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Ukraine: Interview d’une militante syndicaliste de Borotba

international Ukraine

Lien publiée le 14 octobre 2014

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://tribunemlreypa.wordpress.com/

Une interview d’une militante syndicaliste de Borotba,

(Publiée originellement sur un média du groupe américain WWP :

http://www.workers.org/articles/2014/10/11/exiled-ukraine-union-organizer-never-forget-class-enemy/ )

Les positionnements politiques de TML et WWP ne sont évidemment pas à l’identique, mais il nous parait utile de relayer toute documentation apportant un éclairage positif sur la réalité du mouvement ouvrier actuel.

(Traduction assurée par le camarade Viriato)

Simferopol, Crimée

Svetlana Licht est une militante syndicale et dirigeante de l’Union marxiste Borotba (Lutte) de l’Ukraine.

Forcée de quitter Kiev après le coup d’État d’extrême droite pro-américain, elle s’est d’abord rendue à Kharkov, où elle a aidé à diriger le mouvement de protestation anti-fasciste de la ville, connu sous le nom AntiMaidan. En mai, un escadron de la mort a tenté de kidnapper son compagnon et camarade de combat, le militant syndical Denis Levin. Ils se sont enfuis vers sa ville natale de Donetsk, capitale de la République populaire de Donetsk récemment libérée, dans la région du Donbass à majorité russophone, où elle a vécu le brutal siège militaire ukrainien cet été. Svetlana Licht est récemment arrivée à Simferopol, Crimée, où elle a donné cet entretien à Workers World en Septembre.

Workers World: Comment était-ce de grandir à Donetsk après la destruction de l’Union soviétique?

Svetlana Licht: Grandir dans la Donbass n’était pas différent que dans n’importe quelle autre région industrielle de l’ex-Union soviétique: (il y avait) la pauvreté généralisée, le chômage et l’effondrement de la production. Je pense qu’à bien des égards la période est très similaire au début du déclin de Detroit. Seulement il y a une différence sur les pays post-soviétiques: la majorité des gens, par exemple, les habitants du Donbass, se rappelaient qui avait construit notre industrie, notre science et notre culture dans la région. Ils ont été construits par le peuple soviétique. Ils se souviennent de comment était la vie dans l’Union soviétique, quand il y avait du travail et la protection sociale.

Avec le déclin de l’industrie, il y eu un déclin de la culture et de l’éducation. Les manuels d’histoire ont été réécrits à plusieurs reprises. Chaque année, il y avait de plus en plus des mythes nationalistes ukrainiens et de dénigrement de la période soviétique. C’était un grave endoctrinement idéologique qui visait la destruction du reste des programmes sociaux et pour promouvoir une transition complète vers les relations capitalistes de marché dans toutes les sphères de la vie. Après tout, le nationalisme, ukrainien ou russe-ce n’est pas important, est le principal défenseur de la commercialisation de toutes les sphères de la vie. En premier lieu, il est dirigé contre l’expérience soviétique d’édification du socialisme.

WW: Comment avez-vous l’expérimentée la division entre l’ouest et l’est de l’Ukraine?

Svetlana Licht: J’ai été diplômé en 2005 à l’école de deuxième langue ukrainienne de Donetsk. La plupart du personnel de l’enseignement venait de l’ouest d’Ukraine. En 2004, la plupart des enseignants ont commencé à épouser des positions nationalistes modérées. Il y avait aussi des nationalistes virulents qui n’avaient pas honte devant tout le monde, pas même les enfants. Par exemple, dans le milieu de la Révolution orange [un précédent soulèvement de droite] en 2004, mon professeur d’histoire nous a dit que ceux qui vivent dans la Donbass ne sont que des bovins et des lumpen et des trucs sociaux-racistes similaires. Mais il y avait aussi ceux qui, au contraire, ont fortement souligné leur refus de présenter ce programme politique dans le processus d’apprentissage. Donc ma génération de Donetsk diplômée à l’école ukrainienne est sceptique des choses telles que le nationalisme et la «révolutions d’honneur. »

Avant la guerre en Ukraine, la plupart des gens étaient sensibles à la différence entre les points de vue des gens de différentes régions du pays. Nous avons des histoires différentes, un développement économique différent. Les gens ont compris cela, même en dépit de la propagande qui a tenté de diviser les habitants des différentes régions pour des raisons territoriales et culturelles. Si les gens avaient plus de possibilités de voyager à travers le pays, ils verraient que les travailleurs vivent la même chose partout, que tous ceux qui vendent leur force de travail ont les mêmes problèmes et difficultés, qui leur sont communes et qu’ils peuvent seulement résoudre en s’unissant en tant que classe.

WW: Parlez-nous de votre activité à Kiev avant le coup Février.

Svetlana Licht: J’ai travaillé en tant que syndicaliste, avec Denis Levin, dans le transport ferroviaire. Une de nos campagnes le plus réussies fut contre la privatisation des chemins de fer ukrainiens, elle a réussi à unir les passagers, les travailleurs de chemin de fer, les organisations civiques et les syndicats.

En 2012, nous avons commencé à organiser des actions et des réseaux sociaux sur le sujet. Avec les syndicats, nous avons demandé que le gouvernement cesse le pillage et la privatisation du transport ferroviaire. Et le gouvernement allait négocier et faire des concessions.

