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Mort d’Adama Traoré: l’audition du chef de patrouille confirme les mensonges du procureur
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Contrôle dorsal et costal, clef de jambe, malaise... Le chef de patrouille a été entendu par l’IGGN (Inspection générale de la gendarmerie nationale) sur les détails de l’interpellation d’Adama Traoré, retrouvé par les pompiers menotté sur le bitume de la gendarmerie de Persan.
Adama Traoré est mort le 19 juillet dernier, jour de ses 24 ans, lors d’une interpellation à Beaumont-sur-Oise. Près de deux mois plus tard, les circonstances exactes du drame se précisent un peu plus, avec les déclarations de l’un des trois gendarmes ayant participé à son arrestation.
Le chef de patrouille, 28 ans, entendu par le bureau des enquêtes judiciaires à l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), a détaillé ses gestes : "Moi j’exerce une force sur son bras droit pour le déplier, bras droit qui se trouve sous son corps. L’individu est contracté et nous empêche d’avoir une visibilité sur ses mains. Je tire à l’aide de mes deux mains sur son bras droit pour faire passer son bras droit dans son dos (…) Une fois que c’est fait, j’applique un contrôle dorsal costal le temps du passage des menottes." Il poursuit :
"Le contrôle dorsal et costal que je réalise se matérialise par le fait de mettre mon genou droit au niveau du centre du dos de l’individu et mon genou gauche sur la partie costale dorsale de l’individu. Je maintiens son bras droit entre mes deux genoux afin de procéder au menottage."
Des propos qui viennent compléter ce que les collègues du gendarme gradé avaient déjà dit au mois de juillet : Adama Traoré "a pris le poids de nos corps à tous les trois".
Contrairement à ce qu’avait laissé entendre le procureur de la République de Pontoise, Adama Traoré ne souffrait ni d’une maladie cardiaque, ni d’une "infection grave", à l’origine de son décès. Mais c’est bien un "syndrome asphyxique", décrits dans les autopsies, qui aurait provoqué sa mort.
"Il se débat"
Le chef de patrouille connaissait Adama Traoré, parce qu’il l’avait peut-être interpellé "trois ou quatre fois" déjà. Auditionné par l’IGGN, il a raconté comment lui et ses deux collègues, le 19 juillet dernier, sont intervenus dans le logement où Adama Traoré s’était retranché après avoir fui un premier contrôle dans la rue.
Il fait plus de 30 degrés cet après-midi là, tous les volets de l’appartement sont fermés, c’est "la pénombre" : "Je distingue une forme humaine, comme enroulée ou cachée sous un drap, un plaid, une couverture qui est au pied du canapé", dit le chef de patrouille.
"Au moment où on tente d’avoir un contrôle sur l’individu, il se débat."
Pendant que le gendarme gradé, 70 kilos pour 1,75 mètre, est à genoux sur le dos d’Adama Traoré, son bras droit entre les mains, ses collègues se chargent l’un de l’autre bras, l’autre de "maîtriser les membres inférieurs avec une clé de jambe". Le jeune homme, toujours selon le chef de patrouille, "utilise ses jambes pour bouger. Changer de sens. Nous étions trois et cela nous a permis très rapidement de maîtriser l’individu. La rapidité de notre intervention ne lui a pas permis d’aller plus loin dans sa résistance".
Adama Traoré est torse nu, "la palpation est rapide". Le chef de patrouille poursuit : "A cet instant, l’individu m’indique avoir du mal à respirer, j’ordonne à mon chauffeur de préparer le véhicule, à savoir enlever le matériel sensible pour le mettre dans le coffre. J’ordonne à mon gendarme adjoint volontaire de m’accompagner afin de mettre l’individu dans notre véhicule".
Menotté jusqu'à la fin
Le chef de patrouille assure ne détecter chez Adama Traoré "aucun signe pouvant laisser présager qu’il va faire un malaise. Ce que je vois c’est qu’il est essoufflé, ce qui me semble tout à fait logique suite à la course-poursuite qu’il vient de réaliser". Dans la voiture, Adama Traoré est attaché à l’arrière, les mains menottées dans le dos. Devant le portail de la gendarmerie de Persan, le gendarme adjoint volontaire signale au gradé qu’Adama Traoré semble "s’assoupir". Le chef de patrouille déclare :
"Je me retourne et je constate que l’individu est effectivement en train de s’affaisser dans le véhicule."
Les gendarmes garent la voiture à l’arrière du bâtiment de la caserne. Le gradé descend :
"Avec l’aide du gendarme adjoint volontaire, je sors Traoré Adama du véhicule."
Et "je constate qu’il a une perte de tonus musculaire. Il ne tient pas debout, nous le sortons à deux". Le chef de patrouille dit que dans la voiture, il y a "une auréole au niveau du siège, je constate qu’il s’est uriné dessus et que par conséquent il a un relâchement. J’annonce le placement en PLS (position latérale de sécurité) de l’individu, nous mettons sa chemise sous sa tête. Je l’entends respirer, il a fait un malaise pour moi".
Adama Traoré est au sol, sous l’écrasante chaleur de ce 19 juillet. Le gendarme assure : "J’entends sa respiration qui est forte, présente. Elle est bruyante, rauque."
"J’ordonne au gendarme G. de surveiller le pouls de l’individu, et au gendarme adjoint volontaire de vérifier de manière constante sa respiration."
Le chef de patrouille fait appeler les pompiers. Dans l’attente de leur arrivée, selon lui, Adama Traoré "ouvre les yeux à plusieurs reprises de manière brève et ce jusqu’à l’arrivée des pompiers". Ce sont eux qui demandent qu’on ôte les menottes à Adama Traoré, "avant qu’ils mettent en place le défibrillateur". En vain.
Elsa Vigoureux