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Théorie de la dissociation sexuelle et théorie critique d’Adorno

Lien publiée le 1 mai 2016

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Théorie de la dissociation sexuelle et théorie critique adornienne* 

*

Roswitha Scholz 

Voir le Fichier : Roswitha_Scholz_Theorie_de_la_dissociation_sexuelle_et_theorie_critique_adornienne_2004.pdf

   Dans les années 1990 le féminisme académique était dominé par les théories poststructuralistes, tandis que, contrairement aux années 1960-1970, les approches marxistes étaient marginalisées. Au lieu de chercher une compréhension nouvelle de la totalité, à même d’expliquer de récents développements tels que le déclin du socialisme réellement existant, on se tournait vers des conceptions culturalistes. Depuis, la situation a de nouveau changé. A mesure que s’aggrave la conjoncture économique et que la « question sociale » s’impose avec toujours plus d’acuité, l’intérêt pour une critique de l’« économie politique » revient également. Du même coup, naturellement, le sexisme mais aussi le racisme courent une fois de plus le risque de se voir ravalés au rang de « contradictions secondaires ».

   J’aimerais ici présenter un certain nombre d’aspects essentiels de la théorie de la dissociation-valeur que j’ai développée comme un contre-concept au plus fort de la décennie 1990 marquée par le culturalisme. Cette théorie se rattache d’une part à la toute dernière critique de la valeur qui reprend et prolonge la théorie marxienne, d’autre part à la théorie critique adornienne. Selon moi, Adorno a fourni toutes sortes d’angles d’attaque pour une critique de l’androcentrisme, qui mériteraient d’être modifiés et réactualisés. Aussi m’intéresserai-je principalement dans cet exposé au lien entre théorie de la dissociation-valeur et théorie critique adornienne. Il me faudra naturellement me contenter d’en pointer quelques aspects choisis. On ne fait pas le tour de l’œuvre d’Adorno en dix pages ; lui-même dut d’ailleurs reconnaître, après Hegel, qu’on ne peut résumer une théorie dialectique en une simple maxime[1].

   Mon intervention s’attachera à faire ressortir clairement l’importance capitale du rapport entre les sexes dans le patriarcat producteur de marchandises. Il n’est pas question de réduire ce rapport entre les sexes à une contradiction secondaire, comme la théorie traditionnelle (au même titre que le marxisme orthodoxe) avait coutume de le faire. Aux termes de la théorie de la dissociation-valeur telle que je la défends, il constitue bien plutôt un principe formel de la socialisation capitaliste-patriarcale. Ce qu’il faut comprendre par là, j’aimerais d’abord en dire deux mots avant de me pencher sur le lien avec la théorie critique adornienne. Au reste je précise que je ne ferai que mentionner en passant les divergences avec les autres théories féministes présentes en Allemagne et s’inscrivant également dans la filiation d’Adorno.

1.

   La théorie de la dissociation-valeur s’accorde avec la critique de la valeur prolongeant la théorie marxienne et s’écarte des marxismes traditionnels en ce que, pour elle, ce n’est pas tant l’« appropriation » subjective-juridique de la survaleur qui représente le véritable scandale de la socialisation capitaliste mais, bien plus fondamentalement, la valeur elle-même comme rapport social, le travail abstrait, bref le fétichisme des marchandises. Pour éviter de se cantonner au problème de l’« appropriation privée » et pour atteindre au contraire le « sujet automate » autotélique, l’analyse de la survaleur n’a d’autre choix que de prendre pour objet la forme-valeur elle-même. Toutefois, à mon avis, cette détermination (négative) d’un principe social formel reste encore insuffisante. D’après la théorie de la dissociation-valeur, en effet, nous devons également prendre en compte les activités féminines de reproduction mais aussi les sentiments, caractères et attitudes qui leur sont liés, ou plutôt associés, tout en étant précisément – telle est la thèse – dissociés de la valeur. Les activités féminines de reproduction – soin aux enfants, ménage, jusqu’à l’« amour » en tant que moment de la reproduction connoté féminin – reçoivent ainsi une forme et une qualité qui ne sont pas celles du travail abstrait propre à la gestion d’entreprise, et c’est pourquoi on ne peut pas davantage les inclure dans le concept de travail. De sorte que, par exemple, ces activités sont considérées comme du temps perdu et non pas gagné, capitalisé, comme dans la sphère du travail abstrait au service du marché.

   Lorsqu’on parle ici de structure privé=féminin, public=masculin, ça ne veut pas dire que le patriarcat aurait été en quelque sorte « institué » uniquement dans la sphère privée. Par exemple, les femmes ne furent pas seulement de tous temps en charge des moments dissociés de la reproduction : elles exercèrent de surcroît des activités professionnelles dans la sphère du travail abstrait. Or, la dissociation-valeur apparaît aussi dans le domaine professionnel, à travers le fait que les femmes bénéficient en moyenne de salaires moins élevés que ceux des hommes, de possibilités d’avancement moindres, etc. La structure de la dissociation sexuelle imprime donc sa marque à l’ensemble de la société à travers toutes ses sphères et tous ses domaines.

