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    Chronique de la campagne présidentielle – épisode 10

    Chaque week-end, nous publions une chronique de la campagne présidentielle. En commentant les faits marquants de la campagne, de notre point de vue qui est celui de communistes révolutionnaires ayant décidé de faire campagne pour la victoire de Mélenchon en 2022. Vous pouvez retrouver les précédentes chroniques sur le site de la Tendance Claire

    Au sommaire ce week-end :

    - Mélenchon s’impose comme l’alternative à Macron, Pécresse, Zemmour et Le Pen

    - Qui dit quoi sur les droits de succession

    - Poutou chez Bourdin sur BFM

    - Brèves : Rousseau, Hidalgo, Bolloré, primaire populaire

    Mélenchon s’impose comme l’alternative à Macron, Pécresse, Zemmour et Le Pen

    La dynamique Mélenchon se confirme cette semaine. Mardi, un sondage Elabe le donnait en progression de 3 points (passant de 8 % à 11% - dont 19 % chez les ouvriers) pendant que Jadot baissait de 2 points (à 5%) et Hidalgo plafonnait à 3 %. Dans l’hypothèse d’une candidature unique à gauche, c’est Mélenchon qui arrivait largement en tête pour incarner cette candidature : 33 % contre 21 % pour Taubira, 11 % pour Jadot et 10 % pour Hidalgo.

    Un sondage Cluster17 donne Mélenchon à 12 % (à 4 points du second tour) contre 7 % à Taubira, 5 % à Jadot et 2 % à Hidalgo. Ce sondage montre que Taubira perce chez les cadres supérieurs (12%) alors qu’elle est rejetée par les ouvriers (3%), comme Jadot (3%) ou Hidalgo (1%). Dans l’hypothèse d’une primaire à gauche, c’est ici encore Mélenchon qui arrive largement en tête : 37 % contre 25 % pour Taubira, 16 % pour Jadot et 8 % pour Hidalgo.

    La gauche bourgeoise pensait piéger Mélenchon avec la carte Taubira et la carte « primaire de la gauche ». Mais ces opérations ne fonctionnent pas, du moins pour le moment. Mélenchon progresse au détriment de la gauche bourgeoise, et Taubira ne parvient pas à menacer la domination de Mélenchon à gauche.

    Alors que les questions sanitaires occupent désormais toute la place pour de nombreuses semaines, il est difficile d’anticiper les conséquences sur la dynamique de la campagne. Cela favorise a priori Macron qui a intérêt à une suspension de facto de la campagne, en misant sur un réflexe d’union nationale autour de lui en raison de la situation de crise. Des menaces planent également sur la possibilité même de faire campagne (notamment la tenue de meetings) en janvier et février. La campagne risque d’être réduite au minimum, en se jouant quasi exclusivement sur les plateaux télé, ce qui favorise bien entendu les candidats de la bourgeoisie.

    Qui dit quoi sur les droits de succession

    Les droits de succession n’ont pas bonne presse. Beaucoup ont spontanément à l’esprit qu’il serait injuste que l’État nous empêche de transmettre notre patrimoine à nos enfants, le « fruit de toute une vie de travail ». Pourtant, c’est par l’héritage que les inégalités de patrimoine se perpétuent et s’accentuent. C’est pourquoi il est important d’avoir un impôt progressif sur les successions qui taxent très fortement les héritages des grosses fortunes.

    Un récent rapport du Conseil d’analyse économique – rattaché à Matignon – explique que les inégalités de patrimoine explosent alors que les inégalités de revenu sont contenues. La France serait en passe de redevenir une « société d’héritiers » comme elle l’était avant la première guerre mondiale. La concentration des richesses s’est fortement accentuée ces dernières années : les 1 % les plus riches détenaient 15 % du patrimoine total en 1995 ; ils en détenaient 25 % en 2015. Et la fortune héritée représente 60 % du patrimoine contre 35 % au début des années 1970. Les plus riches utilisent tout un tas d’exemptions, mais aussi le système des donations défiscalisés, pour diminuer le montant réel payé : le 0,1 % le plus riche ne paie que 10 % d’impôt sur les successions alors que le taux marginal est de 45 %…

    La droite et l’extrême-droite proposent d’alléger la fiscalité sur les successions, en facilitant les donations multiples et défiscalisés (ce qui bénéficiera avant tout aux plus fortunés). Le Pen propose que les grands-parents et les parents puissent donner jusqu'à 100.000 euros chacun tous les 10 ans sans payer d’impôts (c’est tous les 15 ans actuellement pour un parents, et le seuil maximal pour échapper à l’impôt est 31 865 € pour les grands parents). Pécresse veut aller encore plus loin, en autoriserisant un don défiscalisé de 100.000 € maximum par les parents et grands-parents (et aussi 50.000 € pour les oncles et tantes) tous les six ans ! Quant à Zemmour, il propose de défiscaliser les dons jusqu'à 200.000 € tous les dix ans pour les parents et grands-parents. Il propose aussi la suppression des droits de succession sur les transmissions d'entreprises familiales.

