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Riposter dès maintenant à l’austérité de « gauche » de Hollande !
Nul ne peut plus douter des intentions de Hollande : restaurer la compétitivité des capitalistes français en baissant le « coût du travail »
Pendant la campagne électorale, Hollande avait su habilement esquiver la question du « coût du travail », en insistant sur les autres dimensions (« hors coût ») de la compétitivité : recherche et développement, qualité des produits, formation, etc. Désormais, le masque commence à tomber, même si les décisions sont reportées à plus tard. Hollande n’a pas le choix : en tant que bon gestionnaire des intérêts du capital, il doit restaurer la compétitivité des capitalistes français qui n’a cessé de se dégrader ces dernières années. Ainsi, pendant que les gouvernements allemands (notamment celui du social-démocrate Schröder) ont réussi à bloquer les salaires, les salaires réels français ont augmenté plus rapidement que la productivité (cf. graphique). Hollande doit donc réussir à faire ce que Sarkozy n’a pas été capable d’accomplir : mettre en place des attaques de très grande ampleur pour augmenter suffisamment le taux d’exploitation des travailleurs pour permettre aux capitalistes français de gagner des parts de marché et réduire le déficit commercial qui se creuse chaque année.
Louis Gallois, nommé haut commissaire aux investissements et bientôt chargé d’une « mission sur la compétitivité de nos entreprises » par Ayrault, a expliqué le 7 juillet, devant le Cercle des économistes, qu’il fallait un « choc d’offre » pour restaurer la compétitivité des entreprises françaises. Cela devrait passer selon lui par une réduction massive (d’au moins 30 milliards d’€) des cotisations sociales payées par les patrons. Le Canard enchaîné du 11 juillet a d’ailleurs révélé que le gouvernement prévoyait une hausse de 2 à 4 points de la CSG, sachant qu’1 point de CSG rapporte environ 11 milliards (contre 7 milliards pour 1 point de TVA).
Les antilibéraux s’offusquent de ce « choix » de Hollande d’améliorer la compétitivité-prix des entreprises françaises et l’appellent à privilégier la relance par la demande, c’est-à-dire par la hausse des salaires (1). Mais Hollande n’a pas le « choix » à partir du moment où il gouverne dans le cadre du capitalisme. Voilà ce que le NPA devrait expliquer, au lieu de publier des articles (2) qui nient le lien fort et évident qui existe entre compétitivité et compression des salaires.
La CSG : une création de Rocard pour fiscaliser la Sécurité sociale et diminuer les cotisations sociales
La Sécurité sociale devrait être une institution non étatique où les travailleurs géreraient en commun la partie socialisée de leur salaire (les cotisations sociales payées par les patrons en sus du salaire direct individuel perçu par chacun). C’est cette perspective que les gouvernements bourgeois (de « droite » et de « gauche ») se sont acharnés à combattre. Et c’est un gouvernement de « gauche » (celui de Rocard en 1990) qui a porté un coup de poignard à la Sécu en créant la CSG (contribution sociale généralisée) pour faire diminuer les cotisations sociales. Le financement par l’impôt répond à un objectif idéologique : signifier que la Sécurité sociale ne devrait pas être la propriété des travailleurs (financée par la partie socialisée de leur salaire), mais un organisme étatique financé par des taxes. De façon mystificatrice, les idéologues de la bourgeoisie nous font croire que les cotisations constituent une « taxe sur le travail » (alors qu’il s’agit d’une partie de la rémunération des travailleurs) pour mieux justifier leur remplacement par des impôts, jugés plus « équitables » puisque ne taxant pas seulement le « travail »…
Ainsi, la CSG est un prélèvement payé par les particuliers, à assiette large (l’ensemble des revenus) et à taux proportionnel, contrairement à l’impôt sur le revenu qui est progressif (les taux augmentant avec les revenus). Sur les 89 milliards que devrait rapporter la CSG en 2012 (soit 35 milliards de plus que l’impôt sur le revenu), seuls 10 milliards proviennent de l’imposition des revenus du patrimoine. Autrement dit, la CSG est payée avant tout par les salariés et amputent leur salaire direct. Comme l’avait jadis déclaré Jacques Attali, peu suspect de gauchisme : « Avec la CSG, la gauche a trouvé le moyen d’inventer une fiscalité injuste » (Canard enchaîné du 11 juillet).
La CSG « compétitivité » : ce n’est pas mieux que la « TVA sociale » !
L’augmentation de la TVA est souvent présentée comme plus injuste qu’une hausse de la CSG. En réalité, l’augmentation de la CSG en contrepartie d’une baisse des cotisations patronales n’est pas moins anti-sociale qu’une hausse de la TVA.
Pour le voir, il faut se représenter les différentes composantes du prix d’une marchandise : les coûts des moyens de production, l’ensemble du salaire (salaire net + cotisations salariales + cotisations patronales), le profit et la TVA. Les cotisations alimentent les caisses de Sécurité sociale alors que la TVA alimente les caisses de l’État.
Si la baisse des cotisations patronales est exactement compensée par une hausse de la TVA (dont le montant est affecté aux caisses de Sécu) et que rien d’autre ne bouge, l’effet est neutre sur le prix et sur la répartition salaires/profits. Quand le consommateur achète un bien, il le paie au même prix et il « paie » alors tout autant la TVA que les autres composantes du prix. En outre, il est faux de considérer dans ce cas que la mise en place de la TVA sociale revient à diminuer ce que paient les patrons et à augmenter ce que paient les consommateurs (et donc en majorité les travailleurs). Dans la réalité, etant donné que les prix des biens importés tendant à augmenter (puisqu’ils sont touchés par la hausse de la TVA mais pas par la baisse des cotisations) (3), les capitalistes ont une marge de manœuvre pour profiter de la hausse de la TVA pour augmenter leurs marges et donc leurs prix. D’où une répartition qui devient plus favorable aux capitalistes.