   En même temps, la valeur et la dissociation se situent réciproquement dans un rapport dialectique. Il n’y a pas entre elles de hiérarchie de dérivation logique ; chacune procède de l’autre, chacune est contenue dans l’autre, et la dissociation se soustrait à toute analyse au moyen des seules catégories économiques. On peut par conséquent considérer la dissociation-valeur également comme une logique d’un niveau supérieur qui englobe les catégories intrinsèques de la société marchande. A cet égard, la dissociation-valeur implique même un rapport socio-psychologique spécifique : « la femme » hérite d’un certain nombre de caractères, attitudes et sentiments moins valorisés (la sensibilité, l’émotivité, la faiblesse de caractère ou d’entendement, etc.) qui sont projetés en elle et dissociés d’un sujet mâle se construisant a contrario comme rationnel, fort, sûr de lui, performant, etc. Pour ce qui est de la structure des rapports de dissociation, il y a donc lieu de prendre en compte à la fois les dimensions sociale-psychologique et culturelle-symbolique, autrement dit d’appréhender le patriarcat producteur de marchandises comme modèle de civilisation et non pas simplement comme système économique.

   De ce point de vue, la dissociation-valeur représente une métathéorie dans la mesure aussi où on ne peut pas considérer que les individus empiriques, quel que soit leur sexe, s’y conforment de façon simplement immédiate. Les hommes et les femmes ne s’identifient pas séparément, l’un après l’autre, à cette structure ; pas plus qu’ils ne peuvent se soustraire totalement aux attributions correspondantes.

   De surcroît, en tant que principe social formel, la dissociation-valeur se soumet, tout comme la valeur elle-même, au changement historique et doit être pensée comme processus historique. Il ne faut pas oublier que les représentations sexuelles modernes et les formes d’existence y afférentes ne sont apparues qu’en lien avec l’institutionnalisation, d’une part, du « travail abstrait » au service du marché, et d’autre part des tâches domestiques qui en sont écartées. La femme au foyer et l’homme-soutien de famille n’existaient pas aux époques prémodernes. Du reste, on constate que, en dehors du contexte moderne-occidental, les représentations culturelles de la masculinité et de la féminité peuvent varier considérablement et ne sont nullement tenues de présenter des traits homogènes.

   A l’ère postmoderne la structure de la dissociation affiche une autre physionomie qu’à l’ère moderne « classique » : la cellule familiale traditionnelle est à présent presque totalement dissoute, et avec elle le rapport moderne entre les sexes tel que nous le connaissions jusqu’ici. A maints égards, les femmes – à tout le moins dans les pays occidentaux – ont désormais rattrapé les hommes (par exemple en ce qui concerne le niveau d’instruction). Contrastant avec l’ancien idéal de la femme au foyer, les femmes d’aujourd’hui sont individualisées et « doublement socialisées » (Regina Becker-Schmidt), autrement dit ont des responsabilités à la fois sur le plan professionnel et sur le plan familial. Pourtant, ou plutôt de ce fait, elles restent en majeure partie en charge des activités dissociées de reproduction (contrairement aux hommes), continuent à gagner moins que les hommes, à bénéficier de possibilités d’avancement moindres, etc. A l’ère de la mondialisation nous assistons donc non pas à une abolition mais simplement à une barbarisation du patriarcat, les institutions du travail et de la famille n’en finissant pas de se déliter à la faveur de la crise du système producteur de marchandises sans que nulle forme nouvelle de reproduction ne vienne les remplacer.

   Pour la plupart des gens, y compris dans les pays soi-disant développés, cela implique la probabilité de devoir vivre dans des conditions semblables à celles que connaissent déjà, au moins en partie, les bidonvilles du tiers monde : les femmes y portent sur leurs épaules à la fois les questions d’argent et de (sur)vie. Elles s’intègrent toujours davantage au marché mondial sans pour autant y trouver leurs moyens d’existence. Elles élèvent les enfants grâce à l’aide, essentiellement féminine, de parentes et de voisines. Les hommes vont et viennent, se raccrochant de job en job et de femme en femme, celles-ci pouvant même les entretenir (en principe, bien sûr, l’inverse est également possible). Sous l’effet combiné de la précarisation de l’emploi et de l’érosion des relations familiales traditionnelles, l’homme a perdu son rôle de soutien de famille. Pour autant, l’ordre hiérarchique des sexes n’a nullement disparu[2]. Avec toutes les nuances dont il faut naturellement tenir compte, ces observations sont valables aujourd’hui au niveau mondial[3].

