Agenda militant
Ailleurs sur le Web
- La transition énergétique, la question économique et la Gauche (26/04)
- L’amour de/dans la révolution. Lire Alexandra Kollontaï (26/04)
- Mélenchon: La jeunesse de Sciences Po est l’honneur de notre pays face au génocide (26/04)
- Il y a 50 ans, le Portugal entrait en révolution (25/04)
- Israël-Palestine : "C’est la liberté d’expression qu’on veut censurer" (25/04)
- Il y a 50 ans : la « Révolution des œillets » (25/04)
- Plan d’urgence pour l’Education nationale : bilan de la lutte (25/04)
- Miyazaki : forces et faiblesses d’un génie de l’animation (25/04)
- Grèce : Quelles suites après la grève réussie contre la misère ? (24/04)
- L’image de Lénine est au plus haut en Russie (24/04)
- Suicides à la Banque de France : un rapport décortique le management toxique de l’institution (24/04)
- Victoire historique dans le Tennessee pour le syndicat UAW (24/04)
- Soudan : La conférence de Paris controversée (24/04)
- Michel Pablo, une vie de révolutionnaire (24/04)
- La "Gauche démocratique et sociale" de Filoche appelle à voter France Insoumise (22/04)
- Elections au Pays basque espagnol : le parti séparatiste de gauche réalise une percée historique (22/04)
- Loi d’orientation d’Attal-Macron, crise de l’agriculture capitaliste, quelle réponse du mouvement ouvrier ? (22/04)
- L’émergence du capitalisme vue par un médiéviste, par Vincent Présumey. (21/04)
- La crise immobilière se poursuit : les prix vont encore baisser ! (21/04)
- Les désillusions et la décomposition du capitalisme mondialisé (21/04)
- La théorie de la dictature du prolétariat de Marx revisitée (21/04)
- Enseignants, les nouveaux prolétaires ? (21/04)
- Contre le délit d’opinion, pour défendre notre droit à soutenir la Palestine : il faut faire front ! (21/04)
- Controverses - Revue du Forum pour une Gauche communiste internationaliste (21/04)
- Libertés publiques...un pas de plus dans la répression! (20/04)
Liens
- Notre page FaceBook
- Site du NPA
- Démosphère (Paris, IdF)
- Site anti-k.org
- Le blog de Jean-marc B
- CGT Goodyear
- Démocratie Révolutionnaire
- Fraction l'Étincelle
- Anticapitalisme & Révolution
- Révolution Permanente (courant CCR)
- Alternative Communiste Révolutionnaire (site gelé)
- Ex-Groupe CRI
- Librairie «la Brèche»
- Secteur jeune du NPA
- Marxiste.org
- Wiki Rouge, pour la formation communiste révolutionnaire
Surveillance, classement, pressions : sois caissière et tais toi !
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Vous les croisez quotidiennement dans vos supermarchés en les ignorant parfois, en leur souriant parfois aussi. Mais finalement que savez-vous vraiment de ces caissières et de ces caissiers, de leurs conditions de travail, de ce milieu ? Témoignages.
Comme bon nombre d’étudiants, j’ai exercé un nombre infini de petits jobs. Durant ces expériences, j’ai pu découvrir un nouveau monde, celui des caissières et caissiers des supermarchés. Pendant deux ans, j’ai occupé ce poste dans deux supermarchés de grandes villes de la banlieue parisienne.
Les caissiers sont confrontés en permanence aux regards des autres. Ces autres qui nous jugent. Combien de fois, nous avons vu de la pitié ou de la condescendance dans le regard des clients. Ces regards qui attendent de nous l’amabilité, le respect et le sourire mais qui en échange nous ignorent. Tandis que la direction insiste sur le comportement que l’on doit avoir, certains clients ne daignent même pas dire “Bonjour” ni même “merci”.
Surveillance des caissières et classement des salariés
Cette invisibilité, nous avons fini par nous y habituer. Il faut surtout faire face à la pression qui n’est pas des moindres. La direction, quand elle n’est pas d’humeur à faire son travail, ce qui pourrait amplement nous faciliter la tâche, s’amuse à nous surveiller grâce aux caméras placées au-dessus des caisses. Je ne compte plus le nombre de fois où un responsable nous a demandé d’enlever un chewing-gum ou de cesser de regarder notre téléphone alors même qu’il ne se trouvait pas à nos côtés. Cela m’est arrivé la semaine dernière. “On t’a vue à l’écran“, reconnaissait une des chefs. Ces caméras avaient pour première utilité de renseigner les vigiles sur les vols. Nous sommes devenus des sortes de candidats de téléréalité assis sur nos chaises n’ayant pas le droit à l’erreur de peur d’être éliminés. C’est ainsi qu’Eloise*, une de mes collègues, m’a confié avoir été rappelée à l’ordre par les supérieurs car elle a osé bailler devant un client. Ce jour-là, Eloïse avait commencé sa journée à 11h30, finissait à 20h30 avec deux heures de coupure.
