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Pour l’ONU, Julian Assange doit être libéré et indemnisé
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
(Libération) Comme attendu, le groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations unies a publié ce vendredi matin sa décision en faveur du fondateur de WikiLeaks. Un avis que Londres et Stockholm contestent.
«Le Groupe de travail sur la détention arbitraire [des Nations unies] considère comme arbitraire la privation de liberté de Julian Assange.» Annoncée dès jeudi matin par la BBC, confirmée dans la journée par le ministère suédois des Affaires étrangères, la décision a été rendue publique ce vendredi, vers 9 heures, sur le site du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU.
Le panel d’experts, qui examine chaque année plusieurs centaines de cas – il s’était notamment prononcé en faveur de l’opposante birmane Aung San Suu Kyi ou du journaliste américano-iranien Jason Rezaian –, avait été saisi en septembre 2014 par l’équipe de défense du chef de file de WikiLeaks. Laquelle avait fait valoir qu’Assange s’était réfugié dans l’ambassade londonienne de l’Equateur, qui lui a accordé l’asile, non«par choix», mais pour échapper à un «risque fondé de persécution». L’Australien a toujours dit craindre qu’une extradition vers la Suède, où la justice veut l’entendre dans une affaire d’agressions sexuelles présumées, ne le mène in fine aux Etats-Unis, où un grand jury enquête depuis 2010 sur le site de révélations et son fondateur, et où ce dernier pourrait être lourdement condamné pour violation de l’Espionage Act.
«Privation continue de liberté»
Des arguments qui ont porté. Dans sa décision, le groupe de travail estime qu’Assange a été soumis à «une privation continue de liberté», de son séjour de dix jours à la prison de Wandsworth, en décembre 2010, à son confinement dans l’ambassade équatorienne, en passant par son assignation à résidence dans un manoir à 200 kilomètres de Londres. Le panel pointe aussi son maintien à l’isolement à Wandsworth et le«manque de diligence» de la procureure suédoise chargée de l’enquête préliminaire, Marianne Ny. Le tout, donc, en violation de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Le groupe de travail demande désormais au Royaume-Uni et à la Suède d’assurer «[la] sécurité et [l']intégrité physique» de l’Australien, et de lui garantir «le plein exercice de ses droits garantis par les normes internationales». Mais également de mettre fin à sa détention et de lui accorder une indemnisation.
Londres «contestera», Stockholm n’est «pas d’accord»
Reste à savoir quelles seront les conséquences de cette décision, communiquée dès le 22 janvier aux autorités suédoises et britanniques. Jeudi, le Foreign Office s’était empressé de faire valoir que l’avis n’était pas «légalement contraignant», et de rappeler l'«obligation légale» du Royaume-Uni à arrêter Assange et à l’extrader vers la Suède. Ce vendredi, il a réaffirmé sa position, comme le rapporte notre correspondante à Londres, Sonia Delesalle-Stolper : l’arbitrage onusien«ne change rien», le Royaume-Uni entend bien le contester, et Assange«évite, volontairement, une arrestation légale en choisissant de rester à l’ambassade d’Equateur». Le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Philip Hammond, a même qualifié de «ridicules» les conclusions du panel d’experts auprès d’ITV News.
Même son de cloche du côté de Stockholm : le gouvernement suédois a fait savoir par courrier aux Nations unies qu’il n’était «pas d’accord» – le fondateur de WikiLeaks «est libre de quitter l’ambassade à tout moment», juge-t-il –, et souligné qu’il ne peut «interférer dans une affaire en cours». Quant au parquet, il a estimé jeudi que la décision «n'[avait] aucune incidence formelle sur l’enquête préliminaire».
«Les arguments des Nations unies vont jouer en ma faveur»
«Si les Nations unies décident en ma faveur, c’est véritablement quelque chose qui va nous renforcer dans ce que nous disons depuis trois ans, a jugé Assange, invité ce vendredi de la matinale de France Inter, alors que la décision n’avait pas encore été rendue publique. Je suis certain que mes arguments et ceux des Nations unies vont jouer en ma faveur.» Au passage, le fondateur de WikiLeaks a taclé François Hollande, auquel il avait demandé l’été dernier «accueil» et «protection» dans une lettre ouverte publiée par Le Monde, dix jours après la publication par WikiLeaks, Libération et Mediapart de documents confidentiels de la NSA attestant de la surveillance par les Etats-Unis de trois présidents français successifs : «La fourniture additionnelle de renseignements par les Etats-Unis a apparemment été considérée comme plus importante que mon droit d’asile, plus importante même que la souveraineté française», a-t-il lancé.
Assange réclame désormais que lui soit restitué son passeport. Son équipe juridique devrait donner, lors d’une conférence de presse ce vendredi midi à Londres, quelques éléments sur la manière dont elle pourrait s’appuyer sur l’arbitrage onusien.