2.

   Horkheimer et Adorno offrent dans La dialectique de la raison des points de contact direct avec la théorie de la dissociation-valeur. Quelques extraits en attestent : « L’humanité dut se soumettre à des épreuves terribles avant que le moi, nature identique, tenace, virile de l’homme fût élaboré, et chaque enfance est encore un peu la répétition de ces épreuves. [...] Celui qui veut survivre ne doit pas prêter l’oreille à la tentation de l’irrévocable, et ne peut survivre que s’il ne parvient pas à l’entendre. La société a toujours veillé pour qu’il en soit ainsi. Alertes et concentrés, ceux qui travaillent doivent regarder droit devant eux et ignorer ce qui se trouve à leur côté. Ils doivent sublimer en efforts supplémentaires l’instinct qui les entraîne vers la diversion. C’est ainsi qu’ils deviennent pratiques[4] ».

   Comme chacun sait, Horkheimer et Adorno remontent ici jusqu’à l’Antiquité puisqu’ils font référence à l’Odyssée. Ulysse ordonne qu’on l’attache au mat afin de pouvoir résister au chant des sirènes. Ce repli vers une époque lointaine me paraît problématique ; je préfère lire La dialectique de la raison en premier lieu comme le récit, alliant implicitement théorie marxiste et psychanalyse, de la constitution de la société capitaliste et de la subjectivité modernes.

   Andrea Maihofer, il me semble, ne s’y est pas trompée : « Des phénomènes paraissant d’habitude distincts les uns des autres, tels que production capitaliste des marchandises, rationalité instrumentale, maîtrise de la nature, domination bourgeoise-patriarcale, subjectivité “masculine”, etc., sont vus ici dans un rapport étroit et constitutif de genèse et de reproduction. Contrairement au soupçon qui pèse souvent sur lui, ce rapport n’est pas conçu comme rapport de dérivation purement économique, monocausal, en vertu duquel tout serait lié à tout ; en définitive, le tout est plutôt la forme (fonctionnelle) sous laquelle se manifeste la capacité de l’économie à “agréger” tous ces aspects[5] ». La parenté avec la théorie de la dissociation-valeur devient par là évidente. Le sujet (mâle) dissocie ses pulsions et ses sentiments ; il lui faut désormais être contrôlé et dominé. Ce qui donne lieu à une dialectique de la domination et de la soumission, ou plus exactement de l’autosoumission.

   Mais en même temps, par ce raisonnement Horkheimer et Adorno reconstruisent en réalité le discours capitaliste-patriarcal sur les sexes, réintroduisant ainsi non seulement les stéréotypes sexuels bourgeois mais présentant en outre leur constitution d’une manière qui n’est que timidement critique. Car si implicitement ils prennent en considération également le niveau culturel-symbolique et perçoivent donc le patriarcat capitaliste comme un modèle de civilisation absolument irréductible à l’économie, ils ne vont cependant pas jusqu’à présenter et critiquer radicalement le rapport de dissociation-valeur comme étant son noyau constitutif. Leurs remarques sur le rapport entre les sexes ont surtout un caractère descriptif.

Le problème majeur vient ici de ce que, chez Adorno, c’est le principe d’échange qui tient lieu de « fait de base » social de la modernité, et non la valeur, le travail abstrait, en tant que rapport de production (encore moins la dissociation-valeur en tant que rapport de reproduction englobant les autres). Force est donc de constater, même si je ne puis m’étendre sur ce point, qu’Adorno et Horkheimer ont une compréhension théorique tronquée de la circulation, même s’il est vrai qu’ils recourent beaucoup moins que le marxisme traditionnel à la catégorie sociologique de classe, laquelle chez eux représente plutôt un simple épiphénomène de l’échange.

   Ce qui se passe avec « la femme », à présent, Horkheimer et Adorno le décrivent de la façon suivante : « Dans la société bourgeoise, la femme en tant que représentante de la nature est devenue un symbole énigmatique de la séduction irrésistible et de l’impuissance. Elle restitue ainsi à la domination, comme en un miroir, le vain mensonge qui pose comme principe l’assujettissement de la nature, au lieu de la réconciliation avec elle[6] ».

   Pour les deux auteurs, face au national-socialisme, il s’agissait dans La dialectique de la raison de comprendre « pourquoi l’humanité, au lieu de s’engager dans des conditions vraiment humaines, sombrait dans une nouvelle forme de barbarie[7] ». A partir de ce moment historique, le renversement du capitalisme devenait à leurs yeux pratiquement impossible. C’est ce qu’exprime la célèbre image de la « bouteille à la mer ».

