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Le Bras: "Le vote Front national n’est pas un vote de protestation"

Lien publiée le 8 décembre 2015

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

http://www.20minutes.fr/politique/1703383-20151007-vote-front-national-vote-protestation

INTERVIEW Hervé Le Bras, démographe et historien, publie ce mercredi «Le pari du FN», qui analyse la géographie des votes Front national…

Analyser les cartes des votes FN pour mieux comprendre qui sont ses électeurs. Ledémographe et historien Hervé Le Bras* publie ce mercredi Le pari du FN (éditions Autrement 17,50 euros). Ces cartes révèlent à une échelle fine le trouble ressenti par de nombreux Français : Disparition des relations de voisinage, expulsion des métropoles, blocage de l’ascension sociale. Le FN paraît dès lors l’unique moyen de changer la donne. Interview sur « ce pari du FN » avec l’auteur…

Pourquoi expliquez-vous que l’électeur fait un pari en votant Front national ?

Les électeurs du FN se comportent comme des personnes qui prennent un billet de loterie. L’espérance des gains est très faible par rapport à la mise engagée, mais il y a l’espoir du gros lot. Ces électeurs savent que c’est risqué, qu’ils ont une chance infime que leur situation change véritablement avec ce bulletin, mais cet espoir vaut mieux qu’une situation où rien ne change. Ces personnes se sentent bloquées, sans espoir d’ascension sociale.

Le vote FN est souvent qualifié de « vote de protestation ». Pourquoi dites-vous que c’est faux ?

La protestation est un mouvement de mécontentement passager. Trente ans de protestation, cela ne tient pas. J’analyse au contraire des forces profondes à l’œuvre. Depuis les années 1970, la raréfaction des relations sociales de proximité à cause du changement des modes de vie, l’ouverture des grandes surfaces, l’expulsion des métropoles, et surtout le manque de perspective mènent l’électeur à ce vote FN. On est donc loin du mécontentement passager.

Pourquoi étudiez-vous le vote FN comme une épidémie évoluant selon la géographie française ?

J’utilise cette métaphore sur un terrain composé d’éléments physiques (une montagne, un fleuve, une plaine) qui facilitent ou entravent les communications. Les plaines, où la circulation est facile, sont propices à l’éclosion du FN. C’est par exemple le cas de la vallée de la Garonne. La diffusion du FN est par contre bloquée par l’altitude, dès les contreforts des Alpes et du Massif central. Cette manière d’envisager l’apparition d’un courant politique s’applique aussi à d’autres surgissements politiques, comme le parti des chasseurs et des pêcheurs (CPNT) en 2002 dans la baie de Somme, ou le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers en Vendée aux européennes de 1994.

En prenant l’exemple francilien, vous soulignez les grandes variations du vote FN depuis 1984…

A Paris aux élections de 1984, les arrondissements de l’ouest étaient en tête du vote FN. Puis il a migré vers les quartiers de l’est, avant de revenir aux dernières élections vers l’ouest. A une échelle plus large, le vote FN a migré vers les départements de l’Ile-de-France, puis avec leurs voisins des autres régions. En observant une carte du recensement de 2010 et celle du vote FN à la présidentielle 2012, on remarque que plus on s’éloigne du centre de Paris, plus la proportion d’immigrés décroît et plus le vote FN augmente.

Quelle peut-être l’évolution du vote FN aux élections régionales ?

Sans doute une stabilité par rapport aux départementales de 2015 (26 % de votes FN). Il y aura sans doute une poussée dans le Nord et en PACA à cause des deux candidates emblématiques de la famille Le Pen. Mais aux dernières élections européennes, dans la circonscription nord où Marine Le Pen se présentait, son bonus a été de deux points par rapport aux départementales, ce qui n’est pas énorme.

Hervé Le Bras est directeur de recherche émérite à l'Institut national d'études démographiques (Ined) et directeur d’études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS).