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    Taux de profit, revenu universel et surnuméraire

    économie

    Lien publiée le 29 janvier 2017

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    http://spartacus1918.canalblog.com/archives/2017/01/28/34861825.html

    Revenons sur la baisse du taux de profit.

     Baisse tendancielle du développement du Mode de Production Capitaliste (MPC). Le MPC depuis la création du crédit et de la Société Anonyme (SA) est devenu un capitalisme collectif. Ce qui a pour conséquence la mise en œuvre de capitaux de plus en plus considérables pour le développement du MPC et sa reproduction élargie. Il en résulte un accroissement tout aussi considérable de la masse de profit ; quant à l'accroissement du capital (sa reproduction élargie), il dépend à la fois du taux de profit et de sa masse (1).

     Sous le fouet permanent de la concurrence, tout capitaliste d'État ou privé et même monopoliste est contraint d’accroître la productivité. Cet accroissement de la productivité a pour résultat la diminution de valeur du capital existant et la réduction du capital variable (nombre de salariés) par rapport au capital constant ; ce qui a pour conséquences, d'une part de faire tomber le taux du profit, d'autre part d'en ralentir la chute.

     Autrement dit les capitalistes doivent faire des investissements de plus en plus importants, avec comme corollaire une diminution relative du capital variable (nombre de salariés) qui entraîne une chute du taux de plus-value. Mais cette chute sera compensée par la liquidation des concurrents la pléthore de capital qui selon Marx est dans l'impossibilité de compenser la baisse du taux de profit par sa masse (manque de crédit).

     Comment se rendre compte qu'il y a baisse du taux de profit ?

     Nous pouvons nous référer aux statistiques faites par les organismes capitalistes, ce que font régulièrement les intellectuels marxistes. Mais ce qui est plus intéressant ce sont les mesures que les capitalistes sont contraints de prendre pour contrecarrer cette chute du taux de profit. Ces mesures, ou contre tendances à la baisse du taux de profit, sont énumérées au chapitre XIV du tome III du Capital. elles sont au nombre de six : 1) l'accroissement de l'exploitation du travail. 2) La réduction du salaire au-dessous de la valeur de la force de travail. 3) La dépréciation des éléments du capital constant. 4) La surpopulation relative. 5) Le commerce international. 6) L'accroissement du capital par actions.

    Toutes ces contre-tendances ont été mises en action depuis le retournement monétariste de 1979 visant à «euthanasier l'État providence». Le monétarisme voulait juguler l'inflation et permettre au capital de retrouver ses marges par des purges grandioses à l'échelle du monde. Elles sont toujours efficientes, reprenons les une à une.

    Il ne semble pas nécessaire de traiter ici de «l'accroissement de l'exploitation du travail et la réduction du salaire au-dessous de la valeur de la force de travail» qui est si évidente que nous pouvons écrire sur le sujet chaque jour. Je vais donc concentrer mes critiques sur « la dépréciation des éléments du capital constant et la surpopulation relative ».

     La dépréciation des éléments du capital constant.

     Face à la baisse du taux de profit que certains sous estiment, nous voyons poindre de nouveaux entrepreneurs qui savent habilement utiliser les TIC et pénétrer comme une bombe à retardement dans le MPC, ces nouveaux capitalistes se sont les start-ups et l'ubérisation dont tout le monde connaît les péripéties. Seulement peu de «théoriciens» sont aujourd'hui en mesure de nous indiquer ce qui se passe derrière le rideau. Des transformations s'opèrent à une grande échelle au point que certains parlent ouvertement d'en finir avec le salariat, réduisant celui-ci à l'état d'auto entrepreneur misérable. Ces nouveaux capitalistes veulent s'émanciper d'une forte mise en capital constant et variable, comme le disait K. Marx «ramener au niveau le plus bas possible la valeur du capital constant utilisé » (2). Ils vont pour cela utiliser les niches offertes par les TIC pour se faire une place d'intermédiaires indispensables dans le système. Certes, le système en lui-même n'est pas nouveau on le connaît depuis les franchisés , et plus anciennement avec le système de vente comme Amway (3) et Tupperware. Ce qui change c'est la montée en charge de ce système qui se présente comme voulant libérer les individus du salariat, illustration : « la Loi travail en France ».

     Le rapport de Robert Badinter accolé à la loi travail insiste sur le fait que le salariat de la première révolution industrielle est en voie de disparition. Cela fait effectivement 40 ans que nous voyons se multiplier et démultiplier les contrats de travail en tout genre jusqu'au contrat de travail zéro heure. (4) Cette déstructuration du contrat de travail à temps plein n'est pas la fin du salariat, mais sa précarisation.