   Prisonniers de leur époque, Horkheimer et Adorno ne peuvent avoir connaissance de certains processus barbares plus récents, consécutifs à l’« effondrement de la modernisation » (Robert Kurz). De sorte qu’il leur est bien sûr impossible de parvenir au diagnostic d’une « barbarisation du patriarcat » à l’ère postmoderne.

   Sans doute observent-ils avec scepticisme l’arrivée en masse, déjà, des femmes dans le monde du travail, parlant à ce propos d’une « dissociation de l’amour[8] ». Mais là encore, une différence se fait jour avec ma critique de la dissociation-valeur : loin d’être un refuge, quelque chose d’« autre » et de positif comme cela apparaît chez Horkheimer et Adorno, la sphère dissociée, la famille s’avère au contraire elle-même une composante immanente du patriarcat producteur de marchandises.

3.

   Ceci étant dit, on pourrait faire valoir que le rapport entre les sexes existant aujourd’hui n’est plus celui, dualiste, spécifique à la modernité classique, qu’Adorno et Horkheimer connaissaient. La traditionnelle subordination de la femme n’a plus cours. Les femmes sont désormais de « petites entreprises autonomes » (Irmgard Schultz) censées en principe être à même de s’en sortir seules. C’est pourquoi beaucoup de gens s’imaginent que c’en serait fini du patriarcat comme structure fondamentale de la société, même si les femmes continuent à subir des discriminations.

   Toutefois, en dépit de ces changements historiques empiriques, la théorie de la dissociation-valeur n’a rien perdu de sa pertinence ; elle reprend à son compte l’idée adornienne, telle qu’il l’a formulée dans son cours d’introduction à la sociologie, « que, d’une part, ce qui est essentiel [c’est] l’intérêt pour les lois du mouvement de la société, tout particulièrement celles qui expliquent pourquoi elle est devenue telle [...] ; ensuite, que ces lois se modifient et que leur domaine de validité ne dépasse pas ce que nous pouvons effectivement observer ; et enfin, à un troisième niveau, que la tâche de la sociologie consiste, ou bien à saisir pour sa part la nature de ces divergences entre essence et apparence, à les saisir théoriquement, ou bien à avoir le réel courage de renoncer à des concepts fondamentaux ou des lois générales absolument incapables de rendre compte des phénomènes, serait-ce dialectiquement[9] ».

   A présent, qu’est-ce que cela implique dans le contexte de la critique de la dissociation-valeur, un contexte qui n’est pas celui que connaissait Adorno ? Du point de vue de la théorie de la dissociation-valeur, il est capital de s’en tenir comme lui fermement à une dialectique de l’essence et de l’apparence, et de ne pas se laisser entraîner à diagnostiquer prématurément une « fin du patriarcat » sous prétexte de faits empiriques observables tels que l’individualisation postmoderne des femmes désormais « doublement socialisées ». Il faut au contraire continuer à définir la dissociation-valeur – cette dissociation-valeur constitutive (puisqu’à aucun moment abolie positivement) et englobant plus que jamais la reproduction – comme le principe formel de la totalité sociale dans sa récente mue historique. Ce principe, je le rappelle, embrasse aujourd’hui encore, dans une configuration elle-même postmoderne-avancée, à la fois les dimensions matérielle, sociale-psychologique et culturelle-symbolique, donc aussi toutes les sphères et tous les domaines de la société. Par conséquent, c’est précisément eu égard aux mécanismes et structures de la dissociation-valeur que nous devons interpréter les récentes transformations empiriques du rapport entre les sexes.

   Le développement des forces productives et la dynamique du marché, en premier lieu, qui reposent eux-mêmes sur la dissociation-valeur, battent en brèche leurs propres conditions : ils contribuent à éloigner notablement les femmes de leur rôle traditionnel et à leur faire prendre conscience de la fameuse « double socialisation » qu’a d’ores et déjà entraîné chez elle le processus d’individualisation. Ainsi a-t-on vu en Allemagne fédérale, à partir des années 1950 environ, de plus en plus de femmes des classes moyennes intégrer le domaine professionnel ; du fait notamment de la rationalisation des tâches ménagères, les femmes ont depuis lors rattrapé les hommes sur le plan des études ; on peut même voir de plus en plus de mères travailler, grâce à un planning familial rendu possible entre autres par les moyens de contraception[10]. Bref : la tendance à l’intégration toujours plus poussée des femmes à la société « officielle » (connotée masculine dans le patriarcat producteur de marchandises) n’est pas vraiment une nouveauté.

