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    Pourquoi il faut annuler la dette publique... et qui doit payer cette annulation

    Par Tendance CLAIRE (25 avril 2021)
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    Avec la crise du Covid, le déficit public s’est envolé en 2020. Par voie de conséquence, la dette publique a fortement augmenté passant de 100 % du PIB avant la crise à 120 % du PIB après. Alors qu’on nous expliquait avant la crise que le niveau de la dette était insoutenable, des dizaines de milliards ont été miraculeusement trouvés pour aider les entreprises. Mais qui va payer l’addition ? Et doit-« on » rembourser cette dette ?

    Qui détient la dette publique française ?

    La dette publique est détenue pour un quart par la Banque de France, pour un autre quart par les banques et sociétés d’assurance française, et pour la moitié par l’étranger (fonds de pensions, banques, sociétés d’assurance...).

    L’idée à la mode chez les réformistes et les économistes hétérodoxes est l’annulation de la partie de la dette publique détenue par la Banque centrale. C’est une diversion : cette partie de la dette ne coûte rien à l’État. En effet, l’État étant actionnaire de la banque centrale, les intérêts qu’ils versent à la banque centrale lui sont reversés par celle-ci !

    La partie de la dette qui « coûte » aux contribuables est celle qui est versée aux banques et sociétés d’assurance nationales et étrangères. Malgré l’envolée de la dette, la charge des intérêts a baissé depuis la fin des années 1980 avec la baisse des taux d’intérêt. Néanmoins, c’est environ 30 milliards par an qui sortent des caisses de l’État pour payer les intérêts de la dette. Et cela pourrait être bien plus si les taux d’intérêt montaient à nouveau, par exemple si les « marchés » exprimaient leur défiance vis-à-vis d’un gouvernement pas assez docile.

    À travers les banques et les sociétés d’assurance,ce sont les plus riches qui sont les créanciers de l’État

    Les banques et les sociétés d’assurance possèdent à leur « actif » les titres de la dette publique. À leur « passif » figurent leur dette vis-à-vis de leurs clients. Grâce aux revenus tirés de leurs actifs, ces sociétés financières rémunèrent leurs clients. En ce sens, ce sont leurs clients, et surtout les plus riches d’entre eux, qui possèdent les titres de la dette publique, par l’intermédiaire de ces sociétés financières.

    On peut d’ailleurs souligner l’absurdité de la mesure préconisée par Martinez et Duflot : créer une taxe Covid frappant les plus riches… afin de rembourser la dette Covid. Autrement dit, prendre aux riches… pour redonner aux riches ! Décidément, les réformistes sont très fort·e·s pour faire diversion et pour « jouer la radicalité » tout en préservant l’ordre existant.

    Faut-il annuler la dette publique ?

    Si les économistes hétérodoxes se divisent sur l’utilité d’annuler la partie de la dette publique détenue par la banque centrale, il existe un large consensus pour refuser l’annulation de la dette publique détenue par les sociétés financières. Ils et elles naturalisent le financement des dépenses publiques par le recours à la dette : il faut simplement que le coût de la dette reste « raisonnable », ce qu’il est aujourd’hui par rapport aux années 1990. De rares personnalités refusent cette naturalisation : par exemple Bernard Friot explique qu’il n’y a aucune raison d’accepter de financer les dépenses publiques (y compris l’investissement public) par la dette, en rappelant que l’investissement des hôpitaux a longtemps été financé par la cotisation sociale. Mais dans le « sens commun » (y compris à « gauche de la gauche »…), l’investissement doit être financé par l’emprunt. Il n’y a pourtant aucune raison d’accepter de s’endetter auprès des plus riches : les dépenses publiques doivent être financés par les impôts et les cotisations, avec une éventuelle création monétaire (sans crédit) en complément.

    Doit-on dès lors accepter de continuer à payer les parasites qui s’enrichissent par la simple possession des titres de la dette publique ? Si on met le droit de propriété au dessus de tout, la réponse est oui. Si on privilégie la satisfaction des besoins sociaux, la réponse est non : il n’y a aucune raison de redistribuer plusieurs dizaines de milliards d’intérêts de la dette vers les plus fortunés.

    La contrepartie nécessaire de l’annulation de la dette publique : la dévalorisation de l’épargne des plus riches

    Que se passerait-il si la dette publique par les sociétés financières était annulée ? 2.000 milliards d’actifs des sociétés financières partiraient en fumée. Pour éviter la faillite, ces sociétés devraient alors dévaloriser leur passif de 2.000 milliards. Dans leur passif, il y a leurs fonds propres et leurs dettes vis-à-vis de leurs client·e·s. Ce seraient ces dettes-là (et donc les avoirs de leurs client·e·s) qui devraient donc être dévalorisées. Il faudrait alors revendiquer que ce soit l’épargne financière (sous forme de contrats d’assurance vie, de Sicav, de gros comptes à terme, etc.) des plus riches qui soit purgée. Environ 1.400 milliards détenus par des étranger·e·s et 600 milliards détenus par des résident·e·s français·es. Comme la dette française est détenue par des fonds de pension étrangers, l’annulation de la dette pourrait menacer le versement des pensions de retraites. Cela pourrait donc encourager les mobilisations pour la transformation des régimes de retraite par capitalisation en régimes par répartition !

    L’annulation de la dette publique aurait donc la vertu de s’attaquer aux patrimoines financiers indécents de plus riches et de libérer de l’argent public pour couvrir les besoins sociaux. Un patrimoine des plus riches qui prospère sur la crise du Covid grâce à une politique monétaire expansionniste qui tire à la hausse les prix de l’immobilier et des marchés d’actions. Il est temps de s’en prendre à la fortune des « profiteurs de guerre », car « nous sommes en guerre » d’après Jupiter.

    L’annulation de toute la dette publique est donc une revendication salutaire qui permet de remettre les compteurs à zéro. Mais elle ne s’attaque pas en tant que telle à la racine du mal : le mode de production capitaliste qui engendre cette dette publique et les parasites qui prospèrent dessus. C’est pourquoi la répudiation de la dette publique doit être articulée à l’expropriation des capitalistes et à la réorganisation de toute l’économie, sous la direction des travailleurs/ses associé·.e·s. Cela permettra d’en finir, une bonne fois pour toutes, avec la dette publique et tous les mécanismes de parasitisme financier qui gangrène l’économie.

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