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Fraude massive des entreprises au chômage technique: mettre fin à ce scandale
Article initialement publié sur le site du NPA.
Depuis le début de la crise, le chômage technique explose. Plus de la moitié des salariéEs du privé (12,9 millions) a été couverte par une demande d’autorisation préalable d’activité partielle (cf. note de la DARES). Ces demandes ne se sont pas toutes transformées en actes. Néanmoins le nombre de salariéEs concrètement au chômage technique a été massif. En avril, selon le ministère du travail, 8,6 millions de salariéEs (sur 11,3 millions de demandes d’autorisations) ont été au chômage technique en moyenne 2,8 semaines dans le mois.
Un énorme cadeau au patronat
On ne connaît pas encore le montant total du coût du dispositif pour les finances publiques (État et Unedic), d’autant plus que beaucoup d’entreprises seront encore au chômage technique dans les semaines qui viennent. Mais il est certain qu’il dépassera très largement les 24 milliards budgétés par la loi de finance rectificative d’avril. Le coût est d’autant plus faramineux que le dispositif a été assoupli mi-mars, si bien que les administrations publiques prennent entièrement à leur charge le versement des salaires amincis (84 % du salaire net dans la limite de 4,5 SMIC). Les procédures ont été simplifiées pour les entreprises. Auparavant, l’administration du travail (DIRECCTE) contrôlait les motifs avancés par les entreprises. Désormais, un simple clic sur internet suffit. Le gouvernement fait « confiance » aux patrons et dissuade les fonctionnaires de faire les contrôles.
À partir du 1er juin, la prise en charge par les administrations publiques ne sera plus totale mais à hauteur de 85 %. Cependant, le Medef lui ayant adressé une nouvelle liste, le gouvernement réfléchit à de nouveaux cadeaux, en plus des 100 milliards de la loi de finance rectificative d’avril : baisses d’impôts sur la production (contribution sociale de solidarité, contribution économique territoriale), exonérations de cotisations sociales pour l’embauche de jeunes en CDI, prime pour l’embauche d’apprentiEs etc. Les patrons ne seront pas perdants…
Une fraude massive de plusieurs milliards
La conséquence de l’absence de contrôle est une fraude massive. À croire que la soif de profits est plus forte chez les patrons que la morale… Il faut dire que le gouvernement est complice de la fraude, et les patrons ont bien compris qu’ils avaient carte blanche : pourquoi se priver ?
Deux enquêtes1 dévoilent l’ampleur de la fraude : environ un quart des salariéEs aurait travaillé – dont 10 % à temps plein – à la demande de leur employeur ! D’autres ont aussi travaillé « de leur plein gré »… et vraisemblablement en toute connaissance de cause de leur employeur. Le travail au noir est donc massif et se chiffre en milliards.
L’Insee transforme cette aide au patronat en prestation pour les ménages
Dans la communication gouvernementale, le chômage technique est « une aide aux ménages ». En réalité, c’est un cadeau aux patrons puisque l’État et l’Unédic versent une subvention aux entreprises, qui couvre le montant des salaires versés (84 % du salaire net).
Malheureusement, l’Insee a fait le choix de traiter le chômage technique comme une prestation sociale versée aux ménages et non comme une subvention aux entreprises. La comptabilité nationale est une représentation de l’économie et un enjeu de la lutte de classe : l’Insee a fait un choix qui n’est pas neutre. Puisque les salariéEs n’ont pas travaillé, l’Insee considère qu’ils/elles n’ont pas reçu un « salaire » mais une « prestation ». C’est une conception patronale du salaire qui considère que le salaire est la mesure du travail fourni. Nous considérons au contraire que les travailleurs/euses au chômage technique touchent un salaire puisqu’ils/elles gardent leur statut de salariéEs. Ce salaire leur est dû par leur patron, et celui-ci bénéficie de l’argent public pour remplir son obligation. L’Insee invisibilise donc l’énorme cadeau fait au patronat en le transformant en aide aux ménages…
Les capitalistes qui ne peuvent plus payer leurs salariés doivent être expropriés
La logique du système est implacable : la crise est énorme, et donc il faut donner des milliards aux patrons pour éviter des faillites en cascade. On pourra d’ailleurs noter que les antilibéraux ne remettent pas en cause ces milliards, ils se contentent d’en discuter les modalités. C’est logique : refuser ces aides, c’est assumer de s’attaquer au noyau dur de la logique capitaliste : la propriété ! Et de cela, pas question pour les antilibéraux qui nous enfument en nous faisant croire qu’on peut donner des milliards à tout le monde.
Nous défendons pour notre part une alternative au dispositif du chômage technique. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’abroger ce dispositif sans rien proposer aux travailleurs/euses à la place : cela se traduirait par des millions de licenciements et une catastrophe sociale. Les capitalistes qui ne peuvent plus payer les salaires doivent être expropriés : leurs entreprises doivent être nationalisées et l’État doit garantir le maintien des emplois. Les petits patrons pourraient avoir droit à une indemnité et intégrer le collectif de travail. Les entreprises devraient passer sous le contrôle des travailleurs/euses qui reprendraient la main sur l’organisation du travail.
Notes
1.Une enquête de l’Ugict CGT auprès de 34.000 salariéEs et une enquête du groupe Technologia auprès de 2.500 éluEs du personnel