Cuba : un pas de plus vers le capitalisme

Raul Castro a annoncé le début du processus de réunification des deux monnaies qui circulent depuis 19 ans à Cuba. En
1993, pour faire face à l'effondrement consécutif à la chute du bloc
soviétique, le gouvernement a officialisé la dollarisation rampante de
l"économie, en créant le peso convertible (à parité fixe avec le dollar)
à côté du peso cubain (qui vaut actuellement 1/25ème d"un
peso convertible). Associé au démantèlement du monopole étatique du
commerce extérieur, la nouvelle monnaie a permis de développer le
tourisme et les investissements étrangers pour financer les
importations. Le développement du secteur privé (national et étranger) a
accru les inégalités : la majorité des travailleurs sont payés en peso
cubain et n'ont pas accès aux biens importés évalués en peso convertible
(un litre de lait vaut par exemple environ 15% du salaire mensuel
moyen). Outre les services publics gratuits (éducation, santé, ...), les
cubains ne peuvent
survivre que grâce à la « libreta », de plus en plus réduite, qui
fournit à chacun des produits de base à bas prix. Mais pour pouvoir
consommer des légumes ou de la viande, les cubains doivent se tourner
vers le marché libre hors de prix. Signalons également que l'odieux
embargo US imposé depuis plus de 50 ans aggrave fortement les
difficultés de l’île.
Trois
ans après « l"actualisation du modèle socialiste cubain », et notamment
le licenciement de près de 500 000 fonctionnaires, la restauration du
capitalisme est en marche suivant « l"exemple » chinois. A la différence
des réformes des années 1990, les nouvelles entreprises privées sont
désormais autorisées à embaucher des salariés. Le secteur non étatique
devrait représenter plus de 40% du PIB en 2015. La réforme devrait se
traduire par une convergence
progressive des deux monnaies, et donc une dépréciation du peso
convertible, ce qui peut sembler favorable aux travailleurs puisqu'ils
pourront acheter davantage de biens importés. Mais la contrepartie de
ces espoirs risque d'être la remise en cause des acquis, services
publics gratuits et libreta. Car le sens de la réforme est de faire
rentrer Cuba dans la « normalité » capitaliste, et ce sont les
travailleurs qui en paieront le prix, en dépit des discours
mystificateurs de la bureaucratie. La seule alternative passe par
l"initiative autonome des travailleurs pour défendre et étendre ce qu'il
reste des conquêtes de la révolution.
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