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    Après les élections législatives, la nécessité d’affronter Macron et son gouvernement

    La macronie affaiblie

    Macron n’est pas parvenu à élargir sa majorité relative à l’Assemblée. Aucun accord politique n’a pu être conclu, notamment avec LR. Et il a même été incapable de débaucher une « pointure » de LR, de la gauche social-libérale ou de la « société civile ». Du coup, d’anciennes figures discréditées de la macronie (comme Schiappa), écartées du gouvernement après la présidentielle, ont fait leur retour, symbolisant le rabougrissement de la macronie à son noyau dur. Comment pourront-ils tenir cinq ans après un si mauvais départ ? Surtout que l’état pourrissant du capitalisme annonce de violentes contre-réformes contre les travailleurs/ses pour défendre les profits des patrons.

    La première ministre Elisabeth Borne s’est présentée mercredi 6 juillet pour son discours de politique générale. D’emblée, elle a refusé de demander la confiance au Parlement, une première depuis Mitterrand. La macronie craignait moins la chute du gouvernement que le fait de survivre grâce au vote des députés du RN qui avaient annoncé leur intention de s’abstenir ! Après les magouilles entre la macronie et l’extrême droite pour permettre au RN de gagner des postes à l’Assemblée (notamment deux postes de vice-président), cela aurait été très embarrassant. Le discours de Borne a été incroyablement terne et vide, montrant que le gouvernement n’a strictement rien à vendre d’enthousiasmant pour la population : juste des paroles creuses et des éléments de langage fournis par des cabinets de conseil. Borne a aussi essayé de nous apitoyer sur son parcours de pupille de la nation, orpheline de père.

    On ne retiendra qu’une annonce positive : la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé (AAH), à laquelle s’était jusque là opposée la macronie.

    Quant à la « nationalisation » d’EDF (l’État possède déjà 84 % des actions), il ne faut pas être dupe de sa signification. Alors qu’EDF est en grosse difficulté (en raison du bouclier tarifaire et parce qu’elle doit acheter à un prix très élevé de l’électricité pour la fournir à bas prix à ses concurrents), la Bourse a salué cette « nationalisation » et le cours d’EDF s’est envolé : autrement dit, l’État va acheter très cher les actions, le coût étant estimé à 7 milliards. En outre, cette « nationalisation » est le prélude à un démantèlement d’EDF : même si le projet « Hercule » a été abandonné, le gouvernement n’a pas abandonné son idée de démembrer EDF avec un pôle public (nucléaire, barrages…) et le reste, rentable, vendu au privé (commercialisation, énergies renouvelables…).

    Enfin, la seule véritable bonne nouvelle annoncée par Borne est une fois de plus pour les patrons : alors qu’il était prévu de baisser progressivement les impôts de production de 7 milliards (après une baisse de 10 Mds en 2021), Borne a annoncé la suppression pure et simple de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée) en 2023, soit un cadeau de 8 Mds pour les patrons.

    Un projet de loi sur le pouvoir d’achat… qui fera plonger le pouvoir d’achat des travailleurs/se-s

    Le gouvernement est attendu sur son projet de loi sur le pouvoir d’achat, dont nous connaissons désormais les grandes lignes :

    - hausse du point d’indice de la fonction publique de 3,5 %, c’est-à-dire bien en-deça du taux d’inflation actuel (+6,5 % en juin sur un an), et encore davatange du taux d’inflation futur qui devrait continuer à grimper dans les prochains mois. Autrement dit, les fonctionnaires vont continuer à perdre du pouvoir d’achat, alors que la valeur réelle du point d’indice (corrigé de l’inflation) a déjà baissé d’environ 20 % depuis le début des années 2000. Le gouvernement communique sur le coût exorbitant (7,5 Mds) de cette hausse « historique » du point d’indice de 3,5 %, mai il ment une fois de plus, en ne tenant pas compte des rentrées fiscales que cette hausse entraînera (via les recettes de TVA ou d’impôt sur le revenu).

    - revalorisation des prestations sociales (notamment les retraites du régime de base) de 4 %. Là aussi, c’est moins que l’inflation. Auparavant, le patronat et la CFDT s’étaient entendus pour augmenter de seulement 2,9 % le montant des allocations chômage de Pôle emploi.

