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CGT: le coût du capital ?

économie

Lien publiée le 31 janvier 2014

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http://npa2009.org/content/cgt-le-cout-du-capital

Les politiques d’austérité, la multiplication des plans sociaux et l’offensive tous azimuts en faveur de la diminution du coût du travail en France ont poussé la CGT à mettre en avant le « coût du capital ».

L’objectif est de riposter à la propagande gouvernementale et patronale et de lancer un grand débat national visant à privilégier le travail, la protection sociale aux dépens de la rémunération des actionnaires. Les enjeux de ce débat s’inspirent d’une étude universitaire du laboratoire d’économie de l’université de Lille 1 sur le coût du capital qui ambitionne notamment de « donner une idée claire sur le plan théorique [du] surcoût du capital ».
L’étude suggère en effet de distinguer théoriquement le coût économique du capital dédié au remplacement du capital fixe usé ou déprécié ou à l’investissement en biens de production nouveaux, et le coût financier généré par la distribution des intérêts et des dividendes aux prêteurs et aux actionnaires. Ce coût financier à son tour se diviserait en un « coût légitime », en raison du risque de faillite encouru par le prêteur d’argent, et en un « surcoût » dépourvu de toute justification économique, lequel n’aurait cessé d’augmenter ces trente dernières années.

Une conversion idéologique fatale
Il y aurait donc une rémunération légitime du capital et une rémunération illégitime sur laquelle devrait porter la contestation des travailleurs. Plus que sur le profit globalement et l’impact de la recherche du profit sur l’orientation générale de l’économie, la contestation se focaliserait donc sur le seul « mauvais » profit. 
Les auteurs de cette étude semblent ignorer que l’achat et la vente d’actions sur les marchés boursiers prémunit l’actionnaire de tout risque de faillite de l’entreprise. De plus, rien ne lie l’actionnaire à l’entreprise dont il détient des titres, sinon le droit à une fraction déterminée du profit dégagé par cette entreprise. Le profit ne rémunère que le droit de propriété de l’actionnaire. Cette distinction fausse entre coût et surcoût implique une définition du capital comme facteur de production complémentaire au facteur travail, source d’un revenu propre distinct des salaires.
La CGT opère là une conversion idéologique fatale en se prévalant de la théorie économique néo-classique. Entre les profits bruts et les salaires, il existe une différence de nature et de fonction : si les salaires représentent à la fois du capital investi en main-d’œuvre et le revenu des travailleurs, les profits de leur côté ne représentent que de la valeur produite par le facteur travail appropriée par les différentes factions de la classe capitalistes. Seule la valeur de l’amortissement du capital fixe, comptabilisée à tort dans les profits bruts, se reconvertit a priori en moyens de production.

C’est le profit qu’il faut contester
Sans doute la direction de la CGT voit-elle dans cette conception du capital et de son coût un argument dans la lutte pour la répartition du revenu global et la dénonciation des dividendes. Mais en réclamant un indice du coût du capital pour l’élaboration des politiques publiques, la CGT offre au patronat l’occasion de justifier théoriquement, techniquement, l’appropriation de la totalité de l’excédent produit par les travailleurs au-delà de la reproduction de leurs salaires, dans un contexte où sont révisées constamment à la baisse les conditions de la vente de la force de travail. À travers la dénonciation du surcoût du capital, la CGT blâme les revenus disproportionnés que les actionnaires réclament sous peine de sanctions du marché, alors que leurs exigences ne font qu’exprimer les conditions nouvelles de la concurrence internationale des entreprises. L’investisseur institutionnel ne tient son aplomb éhonté de rien d’autre que de la lutte acharnée des firmes mondialisées pour la compétitivité et la conquête des marchés.
Ce n’est pas le surcoût du capital mais le profit lui-même, comme catégorie économique et comme forme de revenu, qui doit être contesté. « Remettre l’humain au centre de l’économie » suppose avant tout de mettre le travailleur lui-même au centre des décisions relatives aux investissements productifs de la société.

Julien Lumière