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Et Montebourg s’en est allé

Lien publiée le 23 janvier 2017

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Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

(Mediapart) L’ancien député PS a une nouvelle fois échoué à la troisième place du premier tour de la primaire du son parti, derrière Benoît Hamon et Manuel Valls. Une défaite qui sonne peut-être la fin de sa carrière politique.

L'échec est cuisant. Arnaud Montebourg a une nouvelle fois échoué à se qualifier au second tour de la primaire du parti socialiste, arrivant comme en 2011 en troisième position. Devancé par Benoît Hamon et Manuel Valls, l’ancien ministre de l’économie paie une campagne ratée. Ce nouvel échec sonne peut-être la fin de sa carrière politique. 

Selon des résultats partiels, il obtient seulement 17,52 % des suffrages, loin derrière Manuel Valls (31,11 %) et, surtout, Benoît Hamon (36,21 %). Il fait à peine mieux qu’il y a cinq ans (17,19 %), quand il avait créé la surprise en prenant la troisième place de la primaire. En nombre de voix, il perd même du terrain – la participation ayant été nettement moins élevée cette année.

Premier candidat à s’exprimer dimanche, Arnaud Montebourg a appelé à voter pour Benoît Hamon. « Nous avons combattu ensemble dans le gouvernement contre les politiques social-libérales aujourd’hui désavouées. Nous avons quitté le gouvernement ensemble et nous avons veillé [dans cette campagne] à ce que nos prises de position restent compatibles », a-t-il expliqué, parlant d’un « appel de l’histoire » au « rassemblement des gauches ». Il y a quelques mois, quand il annonçait sa candidature depuis son rendez-vous annuel de Frangy-en-Bresse, il faisait pourtant figure de favori, du moins pour concurrencer la ligne gouvernementale, alors portée par François Hollande. Aux yeux de ses proches, celle de Benoît Hamon était condamnée à être symbolique, apportant, au mieux, une réserve de voix utile au second tour, au nom de la « théorie du râteau ».

Déjà, à l’époque, Montebourg aurait dû s’alarmer de voir ses concurrents toujours le devancer, et miner son propre calendrier : quand il hésitait à contourner la primaire du PS, et à se présenter hors parti, c’est Macron qui a dégainé le premier avec En Marche. Et quand il s’est finalement décidé à être candidat, Benoît Hamon avait déjà fait sa déclaration de candidature.

Cette primaire, dont il a été le promoteur au parti socialiste quand personne n’en voulait, devait signer sa revanche, deux ans après son départ forcé du gouvernement en 2014, avec Benoît Hamon (déjà) et Aurélie Filippetti. Montebourg rêvait de régler les comptes politiques de Hollande, après être apparu comme son principal opposant au sein même du gouvernement depuis Florange. Le renoncement du président, le 1er décembre, a tout chamboulé.

Surtout, sa campagne, ponctuée pendant six mois de nombreux déplacements sur le terrain, n’a jamais décollé. Pire, elle a souvent semblé invisible ou illisible. Sur le fond, Montebourg a semblé parfois plus préoccupé par les électeurs potentiels d’Emmanuel Macron que par ceux de la gauche socialiste : c’était, entre autres, le sens de son slogan « Libérez les Français ». Sur la forme, il tenait avant tout à se « présidentialiser », en gommant les aspérités de ses formules, quitte à ne plus incarner la radicalité, prometteuse de rupture avec un quinquennat qui a tant désespéré l’électorat de François Hollande. Dans son équipe, de nouveaux visages apparaissaient, notamment le directeur de campagne François Kalfon, quand les plus fidèles se tenaient en retrait, parfois consternés par les choix de leur mentor.