La pression ne s’arrête pas là. A la caisse centrale, un classement est disponible. Il établit la liste des caissiers du plus rapide au plus lent. Le premier caissier sur la liste est celui qui passe le plus d’articles par minute. Dans le dernier supermarché où j’ai travaillé, le nombre d’articles exigé est de 21 par minute. Un nouveau classement est établi chaque jour en fonction des résultats de la veille. Tous les matins, au moment de récupérer sa caisse pour se rendre à son poste, les chefs rappellent le chiffre de 21 à atteindre, donnent les statistiques et les résultats de la veille. Ce chronométrage est biaisé. En effet, il est déclenché dès le premier article et jusqu’au dernier. Mais pendant ce temps, nous devons aussi soulever des articles lourds, renseigner les clients, les aider notamment les personnes âgées. Des actions tout autant dévalorisées au dépend de notre humanité pour faire de nous des machines. Ce classement nous dit autre chose. Il nous sépare. Il crée de la concurrence entre les employés, une distinction très claire entre les meilleures machines et les mauvaises machines, entre celles qui tiennent le rythme et les autres. Ce système vieux comme le monde du “diviser pour mieux régner” se retrouve lorsque la direction promet de meilleures postes, une caisse plus chaude en hiver ou encore d’accorder plus facilement des congés.
Conditions de travail
” Plus je travaille, plus mon couple va mal”, me confie Catherine*. Des horaires qui varient d’une semaine à l’autre peuvent avoir des conséquences négatives sur une vie familiale voire une vie sociale. Mariam*, quant à elle, a été prévenue à la dernière minute d’un changement d’horaire. Peu importe si cela pose problème pour récupérer sa fille à la sortie de l’école.
Tout cela s’accompagne d’un manque de moyens. Quelques caisses, inutilisables ne fonctionnent plus depuis plusieurs années. Cet été, les employés de caisse ont dû travailler en pleine canicule sans climatiseur. Après plusieurs réclamations venues des salariés et des clients, le directeur à simplement répondu : “Cela coûte beaucoup trop cher pour une canicule d’une semaine.” L’exploitation des salariés est totale. En effet, Katarina* caissière, travaille au poste de chef de caisse les dimanche matin. Un chef de caisse touche un peu près 100 euros de plus qu’un caissier. Katrina n’a pas le droit ni à l’intitulé du poste, encore moins au salaire qui va avec. De telles pressions amènent à des échanges vifs avec les clients et les erreurs de caisse se font de plus en plus fréquentes.
Placé à la fin du long système de la grande distribution, ce sont les caissiers qui subissent les erreurs des autres : prix erronés, promotions qui ne passent pas, problèmes d’étiquetage. Ces erreurs sont d’autant plus graves que, lorsque le client s’en aperçoit, c’est à la personne derrière la caisse qu’il s’en prend. Si le client n’est pas satisfait, c’est à cette même personne que la direction va s’en prendre aussi. Un cercle vicieux qui enferme les employés dans une situation d’emprisonnement et de soumission continuelle.
Personne objet et sexisme
Comme si tout ceci ne suffisait déjà pas, quand on est une femme, il nous arrive d’être traitées comme des objets, des bouts de viande par certains clients. Certains se permettent de lancer des “elle est mignonne la petite derrière sa caisse”. Les responsables masculins se permettent aussi de draguer très lourdement les caissières en les tutoyant et en faisant des remarques sur telle jupe, telles jambes… Les hommes qui exercent ce métier ne sont pas épargnés. Amaury a plus d’une fois été la cible des remarques sexistes et homophobes. “La tafiole, retourne scanner tes articles”.
Vous vouliez une lueur d’espoir dans ce tableau bien sombre ? “Certains clients me connaissent bien, raconte Amel. Ils me parlent, on se raconte nos vies et il arrive qu’ils demandent des nouvelles de mes enfants”. De plus en plus de clients commencent à comprendre ces situations précaires de ces salariés qui espèrent un jour de conditions de travail dignes et peut-être un sourire.
*Par souci d’anonymat, les noms des témoins ont étés modifiés.
Myriam ALEXANDRE