   Mais en dépit de ces nouveaux rapports postmodernes, les femmes ont toujours à charge, contrairement aux hommes, les tâches ménagères et les enfants, accèdent toujours aussi rarement aux leviers de commande dans la sphère publique, gagnent toujours en moyenne moins que les hommes, et ainsi de suite. Nous avons donc affaire non pas à une abolition mais à une simple modification de la structure de la dissociation-valeur, qui voit la « double socialisation » acquérir une qualité nouvelle : si les femmes restent sujettes comme auparavant à une « double socialisation » objective, en revanche, dans le contexte d’un patriarcat qui se barbarise sous l’effet de la crise, les modèles auxquels elles doivent se conformer ne se limitent plus à ceux de la mère et de la femme au foyer.

4.

   Ainsi peut-on comprendre, en dépit des changements affectant toujours davantage l’essence de la société contemporaine, l’appréciation portée par Horkheimer et Adorno dans La dialectique de la raison – appréciation que je rapporte ici afin d’en venir à l’examen des prémisses épistémologiques de la critique de la valeur sous l’angle d’une critique de la logique d’identité : « L’homme en tant que dominateur refuse à la femme l’honneur d’exister comme individu. La femme prise individuellement est un exemple social de l’espèce, représentante de son sexe et c’est pourquoi, entièrement conquise par la logique masculine, elle représente la nature, le substrat d’une subordination sans fin au plan conceptuel, d’une soumission sans fin dans la réalité. La femme en tant qu’être prétendument naturel est un produit de l’histoire qui la dénature[11] ».

   Aux yeux des deux auteurs, c’est la raison instrumentale, la logique d’identité, qui aboutit à la liquidation des « autres » sous le national-socialisme. Cette logique d’identité prédominante, Horkheimer et Adorno l’associent de façon fondamentale à la maîtrise de la nature et, de là, au principe de l’échange.

   La critique de la dissociation-valeur, s’appuyant précisément sur la pensée d’Adorno, reprend aujourd’hui à son compte cette critique de la logique d’identité, c’est-à-dire d’un penser déductif qui entend instaurer l’ordre par le haut et soumettre tout ce qui est particulier, contingent, différent, équivoque à une seule et même logique. Toutefois, ce mode de pensée propre à la logique d’identité ne correspond pas chez moi uniquement à l’échange ou, pour mieux dire, à la valeur. Car le point décisif n’est pas simplement que l’élément commun – une fois ôtées les qualités – soit la force de travail sociale moyenne, c’est-à-dire le travail abstrait, qui se tient en quelque sorte derrière la forme d’équivalence ; c’est plutôt le fait que cet élément commun nécessite à son tour de marginaliser et de regarder comme inférieur ce qui est connoté féminin, à savoir les tâches domestiques, le sensible, l’émotionnel, ce qu’on ne peut saisir par l’analyse, ce qui est différent ou contradictoire.

   La dissociation du féminin, loin de coïncider avec le non-identique d’Adorno, représente plutôt la face obscure de la valeur elle-même. En ce sens, en tant que forme universelle, la dissociation du féminin est en réalité une condition préalable : elle a permis que les éléments appartenant au monde de la vie, ce que la science ne peut saisir, tout ce qui est contingent, soient laissés de côté et demeurent, à l’ère moderne, largement ignorés par les domaines connotés masculins de la science, de l’économie et de la politique. Apparaissait ainsi comme principal responsable un penser classificateur, incapable de disséquer la qualité particulière, la « chose en soi », et échouant par conséquent totalement à percevoir, ou plutôt à retenir tout ce qu’elle amenait dans son sillage : différences, fractures, ambivalences, etc.

   Pour la critique du rapport de dissociation, cela implique alors de tenir compte du fait que la dissociation-valeur comme principe social formel interne au patriarcat marchand, d’une part, n’est pas simplement une institution matérielle régnant sur certaines sphères (privée/publique) mais possède bel et bien une histoire, et d’autre part ne peut pas être appréhendée au moyen des outils du marxisme traditionnel. Cette structure complexe ne présente donc pas le même visage partout dans le monde et ne peut nullement prétendre à l’ontologie ou à la transculturalité. En d’autres termes, l’une des tâches, et non des moindres, d’une théorie adéquate de la dissociation-valeur consiste à mettre en évidence ses propres limites ; c’est même là un impératif qui est au cœur de sa démarche. Et à cet égard il s’agit également, tout à fait dans l’esprit adornien, de pointer le fait qu’hommes et femmes empiriques, s’ils ne peuvent certes jamais totalement se soustraire aux attributions sexotypiques, ne s’y identifient toutefois jamais totalement non plus.

5.

