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    Sur la grève du Théâtre de la Commune à Aubervilliers

    Par ( 9 novembre 2018)
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    Après plus de 50 jours de grèves et une situation complètement cadenassée par la direction qui refuse de mener à bien les négociations avec les salarié.e.s, nous publions ici (par ordre chronologique) un dossier d'articles que nous avons écris pour le NPA qui permet de revenir sur ce mouvement qui dépasse de loin le seul théâtre de la Commune d'Aubervilliers. Vive la grève des salarié.e.s de théâtre de la Commune !

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    25 septembre : A Aubervilliers comme ailleurs, la violence du travail ne s'arrête pas aux portes des théâtres !

    https://npa2009.org/communique/aubervilliers-comme-ailleurs-la-violence-du-travail-ne-sarrete-pas-aux-portes-des

    Le NPA apporte tout son soutien aux salarié.e.s en grève du Théâtre de la Commune à Aubervilliers. Nous sommes indigné.e.s que sa directrice, Marie-José Malis, instrumentalise le caractère militant de son projet artistique pour justifier une gestion nocive du personnel. Cette instrumentalisation s’opère avec l’aide et le soutien d’Alain Badiou, dont les écrits et la pensée sont pourtant une référence pour de nombreux militant.e.s.

    Depuis que Marie-José Malis a pris la direction du lieu il y a 4 ans, il y a eu 12 ruptures conventionnelles de contrats, 4 suppressions de postes, de nombreux congés maladie, et aujourd’hui 10 grévistes (sur 18 salarié.e.s permanent.e.s, hors direction). Impossible donc de nier la violence des conditions de travail qui s’exerce sur place, sans compter que la direction refuse de faire faire un audit sur les conditions de travail comme le réclament les représentant.e.s du personnel.

    Rajoutons que Marie-José Malis est également présidente du Syndéac, le syndicats des patron.ne.s du spectacle vivant et qu'à ce titre, en l'absence de communiqués du syndicat ou d’autres théâtres, sa position a donc valeur d’exemple.

    Nous sommes également indigné.e.s de voir que les droits sociaux ne sont pas respectés et les conditions de travail dégradées, au nom de l'amour de l'art et d'une certaine conception d'un théâtre engagé voire militant... Les positions théoriques et politiques sur l'art, qui peuvent être de bonne foi et sincères, ne peuvent être l'arbre qui cache la forêt des rapports de classes et de forces qui se jouent dans les théâtres, les compagnies ou les institutions artistiques et culturelles.

    Non le néo-libéralisme ne s'arrête pas aux portes des théâtres...

    Vive la lutte des travailleurs/euses du Théâtre de la Commune !

    Montreuil le lundi 24 septembre

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    26 septembre : Avec les salariéEs du théâtre de la Commune à Aubervilliers !

    https://npa2009.org/actualite/culture/avec-les-salariees-du-theatre-de-la-commune-aubervilliers

    Jeudi 20 septembre un rassemblement avait lieu devant le théâtre de la Commune d’Aubervilliers pour soutenir la dizaine de salariéEs (sur les 18 permanentEs hors direction) dans leur premier jour de grève reconductible.

    Les salariéEs protestent contre leurs conditions de travail indignes, violentes et pathogènes. La directrice, Marie-José Malis (« MJM »), défend quant à elle sa politique de management au nom du caractère militant de son projet artistique : « Cette grève n’a pas été votée. Nous sommes fatigués des mensonges et du travail de sape. [Signé :] Les salariés restés au travail dans ce lieu innovant, fiers de la beauté de son projet », lisait-on sur une banderole le long du théâtre, enlevée depuis, à la demande de la mairie. On retrouve là la phraséologie de toutes les entreprises qui reprochent à celles et ceux qui défendent leurs conditions de travail d’être rétrogrades et de refuser l’innovation.

    Contre la grève : la directrice et… Alain Badiou

    Rien d’étonnant ? Sauf que derrière cette banderole, il y a la directrice, Marie-José Malis… et Alain Badiou, un de ses partenaires privilégiés. MJM est une femme de gauche, metteuse en scène et dramaturge engagée, militante, qui n’est pas « du côté du capital » (ouf !) comme nous l’a dit un des signataires de la banderole. Quant à Alain Badiou, ce gauchiste invétéré, celui qui a pu écrire, par exemple, que « le capitalisme appartient à la culture du néolithique », ou qu’il fallait en finir avec la « dictature de la majorité », il n’a pas assez de mots pour dire l’illégitimité de cette grève et dénoncer son caractère minoritaire.