    Le « cloud working ».

    Chaque jour sur Internet un site offre des travaux à faire immédiatement à domicile par un «indépendant». Bien sûr, cela ne concerne que des tâches comme programmeur, rédacteur, traducteur, graphiste, etc. C’est une version des contrats déjà existants de chantier ou de projets non-salariés, c’est-à-dire sans aucune garantie sociale (en France, IBM s’est lancé en 2012 dans la pratique du cloud working sous le titre «Program Liquid» qui lui permettrait, en confiant des tâches à des sous-traitants sous statut d’autoentrepreneurs, de réduire ses effectifs mondiaux de 400 000 à 100 000 employés. Cette résurgence du travail à domicile est liée au développement de l’informatique individuelle (ce qui déplace la question du capital fixe) et a aussi des conséquences sociales.

     La surpopulation relative.

     Au niveau mondial, le taux d'emploi est passé de 77% en 1966 à 53,9% en 2015, malgré une hausse relative du nombre d'emplois (5).

     Il faut voir à ce sujet les données de la Banque mondiale, de l'OCDE (6). La population, en surnombre relatif, est contrainte pour survivre d'entrer dans ce que l'on appelle l'économie informelle. Cette économie frôle les 19% du PIB des 27 pays de l'Union européenne, ce qui n'est pas neutre et dans les pays dits « émergents » elle est de l'ordre de 50% et plus. L'objectif fiscal des États est de lutter contre ce phénomène en « légalisant » le travail illégal avec une faible fiscalité. Le résultat le plus marquant est l'Ubérisaton.

     Ubèrisation et la fin du salariat.

     Vous trouverez ci-dessous un extrait d'article qui me semble résumer le fond du problème, même s’il a tendance à sous-estimer l'auto-emploi tout en déclarant que ce phénomène concerne des millions d'emplois aux États-Unis. En France, il ne fait aucun doute que c'est l'État lui-même qui favorise ce type d'emploi notamment par la «Loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques», numéro 2015-990 du 6 août 2015 dite «Loi Macron» (7), mais aussi par de nouvelles mesures fiscales, comme notamment le statut fiscal de «Jeune Entreprise Innovante», créé en 2004 et enfin en 2016 la loi el Khomri.

     Cette dernière dite aussi loi travail vise à stopper le mouvement de requalification des travailleurs indépendants dès lors que le lien de subordination avec le donneur d'ordre était établi (8). Cette remise en cause des requalifications du travailleur le touche dès lors qu’il :

     1. Exerce une activité immatriculée au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux, à un registre des entreprises de transport ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales ;

    2. définit librement ses horaires, ainsi que la durée et sa charge de travail ;

    3. n’a pas de lien d’exclusivité entre la plateforme et le travailleur.

     «Plus intéressant est le démontage par Moody de l’illusion auto-entrepreneuriale, composante à la fois réelle et imaginaire de la précarisation. Celle-ci revêt des formes multiples : embauche par une agence d’intérim, contrat très bref, travail à la demande (on call, le prolétaire attendant d’être convoqué par téléphone), travail à temps partiel accepté faute de mieux, ou statut imposé d’autoentrepreneur, aux États-Unis, l’auto-emploi concerne des millions de prolétaires dans le bâtiment, les taxis et le camionnage, dont 150.000 driver-partners chez le fameux Uber » (9).

     On se tromperait pourtant en y voyant une forme privilégiée du travail de demain.

     « Pour un prix convenu, au volant de sa voiture, A reconduit B chez elle. B se fait ensuite payer par C pour lui couper les cheveux à domicile. Sur Internet, de retour chez lui, C prend sa leçon hebdomadaire de chinois avec A qui le règle en ligne. Cette somme permet à C de payer D pour élaguer sa haie. Chacun est à son tour vendeur et acheteur, mais de quoi ? Ni la voiture, ni les ciseaux, l’ordinateur ou la tronçonneuse n’ont été fabriqués dans un grenier ou un garage (sur un banal établi, ou grâce à une imprimante tridimensionnelle) par A, B, C et D. Ces objets sont sortis d’usines. »

     « On peut regretter l’évolution d’un monde où chacun achète et (se) vend, et juger lamentable que l’autostop d’antan revive comme pratique marchande. Mais le capitalisme excelle à faire commerce de tout, y compris du temps libre ou des aptitudes personnelles individuelles de vous et moi, et il est inévitable que des multinationales comme Uber en profitent pour gagner des milliards en jouant les intermédiaires (10).