   Mais inversement, je m’attache aussi à ce que les différents niveaux (notamment matériel, social-psychologique et culturel-symbolique) et domaines (public, privé, etc.) soient non seulement reliés les uns aux autres comme des éléments réels et irréductibles, mais qu’en outre ils soient vus comme une totalité dans leur rattachement objectif (c’est-à-dire interne) au niveau fondamental de la dissociation-valeur – totalité qui de toute façon est constituée dans son essence à partir de la société, et dont lesdits domaines, moments et niveaux spécifiques se présentent « réellement » comme les manifestations phénoménales. L’énoncé d’Adorno relatif à la sociologie vaut ainsi également pour la théorie de la dissociation-valeur : « Ce qu’on désigne par coopération interdisciplinaire n’englobe pas la sociologie. Celle-ci veut découvrir en elle-même les médiations des catégories structurelles, médiations dont chacune mène aux autres. La sociologie vise à l’interaction immanente des éléments traités de manière relativement indépendante par l’économie, l’histoire, la psychologie [...] ; elle cherche à restituer scientifiquement l’unité qu’ils forment per se dans le social et que la science, mais naturellement pas seulement elle, leur fait perdre sans cesse[12] ». Ou encore, pour citer les Minima Moralia, « la pensée doit viser au-delà de son objet, justement parce qu’elle ne l’atteint pas tout à fait[13] ».

   La totalité telle que l’entend la dissociation-valeur s’avère par conséquent d’emblée une totalité fragmentée, brisée, non identique à elle-même. De ce fait, la question n’est pas de produire une synthèse interdisciplinaire de type éclectique ; ce sont bien plutôt les différents moments qu’il faut, dès le départ et « fondamentalement », relier les uns aux autres conformément à la dissociation-valeur, ce principe social formel dont la critique – j’insiste à nouveau sur ce point – ne perd jamais de vue ses propres limitations, ne se pose pas comme un absolu au nom d’un niveau transcendant, et partant fait vraiment l’effort de reconnaître la vérité propre des niveaux « particuliers ». A cet égard, elle récuse également le traditionnel schéma base-superstructure. Pour la structure de la dissociation-valeur, les niveaux social-psychologique et culturel-symbolique sont tout aussi constitutifs que le plan matériel.

6.

   Du même coup, que ce soit dans la théorie critique adornienne ou dans son prolongement à travers la théorie de la dissociation-valeur, les différences ne sauraient être posées de façon bêtement abstraite, comme le font tant de théories postmodernes et poststructuralistes. Ces dernières, dans la droite ligne d’une compréhension idéologique traditionnelle, ne font que reproduire la piteuse réalité du capitalisme postmoderne au lieu, par la critique, de s’attacher à en dégager le « concept ».

   Avec la postmodernité, la structure de la dissociation-valeur voit sa forme classique se décomposer et reçoit une nouvelle configuration. Comme je l’ai déjà indiqué, elle perd ses supports institutionnels, et c’est alors que se produit, dans le sillage du processus de mondialisation et au sein d’une situation économique qui se détériore de plus en plus, cette « barbarisation du patriarcat » dont j’ai parlé. De la même façon, la conceptualisation à l’ère postmoderne – à tout le moins, celle qui tient le haut du pavé – se transforme elle aussi, et à vrai dire pas seulement dans le champ du féminisme, que l’on sait particulièrement réceptif aux théories postmodernes. Aujourd’hui les concepts deviennent légers, superficiels et évocateurs. Ce qui explique qu’en Allemagne, où ils se combinent en slogans tels que « société du risque », « société de l’expérience », « société multi-optionnelle », etc., les concepts fassent beaucoup parler d’eux. Pour la plupart, ils n’évoluent plus que sur un plan phénoménologique, et il n’est pas rare qu’ils soient tout à fait imprécis d’un point de vue méthodologique ou méthodique. Contingences, ambivalences et contradictions prolifèrent et tout est considéré comme construit, comme n’étant rien d’autre qu’un produit du langage, du discours, des médias et ainsi de suite. Une certaine gauche postmarxiste dans les années 1990 raffolait tout spécialement de ce genre d’idées.

   Avec l’individualisation postmoderne et la dissolution de la famille et du lien national en familles recomposées, tribus, etc., la notion d’une conceptualisation exigeante paraît, elle aussi, aller à vau-l’eau ; ou, plus exactement, ces nouvelles théories s’efforcent de légitimer sans distinction tout ce qui est différent et de lui laisser libre cours. Par ailleurs, il devient évident que parler d’une corrélation entre « logique d’identité et violence » (Regina Becker-Schmidt) ou d’une « déréalisation par abstraction » (Gudrun-Axeli Knapp) ne suffit pas : on assiste également à une sorte de « déréalisation par concrétion » à travers l’abstraction même qui consiste à revendiquer telles ou telles différences. Sur le plan de la réalité sociale, de tels modes de pensée ont pour pendant les diverses guerres civiles, soi-disant d’origine « ethnique », qui ont lieu partout dans le monde, mais aussi la concurrence de plus en plus âpre entre les individus constitués sur la base du capitalisme postmoderne de casino. Le recours au non-identique, au contradictoire, à l’ambivalent, au différent, etc., est depuis longtemps devenu d’autant plus affirmatif qu’il se présente – tout particulièrement dans les théories postmodernes – planant pour ainsi dire sans attaches, sans être relié à un concept, à quelque chose de général, une essence (négative, à abolir) de la société, comme c’était le cas encore chez Adorno.