    Un des salariéEs, resté fièrement en poste, nous a expliqué que les choses sont plus complexes qu’il n’y paraît : MJM voudrait porter un « projet » qui est novateur, progressiste, émancipateur, et qui vise à faire sortir le théâtre de sa tour d’ivoire, pour aller à la rencontre des publics et des populations, accueillir les migrantEs, etc. Or, comme elle est de gauche, elle n’a pas viré tout le monde en arrivant. Elle a tenté de convaincre les salariéEs de son projet. Celles et ceux qui avaient des réticences sont partis en rupture conventionnelle (12 en 4 ans, on commence à serrer les dents…). Quant à celles et ceux qui restent et qui font grève : des réacs qui ne sont pas prêts au menu sacrifice de « leurs habitudes » pour la Culture.

    Une grève illégitime ?

    Imaginons un instant que Badiou et MJM aient raison, que cette grève soit illégitime voire réactionnaire. Alors pourquoi ne pas accepter l’audit sur les conditions de travail réclamé par les déléguéEs du personnel depuis plusieurs mois ? Pourquoi ne pas organiser un débat public ? Pourquoi payer – avec le budget du théâtre – un huissier pour inspecter le rassemblement ? Pourquoi avoir refusé d’ouvrir des négociations suite au préavis ? Et surtout, n’y a-t-il pas d’autres moyens de convaincre de leur projet qu’en se faisant le relais de gauche des attaques contre le droit de grève ? 

    Les 12 ruptures conventionnelles, les quatre suppressions de postes, les très nombreux congés maladie, et les 10 grévistes aujourd’hui, rendent impossible d’imaginer que cette grève puisse être infondée, et qu’il n’y ait pas un réel problème de conditions de travail. D’autant que MJM ne recule devant rien : intimidations et menaces de licenciement, voilà ce qui attend les salariéEs qui défendent leurs droits. Quant au « projet » en lui-même, une enseignante d’Aubervilliers a pris la parole jeudi soir pour dire comment les dispositifs pour emmener les élèves au théâtre s’étaient affaiblis depuis quatre ans… En effet, les choses semblent bien complexes !

    Nous appelons au soutien des salariéEs en lutte de la Commune. Consultez, aimez, partagez leur page Facebook : Salariés du théâtre de la Commune en lutte.

    Commission culture 

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    3 octobre : Théâtre de la Commune à Aubervilliers : "L’enthousiasme s’est mué en lassitude, puis en angoisse"

    https://npa2009.org/actualite/culture/theatre-de-la-commune-aubervilliers-lenthousiasme-sest-mue-en-lassitude-puis-en

    Les salariéEs du théâtre de la Commune à Aubervilliers sont en grève depuis plus d’une semaine. Leur directrice, Marie-José Malis (MJM), soutenue par Alain Badiou, entend faire passer le conflit pour une simple preuve de l’immobilisme de la CGT, ou encore de la mollesse et de l’absence de désir des salariéEs. Entre les lignes, on les accuse de faire grève contre l’art et la beauté. Entretien avec l’une des grévistes du théâtre.

    Alors, ça fait quoi d’avoir un patron de gauche ?

    Un patron de gauche… ça reste un patron ! Ça peut même avoir un effet pervers : les rapports de domination perdurent, mais ils ont tendance à être niés sous prétexte que nous serions tous égaux, qu’on travaillerait dans une forme d’horizontalité, dans laquelle le rapport hiérarchique ne serait qu’une formalité. Sauf que cette égalité est illusoire, et le rapport hiérarchique, lui, bien réel. Et lorsque tu le fais remarquer à ton employeur (ou ton employeuse), tu te fais engueuler parce que tu l’insultes en le traitant de dominant.

    Vous parlez de « conditions de -travail pathogènes »…

    C’est un ensemble de pratiques qui génèrent, pour les gens qui travaillent, des situations de stress très fortes.

