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Retour sur une année de mobilisation dans un lycée parisien.

Par Tristan Daul (24 septembre 2018)
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L’ensemble de ces attaques s’inscrit dans une situation ou « l’état d’urgence » a été constitutionnalisé, donnant aux services de police et de renseignement un arsenal répressif démesuré. Face à l’ampleur de ces attaques, des mobilisations ont vu le jour, avec des manifestations d’importance et le détachement d’une avant-garde particulièrement combative, sur une ligne lutte de classe. Dans les universités, des AG ont rassemblé pour certaines des milliers d’étudiant.e.s, notamment à Rennes 2, Montpellier de même que dans certaines facs parisiennes. Des facs et des écoles comme le Mirail à Toulouse ou Tolbiac, Censier ou Paris 8 et l’EHESS à Paris ont été occupées pendant des mois. Pourtant, cela ne s’est pas transformé en mobilisation de rue massive : les manifestations étudiantes sont restées faibles numériquement. Certains secteurs sont entrés dans des grèves dures, comme à la Poste, dans les catacombes parisiennes, dans les hôpitaux comme au Rouvray. Pour certaines, ces luttes ont payé, mais cela est resté isolé. Force est de constater que le mouvement connaît un certain reflux et que seul.e.s quelques gauchistes qui se rêvent en étincelle croient encore à une nouvelle séquence sociale pendant l’été. Le poids des échecs passés, notamment depuis la fin du quinquennat Hollande (défaite contre la « loi travail » et contre la « loi travail XXL ») est effectivement un facteur de découragement pour une grande partie des travailleurs/euses qui se rendent compte qu’il est difficile de faire face aux attaques de toutes part. Dans cette situation, les directions des organisations du mouvement ouvrier ont une immense part de responsabilité. La politique des directions syndicales n’a mené qu’à des impasses : la « grève perlée » à la SNCF à largement épuisé et démoralisé une grande partie des cheminot.e.s alors qu’à l’annonce du rapport Spinetta en février, tous les syndicats annonçaient que face à une telle attaque, la seule solution possible était la grève reconductible. A l’heure actuelle, l’intersyndicale n’est plus qu’un souvenir et, bien que la CGT et Sud appellent à continuer la grève, les perspectives de victoires semblent de plus en plus lointaines. Dans l’Éducation Nationale, le SNES n’a pas mobilisé face à ParcoursSup ou aux annonces de réduction des postes. Quelques dates de manifestations ont été proposées tout en continuant les concertations – donc les négociations – avec le gouvernement. Plus : les manifestations ont systématiquement été proposées à des jours en dehors du calendrier de grève de la SNCF, afin de prendre soin d’éviter à tout prix une manifestation un peu large regroupant l’ensemble des secteurs attaqués par Macron. Face à ce rouleau compresseur et à l’incapacité des directions syndicales embourbées dans le « dialogue social » et trop occupées à préserver leurs intérêts boutiquiers, quelles leçons pouvons nous tirer de nos expériences de luttes locales ? Pour ne pas tomber dans une dérive substitutionniste ni résignée et réformiste, penser nos interventions pour la suite peut être riche d’enseignement.

Retours d’expérience.

1/ Le combat pour le maintien des collègues en Contrats Uniques d’Insertion.

En tant qu’AED, du fait de la précarité de l’emploi, il est très dur de se mobiliser politiquement. Le risque de pression ne cesse de planer au-dessus de soi, particulièrement la peur de voir son (petit) contrat ne pas être renouvelé l’année suivante. Le premier mois d’essai doit donc se faire sans montrer son bord politique ou syndical. Il faut prendre ses marques patiemment et discrètement. 2017 a pourtant démarré avec une première manifestation inter-professionelle le 21 septembre contre la casse du code du travail puis une manifestation dans la Fonction Publique le 10 octobre. Les mouvements sociaux sont des périodes de politisation importantes dans lesquelles les collègues peuvent prendre très vite part aux mobilisations. L’annonce de la suppression de plusieurs CUI dans mon établissement dès octobre à été l’occasion de mener une première lutte sociale d’importance au sein d’une équipe complètement renouvelée par la direction l’année précédente. Pour exiger le maintien de 3 postes en vie scolaire, nous avons réussi à mettre tou.te.s les collègues de la cité scolaire (donc collège et lycée) en grève. Ce fût une première expérience riche de solidarité, avec une mobilisation et un soutien d’importance des professeurs qui ont fait circuler une caisse de grève pour les précaires afin que l’argent ne soit pas un facteur de démobilisation. Le lycée a aussi été bloqué par les élèves. Cet ensemble regroupant toutes les composantes de la cité scolaire à clairement eu un impact fort permettant un rendez-vous au rectorat très rapide. Ce qui a été obtenu fut modeste mais pas insignifiant : une collègue en contrat CUI a été embauchée en tant que AED. Une autre à vu son contrat prolongé de quelques mois. Malheureusement, la dernière personne en CUI s’est vue dégagée très rapidement. Par une auto-organisation à la base, avec une pression forte de la part des personnels de vie scolaire – donc des précaires de l’éducation – pour exiger le maintient de nos collègues, nous avons entraîné une large partie de l’établissement dans cette lutte. Un manque de combativité certain de la part des professeur.e.s au rectorat et dans la suite n’a pas permis de créer un groupe de lutte solide, mais cette expérience a néanmoins permis de poser la question sociale au quotidien dans la vie scolaire.