7.

   A l’opposé des tendances postmodernes et poststructuralistes hostiles à la philosophie, je pense donc qu’on ne viendra aujourd’hui à bout de la réalité sociale planétaire qu’au moyen d’un penser à la fois actuel et spéculatif-philosophique, s’appuyant sur une critique radicale du rapport de dissociation-valeur en tant que structure sociale fondamentale. Dans son opposition résolue au positivisme en général et notamment à des théories systémiques comme le structuro-fonctionnalisme de Talcott Parsons[14], Adorno – surtout, et cela se conçoit, dans la société figée des années 1950 – n’a cessé d’insister sur le non-identique contre la logique d’identité. On pourrait dire qu’il a ainsi involontairement fait le jeu de l’élément arbitraire propre à la postmodernité montante. Seulement, si cette dernière en appelle en effet à ce qui apparaît comme différent, elle ne le relie pas de manière critique à la logique d’identité et ne développe pas de concept permettant de saisir le rapport entre essence (négative) et apparence sociales.

   Une théorie critique modifiée, intégrant désormais dans sa réflexion la dissociation-valeur en tant que principe social formel, devrait naturellement examiner aussi la possibilité d’un changement social. Cependant, à l’heure des rapports « flexibilisés » et des nouvelles identités-carcans calquées sur le modèle de la « double socialisation » des femmes, ce dont il s’agirait maintenant, c’est de la possibilité de sortir de la « fausse possibilité », à savoir ce règne apparent de l’arbitraire au sein du rapport fétiche non aboli et de sa structure sous-jacente de dissociation-valeur. Il faudrait à l’inverse mettre l’accent sur la nécessité d’une rupture radicale avec ce rapport structurel fondamental lui-même. Dans le patriarcat actuel où, en dépit ou peut-être en raison même des lugubres perspectives qu’offre la crise, toutes les possibilités apparaissent effectivement réalisables (le changement de sexe, la simulation illimitée dans le domaine des médias, l’emprise quasi absolue sur les briques élémentaires de la « nature » via le génie génétique), il ne resterait plus à souligner affirmativement que la simple « possibilité de la possibilité ».

   Car si d’aventure il y avait vraiment une liberté de décision chez les individus postmodernes – et à ce titre on pourrait aller jusqu’à parler d’une « dialectique de l’individualisation postmoderne » –, cette liberté serait précisément la négation de la liberté fausse, car répressive, qui a cours dans le processus actuel de décomposition sociale du patriarcat producteur de marchandises. Et l’une de ses premières tâches consisterait à prendre à nouveau en considération l’œuvre d’Adorno et à se pencher sur la « survivance de la nature dans le sujet[15] ».

8.

   Depuis au moins le tournant du millénaire, il est devenu clair qu’un monde illimité au sens postmoderne, fondé sur la forme inabolie de la dissociation-valeur, est à maints égards un pur fantasme. A mesure que progresse l’« effondrement de la modernisation » et que s’accentue la crise économique, autrement dit à l’intérieur même de la « seconde nature », on en prend toujours davantage conscience. Or, cela ne conduit justement pas à une prise de conscience de la dissociation-valeur et, avec elle, du rapport asymétrique entre les sexes comme essence de la société (mondiale). On voit au contraire le sexisme à nouveau relégué, à l’instar du racisme et de l’antisémitisme, au rang de contradiction secondaire dans la pensée théorique et le comportement pratique. Mais en même temps, cette tendance à faire l’impasse une fois de plus sur le rapport hiérarchique inaboli entre les sexes montre bien la force, toujours agissante en sous-main, qu’un patriarcat présumé à bout de souffle conserve aujourd’hui encore, jusque dans sa phase de décomposition.

   Le rôle crucial de la dissociation-valeur en tant que principe social formel et du rapport entre les sexes qui lui correspond ne signifie pas pour autant qu’il faille élever ce dernier au rang de « contradiction principale ». Dans un esprit tout à fait adornien, la théorie de la dissociation-valeur peut se présenter comme je l’ai indiqué précédemment, à savoir comme une logique non absolue, non « agrégeante ». Elle reste au contraire fidèle à sa critique de la logique d’identité, et ne peut exister qu’en se relativisant elle-même, voire en se désavouant au besoin. Et cela veut dire aussi que la théorie de la dissociation sexuelle se doit d’accorder en quelque sorte un espace théorique égal à d’autres formes de discrimination sociale.