    - mise en place d’une prime carburants pour 11 millions de foyers qui se substituera à la prise en charge de 18 centimes par litre d’essence par l’État. Environ 11 millions de foyers modestes toucheront une prime de 100 à 200 € (jusqu’à 300 € pour les gros rouleurs). Le coût de cette mesure sera d’au maximum 2 Mds alors que la prise en charge de 18 centimes coûtait environ 800 millions par mois à l’État, soit environ 10 Mds sur un an. Autrement dit, le gouvernement allège considérablement son effort pour prendre en charge une partie du coût des carburants…

    - suppression de la redevance audiovisuelle : le gouvernement organise la paupérisation de l’audiovisuel public, prélude à sa privatisation. On connaît la stratégie : rendre l’audiovisuel de moins en moins attractif pour faire accepter sa liquidation. Malgré une grève bien suivie à Radio France le 28 juin, Borne ne cède rien. L’an prochain, la direction de France télévision annonce la suppression des journaux télévisés nationaux (les moins pourris des grandes chaînes) de France 3. Des émissions emblématiques sont attaquées, comme l’éducative « Des chiffres et des lettres » (diffusée quotidiennement depuis 1965, elle serait releguée au week-end avant d’être supprimée). Des émissions un peu trop critiques (comme « Une heure en séries ») sont supprimées sur France inter alors qu’elles ont de très bonnes audiences. C’est une véritable politique de casse de l’audiovisuel public est qui méthodiquement organisée.

    - « aide exceptionnelle » (ex-« chèque alimentaire ») de 100 € par foyer et 50 € par enfant concernerait environ 14 millions de personnes vivant dans des ménages modestes.

    - triplement de la prime Macron à 6000 € : loin d’être un cadeau pour les travailleurs/se-s, c’est une attaque contre le salaire socialisé. En effet, le mécanisme de la prime Macron permet aux patrons de verser une prime (si ils le souhaitent), au lieu d’augmenter les salaires, sans verser un euro de cotisations !

    - limitation de la hausse des loyers à 3,5 %, qui est présentée comme un compromis entre les intérêts des locataires et ceux des propriétaires. C’est une façon de parler : la très grande majorité des propriétaires ne possèdent que leur propre logement. En revanche, 3,5 % des ménages possèdent la moitié des logements mis en location : ce sont ces intérêts-là que le gouvernement a cherché à préserver, au détriment des locataires.

    Le gouvernement prétend donc faire un gros effort pour les ménages puisqu’il estime le coût de ses mesures à plus de 20 Mds. En réalité, ces mesures sont cosmétiques et ponctuelles, et elles ne permettront pas d’empêcher la baisse du pouvoir d’achat des travailleur/ses cette année. L’Insee anticipe une baisse moyenne de 1 %, sans doute beaucoup plus pour certaines catégories. Si le gouvernement fait quelques petits chèques pour les travailleurs/ses, il continue à prendre des mesures structurelles pour le grand capital, comme la baisse des impôts de production. Il peut compter sur différentes institutions de l’appareil d’État (comme la Cour des Comptes ou la Banque de France) pour mettre en garde contre trop de générosité pour les plus pauvres. Le chiffon rouge de la dette est également agité, puisque les taux d’intérêt remontent sur les marchés. En 2022, la charge de la dette devrait augmenter de 17 Mds. Les marchés financiers peuvent ainsi faire pression à leur guise sur les politiques publiques, avec la complicité des gouvernements de la bourgeoisie.

    Le Rassemblement national, une opposition de pacotille en quête de respectabilité

    Le RN cherche à se distinguer de la NUPES par le caractère « constructif » et « responsable » de son opposition à Macron. Concrètement, le RN a affiché son intention de refuser de voter contre la confiance au gouvernement (si Borne le demandait) et de refuser de s’associer à la motion de censure présentée par la NUPES (et qui sera soumise au vote lundi 11 juillet).

    Le RN assume donc sa volonté de ne pas faire tomber le gouvernement. Prétexte avancé : cela retarderait la mise en place des mesures « pouvoir d’achat » du gouvernement. Mais le RN affiche en réalité une complicité avec le gouvernement face aux « irresponsables » de la NUPES. Des députés RN ont même été jusqu’à applaudir Borne, notamment lorsqu’elle a lancé : « Honte à ceux qui attaquent systématiquement nos policiers et nos gendarmes ». Bref, une unité naturelle se constitue entre les défenseurs de l’ordre bourgeois face aux « gauchistes » et aux « zadistes » de la NUPES.

