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Ugo Palheta : "Il y a un risque de fascisation accélérée du régime en Italie"
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Partout dans le monde au Brésil, en Italie, en Inde, aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Israël, la tentation de l’extrême droite est de plus en plus présente. Le sociologue, Ugo Palheta, auteur de "La possibilité du fascisme" (Editions La Découverte) est l’invité de #LaMidinale.
VERBATIM
Sur la tentation de l’extrême droite à l’échelle internationale
« Ce n’est plus de l’ordre de la menace parce qu’il y a des pays où l’extrême droite est au pouvoir. L’Italie notamment, on l’évoque moins souvent mais Israël et l’Inde aussi sont dirigés par des gouvernements d’extrême droite. »
« Il y a des spécificités nationales mais au niveau international, il y a une crise d’hégémonie du capitalisme néolibéral qui a déstabilisé les systèmes politiques. Il y a un paradoxe puisque le capitalisme est triomphant mais fragile économiquement du fait de l’instabilité de la finance. Il est instable également et surtout, politiquement. Et cela dans de nombreux pays. »
Sur le gouvernement italien actuel
« Il y a un risque de fascisation accélérée du régime en Italie. […] Les régimes ne deviennent pas fascistes en quelques semaines ou en quelques mois. Cela a été le cas en Allemagne où les Nazis détruisent toute opposition très rapidement mais en Italie cela n’était pas le cas. Mussolini a mis 3 ou 4 années à se débarrasser de toutes oppositions politiques et syndicales constituées. »
Sur les conditions de l’émergence du fascisme
« Dans le fascisme de l’entre-deux guerres, il y a un rôle central joué par la première guerre mondiale dans ce que les historiens ont appelé la brutalisation de la société c’est-à-dire une accoutumance à une certaine forme de violence politique. »
« Aujourd’hui ce qui joue, c’est une crise des capacités des dominants à obtenir le consentement des masses ou des classes populaires et moyennes. »
« Il y a également des formes de durcissement autoritaire qui sont mis en place par les classes dirigeantes elles-mêmes et avant même l’arrivée des fascistes au pouvoir. Cela tend à crédibiliser, à valider les options ultrasécuritaires que défendent les fascistes. »
Sur le rapport capitalisme et fascisme
« Si on veut in fine se débarrasser du poison fasciste, on a besoin d’une rupture avec une société qui produit l’exploitation ou qui produit les inégalités. »
« Si on veut lutter contre le fascisme aujourd’hui, on ne peut pas non plus exiger de tout le monde qu’il soit anticapitaliste dès maintenant. »
Sur les différents mouvements d’extrême droite en Europe
« Ils ne se construisent pas tous sur les mêmes thématiques. En Europe de l’Ouest, c’est l’islamophobie tandis qu’en Europe de l’Est, ça reste l’antisémitisme. »
« Dans certains cas, notamment l’UKIP, c’est une scission de la droite dans un sens souverainiste nationaliste. Dans d’autres cas comme en France, on a des partis qui viennent du fascisme historique. »
« Ils cherchent donc à faire des alliances avec des forces assez diverses. Le jeu étant de ne pas faire d’alliance avec des partis qui ne seraient pas assez respectables dans leurs pays. »
« Le Front National n’avait pas voulu faire d’alliance avec Aube Dorée en Grèce mais d’autres partis d’extrême droite en Europe peuvent avoir le même rapport au front national parce que le front national serait trop sulfureux pour eux. »
Sur Emmanuel Macron et la situation française
« Macron a toutes les chances de devenir plus impopulaire que Hollande. Dans cette situation là où l’instabilité est chronique avec 4 candidats à 20 % aux élections présidentielles, tout devient possible. »
« On n’est plus dans une situation d’alternance tranquille entre une droite complexée (c’est-à-dire le PS) comme dirait Lordon et une droite décomplexée. »
« On ne peut plus prévoir à 5 ans ce qu’il peut se passer et on voit très bien les changements rapides qui peuvent subvenir dans une société, avec la victoire de Trump par exemple ou plus récemment au Brésil avec Bolsonaro. »
« Il y a de quoi avoir peur mais surtout de quoi rentrer en action pour éviter que cette option fasciste soit celle qui triomphe de la crise annoncée. »
Sur la notion de populisme
« Le populisme a permis au FN de se laver des soupçons de collusion avec le fascisme classique. Cela a donné une sorte de crédit populaire au FN, en accolant ce terme au FN on a donné un ancrage que le FN n’avait pas dans les classes populaires. »
« Le FN a une clientèle électorale dans toutes les catégories sociales et les classes dirigeantes mènent elles-mêmes des politiques autoritaires et xénophobes. »
Sur la question migratoire
« Le ralliement d’une partie de la gauche, notamment du PS, à cette idée que l’immigration est un problème qu’il faut résoudre, a joué un rôle crucial dans la montée de l’extrême droite. »