   Autrement dit : s’il est important de s’attacher fermement à la dissociation-valeur comme principe social essentiel, et de refuser à l’inverse le recul androcentrique et grossièrement matérialiste du début du nouveau siècle, c’est précisément parce que ce concept de dissociation-valeur est une définition se relativisant elle-même tout en défendant néanmoins sa position ; qu’il est en l’occurrence un concept contredisant toujours d’emblée toute notion d’un monde pensé comme illimité. Je ne peux toutefois pas m’étendre davantage ici sur cet énoncé qui reste peut-être, au premier abord, quelque peu mystérieux par certains côtés.

9.

   Pour en revenir à la théorie critique adornienne, ce qu’il faut en retenir pour la théorie de la dissociation-valeur, c’est qu’Adorno, à la différence du marxisme traditionnel, a bien identifié le problème de la forme sociale, même si cette problématique de la forme en termes de rapport entre les sexes est formulée chez lui de façon plutôt descriptive et limitée. Il a tout à la fois résisté aux tentations du marxisme du mouvement ouvrier et senti pour ainsi dire intuitivement que le niveau de la forme sociale ne se confond pas, sociologiquement parlant, avec les rapports de classes.

   Mais, ce faisant, Adorno est néanmoins resté focalisé sur le niveau de l’échange, de sorte qu’il n’a pu parvenir à un examen critique de la valeur comme rapport de production et de la dissociation-valeur comme forme fondamentale de la reproduction. Concernant le rapport entre les sexes, la théorie critique d’Adorno et Horkheimer conserve une démarche essentiellement descriptive, considérant de façon erronée la circulation comme rapport social fondamental, tout en reconstruisant malgré tout entre forme sociale et rapport entre les sexes un lien qui, si l’on veut saisir théoriquement les rapports sociaux dans les termes de la théorie plus sophistiquée de la dissociation-valeur, constitue un prérequis essentiel.

Traduction de l’allemand : Sînziana

Roswitha Scholz est l'auteur de nombreux articles et ouvrages dont Le Sexe du capitalisme (non traduit). Un recueil de ses principaux articles théoriques sera publié en français prochainement. De cet auteur, on pourra lire notamment en français, « Le queer a fait son temps » (entretien), son texte « Remarques sur les notions de "valeur" et de "dissociation-valeur" », ainsi qu'une présentation générale par Johannes Vogele des thèses de R. Scholz dans « Le côté obscur du capital. "Masculinité" et "féminité" comme piliers de la modernité ». 


* Texte présenté lors du symposium Roberto Schwarz de Saõ Paulo (Brésil) en août 2004, puis publié dans sa version portugaise au printemps 2005 ; www.exit-online.org/druck.php?tabelle=autoren&posnr=189 (ndt).

[1] Cf. Adorno Theodor W., Trois études sur Hegel, Paris, Payot, 1978 (1963).

[2] Cf. par exemple Schultz Irmgard, Der erregende Mythos vom Geld. Die neue Verbindung von Zeit, Geld und Geschlecht im Ökologiezeitalter, Francfort, Campus Verlag, 1994.

[3] Sur la théorie de la dissociation-valeur résumée ici, lire également du même auteur les « Remarques sur les notions de “valeur” et de “dissociation-valeur” », in Illusio, n°4-5, 2007, article repris en ligne dans le dossier « Critique de la valeur, genre et dominations » : palim-psao.over-blog.fr/article-dossier-critique-de-la-valeur-genre-et-dominations-47134207.html (ndt).

[4] Adorno Theodor W. & Horkheimer Max, La dialectique de la raison. Fragmentsphilosophiques, Paris, Gallimard, 1974 (1947), pp. 49-50.

[5] Maihofer Andrea, Geschlecht als Existenzweise. Macht, Moral, Recht und Geschlechterdiffenrenz, Sulzbach, Ulrike Helmer Verlag, 1995, p. 111.

[6] La dialectique de la raison, op. cit., p. 84.

[7] Ibid., p. 13.

[8] Ibid., p. 118.

[9] Adorno, Einleitung in die Soziologie, Francfort, Suhrkamp, 1993, p. 46 sq.

[10] Cf. Beck Ulrich, La Société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Aubier, 2001 (1986).

[11] La dialectique de la raison, op. cit., p. 120.

[12] Adorno, Gesammelte Schriften 5, Francfort, Suhrkamp, 1969, note p. 145.

[13] Adorno, Minima Moralia. Réflexions sur la vie mutilée, trad. E. Kaufholz & J.-R. Ladmiral, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2003 (1951), « 82. Garder les distances », p. 173.

[14] Cf. notamment Adorno Theodor W. & Popper Karl, De Vienne à Francfort. La querelle allemande des sciences sociales, trad. collective, Bruxelles, Editions Complexe, 1979 (1969).

[15] La dialectique de la raison, op. cit., p. 55.