Agenda militant
Ailleurs sur le Web
- Cuba : le mouvement du social (27/12)
- Procès de Georges Ibrahim Abdallah : la victoire est-elle proche ? (26/12)
- Île Maurice : la volonté de changement (26/12)
- Le socialisme dans un seul pays (26/12)
- Quel avenir pour la France insoumise ? (26/12)
- Les changements tectoniques dans les relations mondiales provoquent des explosions volcaniques (26/12)
- Un nouveau château de cartes (26/12)
- Le syndicalisme de Charles Piaget (26/12)
- Nabil Salih, Retour à Bagdad (26/12)
- La Syrie est-elle entre les mains d’Erdoğan ? (26/12)
- L’UE encourage l’exploitation du lithium en Serbie avec un grand cynisme (26/12)
- Le contrôle territorial d’Israël s’étend-il vers la Syrie ? (26/12)
- Scrutin TPE – Très Petite Élection (26/12)
- Une étudiante ingénieure déchire son diplôme en pleine cérémonie en protestation contre l’industrie d’armement (26/12)
- Des étudiants en lutte pour la paix : blocage historique à Tolbiac Paris I (24/12)
- Aurélie Trouvé sur RTL ce lundi (23/12)
- RÉVÉLATIONS DE MARC ENDEWELD SUR MACRON ET SON ENTOURAGE (23/12)
- La Grèce sous Kyriakos Mitsotakis: de la frustration sociale à la crise politique (23/12)
- Syrie : “Entre discours réformiste et répression réelle : Comment HTS a géré les manifestations à Idlib” (23/12)
- Contre les GAFAM, redécouvrir Jacques Ellul (23/12)
- Dialogue avec Benjamin Lemoine: les fonds vautours à l’assaut de la dette mondiale (23/12)
- Le cyclone Chido et la responsabilité de l’impérialisme français (22/12)
- Aurélie Trouvé sur France Info (22/12)
- Entretien avec Aymeric Caron - Palestine, antispécisme et journalisme (22/12)
- SNCF. Grèves partielles, unité de façade... : après l’échec du 12 décembre, tirer les bilans stratégiques (21/12)
Contre les attaques de la classe dominante pour diviser les travailleurs français et étrangers! Mobilisons-nous contre le projet de loi d’interdiction du voile intégral !
Ce que signifie l’essor de l’islam dans les quartiers populaires en France
Depuis des années, les conditions de vie des populations immigrées ou d’origine immigrée ne cessent de se dégrader. Les promesses de la politique d’intégration ont fait long feu. Si la bourgeoisie cherche à promouvoir l’accès à l’élite d’une minuscule fraction des populations d’origine étrangère (via différents mécanismes de « discrimination positive »), l’immense majorité de ces populations vit dans la misère, et subit de surcroît le racisme institutionnel et une répression croissante au moindre signe de révolte.
Depuis les années 1980, le discrédit profond de la gauche institutionnelle a rejailli sur l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier. Cette situation a offert un terrain propice au développement de la religiosité et aussi de l’Islam politique, au sein de la jeunesse populaire d’origine immigrée. Un élément symbolique de cette pénétration est la conversion à l’islam de Toumi Djaïdja, leader de la marche des jeunes Beurs de 1983.
L’engouement pour l’islam a un double sens :
- D’une part, il s’inscrit dans la quête générale de sens face au rouleau compresseur capitaliste (qui tend à réduire l’ensemble des liens sociaux aux rapports médiatisés par l’argent) et à l’absence d’alternative politique crédible. Cette quête ne se manifeste pas seulement par un renouveau religieux, mais aussi et surtout par d’autres symptômes : la mode des livres ésotériques, ou les ouvrages et pratiques centrés sur la connaissance et le développement personnels, particulièrement « à la mode » parmi les classes moyennes athées ou non pratiquantes. Alors que les pratiques religieuses s’inscrivent dans un cadre communautaire, ces nouvelles aliénations spirituelles prennent corps sur le délitement des liens sociaux, sans viser la construction de nouvelles communautés.