    Si le RN risque de décevoir une partie de son électorat populaire, il cherche à s’incruster dans l’appareil d’État pour y gagner des postes et des moyens. Il tente de présenter un visage « raisonnable » pour apparaître comme un « parti de gouvernement » aspirant à exercer le pouvoir à brève échéance. Face à cette banalisation, il y a besoin de renforcer un « bloc populaire » capable de convaincre les catégories populaires autour d’un projet de rupture avec le système.

    Les grèves pour les hausses de salaires se multiplient

    Alors que l’inflation ne cesse de grimper, les grèves se multiplient pour exiger des hausses de salaires pour au moins compenser la hausse des prix. Alors que la bourgeoisie tente de nous faire croire que nous sommes en quasi plein-emploi, que les patrons peinent à recruter, la réalité est toute autre : les patrons se sentent en position de force pour imposer des baisses de salaire réel. Dans ce contexte, de nombreux conflits surgissent, y compris dans de grandes entreprises comme la SNCF ou Aéroport de Paris.

    A la SNCF, la grève du mercredi 6 juillet a été bien suivie, avec plus de 20 % de grévistes dans l’ensemble de la SNCF, et plus de 40 % chez les conducteurs. Alors que l’intersyndicale exigeait 6 % de hausse générale et menaçait de nouvelles journées de grève lors des week-end de grands départs en vacances, la direction a lâché du lest : une augmentation générale de 1,4 % accompagnée d’une prime de 400 € pour tous, ainsi qu’une hausse de certaines indemnités (heures de nuit, dimanche…). Au total, la direction de la SNCF évoque une hausse médiane de 3,1 %, avec 3,7 % de hausse pour les petits salaires et 2,2 % pour les cadres. On est loin des 6 %, et surtout la direction préfère verser des primes que d’augmenter les salaires. Malheureusement, hormis SUD, les syndicats ont décidé de s’en satisfaire pour le moment.

    A Aéroport de Paris, l’intersyndicale revendiquait 6 % de hausse générale, alors que les salaires avaient baissé de 5 % l’an dernier. Après plusieurs journées de grève, un accord a été trouvé ce vendredi : 3 % de hausse générale plus des mesures spécifiques, comme pour les pompiers d’ADP qui bénéficient du passage d’un échelon et d’une prime de 200 €.

    Mélenchon propose une « grande marche » contre la vie chère en septembre et l’organisation d’AG locales de la NUPES

    Mardi 5 juillet, Mélenchon a organisé une longue conférence dans les locaux du POI, multipliant les clins d’oeil complices à l’organisation lambertiste. Après avoir analysé la séquence électorale des législatives, il a dressé un bilan positif de la NUPES et affiché son objectif de nouvelles élections au plus vite. Il a formulé en outre deux propositions :

    - organiser des AG locales (par circonscription) de la NUPES ;

    - organiser une grande marche contre la vie chère en septembre afin de centraliser le combat contre le gouvernement.

    Face à la passivité des directions syndicales, cette proposition de « grande marche » pour lancer la rentrée sociale de septembre est une opportunité à saisir pour construire l’unité de notre classe face à la bourgeoisie et son gouvernement. Une grande marche de plusieurs centaines de milliers de travailleur/se-s permettrait de donner confiance au prolétariat et de servir de point d’appui à des grèves puissantes face à la baisse du niveau de vie et face aux contre-réformes qui s’annoncent très violentes. Il faut donc dès aujourd’hui populariser cette initiative, en donner un contenu de classe, et ouvrir la perspective d’un grand mouvement, d’une grève générale se fixant pour objectif de faire tomber le gouvernement et d’imposer la satisfaction des revendications essentielles de notre classe. Il faudra pour cela s’affronter aux bureaucraties syndicales et aux sectaires de toute nature.

    En revanche, nous pensons qu’il faudrait tirer un bilan sérieux de la NUPES (ce que nous avons commencé à faire ici : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1817) et en tirer les conséquences : au lieu d’essayer de faire vivre la NUPES à un échelon local, il faudrait une initiative forte pour construire un grand parti ouvrier et populaire, démocratique et pluraliste sur la base du score de Mélenchon à la présidentielle. L’alliance avec des partis bourgeois comme le PS et les Verts ne suscitera aucun enthousiasme chez les exploité.e.s et les opprimé.e.s. Elle ne pourra que mener à des renoncements. Néanmois, nous devons nous saisir de tous les cadres de discussion et d’action, afin d’y porter la nécessité d’un grand parti de notre classe que les communistes révolutionnaires devraient construire en y défendant en toute transparence leur orientation.

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