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Orange / France Télécom : Quand le « harcèlement moral » désigne le rouleau compresseur capitaliste qui écrase des vies.
Enfin ! Après 7 ans d’attente, Didier Lombard le PDG d’Orange, (Entreprise privée issue du démantèlement du service public des télécommunications) et quelques-uns de ses porte-flingue vont être jugés pour « harcèlement moral ». On peut s’étonner de cette qualification très « clinique » alors que ces individus en costard cravate, employant des techniques managériales d’une cruauté inouïe, ont, entre autres dégâts, poussé une soixantaine de salariés au suicide entre 2008 et 2009.
Cette affaire constitue un cas d’école sur les ravages du capitalisme sur lequel il convient de s’appesantir.
Comment, après les destructions de la guerre, dans une France exsangue, est-on passé de la création d’industries innovantes dans des secteurs clés et de services publics performants bénéficiant à toutes et tous, à leur sacrifice systématique sur l’autel du profit maximum ? Tout ceci bien sur, au grand bénéfice de quelques capitaines d’industrie soutenus par des politiques sans foi ni loi de tous bords.
A la fin de la dernière guerre mondiale, la bourgeoisie française a été obligée de faire son deuil du confortable marché intérieur constitué par ses colonies. Elle s'est alors lancée dans les innovations technologiques afin de conquérir une place sur un marché mondial dans lequel elle était pratiquement absente. C'est ainsi que les gouvernements de l'époque ont lancé de grands programmes publics de recherche et développement technologique dans le nucléaire, la téléphonie numérique, la télématique, le train à grande vitesse, l’aéronautique, la production agricole de masse etc. Ces programmes volontaristes ont été mis en place à travers à des centres de recherches publics créés un peu partout en France dans le cadre de l’aménagement régional, ce qui a considérablement développé l'emploi local. Réunissant les meilleurs chercheurs formés par les grandes écoles et l'université, ces centres de recherche ont été adossés à de grandes entreprises, certaines créées de toutes pièces, pour développer ces recherches sur le plan industriel.
On a oublié aujourd’hui l'énorme investissement financier, en infrastructure mais aussi et surtout humain que cela a représenté. La mobilisation des chercheurs de haut niveau ainsi que leurs équipes, dans tous ces domaines cruciaux et les résultats obtenus ont été tellement remarquables qu'à l'étranger, il était demandé à la France d’envoyer ses experts expliquer comment on pouvait ainsi, dans le cadre d’une planification souple, marier secteur public et secteur privé. Le fameux ni ni…
Hélas cette belle histoire qui avait tout du conte de fée pour innocents, a pris un nouveau tour quand la puissance publique a estimé que l'appareil industriel privé était suffisamment solide pour qu'on puisse lui faire cadeau de ces avancées technologiques afin qu’il en tire le meilleur profit. A grands renfort d’aides publiques à l’exportation, quand même.
La privatisation de certains services publics comme les télécommunications a constitué une nouvelle étape. Lorsqu’il s’agit de vendre des services, que faire de toutes ces structures de recherche et de ces chercheurs et chercheuses hautement qualifié.e.s, maintenant qu'elles et ils avaient donné tout ce que l'on attendait d'elles et d’eux ? Les lois défendant les salariés étant encore fortes, les entreprises privatisées, pour éviter le coût des licenciements, ont procédé à des reclassements à la hache avec les conséquences meurtrières que l'ont connaît. A France Télécom, devenu Orange, du jour au lendemain ces salarié.e.s, encensés et mis en avant pour leurs compétences, mais dont les entreprises commerciales n'avaient que faire, se sont retrouvé.e.s brusquement ravalé.e.s au rang d'inutiles à caser ici ou là, ou à dégoûter pour qu’ils et elles s’en aillent « par la fenêtre ou par la porte » comme le PDG de d’Orange, en bon valet du capital a osé le dire. On notera au passage que le mépris de classe des donneurs d’ordre vis-à-vis de ces salariés, en col blanc, eux aussi, et hyper compétents, s’est appliqué avec la même rigueur et la même indifférence que s’il s’était agit de travailleurs non qualifiés jetables à merci. Sain rappel pour celles et ceux qui auraient oublié que le contrat de travail reste légalement un contrat de subordination entre employeurs et employ.é.e.s.
Dans les médias bourgeois, aux mains de grands groupes industriels, bon nombre d’analystes à leur solde, expliquaient doctement que les français étant décidemment irréformables on se devait de leur signifier, énergiquement, s’il le fallait, la fin de « l’état providence ».
Quant aux régions, comme la Bretagne et d'autres encore, où ces centres de recherche avaient été implantés, suivis par des créations d’usines (qui employaient beaucoup de femmes), elles ont été tout simplement été oubliées.
Lorsque ces tueurs en col blanc d’Orange passeront enfin en jugement, prenons le temps d’aller leur crier notre révolte pour avoir sacrifié des vies au nom de ce capitalisme destructeur qui ne bénéficie qu’à une poignée de prédateurs.
Pour autant, n’oublions pas leurs maîtres, ce patronat insatiablement vorace et leurs complices ; ces politiciens professionnels, « staliniens du capitalisme » adeptes béats de la mondialisation, qui se sont ligués pour précipiter des régions entières et le pays dans le chômage de masse. Pendant ce temps là, leurs biens étaient et sont toujours bien à l’abri dans les paradis fiscaux.
Décidemment, parodiant Clemenceau : Mettons-nous bien dans la tête que la création de richesses pour toutes et tous est une question trop sérieuse pour la confier aux capitalistes !