    Quant à Macron qui se vantait de vouloir lutter contre la « rente » et de récompenser uniquement le « mérite », il a abandonné toute idée de taxer davantage les successions. Pas question de taxer davantage ceux qui ont le mérite d’être « bien né ». Castaner avait tenté timidement de redonner vie à l'idée de taxer plus les héritages en 2018, avant de se faire sévèrement rabrouer par Macron.

    Du côté de la gauche bourgeoise (Hidalgo et Jadot), c’est silence radio. En revanche, le programme de l’Union populaire préconise de « augmenter les droits de succession sur les plus hauts patrimoines en comptabilisant l’ensemble des dons et héritages reçus tout au long de la vie et créer un héritage maximal de 12 millions d’euros (soit 100 fois le patrimoine net médian) ».

    Poutou chez Bourdin sur BFM

    Poutou est passé chez Bourdin mardi 21 décembre. Il a bien articulé la défense de la vaccination et la lutte contre le pass vaccinal. Il a rappelé que les mensonges du gouvernement sont pour beaucoup dans les réticences face au vaccin. Il aurait pu aussi parler de l’importance de la gratuité des masques si la santé passait vraiment avant les profits. Alors que Bourdin a cherché à le piéger en le poussant à condamner les gens qui se fabriquaient des faux pass sanitaires, il aurait pu répondre que si le pass sanitaire n’existait pas (ce qu’on revendique), alors la question ne se poserait pas.

    Interrogé sur la « gauche », Poutou n’a pas distingué la gauche bourgeoise (Hidalgo, Jadot, Taubira…) et la gauche réformiste de Mélenchon, position qui le prive d’un dialogue fructueux avec les travailleurs/ses qui se tournent vers Mélenchon.

    Face à Bourdin qui essayait de justifier les fortunes colossales des miliardaires, Poutou lui a répondu très justement que leur richesse était le résultat d’un vol, et pas la juste rémunération de leur travail ou de leur mérite ! Bourdin a été bien sur offusqué, mais voilà le genre de choses qu’il faut répéter inlassablement : les milliardaires sont des voleurs du travail des autres, à une échelle colossale !

    Brèves

    Sandrine Rousseau a commenté dans le JDD du week-end dernier le choix de son ex directeur de campagne (Thomas Portes) de rejoindre l’Union populaire : « La lutte des classes, le rapport de force au-delà du dialogue social, c’est son corpus. Mais pas vraiment celui de Yannick Jadot ». Ce n’est visiblement pas le sien non plus. Si Rousseau ne rejoint pas l’Union populaire, ce n’est pas par loyauté à l’égard de Jadot. Elle va sur tous les plateaux télé pour expliquer tout le bien qu’elle pense de la candidature de Taubira et fait bien comprendre que Jadot aurait intérêt soit à se retirer, soit à rejouer une primaire avec Taubira.

    Chez Bourdin jeudi 23 décembre, Hidalgo s’est totalement embourbé sur le pass vaccinal. Elle a dit qu’elle était contre, mais qu’en fait elle était pour l’obligation vaccinale… tout en reconnaissant que c’est la même chose. Elle s’est prononcé contre des contrôles dans les entreprises… tout en disant que l’obligation vaccinale doit empêcher les non vaccinés d’avoir une « vie normale ». Hidalgo a beaucoup de mal à cacher qu’elle pense comme Macron sur ce sujet comme sur les autres…

    Bolloré a décidé de vendre toutes ses activités en Afrique (logistique et transport) au groupe italien MSC, dirigé par Aponte, un cousin d’Alexis Kohler, secrétaire général de l’Elysée. Il faut dire que les affaires africaines de Bolloré étaient menacées : il pensait acheter la justice avec un « plaider coupable » et une petite amende pour solde de tout compte sur ses pratiques de corruption de dirigeants africains. Mais il devra affronter un procès public dans quelques mois. Il était peut-être temps de se débarrasser de ses actifs en Afrique… Et c’est le groupe ennemi, MSC, proche de la macronie, qui va acquérir ses actifs pour la modeste somme de 5,7 milliards. La macronie va ainsi pouvoir asseoir son influence en Afrique. Cet argent frais permettra sans doute à Bolloré d’accroître encore ses possessions dans le secteur des médias. Mais pourquoi faire ? Alors que son avenir judicaire est incertain, Bolloré n’est pas forcément en position de force pour affronter Macron.

    Les ex (?) macronistes qui pilotent la primaire populaire ont l’air bien décidé à tenir coûte que coûte leur vote, qui aura lieu a priori entre le 27 janvier et le 30 janvier. Elle pourrait avoir lieu entre Hidalgo, Taubira et quelques faire-valoir (comme l’opportuniste ex rocardien Larrouturou). Cela permettrait d’offrir une porte de sortie honorable à Hidalgo, et de tenter de propulser la candidature de Taubira (qui gagnera très probablement la primaire), qui pourrait être soutenu par Montebourg, qui lui aussi cherche une porte de sortie. Tout ce schmilblick aura du mal à cacher qu’il s’agit simplement de remplacer la candidate du PS. Mais Taubira (dont le directeur officieux de campagne est Christian Paul, ex député PS toujours encarté) peut espérer affaiblir Jadot et débaucher quelques écologistes. Mais elle aura beaucoup plus de mal à convaincre les soutiens de Mélenchon et à lui contester le leadership à gauche.

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