     Il n’empêche, A, B, C et D n’ont fait que mettre entre eux en circulation des services monnayés, à partir d’objets préalablement manufacturés. L’ubérisation n’est pas l’avenir du monde ».

     « Quant aux faits, les données réunies par Moody démentent la croyance en une progression de l’auto-emploi ou contrat entre un patron et un salarié formellement indépendant, mais obligé pour vivre de multiplier des boulots courts et mal payés. En réalité, depuis 1990, le nombre de personnes cumulant plusieurs emplois n’a guère augmenté aux États-Unis, et plus de la moitié d’entre elles ont un travail permanent en plus de l’emploi additionnel. L’emploi court et multiple concerne surtout des secteurs avec une longue tradition d’embauche saisonnière, dans des entreprises petites ou grandes, et des horaires tournant autour d’une trentaine d’heures hebdomadaires dans le commerce de détail, la santé, les loisirs… » (Extrait de Working class zero ? Sur la prétendue disparition des ouvriers étasuniens (11)).

     La cocréation un nouveau concept loin d'être neutre.

     Voici un extrait d’article qui résume les objectifs du concept de cocréation d’emploi. « Répondre plus rapidement à près de 1,3 million de questions de clients par an, c'est le défi de Voyages-sncf.com. Après avoir garanti la réponse d'un conseiller en moins de deux heures sur les réseaux sociaux, le site de réservation en ligne vise l'instantanéité. À cet effet, il a délégué la gestion d'une partie de son service consommateur à ses utilisateurs experts. Un pari gagnant : près de 400 clients se mobilisent volontairement et à titre gratuit pour répondre tous les jours aux voyageurs sur le chat communautaire. Cinq d'entre eux ont même intégré la « love team », une cellule de dix salariés chargés d'analyser les verbatims clients et d'améliorer l'expérience utilisateur du site. Cette initiative a valu à Valérie Darmaillacq, directrice performance et relation client de Voyages-sncf.com, le prix du directeur client de l'année 2015 ».

     « PriceMinister, PMU, MAAF, Auchan, Darty, Adidas, Nike, AXA, Decathlon, Airbnb, Lego, mais aussi Alstom dans le BtoB, nombreuses sont les entreprises qui font appel à leurs clients. Pour les unes, il s'agit de gérer leur service après-vente, pour les autres de trouver de nouvelles idées de produits et services ou de les améliorer. La cocréation enrichit le spectre des compétences et des idées, soutient Lidia Boutaghane, consultante en stratégie client et markéting collaboratif pour Client au Coeur. Tout expert dans son domaine a tendance à se couper le champ des possibles, tandis qu'une personne qui n'est pas du métier s'autocensurera moins » (12).

     Ce n'est plus le salariat qu'il faut protéger, mais la personne!

     Le retour à l'idéologie « citoyenne » est récent et pas anodin, nous avons entendu parler de la place du citoyen dans l'entreprise , et ensuite par le truchement de la formation professionnelle d'un droit à la personne (le DIF) puis de la sécurité sociale professionnelle de la CGT (que Emmanuel Valls reprend à son compte) elle aussi attachée à la personne. Les coins pour faire exploser le salariat collectif étaient bien enfoncés, il s'agissait dorénavant de gérer la précarisation inévitable dans la société capitaliste.

     La Loi travail tout comme le rapport Badinter liquide les droits collectifs du travail (conventions collectives) au profit de la « personne », « On caractérisera le rapport comme une tentative pour en finir avec un « code du travail » spécifique et le remplacer par un mixte avec le Code civil, où les contrats commerciaux et les statuts d’indépendants sont mis sur le même plan que l’ex contrat de travail. La «personne» » remplace le salarié. Le salarié est traité comme l’indépendant. Uber peut s’y retrouver, Attali et Macron sont passés par là » (13).

     Il faut voir dans cette démarche juridique, une volonté de gérer un système où la précarité devient incontournable, la revendication d'un revenu de base attachée à la personne va dans ce sens. Ce n'est certes pas un hasard si dès son intronisation à la tête du Medef, Laurence Parisot a donné le ton de la nouvelle période qui s’ouvre ;

    Le 3 septembre 2005, elle déclare sur France inter que «la précarité est une loi de la condition humaine».