Si la baisse des cotisations patronales est exactement compensée par une hausse de la CSG, et que rien d’autre ne bouge, les prix des marchandises produites en France baissent. Mais cette hausse de pouvoir d’achat potentielle est mangée par la baisse du salaire net perçu entraînée par la hausse de la CSG (qui frappe principalement les travailleurs). Mais dans la réalité, il est probable que les entreprises ne répercuteront pas intégralement la baisse de cotisations sur les prix, et profiteront (comme pour une hausse de la TVA) de leur nouvelle marge de manœuvre pour augmenter leurs marges. Alors le pouvoir d’achat des salariés diminuera : les prix baisseront peu ou pas du tout, alors que les impôts qui les frappent augmenteront.
CSG ou TVA, les travailleurs n’ont rien à gagner à la diminution des cotisations patronales. Et ils ont même encore plus à craindre d’une hausse de la CSG. En effet, la hausse des prix qu’entraînerait la hausse de la TVA serait en partie neutralisée par une hausse des retraites (indexées sur les prix) et des salaires (le Smic est également indexé sur les prix). En revanche, aucun mécanisme ne garantit une augmentation automatique du Smic ou des retraites en cas de hausse des impôts directs !
Toutes les mesures visant à améliorer la compétitivité des capitalistes français permettent d’intensifier le travail, d’augmenter les profits et de diminuer les salaires. Nous devons donc nous y opposer et exiger que l’intégralité du budget de la Sécurité sociale soit financée par des cotisations sociales, qui constituent notre salaire socialisé que nous devrions pouvoir gérer collectivement.
La complicité des bureaucraties syndicales et des réformistes
Alors que le gouvernement a clairement fixé le cap de la restauration de la compétitivité à l’issue de la « conférence sociale », les directions syndicales ont chaleureusement applaudi le discours de clôture d’Ayrault. Thibault a ainsi salué le « cap nouveau », la « démarche tout à fait différente » (4) du gouvernement.
Aucune direction syndicale n’a l’intention de lancer une mobilisation d’ampleur contre l’austérité de gauche, déjà bien réelle avec le non remplacement de 2 fonctionnaires sur 3 dans les ministères « non prioritaires » (au lieu d’1 sur 2 sous Sarkozy) et la baisse annoncée des dépenses de fonctionnement. Pire encore, alors que la CGT et FO s’opposent formellement à la hausse de la CSG pour compenser la baisse des cotisations patronales, la CFDT applaudit l’idée, tout en précisant que cette hausse devrait s’accompagner d’une hausse des salaires nets pour compenser son alourdissement ! Autrement dit, la CFDT approuve une attaque contre les travailleurs, en émettant le vœu (pieux) que cette attaque soit contrebalancée par une hausse des salaires... De qui se moque-t-on ?
À défaut d’annoncer des mesures en faveur des travailleurs, Hollande n’a pas oublié de chouchouter ses amis bureaucrates syndicaux. Ainsi, le gouvernement a émis l’idée de créer un « commissariat général à la prospective » où siégeraient des experts syndicaux qui seraient « indemnisés » aux frais de l’État. En outre, Hollande veut « valoriser les compétences » des permanents syndicaux : « en clair, le représentant d’une organisation qui abandonnerait ses mandats après des années de bons et loyaux services pourrait se voir proposer une promotion » (Le Canard enchaîné du 11 juillet). De quoi amadouer des bureaucrates déjà bien peu farouches...
Quant au Front de gauche, ses députés ont refusé de voter contre la confiance au gouvernement Ayrault, préférant s’abstenir pour bien montrer qu’ils n’ont nullement l’intention de s’opposer sérieusement à sa politique pourtant clairement annoncée désormais.
Face à ce gouvernement de « gauche » 100% au service de la bourgeoisie, toutes les organisations du mouvement ouvrier doivent être à 100% dans une opposition de classe. Dès maintenant, nous devons préparer la riposte et affronter politiquement l’obstacle que constituent les directions syndicales bureaucratisées, liées au PS ou au Front de gauche. Il faut œuvrer au rassemblement des militantes et des militants lutte de classe dans les syndicats pour imposer la rupture du dialogue social avec le gouvernement et exiger la mise en place d’un véritable plan de mobilisation contre l’austérité de gauche et contre les licenciements, avec notamment les mesures minimales suivantes :
- Refus de tous les licenciements : les entreprises qui veulent licencier doivent être nationalisées sans indemnité, sous contrôle des travailleurs ;
- Refus de toutes les mesures d’austérité : non à la hausse de la CSG ; non à la baisse des dépenses de fonctionnements dans la fonction publique ; non à la baisse des effectifs dans les administrations « non prioritaires » ;
- Initiatives pour aider et lancer des grèves, coordination des luttes.
1) Sur la pente dangereuse du social libéralisme », par Laurent Mauduit dans Mediapart, http://democratie-reelle-nimes.over-blog.com/article-sur-la-pente-dangereuse-du-social-liberalisme-108034710.html
2) Comme dans l’article de Louis Adam dans « Tout est à nous » du 23 février 2012 : http://www.npa2009.org/content/vous-avez-dit-%C2%AB%E2%80%89comp%C3%A9titivit%C3%A9%E2%80%89%C2%BB
3) C’est d’ailleurs le but de la « TVA sociale » de pénaliser les producteurs non-résidents par rapport aux producteurs qui produisent en France