Crédit immobilier de France : nationaliser pour sauver les emplois!
(Article à paraître dans Tout est à nous)
Tout
s"est déroulé très rapidement et sans mot dire : le 28 août,
Moody"s dégrade de trois crans la note du Crédit
immobilier de France (CIF) ;
trois jours plus tard, l’État accorde une garantie de 20 milliards
d"€ au CIF. Concrètement, cela signifie que l’État remboursera
les créanciers du CIF au cas où le CIF ne serait plus en capacité
de le faire. On comprend la volonté de discrétion du gouvernement :
pendant sa campagne, Hollande avait juré que plus jamais on ne
renflouerait les banques avec l'argent du contribuable ! On n'en
est pas encore là, mais avec cette garantie, l’État adresse un
message limpide : les capitalistes ne perdront rien, et ce sont
les impôts payés majoritairement par les travailleurs qui
constitueront, « au cas où », la variable d'ajustement.
Comment
en est-on arrivé là ? Créé en 1908, regroupant 300 agences
et 2 500 salariés, le CIF finance des crédits immobiliers aux
particuliers en empruntant à court terme sur le marché
interbancaire (auprès des autres banques). Le CIF ne collecte pas de
dépôts : ses ressources dépendent donc uniquement de la
confiance des marchés. Or, avec la crise, les banques hésitent de
plus en plus à se prêter mutuellement. En outre, les sombres
perspectives du marché immobilier ont précipité la crise de
liquidité : trouvant de plus en plus difficilement des
créanciers pour faire face à ses échéances de remboursement, la
dégradation de Moody"s a signé le coup de grâce : sans la
garantie de l’État, le CIF serait en faillite.
Que
va-t-il se passer maintenant ? Faute de repreneur (la Banque
postale a décliné...),
l’État programme la mort lente du CIF, en stoppant l'octroi de
nouveaux crédits et en ordonnant la gestion des affaires courantes
en attendant que l'ensemble des crédits (424 000) arrivent à
échéance. Ainsi, ce sont les ménages modestes qui profitaient de
conditions intéressantes de crédit qui sont immédiatement
pénalisés et qui ne peuvent plus accéder à la propriété de leur
logement. Ceci au moment où les crédits immobiliers accordés par
les banques ont reculé de 31,4% sur les huit premiers mois de
l"année 2012. Alors que les mises en chantier reculent, la
disparition du CIF pourrait accélérer cette tendance et aiguiser
les problèmes de logement de nombreux travailleurs, malgré un début
de baisse des prix immobiliers qui pourrait s’amplifier dans les
mois qui viennent.
Les
salariés du CIF sont mobilisés contre la fin programmée de leur
banque : jeudi 13 septembre, 1 700 (selon la police) à
2 000 (selon les syndicats) sont venus de toute la France
manifester à Paris, pour défendre leur emploi et l'accession à la
propriété pour les foyers modestes. Une banderole « le marché
sauvé, le personnel sacrifié » synthétisait parfaitement les
objectifs du « sauvetage » du CIF.
Il
existe pourtant une autre issue, que le gouvernement ne veut
évidemment pas envisager : la nationalisation sous le contrôle
des travailleurs, afin de pérenniser l'activité (sans aucun
licenciement) et la soustraire à la pression des marchés
financiers. Il faut en outre réorganiser le financement du logement
populaire qui devrait être pris en charge par un monopole public à
partir de l’épargne des ménages (livret A, etc.) sans avoir
recours à l’emprunt sur les marchés.
Plus
globalement, c'est l'expropriation du secteur bancaire privé et la
constitution d'un monopole public bancaire entre les mains des
travailleurs et de leurs représentants qui peut nous sortir de la
crise. Exproprier les capitalistes et prendre collectivement le
contrôle de la monnaie, du crédit, et des grands moyens de
production : voilà les grands axes d'une alternative socialiste
à la crise du capitalisme.
Télécharger au format