- D’autre part, il est le moyen par lequel la jeunesse populaire d’origine immigrée manifeste sa défiance à l’égard du modèle impérialiste occidental ou sa réaction aux stigmatisations racistes. L’adhésion à l’islam se pare alors d’oripeaux « anti-impérialistes », en fait anti-américains ou anti-occidentaux, et est associée à la solidarité avec les Palestiniens. Parmi les plus conscients politiquement, le tournant vers la religion va de pair avec l’hostilité envers les dirigeants impérialistes et leurs affidés dans les pays arabo-musulmans.
En outre, le renforcement du poids de l’islam ne peut qu’accentuer l’oppression que subissent les femmes. L’extension du port du foulard islamique en est une manifestation, quoi qu’en disent les relativistes qui prétendent qu’il relève d’un libre choix aussi anodin qu’un autre. Le problème n’est bien évidemment pas le port du foulard en tant que tel, mais le contexte familial (et de voisinage) oppressif sous-jacent, qui amène de plus en plus de jeunes femmes à faire le « choix »de porter un foulard pour affirmer leur identité religieuse, leur appartenance communautaire (contre le racisme et les discriminations) et/ou satisfaire aux pressions de l’entourage.
Au nom de la « laïcité » et de la défense des droits des femmes, fin 2003, le gouvernement Chirac essaye de reconstruire une union nationale et diviser les travailleurs en stigmatisant la population arabo-musulmane en interdisant le port du foulard à l’école
Si les gouvernements bourgeois cherchent à organiser et renforcer un « islam républicain », ils communiquent sur le danger de l’islam radical, et par là même, pointent du doigt l’ensemble de la population arabo-musulmane, suspectée de basculer ou de pouvoir basculer dans la barbarie obscurantiste.
Fin 2003, à quelques mois des élections régionales (tiens donc...), le gouvernement s’est appuyé sur l’exclusion de deux jeunes filles portant un foulard du lycée H. Wallon d’Aubervilliers (avec l’appui de professeurs de LO et de la LCR) pour lancer une campagne hystérique qui a abouti à la loi sur l’interdiction des signes religieux « ostensibles » des élèves à l’école. Alors que les gouvernements piétinent allègrement la laïcité, c’est-à-dire la séparation de l’État et de la religion (en organisant les différents cultes, en finançant les écoles privées, etc.), Chirac a osé se revendiquer de la « laïcité » pour empêcher les élèves d’afficher une croyance religieuse. Alors qu’il s’agissait prétendument de contribuer à l’émancipation des jeunes filles portant un foulard, cette loi n’a fait qu’ajouter une oppression étatique à l’oppression que subissent généralement ces jeunes filles dans leurs familles. On ne lutte pas contre la misère religieuse en humiliant celles qu’on prétend libérer, mais en s’attaquant aux racines sociales de cette aliénation. Les marxistes révolutionnaires authentiques ne pouvaient que s’opposer de toute leur force à cette loi, en cherchant à organiser l’ensemble des travailleurs – femmes portant un foulard comprises – contre l’État bourgeois. C’est une position diamétralement opposée qu’avait prise LO, en apportant son soutien explicite à la décision annoncée d’interdire le foulard à l’école, en la faisant même passer pour une victoire des enseignants et des femmes ! On pouvait lire ainsi dans le numéro du 19 décembre 2003, en page éditoriale : la décision du président « n’aurait sans doute pas été possible si des enseignants n’avaient pas refusé de faire cours à des jeunes filles voilées, s’ils ne s’étaient pas mobilisés pour refuser le port du voile, pas seulement au nom du respect de la laïcité, mais aussi et surtout au nom de la défense des droits des femmes » !