     Dès 1995 une réunion de chefs d'État (14) se réunissait à San Francisco, pour annoncer au monde l'arrivée de la société 20/80, c'est à dire une société dans laquelle le travail de 20% de la population mondiale suffira pour soutenir l'appareil économique de la planète. Il restera alors 80% de la population qui s'avérera superflu, ou surnuméraires qu'il faudra «occuper». Z. Brezinski a proposé le « tittytainment », un mélange d’aliment physique et psychologique qui endormirait les masses et contrôlerait sa frustration et ses protestations prévisibles.

     Le revenu de base, (défendu par Benoît Hamon) va dans le sens de ce « tittytainment », la gestion citoyenne de la misère à grande échelle. Ceci devant logiquement s'accompagner, d'un nouveau code, non pas du travail, mais de l'individu en situation de précarité permanente. De plus, le précariat engendre fatalement une poussée de l'économie souterraine venant concurrencer l'économie légale et engendre d'importantes pertes fiscales pour les États (à ce sujet la récente obligation demandée par l'État français d'une carte d'identité pour le secteur du bâtiment (15).

     Pour conclure.

    Le capitalisme étant basé sur l'accumulation de la richesse à un pôle et la pauvreté à l'autre, il serait pure illusion de croire que ce dernier va se priver de poursuivre l'exploitation de l'homme par l'homme et financer le droit à la paresse (16).

    En la circonstance le « revenu universel » ou « de base » est une arnaque qui ne vise qu'à mutualiser la précarisation ambiante, un os que l'on jette au chien pour ne pas qu'il morde.

     Gérard Bad. (26 janvier 2017)

    NOTES

    (1) Le taux de profit est quelque peu différent du taux de plus-value, en ce que le taux de profit se rapporte au capital total ( capital constant + capital variable) alors que le taux de plus-value ne concerne que le capital variable (l' exploitation ouvrière).Voir a ce sujet le T III du capital chap.III relation entre le taux de profit et le taux de plus-value

    (2) Tome III, chap.V, p,97, ed. Moscou

    (3) Amway France est une filiale d’Amway Corporation qui appartient à la holding Alticor. Près de dix mille distributeurs (appelés Entrepreneurs indépendants Amway/EIA) vendent les produits Amway en France métropolitaine et dans les DOM.

    (4) zéro heure. http://spartacus1918.canalblog.com/archives/2016/02/26/33428754.html

    (5) Le taux d' emploi est passé de 77% en 1966 à 53,9% en 2015http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.POP.DPND?view=chart

    (6) OCDE https://data.oecd.org/fr/emp/taux-d-emploi.htm#indicator-chart

    (7) Loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiqueshttps://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_pour_la_croissance,_l%27activité_et_l%27égalité_des_chances_économiques

    (8) De nombreux procès sont en cours, en France ou aux états-Unis visant la requalification.

    (9) ???

    (10) https://ddt21.noblogs.org/?page_id=1260#sdfootnote2sym

    (11) Working class zero ? Sur la prétendue disparition des ouvriers étasunienshttps://ddt21.noblogs.org/?page_id=1260

    (12) Extrait de: Cocréation: quand le client fait votre travail!

    (13) Gérard Filoche (2016) Analyse détaillée des 61 mesures du rapport Badinter. Url

    (14) Mikhaïl Gorbatchev, George Bush, Margaret Thatcher, Vaclav Havel, Bill Gates, Ted Turner, etc..

    (15) carte d'identité pour le secteur du bâtiment http://www.lemoniteur.fr/article/carte-d-identification-obligatoire-des-salaries-du-btp-c-est-parti-31444962

    (16) Ici je fais référence au livre de Paul Lafargue « Le droit à la paresse » le droit à la paressehttps://www.marxists.org/francais/lafargue/works/1880/00/lafargue_18800000.htm

    Tableau 1. Parts de l’économie souterraine dans les PIB des pays de l’Union européenne en 2012 (En % du PIB)

    Allemagne

    13,3

    Espagne

    19,2

    Italie

    21,6

    Portugal

    19,4

    Angleterre

    10,1

    Estonie

    28,2

    Lettonie

    26,1

    Rép.Tchèque

    16,0

    Autriche

    7,6

    Finlande

    13,3

    Lituanie

    28,5

    Roumanie

    29,1

    Belgique

    16,8

    France

    10,8

    Luxembourg

    8,2

    Slovénie

    23,6

    Bulgarie

    31,9

    Grèce

    24,0

    Malte

    25,3

    Slovaquie

    15,5

    Chypre

    25,6

    Hongrie

    22,5

    Pays-Bas

    9,5

    Suède

    14,3

    Danemark

    13,4

    Ireland

    12,7

    Pologne

    24,4

    UE27pays

    18,4

    Source : F. Schneider (2013)