[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Newsletter

Ailleurs sur le Web [RSS]

Lire plus...

Twitter

Nouvelle arène de tensions entre Washington et Pékin

international

Lien publiée le 6 juin 2015

Tweeter Facebook

Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.ccr4.org/Nouvelle-arene-de-tensions-entre

Pendant que les avancées de Daesh et la crise ukrainienne continuent à déstabiliser le Moyen-Orient et l’Europe de l’Est, la mer de Chine du sud devient progressivement l’arène de nouvelles tensions géo-politiques. Face au vaste programme d’accaparement des terres entrepris en pleine mer de Chine par le régime de Pékin, les États-Unis ont répondu ces dernières semaines par une présence militaire accrue en défense de la « liberté de navigation ».


Prétentions territoriales et « liberté de navigation »

Les tensions entre les États-Unis et la Chine ne cessent de s’aggraver depuis plusieurs mois. Au cœur du différend ouvert entre les deux pays se trouvent les tentatives accélérées de Pékin de créer des îles habitables sur des barrières de corail isolées afin de soutenir ses prétentions maritimes et territoriales en pleine mer de Chine méridionale. Le point de tension se situe plus précisément aux îles Spartleys, un archipel de petites îles coralliennes qui s’étalent sur plus de 410 000 kilomètres carrés. Dans les derniers dix-huit mois, la Chine y a entrepris d’énormes projets de remblaiement, transformant ainsi plus de 1 000 hectares de récifs en terre émergée pour y construire diverses infrastructures, telles que des ports ou des pistes d’atterrissage, et stationner des navires militaires. Ainsi, la Chine espère élargir son contrôle sur la mer de Chine du sud en faisant valoir ses prétentions territoriales sur ces nouvelles îlets.

Les États-Unis ont récemment décidé de répondre à l’accélération de ce processus d’accaparement des terres en se posant en défenseur de la « liberté de navigation ». Pour la puissance nord-américaine, la défense de cette liberté passe principalement par le renforcement de sa présence militaire en mer de Chine. Le mois dernier, un navire de combat littoral, l’USS Fort Worth, naviguait tout près de ces nouveaux îlots chinois et des avions de reconnaissance de l’armée états-unienne les survolent régulièrement. Le Ministre de la Défense, Ashton Carter, a même annoncé qu’il demandait au pentagone de préparer des missions navales et aériennes qui entreraient dans les eaux territoriales de la Chine afin de mettre celle-ci au défi.

Un carrefour de routes maritimes importantes, objet de multiples contentieux

Si les îles Spartleys se trouvent aujourd’hui au cœur des préoccupations des pays comme la Chine ou les États-Unis, c’est parce qu’elles sont situées au cœur d’un carrefour de routes maritimes stratégiques pour le commerce mondial. En effet, les eaux de la mer de Chine du sud sont traversées par près de 60 000 navires par an. Plus que le trafic du canal de Suez et du canal de Panama combinés, cela représente environ un quart du commerce mondial, soit 4,7 milliards d’euros par an, 50 % des transports mondiaux hydrocarbures ou encore 85 % des pétroliers en provenance du Moyen-Orient. C’est également un espace riche en ressources naturelles comme le pétrole.

Ces nouvelles tensions internationales viennent par ailleurs s’ajouter à une série de tensions régionales qui remontent à plus 60 ans, liées aux disputes territoriales entre les principaux pays limitrophes de l’Asie du Sud-est. Les îles Spratleys sont effectivement revendiquées - entièrement ou en partie - par Brunei, la Chine, la Malaisie, les Philippines et Taïwan. Si d’autres pays comme le Vietnam, les Philippines ou la Malaisie ont construit par le passé des avant-postes dans l’archipel et font régulièrement valoir leurs revendications auprès des États-Unis et de l’Organisation des Nations Unies (ONU), la Chine est en passe de franchir un cap qualitatif dans l’affirmation de ses droits de souveraineté sur l’ensemble de la mer de Chine en militarisant toujours plus les territoires qu’elle contrôle.

Le contrôle de ce carrefour s’avère donc fondamental pour quiconque souhaite tirer profit de son énorme trafic. Pour les États-Unis, la défense de la « liberté de navigation » consiste surtout à défendre les droits des pays impérialistes à patrouiller et à dominer les eaux au détriment des pays de la périphérie capitaliste. Afin de mettre la Chine en difficulté aujourd’hui, ils comptent bien s’appuyer sur les pays comme le Vietnam et les Philippines après avoir ignoré pendant des années leurs plaintes concernant les actions de Pékin en mer de Chine. Il s’agit pour la Chine, devenue deuxième économie mondiale, de faire face au ralentissement de sa croissance, pouvant engendrer des difficultés internes à moyen terme, en renforçant ses positions à l’extérieur et en tentant de consolider les caractéristiques impérialistes qu’elle a pu développer dans la dernière période, tout particulièrement sur l’échiquier régional de l’Asie du Sud-Est.

Vers une éventuelle déstabilisation de la région ?

Les manœuvres militaires de la part de la puissance nord-américaine en mer de Chine se sont accompagnées de l’adoption d’une rhétorique diplomatique plus sévère et d’une campagne médiatique offensive contre la Chine. Lors d’une conférence sur la sécurité à Singapour ce week-end dernier, les hauts responsables militaires des deux pays se sont retrouvés dans un passe d’armes. Le ministre de la défense états-unien a accusé la Chine de ne pas « être en phase avec les règles et les normes internationale » et affirmé que « les États-Unis voleront, navigueront et opéreront partout où les lois internationales le permettent, comme les forces américaines le font dans le monde entier ». Le ministre de la défense australien a lui aussi affirmé la nécessité de défendre la « liberté de navigation » et la volonté de son pays de participer aux démonstrations de force qui se préparent.

Non sans rappeler la campagne médiatique offensive menée en faveur de la guerre en Irak au début des années 2000, les grands médias ont immédiatement poussé des cris de guerre contre la Chine. Dans une tribune publiée dans The Washington Post, le comité de rédaction a fortement dénoncé les activités de Pékin et incité le président Obama à prendre des mesures offensives à ce sujet. Le journal a condamné « l’audace » des prétentions territoriales chinoises et qualifié son vaste programme d’accaparement des terres de « dangereusement provocateur ». Le comité de rédaction de The New York Times considère également que « les Etats-Unis ont bien raison de repousser encore plus énergiquement le coup de force de Pékin ». Selon eux, même si une sortie de conflit pacifique est préférable, l’administration « ne peut pas laisser les prétentions chinoises incontestées », y compris par la force militaire.

Quant à la Chine, elle minimise les tensions et maintient que la situation en mer de Chine du sud reste stable. Face aux manœuvres militaires des États-Unis, elle tente de se positionner, au contraire, comme le défenseur « de la paix et de la stabilité de la région ». Selon les hauts responsables chinois présents à la conférence à Singapour, ces chantiers de développement sont censés permettre à leur pays de « mieux assurer ses responsabilités et obligations internationales » dans les domaines du sauvetage en mer, de l’aide humanitaire ou encore de la protection de l’environnement.

Pékin regrette la rhétorique envenimée de Washington et ses relais médiatiques, laquelle pourrait devenir un fort élément de déstabilisation dans la région. Mais ces tensions croissantes en mer de Chine méridionale pourraient avoir des répercussions à l’échelle internationale, contribuant ainsi à la déstabilisation de la situation géopolitique en général.