En 2013, nous avons lancé une campagne visant à créer des syndicats indépendants pour les travailleurs du transport public à Kiev. Au début du mouvement Maidan [mouvement de protestation pro-impérialiste mené par des bandes fascistes et financé par Washington], nous avions déjà gagné une paire de petites victoires. Après la destruction du siège de Borotba à Kiev, nous avons dû quitter la ville.

WW: Après le coup de Février, vous êtes allé dans l’est, à Kharkov, deuxième plus grande ville de l’Ukraine. Quelle a été votre travail dans le mouvement AntiMaidan? Pourquoi avez-vous été obligé de quitter Kharkov?

Svetlana Licht: Nous nous sommes principalement engagés dans des activités de propagande. Des travailleurs ont entrepris d’imprimer des tracts. Nous avons formé des comités et organisé les gens à la campagne et dans la ville, pour diffuser notre message. Parallèlement à des initiatives civiles à Kharkov, nous avons commencé à organiser des actions anti-guerre au début d’Avril, attirant beaucoup de femmes antifascistes. Mais à la fin Avril, la police a entreprise une perquisition illégale du siège de Borotba à Kharkov. Avant cela, il y eu une vague d’arrestations de ceux qui ont pris part à la deuxième prise du bâtiment d’Administration régional d’Etat de Kharkov – plus de 100 personnes ont été arrêtées. En raison de la répression, les activités de Kharkovites ont commencé à chuter.

Puis vint la tragédie du 2 mai à Odessa [quand au moins 48 antifascistes ont été tués par des néo-nazis à la Maison des syndicats]. De moins en moins de personnes sont descendues dans les rues. Le 8 mai – juste avant le Jour de la Victoire [anniversaire de la victoire soviétique sur le fascisme allemand de la Seconde Guerre mondiale] – le Service de sécurité ukrainien (SBU) a saisi illégalement notre siège social, tout détruit et a pris tous les journaux, les dépliants, les drapeaux, les amplificateurs phoniques, les équipements et les générateurs. Cela a été fait pour nous empêcher de mener une action pour le Jour de la Victoire. Mais nous avons quand même participé à une manifestation dans toute la ville qui a attiré plusieurs milliers de personnes.

Bien que l’activité de la population ait reculé, nous avons encore fait des tracts. Beaucoup de gens à Kharkov étaient déjà devenus des activistes, et ils ont commencé à organiser les secours pour les prisonniers politiques et à mener des actions anti-guerre. À la fin du mois de mai un noyau plus ou moins permanent de Kharkovites s’est formé qui a continué à se réunir Place de la Liberté sous la statue de Lénine. Le groupe a varié entre 150 à 300 personnes.

À la fin mai, les agents du SBU ont tenté, sans charges légales, de kidnapper Denis Levin directement dans la rue, puis nous avons quitté la ville. Un petit nombre de personnes a continué d’aller au monument de Lénine tout l’été pour protester contre la guerre.

WW: Comment la vie était différente à Donetsk quand vous étiez là lors de la soi-disant opération anti-terroriste? Comment les gens que vous connaissiez ont répondu?

Svetlana Licht: Des centaines de milliers de personnes ont quitté Donetsk. Les travailleurs sont restés dans seulement quelques entreprises. Les services publics et [les travailleurs] des entreprises publiques de la ville ont travaillé dur, en essayant de fournir de l’eau et de l’électricité. Mais c’était juste un travail héroïque pendant que les attaques avaient lieu tous les jours.

Chaque jour, des dizaines de personnes ont été tuées.

Ceux qui sont restés dans la ville avaient un réel courage. Les gens étaient en colère contre la junte, mais essayaient de ne pas perdre le courage.

Presque tous les soirs, il y avait l’obscurité impénétrable dans la ville de ma région. Les gens ne voulaient pas allumer les lumières, lire ou regarder les nouvelles – tous les jours, ils pouvaient entendre de leurs propres oreilles ce qui se passait dans la ville. Et les mensonges des médias bourgeois attisaient davantage leur douleur et leur colère.

Voici l’un des jours les plus mémorables: Un après-midi, nous avons entendu de fortes explosions non loin de notre maison. Avec une terrible désespoir, notre voisin a crié: «Ces salauds ont bombardé l’hôpital! » Et à partir des nouvelles, nous avons appris que plusieurs obus sont tombés à l’intérieur de la clinique dentaire à 500 mètres de notre maison. Le soir même, dans une maison en face de la nôtre, un homme a mis plein pot de la musique pop soviétique. Il se tenait sur le balcon et fumait. Tous ses voisins ont commencé à se demander pourquoi il a joué cette musique réconfortante. Ce à quoi il a répondu: « Ils veulent nous faire peur et que nous arrêtions de profiter de la vie. C’est ma réponse! «

WW: Comment voyez-vous la guerre civile entre les Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk et la junte Kiev?

Svetlana Licht: Je crois que les démocraties populaires sont une réponse aux mensonges, à la violence et à la propagande des fascistes, oligarques et nationalistes.

WW: Quel avenir voyez-vous pour les travailleurs du Donbass et l’Ukraine?

Svetlana Licht: Je crois que, d’un point de vue historique, la victoire appartient à la classe ouvrière et au socialisme, et j’espère en l’avenir.

Tant que la guerre se prolonge en Ukraine, la crise va s’aggraver. Mais ceux qui ont cru à la propagande nationaliste vont voir à travers les mensonges et réaliser qu’une autre voie, qu’un autre monde, est possible.

WW: Quel est votre message pour les travailleurs et les jeunes des États-Unis?

Svetlana Licht: Unissons-nous partout et toujours. Ne jamais oublier quel est votre ennemi de classe.