2/ La deuxième séquence avec l’annonce de ParcourSup et la loi O.R.E

La deuxième séquence s’est ouverte début février. Très vite, des moyens d’actions issus des mobilisations contre la « loi travail » ont pris le devant de la scène : blocage puis tentative d’occupation des établissements par les lycéen.ne.s. Si dans l’ensemble, au niveau parisien, ces blocages ont permis d’entamer des discussions politiques avec les lycéen.ne.s mais n'ont rarement permis de mobiliser largement dans la rue : les manifestations lycéennes et étudiantes, en dehors de la première du mois n’ont jamais regroupé plus de quelques milliers de personnes dans la capitale.

Si nous aurions pu parier sur un second souffle avec l’entrée des étudiant.e.s dans le mouvement, notamment avec l’occupation rapide de grandes facs comme Paris 8 puis Tolbiac, force a été de constater que l’ensemble s’est montré relativement faible numériquement. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cet état de fait : une politique calamiteuse des syndicats de l’Education Nationale, particulièrement du SNES qui a été quasiment absent du terrain des luttes. Une décomposition de l’UNEF, en proie aux querelles internes entre les restes de l’appareil du PS et les Insoumis. Enfin, la crise de l’extrême-gauche, avec d’un côté la crise du NPA et la guerre de ses courants qui n’ont pu mener une politique d’intervention commune en direction des lycéen.ne.s et l’affirmation d'une certaine hégémonie de la mouvance autonome dans la jeunesse, hégémonie qui pourtant a montré ses impasses par son manque de perspectives stratégiques.

Parallèlement, à l'échelle locale, cette séquence à permis de maintenir un lien politique avec les collègues, notamment en entraînant une nouvelle fois la vie scolaire en grève, ainsi que certain.e.s collègues en manifestation. C’est dans ce cadre que les discussions peuvent être approfondies et ou l’on se rend compte de l’intérêt d’avoir sur place, dans le lieu de travail, d’une section syndicale combative qui aurait pu être force de propositions et soutiens dans le cadre des blocages lycéens.

3/ La grève SNCF.

Pour les militant.e.s, l’espoir de l’entrée dans le conflit des cheminot.e.s ne peut être négligé. Un des derniers bastions du mouvement ouvrier entrant en grève est un facteur qui peut s’avérer décisif dans un mouvement social. Macron en était d’ailleurs très conscient et ce fut une des raisons pour laquelle il décida de tout faire pour casser ce foyer, à l’image de Thatcher et des mineurs anglais en 1984-1985. Avec l’aide des bureaucrates syndicaux et de la « grève perlée », une épine du pied fut écartée : pas de grève reconductible, et donc un conflit plus long, et donc plus éreintant et fatiguant pour les cheminot.e.s.

Avec les collègues, peu politisé.e.s et qui rappelons-le sont précaires, la discussion individuelle fut relativement compliquée sur ce sujet : la propagande médiatique a bien fait son sale boulot, et les embêtements causés par les annulations de trains ont eus leur impact. De plus, notre section syndicale est restée frileuse, se concentrant largement sur l’impact de l’application de ParcourSup. Dès lors, la discussion individuelle perd petit à petit de sa légère capacité mobilisatrice.

4/ La fin de l’année scolaire et la question des renouvellements des contrats.

Sur une équipe de quatre personnes, nous furent deux à apprendre, a quelques semaines de la fin d’année, que nous ne serions très certainement pas renouvelé.e.s l’année prochaine et qu’il nous fallait dès lors mieux chercher un emploi dans un autre établissement. Si un manque de travail fut évoqué pour justifier ce choix, sans pour autant n’avoir jamais été signalé dans l’année, le fait d’avoir souvent fait grève à plusieurs (et en être à l’initiative pour ma part) n’a évidement jamais été mentionné bien qu’il semblerait étonnant que ça n’en soit pas un facteur. Un rapport s'est donc constitué dans un premier temps face au CPE puis dans un second avec le chef d'établissement. La bataille à été menée avec sérieux mais la direction n'a cessé de faire traîner les discussions, probablement dans le but de nous décourager. Étant conscient.e.s que seulement trois motifs de non renouvellement de contrats pouvaient justifier de nous mettre à la porte (faute grave, baisse de dotations et donc d'effectifs, être arrivé.e.s au terme des 6 ans), nous n'avons jamais lâché le morceau, notamment lorsque nous avons rencontré le proviseur en étant accompagné.e.s par la déléguée syndicale. Nous avons finalement été renouvelé.e.s ma collègue et moi l'année prochaine. La aussi, par une auto-organisation et une lutte sans faille, nous avons gagné sur nos revendications malgré le handicap que représente la précarité. Cette expérience sera d'ailleurs partagée avec le Collectif des Précaires de l’Éducation Nationale.

Dans l'ensemble, le bilan est donc positif car sur l'année, nous avons maintenu un poste cette année et renouvelé deux autres pour l'année prochaine. Nous devrions donc avoir une base assez solide pour la suite. En nous auto-organisant à la base, entre collègues précaires, nous avons pu construire une certaine solidarité dans l'équipe, ce qui est très précieux. Un bémol seulement : la section SNES, malgré une certain bonne volonté de la déléguée mais sans combativité, s'est révélée très molle, voire même réfractaire à nous soutenir ou à mobiliser les profs. Un des enjeux de l'année prochaine sera d'essayer d'y impulser une nouvelle dynamique.

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