    C’est, par exemple, être convoqué à un entretien dont l’objet change au moment où l’on est reçu, ou même sans en savoir l’objet : dans le premier cas, on se prépare pour parler d’un sujet, et un autre est abordé, nous prenant au dépourvu. Dans l’autre c’est encore pire : on ne sait pas si notre supérieur va juste nous dire une petite chose anodine ou si ça va être un entretien où l’on va se faire casser pendant une heure. 

    Ça peut être aussi des injonctions contradictoires : d’un côté par exemple, nous dire que les relations publiques ne devraient pas être tenues responsables du remplissage des salles, et d’un autre côté, qu’on nous pousse à faire du chiffre.

    Ce qui cause également une souffrance, c’est le décalage entre le discours affiché de la direction, prônant des valeurs d’égalité et de liberté radicales, y compris dans le travail, et ce que nous subissons réellement au quotidien. Il est important de rappeler que, quand notre directrice est arrivée, nous étions très contents. Elle parlait d’horizontalité, ses sources d’inspiration au niveau organisationnel me parlaient. Elle avait cité l’exemple de lieux autogérés, la clinique de La Borde… Mais dans la réalité, cela ne s’est pas déroulé comme ça, et notre possibilité de participer à la construction du projet s’est révélée très mince... « Moi je veux remettre tout à plat, qu’on re-réfléchisse tout », disait-elle au début. Nous avons embrassé cette perspective avec enthousiasme. Tout en continuant notre travail quotidien, nous avons réfléchi à des propositions de nouvelles façons d’entrer en contact avec le public. Mais cela ne semblait jamais satisfaire la direction. Et cycliquement, on nous redemandait de réorganiser complètement notre travail. Donc on mettait en place de nouveaux outils. Et ces outils n’étaient jamais consultés par la direction.  L’enthousiasme s’est mué en lassitude, puis en angoisse… Quand arrivera la prochaine restruc-turation ? Qu’adviendra-t-il de nos postes et nos fonctions ?

    Que revendiquez-vous ?

    D’abord, l’arrêt des pratiques de gestion du personnel nocives. Cela pourrait prendre la forme d’un protocole co-rédigé avec les grévistes, définissant un certain nombre de cadres que la direction s’engagerait à respecter.

    Deuxièmement, nous demandons le respect des instances représentatives du personnel. La direction avait décidé qu’elle n’entendrait plus rien de la déléguée syndicale et déléguée du personnel, et voulait privilégier des rapports interpersonnels entre direction et salariéEs… C’est pour cela que nous avions fait des demandes de médiations, qui ont été refusées. Nous avons alors décidé d’alerter directement nos tutelles en juillet dernier.

    Enfin, on demande un audit de la structure. Un audit RH dont le cabinet soit co-désigné avec les déléguéEs syndicaux. On -demande qu’en attente de l’audit, les créations et suppressions de postes soient gelées, ainsi que les restructurations, et que les salariéEs soient maintenus dans leurs fonctions et leurs attributions. Ce que la -direction refuse à l’heure actuelle.

    Dans sa lettre, MJM n’explique que 10 des 12 ruptures conventionnelles qui ont eu lieu en 4 ans. Et que parmi ces 10, il y en aurait 8 dont elle n’aurait pas à rougir, et 2 seulement qui seraient liées aux conditions de travail.

    Il y a en effet des gens qui sont partis pour des raisons personnelles. Mais il y en a aussi qui sont partis sans l’avoir choisi. Et d’autres enfin qui l’ont décidé, mais parce que le climat de la structure était devenu trop pesant pour eux. De plus, dans sa lettre, MJM prétend que la responsable d’accueil/billetterie (déléguée syndicale CGT/Synptac) serait la cause de tous les départs des personnes travaillant à l’accueil. Or c’est faux. Nous avons des témoignages qui prouvent le contraire.

    Ce dénigrement permanent de votre travail est-il basé sur des reproches concrets et tangibles ?

