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Présidentielle: EELV choisit Yannick Jadot

Lien publiée le 8 novembre 2016

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Mediapart) À l’issue de la primaire écologiste, le député européen l’a facilement emporté face à Michèle Rivasi. Proche de Daniel Cohn-Bendit, il espère profiter de l’explosion de la gauche et vise un score supérieur à 10 %. Une gageure pour un parti très affaibli. 

Pas de psychodrame, ni de surprise. À l’issue du second tour de la primaire écologiste, dont Cécile Duflot avait déjà été éliminée, le député européen Yannick Jadot l’a facilement emporté face à sa collègue Michèle Rivasi. Mais le plus difficile commence aujourd’hui pour celui qui vise un score à deux chiffres à la présidentielle.

Au second tour de la primaire, Yannick Jadot a recueilli 54,25 % des voix, contre 40,75 % à sa concurrente – le solde comprenant les bulletins blancs et nuls. La participation a atteint 80 % des 17 000 inscrits, en nette hausse par rapport au premier tour, avec 14 000 votants. De quoi rendre le scrutin incontestable. Les trois recalées, Karima Delli, Michèle Rivasi et Cécile Duflot, qui a été la seule à ne pas prendre la parole devant la presse, étaient d’ailleurs présentes lundi soir, au siège d’EELV, pour la déclaration du désormais candidat à la présidentielle.

Les quatre candidats à la primaire, dont le vainqueur Yannick Jadot. © Compte Twitter EELV Benelux 

Les quatre candidats à la primaire, dont le vainqueur Yannick Jadot. © Compte Twitter EELV Benelux

Cette victoire était plutôt attendue : à l’issue du premier tour, Jadot comptait cinq points d’avance (35 % contre 30 %) sur Rivasi. Surtout, il bénéficiait d’une notoriété plus grande et de réseaux plus importants au sein du parti. Il avait également reçu le soutien de l’eurodéputée Karima Delli (arrivée quatrième et dernière de la primaire avec 10 % des voix) et de plusieurs partisans de Cécile Duflot, qui n’avait, elle, donné aucune consigne de vote.

« Personne ne croit que les écologistes peuvent gagner la présidentielle en 2017, a expliqué Jadot peu après l’annonce officielle de sa victoire. Mais nous pouvons ouvrir une nouvelle page qui nous émancipe de ce quinquennat. En 2009, quand on a commencé la campagne des européennes, on n’a pas dit qu’on allait passer devant le PS. On avait dit “10 % plus X”. C’est cet électorat que je veux conquérir aujourd’hui. »

À 49 ans, Yannick Jadot est surtout connu de la sphère écologiste, pour son combat sur le climat et contre les traités de libre-échange, avec les États-Unis (Tafta ou TTIP) et le Canada (CETA), menés notamment depuis le parlement européen, où il a été réélu pour un deuxième mandat en 2014. Directeur des campagnes de Greenpeace France de 2002 à 2008, il avait été espionné pour le compte d’EDF, mais l’électricien a bénéficié d’une relaxe. Il est également élu dans le Grand-Ouest, où les écologistes sont très impliqués dans la lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes – Jadot était à Nantes, lundi matin, quelques heures avant l’annonce du résultat du second tour, pour une audience décisive de la cour administrative d’appel.

C’est notamment cet ancrage au cœur des luttes écologistes qui lui a permis de sortir vainqueur de la primaire : les militants verts choisissent traditionnellement comme candidat à la présidentielle celui ou celle qui semble le plus leur ressembler.

Politiquement, le choix de Jadot est aussi celui d’un équilibre au sein du parti écologiste. Proche de Daniel Cohn-Bendit, il incarne l’ouverture du parti vert lors de sa transformation en EELV – Jadot ne dit que très rarement « Europe Écologie-Les Verts », il dit « Europe Écologie ». Il fait partie de ceux qui, en 2011, lors du congrès de La Rochelle, avaient ferraillé contre Cécile Duflot, qui l’avait alors emporté à la majorité absolue.

Déçu, en 2012, de ne pas avoir été ministre, il est aussi parfois soupçonné en interne d’être trop proche du PS. Il y a cinq ans, il était porte-parole de la candidate Eva Joly, dont il avait poussé la candidature, avant de claquer la porte en pleine campagne. En cause : un désaccord sur la critique des socialistes avec lesquels EELV avait signé un accord. Jadot a aussi manifesté son soutien (avant de se raviser) au traité budgétaire européen (TSCG) en 2012, et il s’est beaucoup impliqué en début d’année dans la primaire de toute la gauche, avant qu’elle ne fasse long feu.

