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Sur le meeting de la Bourse du travail du 26 juin organisé par Ruffin contre les ordonnances de Macron : des bonnes intentions mais aucune stratégie pour gagner
Le nouveau député Ruffin a organisé avec son ami Emmanuel Vire (Snj-Cgt) un meeting « Des ordonnances, oui, mais contre la finance » lundi 26 juin à la Bourse du travail de Paris. La grande salle était pleine à craquer pour écouter une série de prises de paroles politiques et syndicales.
Les gens présents étaient contents d'être là, enthousiastes. La réunion a été introduite par une fanfare militante. Après une brève introduction de Ruffin, Emmanuel Vire (Snj-Cgt) a évoqué les attaques sans précédent contre les journalistes par le nouveau pouvoir (poursuites contre des journalistes qui ont sorti des infos sur la future loi travail, censure à l'Afp, etc.). Il a appelé à participer à la manifestation du samedi 1er juillet contre l'état d'urgence permanent : http://tendanceclaire.org/breve.php?id=24318
Eric Coquerel, nouveau député de la France insoumise, a indiqué qu'il n'y avait pas de majorité politique, dans la population, pour approuver la nouvelle loi travail. Il a invité chacun à se mobiliser pendant l'été pour expliquer et convaincre de la nocivité de la future loi, et a invité à aller au rassemblement intersyndical du lendemain devant l'assemblée : http://tendanceclaire.org/breve.php?id=24305 ; il a affirmé que la mobilisation sociale pouvait gagner, sans en dire davantage sur les conditions d'une hypothétique victoire...
Jean-Baptiste Eyraud (Droit au logement) a indiqué qu'une loi logement était en préparation, et que celle-ci prévoyait de précariser les locataires, en instaurant un « bail à l'essai ». Le logement social est aussi dans le collimateur, avec des risques de dérégulation des loyers.
André Chassaigne, député PCF, nous a servi un discours démago et hypocrite « plus unitaire que moi tu meurs ». Mais il a justifié le fait que le PCF faisait un groupe avec des députés ultra-marins anti-mariage pour tous et pro-Macron par « on ne pouvait pas les abandonner ». Autrement, ils nous ont aidé il y a 5 ans à maintenir notre groupe, alors on leur rend la monnaie de la pièce ! Comme c'est touchant...
Annie, auxiliaire de vie de Picardie, amie de Ruffin, nous a raconté les menaces qui touchent sa profession, et elle a mis en avant la revendication très juste d'un grand service public de la dépendance, avec du personnel fonctionnaire, alors que les auxiliaires de vie sont plus que précarisées.
Loïc Canitrot (Intermittent, compagnie Jolie Môme) a évoqué le « Front social ». C'est le seul à avoir mentionné le Front social, mais des flyers ont été distribués à l'entrée pour faire connaître le Front social. Il a aussi demandé aux députés de faire quelque chose pour Jean-Marc Rouillan, scandaleusement condamné à de la prison ferme pour un délit d'opinion.
François Ruffin a indiqué qu'il allait profiter de sa casquette de député pour visiter l'hôpital psy d'Amiens, qui est en décrépitude. Il a théorisé le nouveau lien qui devrait selon lui unir les députés et la population, les uns s'appuyant sur les autres et réciproquement. Il a insisté à juste titre sur la nécessité de repenser la façon de militer, en s'appuyant sur sa remarquable campagne. Il a évoqué que l'enjeu était de fédérer les différentes couches populaires, les travailleurs qui vivent à la campagne, les jeunes des cités, etc.
Clémentine Autain, nouvelle députée Ensemble/France insoumise a conclu dans le même sens, insistant sur la nécessité d'un nouveau rapport aux institutions, et évoquant son projet d'un nouveau pôle universitaire dans le 93.
Dans une chaleur étouffante, il soufflait un bol d'air frais dans la grande salle de la Bourse du travail. Mais les différentes interventions n'ont au final pas abordé la question centrale : comment faire pour empêcher Macron de faire passer ses ordonnances ? Avant que Ruffin conclut en disant « rendez-vous début septembre pour un nouveau meeting » (!), une syndicaliste s'est imposée et a fait une magnifique intervention : il faut préparer une vraie mobilisation, c'est-à-dire une grève, avec occupation des lieux de travail. Cette intervention a été ovationnée, et Ruffin a lamentablement botté en touche : « c'est pas cet été qu'on occupera » ; « on doit d'abord argumenter, lever une espérance ».
Merci à cette syndicaliste d'avoir osé prendre la parole (puisque bien évidemment nous n'étions invités qu'à écouter nos nouveaux députés...) pour évoquer l'essentiel, qui avait mis sous le boisseau. Car pour gagner, il faudra une grève générale qui bloque l'économie, et donc il faudrait discuter de sa préparation. Mais ce n'était pas à l'ordre du jour du meeting. Les députés PCF et France insoumise font le choix de soutenir les directions syndicales confédérales et de ne pas soutenir le « Front social » qui cherche à construire une véritable mobilisation.
La CGT a d'ores et déjà programmé une « journée d'action et de grève » le 12 septembre contre le nouveau projet de loi travail. C'est reparti pour une nouvelle série de journées d'action pour nous épuiser et nous faire perdre ? Il faut aujourd'hui être clair : nous ne voulons pas de journées d'action éparpillées. Il va falloir se battre, au sein du Front social, pour forcer les directions syndicales à proposer un véritable plan de mobilisation, avec l'objectif de la grève générale, et pas quelques journées d'action. Et il va falloir aussi mettre la pression sur les députés France insoumise et PCF pour qu'ils appuient le Front social. Après la défaite sur la première loi travail au printemps 2016, les choses seront encore plus dures, et pour faire reculer le gouvernement sur ce nouveau projet de loi, il va nous falloir bloquer l’économie, seul moyen de faire plier les gouvernant et les possédants.
Il faut aujourd'hui non seulement argumenter contre la nouvelle travail, mais aussi discuter des conditions de la victoire : car sans perspective de victoire, les travailleurs ne se mobiliseront pas, même s'ils sont convaincus de la nocivité de la loi. Il faut aujourd'hui une intervention concertée des militants lutte de classe et anticapitalistes pour construire la grève générale que les réformistes ne veulent pas préparer, englués qu'ils sont dans le dialogue social pour les uns, dans les beaux discours et le soutien aux confédérations pour les autres. Il faut construire le Front social comme un outil au service du Front unique le plus large, culminant dans la grève générale, pour faire plier Macron. Par ailleurs, au sein de nos différentes interventions, dans les quartiers, sur les lieux de travail, dans le front social, nous devons aussi expliquer que les divers attaques que ce nouveau gouvernement prépare, sur le code du travail, sur les retraites, sur la santé, sont des attaques nécessaires pour le capitalisme et d’autant plus pour un capitalisme en crise profonde. Il nous faut donc pour sortir de la seule logique de résistance un programme révolutionnaire avec une perspective de société communiste, sans exploitation, sans classe, sans oppression.
Gaston Lefranc