    Non, jamais. D’ailleurs nous avons d’excellents rapports – et c’est ça qui est incroyable – avec tous nos partenaires (enseignantEs, artistes, responsable d’association ou de CE…). Nous n’avons de problèmes qu’avec la direction, qui voudrait que nous fassions autre chose que ce que l’on fait. Mais quoi ? Les reproches qui nous sont faits ne sont jamais étayés, et restent très flous et très opaques (dysfonctionnement, désorganisation, mais sans apporter d’éléments concrets). Tout cela nous a conduit à penser que ce n’était pas ce que nous faisions qui posait problème, mais qui nous étions…

    Mais comment la direction justifie-t-elle de porter un projet prétendument émancipateur avec des méthodes qui ressemblent beaucoup à celles du néolibéralisme ?

    Dans son projet, il y a une ligne politique sous-jacente au projet artistique, une « Idée » que nul n’est autorisé à remettre en cause. Et à l’encontre des personnes qui ne seraient pas dans cette ligne – surtout nous, aux relations publiques –, la direction considère qu’elle peut se permettre d’utiliser les mêmes moyens néolibéraux qu’on va trouver dans toutes les grosses boîtes.

    Pour notre direction, la fin justifie les moyens. Et ça n’est pas du tout une contradiction pour elle. C’est quelque chose qu’elle assume.

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    5 octobre : Vive la grève des salariéEs du théâtre de La Commune !

    https://npa2009.org/actualite/culture/vive-la-greve-des-salariees-du-theatre-de-la-commune

    Après presque deux semaines de grève, un nouveau rassemblement a eu lieu le mercredi 3 octobre pour continuer de mettre en avant la lutte des 10 salariéEs. 

    Dans ce théâtre public d’Aubervilliers, les grévistes dénoncent un climat pathogène depuis que la nouvelle directrice Marie-José Malis, qui est aussi présidente du Syndeac (syndicat des employeurs du spectacle subventionné), est aux commandes. 

    Acharnement de la direction

    C’est dans ce climat d’une gestion jugée « nocive » par une partie des salariéEs, qu’un véritable acharnement de la direction a lieu à l’encontre d’une travailleuse handicapée qui est employée depuis plus de vingt ans. Sans motif apparent, la direction « invite » la salariée à se « reconvertir » tout en proposant, si celle-ci ne trouve pas d’emploi de « financer une formation » avant de « proposer une rupture conventionnelle ». Enfin, sans « accord à l’amiable », la direction envisage un licenciement pour « insuffisance » ! Une belle langue de bois pour se placer du bon côté en refusant d’assumer qu’il s’agit d’un licenciement !

    Ce nouveau rassemblement était un temps fort, avec plusieurs prises de la parole, de la part des grévistes et d’invitéEs. Philippe Martinez est venu apporter son soutien, en rappelant que les attaques patronales touchent tous les secteurs, public comme privé. 

    Denis Gravouille, secrétaire de la CGT Spectacle, a lui aussi ré-affirmé que la grève des salariéEs était légitime, bien loin des accusassions proférées par Alain Badiou ou Marie-José Malis qui dénonçaient dans les premiers temps « un complot » mené par « un syndicalisme de pacotille ». 

    Yoann, postier dans le 92 en grève depuis 6 mois, est venu a son tour apporter son soutien aux grévistes, en revenant brièvement sur leur lutte propre. Il a aussi appelé à participer à la manifestation interprofessionnelle du 9 octobre, l’occasion de « taper touTEs ensemble en même temps et sur le même clou ». Même si, comme il l’a rappelé, une seule journée de manifestation ne suffira pas à faire reculer Macron.

    C’est enfin Lucie, gréviste du théâtre, qui a pris la parole pour souligner que les rapports de domination ne disparaissent pas quand le directeur ou la directrice est de gauche. Même masquée, même cachée, elle demeure, et violente. Elle a bien montré comment même dans un lieu supposé plus ouvert, et comment même avec un projet artistique de qualité, les rapports employéEs/patronEs sont les même que dans n’importe quelle entreprise, à savoir profondément inégalitaires. 

    Le rassemblement s’est conclu par une série de chansons interprétées là aussi par Lucie, allant de Moustaki et la révolution permanente, une chanson sur le syndicalisme féministe et de lutte emprunté aux camarades de la CNT du bâtiment ou encore sur un remix de « Merci Patron » ou on entendait plutôt des « merci patronne » et « merci Badiou ». 