En 2010, la bourgeoisie, inquiète de la résistance des travailleurs, tente à nouveau de détourner leur attention des coups du patronat et de les diviser avec son projet d’interdiction du voile intégral dans l’espace public
Aujourd’hui, à quelques mois des élections régionales, le gouvernement a déclaré la guerre au voile intégral (burqa ou niqab), qui est porté par seulement un millier de femmes en France. Il s’appuie sur les travaux d’une commission parlementaire allant du stalinien Gérin (PCF) à l’extrême droite de l’UMP (Raoult), qui prône unanimement l’interdiction du port de la burqa, au moins dans certains lieux publics. Un beau consensus républicain pour s’attaquer à la prétendue menace salafiste au nom de la sécurité publique (car tout le monde doit découvrir son visage devant les flics de Sarkozy) et des droits de la femme ! Certains députés, comme le chef de file des députés UMP (Jean-François Copé) souhaitent même aller plus loin en interdisant le port du voile intégral sur tout le territoire. En attendant d’aller plus loin et d’interdire le port du hijab. Alors qu’il y a environ 5 millions de musulmans en France, qui sont sur-représentés dans les effectifs du prolétariat industriel, la bourgeoisie a tout intérêt à mener une campagne anti-musulmans afin d’empêcher l’unité du prolétariat contre le capital.
Dans un premier temps1, la direction de notre parti n’a pas apprécié correctement la gravité de cette attaque, analysant simplement ce projet de loi comme un détournement d’attention qui « ne règlera rien » et « sera vécue comme discriminatoire ». La motion adoptée par le CPN le 31 janvier2 est en revanche plus satisfaisante : elle exprime notre « opposition totale » au projet de loi, et notre détermination à lutter pour empêcher son adoption. Cependant, elle ne va pas, malheureusement, jusqu’à en appeler à la mobilisation contre ce projet de loi.
Dans le prolongement de son positionnement sur l’interdiction du foulard musulman à l’école, LO appuie implicitement le projet du gouvernement. Puisque la burqa est contraire à « la dignité de l’être humain », LO s’en remet à l’État pour émanciper de force les femmes portant le voile intégral : rien de tel que l’utilisation de l’appareil répressif d’État pour en finir avec l’obscurantisme religieux ! LO se positionne ainsi du côté de l’État bourgeois face aux femmes opprimées qui subiront en plus, soit la répression de l’État bourgeois, soit l’enfermement à domicile. Quelle grande victoire pour l’émancipation des femmes !
Dans Informations ouvrières, le journal du POI, un article3 dénonce l’hypocrisie des parlementaires qui prétendent vouloir défendre les droits des femmes, alors que toute leur politique démontre le contraire. Mais au lieu de mener un combat contre les lois liberticides, l’article en appelle à la bonne application des lois existantes : « Pourquoi donc une loi ? Toute personne doit répondre quand un agent assermenté lui demande de décliner son identité : permis de conduire, carte d’identité, identification des mères qui viennent à l’école… C’est la loi. Elle est valable pour la femme voilée, le motard qui porte le casque intégral ou le Savoyard qui traverse les frimas avec son passe-montagne ! » Autrement dit, pour le POI, il est normal que les flics puissent nous contrôler quand ils le désirent, que chacun soit identifiable afin de prouver qu’il ne constitue par une menace… Pour le POI, parti de l’ordre républicain, le respect des lois (y compris les plus liberticides) va donc désormais de soi.
Les marxistes ne doivent pas relativiser l’oppression des femmes emprisonnées dans la burqa. C’est pourquoi nous devons, non pas en appeler à l’État bourgeois pour qu’il accentue leur oppression (en les empêchant de fait de sortir de chez elles), mais nous adresser à elles, comme à tous les opprimés, sans faire d’un préalable qu’elles se « dévoilent ». C’est en leur permettant de participer à un combat de classe commun que nous leur permettrons de s’émanciper du carcan familial et religieux qui les opprime. Le mouvement ouvrier doit en outre apporter sa protection, ainsi que le soutien matériel et moral nécessaire aux femmes qui souhaitent s’échapper de la prison dans laquelle elles sont enfermées.
Retrait du projet de loi d’interdiction du voile intégral !
Pour que le NPA propose l’organisation d’une manifestation nationale à l’ensemble des organisations du mouvement ouvrier !
1 Communiqué du 26 janvier : https://www.npa2009.org/content/communiqu%C3%A9-du-npa-non-%C3%A0-une-loi-sur-la-burqua
2 Cf. http://npaloirenord.over-blog.com/article-infos-du-ce-du-2-fevrier-2010-n-4-special-cpn-44158115.html
3 « L’oppression des femmes ? Parlons-en ! », http://www.parti-ouvrier-independant.com/spip/spip.php?article741