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    Retour sur la crise des années 1970

    Par Gaston Lefranc (14 novembre 2013)
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    Le dossier complet « 1973-2013 : 40 ans de crises capitalistes » peut être consulté sur le site du NPA à l’adresse suivante :
    http://www.npa2009.org/node/39523

    Le premier choc pétrolier de 1973 n’a pas été un coup de tonnerre dans un ciel serein : s’il a amplifié les effets de la crise, il n’explique pas la fin de la croissance rapide des « Trente Glorieuses ». Le retournement des années 1970 (duquel nous ne sommes jamais réellement sortis) ne résulte pas d’un accident de l’histoire, d’un choc « exogène », mais il est le produit du fonctionnement normal du mode de production capitaliste, qui produit la crise comme la nuée porte l’orage.

    Il est fréquent aujourd’hui d’expliquer la forte croissance des années 1950 et 1960 par les vertus du « compromis fordien » : le juste partage de la valeur ajoutée entre capitalistes et travailleurs aurait enclenché un cercle vertueux, où les bons salaires auraient permis d’entretenir une forte demande de biens de consommation, et donc de stimuler les investissements des entreprises pour y faire face. En fait, la croissance « miraculeuse » résulte avant tout de la très forte purge de capital opérée par la crise des années 1930 et la guerre, qui a fait monter le taux de profit à des niveaux record au sortir de la guerre. 

    Cette forte rentabilité du capital est l’explication fondamentale de la forte croissance d’après-guerre. Elle a également permis aux capitalistes de garder pour eux (pour leur consommation et leurs investissements) des profits substantiels malgré les hausses de salaires obtenues par la lutte des travailleurs, et non pas octroyées de bon cœur par les capitalistes pour alimenter la « demande ». Autrement dit, la forte progression des salaires n’est pas due à la forte croissance d’après-guerre, mais la conséquence de la lutte des classes et des marges de manœuvre dont disposaient les capitalistes.

    Les « trente glorieuses », une parenthèse

    Mais cette configuration ne pouvait pas durer éternellement. À partir de 1965 aux États-Unis, le taux de profit a commencé sa baisse qui devait durer, par-delà les variations de court terme, jusqu’au début des années 1980. Cette baisse est l’expression de la « loi fondamentale » de l’économie capitaliste dégagée par Marx dans le Capital : dans la quête du profit maximal, les capitalistes innovent et développent la productivité du travail en remplaçant les travailleurs par des moyens de production. Comme la plus-value est créée par la force de travail (et non par les moyens de production qui ne font que transmettre leur valeur au produit fabriqué), le profit rapporté au capital avancé tend à baisser. Plus les capitalistes accumulent, et plus les effets de la loi de la baisse tendancielle du taux de profit se font sentir. Et c’est ce qu’on a pu observer à partir du milieu des années 1960 aux États-Unis.
    C’est dans ce contexte que le premier « choc pétrolier » est intervenu : entre octobre et décembre 1973, le prix du baril de pétrole est passé de 3 à 10 $. Cela résulte d’une décision politique des pays de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) en réaction au soutien occidental à Israël lors de la guerre du Kippour. Mais c’est aussi une conséquence de la dépréciation du dollar par rapport à l’or, après la fin en 1971 du système monétaire de Bretton Woods (qui donnait un rôle central au dollar). Cette hausse des coûts de production n’a fait qu’exacerber la suraccumulation du capital qui couvait depuis le milieu des années 1960, déclenchant la première grande récession de l’après-guerre.

    Intervention des États

    L’affaiblissement durable de la croissance après le choc pétrolier montre que le mal est profond. Dans certains pays de l’Europe occidentale, un autre facteur vient peser sur la rentabilité du capital : le développement des luttes ouvrières (particulièrement en Italie) fait baisser le taux d’exploitation du prolétariat. Les capitalistes tentent de réagir en augmentant les prix, alimentant une spirale inflationniste déstabilisatrice. Les déficits publics se creusent en raison de la hausse des dépenses sociales (notamment l’indemnisation des chômeurs de plus en plus nombreux) et des subventions publiques au patronat pour compenser la chute du taux de profit. Contrairement à la crise des années 1930, les États vont intervenir pour empêcher les faillites des grands trusts capitalistes : cela permettra d’éviter un effondrement économique mais la contrepartie sera d’empêcher la purge du capital excédentaire nécessaire à une véritable sortie de crise. D’où le marasme économique persistant, sur fond de croissance faible et de chômage élevé, mais « sous contrôle ».
    C’est dans ce contexte que se produit le second choc pétrolier de 1979, qui déclenche une récession encore plus forte que celle de 1974 et fait plonger le taux de profit encore plus bas. Ceci va entraîner une réaction très forte, à l’échelle planétaire, des capitalistes pour augmenter le taux d’exploitation des travailleurs : ce sera l’ouverture de la période dite « néolibérale » du capitalisme.

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