Ce n’est que très récemment que la campagne de Montebourg a semblé reprendre un peu de souffle. Trop tard, assurément, au vu des résultats. Ses vieux amis étaient revenus ; des soutiens de poids l’avaient rejoint, comme le député Christian Paul ou l’élu européen Emmanuel Maurel. « Ça y est, on respire, glissait alors un proche du candidat. C’est comme autre chose à la table du conseil politique. Enfin, on parle politique ! » Son programme économique, présenté début janvier, assumait une ligne claire : la relance de l’économie ; le pouvoir d’achat ; la lutte contre l’austérité et la finance. Un discours du Bourget, en plus radical, et qui serait, cette fois, suivi à la lettre.

Aucune de ses propositions pourtant, même sur la réorientation de l’Europe, n’a monopolisé les débats entre les candidats. Jamais il n’est apparu comme le lanceur d’idées (rôle rempli par Hamon), ou le candidat responsable de la « gauche crédible qui serait vraiment de gauche » (rôle rempli, au choix, par Valls ou Peillon). Montebourg a tenu la route, mais sans briller, sans incarner un message clairement identifié.

« Dans cette campagne, il fallait un ou deux étendards, explique un proche du candidat. Arnaud, cette fois, il était le candidat de quoi ? » Dans son viseur : la stratégie de campagne choisie par le directeur François Kalfon, ancien strauss-kahnien devenu frondeur. « Il lui disait de ne pas prendre de risques, de se présidentialiser, détaille un autre proche, qui préfère ne pas être cité. Mais il n’a pas marqué les esprits et, à la fin, les gens n’avaient pas de raison de voter Montebourg. » « On s’est lancé tôt et on a fait longtemps une campagne sans vis-à-vis, explique aussi le député Philippe Baumel. Cela nous a amoindris. » Après avoir dénoncé « trois candidatures pour nuire », dont celle de Vincent Peillon, la victoire de la « démagogie », il ajoute : « On s’est aussi en partie trompé de campagne. On a fait une campagne de premier tour de la présidentielle, et pas une campagne de primaire. On a joué la responsabilité alors que les électeurs cherchaient des marqueurs et des identifiants garantissant une politique de gauche. »

Avant le premier tour, l’équipe Montebourg craignait aussi une sous-représentation des électeurs populaires à la primaire, sur lesquels il avait construit toute sa campagne. « Arnaud a fait le choix de parler au monde du travail, celui qui s’est détourné de la gauche depuis 2002, rappelle Christian Paul. Sans les couches populaires, on ne peut pas gagner. C’est le rêve inabouti de notre génération depuis le 21-avril. » Mais la déformation sociologique du corps électoral de la primaire, qui serait cantonné aux seuls “bobos” de centre-ville, ne suffit pas à expliquer la claque de dimanche. « En fait, on perd partout. Benoît Hamon est devant tout le temps », explique un conseiller de l’ancien ministre de l’économie.

Certains électeurs ont aussi reproché à Montebourg son ralliement à François Hollande en 2011 – c’est du moins ce que rapportent plusieurs députés sur le terrain. Ils auraient pu aussi lui faire payer sa participation à la nomination de Manuel Valls à Matignon (à laquelle Benoît Hamon avait pourtant aussi activement participé en 2014). Au hasard d’un reportage à Aubervilliers, dimanche, un électeur, venu voter pour Hamon, reprochait même à Montebourg d’avoir « rien pu faire à Bercy » et d’avoir « abandonné Florange finalement ». Comme si, au fil du quinquennat, sans qu’il ne s’en rende compte lui-même, l’ancien député, chantre de la démondialisation, ensuite devenu ministre, avait progressivement dilapidé tout son capital politique.

Cet automne, Montebourg déroutait aussi certains de ses proches qui s’interrogeaient sur sa réelle volonté de se lancer à nouveau dans l’arène politique, lui qui avait entamé une nouvelle vie dans le privé et qui n’a plus aucun mandat électif. « Il y a aussi eu, sans doute, une équation personnelle », explique un de ses amis. En novembre, quand nous l’interrogions sur la lassitude des électeurs de gauche face aux débats de la primaire, Montebourg rétorquait : « La lassitude… Mais que croyez-vous que j’ai ressenti pendant deux ans ? »