Fin août, lors des Journées d’été de son parti, Jadot estimait encore que la candidature écologiste à la présidentielle pouvait être retirée en cours de campagne : « Le seul sujet pour nous, c’est si François Hollande n’y va pas, et qu’il se passe quelque chose à gauche. Alors, le mouvement peut débrancher le candidat. Mais c’est le seul cas de figure. » Depuis, il a changé d’avis. « Je ne serai pas le médecin urgentiste des appareils politiques de la gauche », a-t-il expliqué lundi, refusant d’entrer dans les « règlements de comptes du sarkozysme et du hollandisme ».  

Surtout, s’il prône une écologie « réaliste » et « crédible », et tient des propos très durs à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon, Jadot a toujours assumé être « de gauche ». Surtout, plus personne chez EELV ne préconise aujourd’hui un accord avec le PS (pas plus qu’avec Mélenchon). Le député européen avait aussi soutenu Duflot quand elle avait choisi de sortir du gouvernement. Et contrairement à d’autres figures d’EELV, Pascal Durand ou Jean-Paul Besset, il n’a pas quitté le parti.

Il a surtout soigneusement évité de s’enfermer dans ce qui reste de l’“aile droite” : lors de la primaire, s’il était soutenu par la motion Europa, Yannick Jadot s’est gardé de s’afficher trop ouvertement avec ses promoteurs et il n’avait signé aucune motion lors du dernier congrès en juin. « Je veux rassembler la famille de l’écologie », répète souvent Jadot qui a de nouveau prôné lundi soir une « écologie apaisée, aimable, crédible, ni culpabilisante, ni punitive mais bienveillante ».

La quête des 500 signatures

En attendant, EELV vient de franchir une nouvelle étape, sans trop de casse apparente en dehors de l’élimination spectaculaire de Cécile Duflot au premier tour. La primaire s’est déroulée sans heurts. Les débats n’ont pas été entachés des mêmes attaques verbales que lors du précédent affrontement, en 2011, entre Eva Joly et Nicolas Hulot, et, à aucun moment, malgré quelques tensions, n’a régné la même ambiance exécrable. Comme un réflexe de survie qu’expliquait déjà cet été Yannick Jadot : « Cette fois, le mouvement est suffisamment fragile et l’espace politique potentiellement limité pour considérer que si la campagne dérape, le candidat, quel qu’il soit, aura une campagne plombée. D’où la nécessité d’afficher une campagne propre. »

Les chiffres de participation ne sont pas non plus honteux : ils sont nettement plus faibles qu’il y a cinq ans mais, pour un parti profondément affaibli par les départs successifs de ses cadres, ils reviennent dans l’étiage classique du parti écologiste depuis sa création, comme nous l’expliquait récemment la chercheuse de l’EHESS, spécialiste des Verts, Vanessa Jérome (à lire ici, et à voir ici).

Cela dit, il reste de nombreux obstacles de taille à franchir pour le candidat d’Europe Écologie-Les Verts. Il doit d’abord recueillir les fameuses 500 signatures d’élus indispensables pour se présenter à la présidentielle. Il y a cinq ans, pour Éva Joly, le parti y était parvenu sans trop de difficulté, mais sans trop de marge non plus. Depuis, il a perdu plus de la moitié de ses élus. « On a aujourd’hui 270 élus EELV ou apparentés. Restent 250 signatures à trouver ! À nous de mettre les bouchées doubles. Mais les écologistes y sont toujours parvenus depuis 1974 [et la candidature de René Dumont – ndlr] », explique le secrétaire national du parti David Cormand.

Surtout, le candidat désigné devra tenter l’exploit de sortir l’écologie politique de la marginalité dans laquelle EELV est aujourd’hui enfermée. La tâche, là encore, s’annonce rude. Parce que la présidentielle est un scrutin difficile pour les écologistes, bien plus à leur aise lors des élections locales ou européennes. Le meilleur score jamais atteint par un de leurs représentants reste celui de Noël Mamère en 2002, le seul à avoir franchi la barre des 5 %, avec 5,25 %. Parce que le parti EELV sort essoré du quinquennat de François Hollande qui a réussi à profondément diviser ses alliés de 2012, jusqu’à recruter leur secrétaire nationale Emmanuelle Cosse au gouvernement l’hiver dernier. Et parce qu’ils auront un budget très limité.

Par ailleurs, l’espace politique des écologistes semble aujourd’hui étroit dans un paysage atomisé à gauche. Sur leur gauche, Jean-Luc Mélenchon assume un discours volontariste sur “l’éco-socialisme”, séduisant ainsi une partie du “peuple de l’écologie”. Sur leur droite, le PS ressemble à la fois à un champ de mines et de ruines, et ne connaîtra son candidat qu’à la fin du mois de janvier. Au fil des mois, montera aussi la petite musique du « vote utile », agitant le spectre du 21 avril 2002 et le risque de qualification au second tour de Marine Le Pen.

Lundi soir, Yannick Jadot se voulait optimiste : « Ce qui se passe dans le reste du paysage politique est assez apocalyptique. J’espère justement tirer l’épingle du jeu écologiste dans cette campagne. »