    Correspondant

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    17 octobre : Théâtre de la Commune : une grève qui pourrait faire date

    https://npa2009.org/actualite/culture/theatre-de-la-commune-une-greve-qui-pourrait-faire-date

    La grève qui se déroule au théâtre de la Commune est une lutte importante. Pour les salariéEs, bien entendu, qui voient leurs conditions de travail se dégrader, et les relations avec l’ensemble de l’équipe du théâtre pourrir. Mais cette grève est aussi l’enjeu d’une lutte plus large, celle de touTEs les travailleurEs du monde du théâtre, quel que soit leur métier. Elle pourrait même faire date dans l’histoire du théâtre public et des luttes syndicales de ce milieu.

    Nous sommes beaucoup à espérer la fin d’une certaine hypocrisie qui a cours depuis une quarantaine d’années. Va-t-on réussir à en finir avec les directeurEs de théâtre, metteurEs en scène, artistes-intellectuelEs tout-puissants ?

    Les théâtres ne sont pas coupés du monde social

    Lorsque vous mettez les pieds dans un théâtre, il convient d’ôter de votre vocabulaire les mots « pouvoir », « lutte de classes », ou même « classe sociale », « patrons », « exploitation ». Enfin, si, vous pouvez en parler, mais uniquement si c’est pour dénoncer ce qui se passe à l’extérieur « Pas de ça chez nous ! » L’entrée en résistance se résume à œuvrer à la grande entreprise de l’art et du théâtre.

    Cet état de fait nie toute contradiction à l’intérieur de chacunE de nous, mais aussi dans n’importe quelle institution ou structure de la société capitaliste. Ici, le bât blesse : si les artistes sont des résistantEs du simple fait qu’ils et elles sont artistes, et qu’il n’y a pas de rapports de pouvoir ou de classes dans les théâtres, comment comprendre la revendication de mettre fin à une gestion nocive du personnel des salariéEs en grève au théâtre de la Commune ?

    UnE salariéE de théâtre serait-il ou elle moins digne d’attention car il ou elle ne serait pas artiste – et donc en résistance – mais bassement attaché à ses conditions de travail et à ses droits syndicaux ? Les travailleurEs du théâtre n’auraient-ils et elles pas le droit de déroger à cet implicite qui veut que les rapports sociaux qui traversent la société capitaliste n’ont plus cours dès lors qu’on passe la porte d’un théâtre ?

    L’art n’excuse pas tout

    Les tensions rendues insolubles par trop de contradictions refoulées viennent de plus loin. Ce qui se joue à la Commune, théâtre labellisé CDN (centre dramatique national), remonte à 1972 et à la « mise en place du contrat de décentralisation, [où] le metteur en scène incarne à lui seul l’identité du CDN qui lui est confié intuitu personae pour un engagement de trois ans renouvelable. » C’est donc « l’abandon de la logique de troupe au profit d’une institutionnalisation de la position dominante du directeur » qui devient le pivot de la politique culturelle du théâtre public1.  Et l’hypocrisie peut s’installer tranquillement. Aujourd’hui, au Théâtre de la Commune, l’ambiance pourrait se résumer à cela : « Il est doux d’avoir des inférieurs ; il est pénible de voir des inférieurs acquérir des droits, même limités, qui établissent entre eux et leurs supérieurs, à certains égards une certaine égalité. On aimerait mieux leur accorder les mêmes avantages, mais à titre de faveur ; on aimerait mieux, surtout, parler de les accorder. »2

    Cette grève est révélatrice de toutes ces contradictions, mais aussi porteuse de quelques espoirs : mettre fin à la toute-puissance des directeurEs de théâtre et à l’idée que lorsqu’on est artiste, tout est excusable. On peut tout à fait défendre et proposer des conditions décentes de production pour la création artistique et une politique culturelle ambitieuse, progressiste et engagée, qui se construise en lien avec les équipes salariées des théâtres et les compagnies et artistes qui y sont associés.

    Marion (comité ATIPIC, commission culture)

    • 1.Marie-Ange Rauch, « La figure du patron dans les théâtres publics », revue Théâtre/Public n°224, « Présences du pouvoir », avril-juin 2017.
    • 2.Simone Weil, la Condition ouvrière, Paris, Gallimard, 1951, p. 323.

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