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COP ou pas COP : pourquoi notre écologie est anticapitaliste
La COP22 s’est achevée la semaine dernière à Marrakech. Baptisée « la COP de l’action » par la présidence marocaine, ce nouveau rendez-vous avait justement pour objectif de passer concrètement aux actes après les grandes déclarations de principe issues de la COP21. Malheureusement une fois encore les engagements concrets ont échoué à suivre les discours, ce qui n’est en fait qu’une habitude lassante à force de répétition sans avoir besoin de remonter bien loin dans l’histoire de ces grandes conférences internationales.
Communiquer, pour remplir les vides
Ne serait-ce que l’an dernier, on se souvient de l’énorme tapage politico-médiatique suscité par la COP21, et surtout par l’adoption de l’accord de Paris qui en avait résulté. A l’époque, une bonne partie de la presse dominante n’avait pas hésité à reprendre voire appuyer les qualificatifs les plus dithyrambiques tout droit sortis des cabinets ministériels et onusiens : accord « historique », « universel », « ambitieux », « réussi », « le meilleur possible »… Des moyens considérables en communication[1] ont continué à être déployés depuis pour ne pas laisser retomber le soufflé de l’autocongratulation. Optimisme béat, aveuglement naïf ou culpabilité complice de tout ce petit monde ?
Il n’y avait pourtant pas besoin de chercher loin pour en juger[2]. Un seul élément notable suffit à révéler le creux de l’affaire : l’accord de Paris n’est qu’une déclaration d’intention, générale et non contraignante, aussi universelle et ambitieuse que soit cette intention. Après cela, on peut donc bien dire que 195 pays se sont mis d’accord à Paris pour limiter le réchauffement climatique à +2°C, voire +1,5°C, d’ici la fin du siècle, mais les contributions volontaires publiées par les gouvernements de ces mêmes pays ne permettent d’espérer guère mieux qu’une limitation globale de +3°C, soit bien au-delà de la ligne rouge annoncée. On peut aussi certes bien dire que des mécanismes de révision et des bilans mondiaux sont prévus à échéances régulières, mais il suffit de constater qu’aucun mécanisme de contrôle n’est évoqué et encore moins de sanction si les actions effectives ne suivent pas.
Les financements climatiques, nerf de la guerre et miroir de l’injustice climatique
Une autre pierre d’achoppement de taille mérite d’être relevée : les financements climatiques. En 2009 déjà, la COP15 avec l’accord de Copenhague promettait de mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 pour financer les projets de lutte contre les changements climatiques. Là encore, on ne peut que constater l’écart béant entre les discours et la réalité : la feuille de route présentée par les États n’envisage pour l’heure au mieux que 60 à 70 milliards, bien loin de l’objectif annoncé sept ans auparavant. Comme souvent, le sujet du financement est véritablement le nerf de la guerre. Cette problématique soulève au moins deux enjeux importants, qui pourraient tous deux être rapprochés d’une bataille plus générale pour la justice climatique, liée à la justice sociale.
Un premier enjeu est celui de la répartition entre contributions publiques et privées pour constituer le fonds annuel de 100 milliards de dollars. Suivant leurs intérêts capitalistes à court et moyen termes, les investisseurs privés peinent à se laisser convaincre de s’engager davantage dans les projets en faveur du climat, faute de perspectives de profit suffisamment importantes ou solides. Si on accepte cette logique, le gros de l’effort financier est ainsi appelé à reposer massivement sur les finances publiques. Or, considérant ces temps de crise économique mondiale et de politiques généralisées d’austérité budgétaire, cela amène à considérer que le financement de la lutte contre les changements climatiques est en quelque sorte mort-né.
Un deuxième enjeu réside dans l’équilibre des projets qui bénéficieront de ce fonds climat, entre projets pour l’atténuation (réduire les émissions de gaz à effet de serre) et projets pour l’adaptation (réduire la vulnérabilité aux effets des changements climatique), même si on peut bien sûr concevoir des projets qui répondent aux deux aspects. Aujourd’hui, une grande majorité des financements climatiques est consacrée à l’atténuation (plus de 80 %). Or les projets d’atténuation bénéficient principalement aux pays les plus riches (projets portant sur l’efficacité énergétique, le transport, l’industrie, le stockage du carbone, les énergies renouvelables…). A l’inverse, l’adaptation fait figure de parent pauvre alors qu’elle permet principalement aux pays les plus pauvres et aux zones côtières de faire face aux effets immédiats et à très court terme du réchauffement (projets portant sur la prévention des risques, la gestion de l’eau, l’agriculture…). C’est d’autant plus aberrant que la responsabilité du changement climatique mondial actuel incombe aux immenses quantités de gaz à effet de serre rejetées par les pays riches au cours de leur fulgurant développement depuis la révolution industrielle.
Intérêts privés contre intérêt social : les Etats et les grandes entreprises main dans la main
Dans ce jeu qui a ses gagnants et ses perdants, au lieu de défendre un prétendu intérêt supérieur commun, les gouvernements des différents pays savent former des alliances pour défendre leurs intérêts nationaux bien compris et se renvoyer hypocritement la balle. Et même, un peu partout depuis la COP21, on entend de plus en plus souvent les chefs d’Etat et leurs ministres, en particulier en France, appeler à une mobilisation des « acteurs non-Étatiques » pour se rassembler dans un même élan. Mais de qui parle-t-on au juste ? De la société civile à qui on interdit de manifester contre la COP21 sous prétexte d’état d’urgence et qu’on réprime quand elle s’oppose au grand projet destructeur et pollueur de Notre-Dame-des-Landes ? Des collectivités territoriales dont l’État ne cesse de réduire les dotations d’années en années ? Du seteur de l’éducation et de la recherche qui subit de plein fouet la casse des services publics ?
Ne reste alors que le monde du business et des entreprises privées. Ainsi, pour nos politiciens, en appeler aux acteurs non-Étatiques, c’est une façon pudique de s’en remettre, par faiblesse ou copinage, aux investisseurs privés… alors qu’ils sont véritablement parties prenantes et dominantes de la machine à polluer. Une illustration flagrante de cette contradiction : pour espérer contenir le réchauffement global à +2°C maximum, il faudra laisser sous terre 80 % des réserves déjà disponibles de pétrole, gaz et charbon. Dans les faits, il faudrait persuader toutes les majors de l’énergie d’arrêter la prospection et de renoncer sur le champ à exploiter le tas d’or (noir) qui fait leur fortune et leur pouvoir ! Un scénario-fiction d’auto-suicide économique que même Hollywood n’a pas encore imaginé.
En fin de compte, on peut bien croire que les dirigeants de ce monde ont compris l’urgence climatique, au-delà de l’émoi que peut susciter l’entrée d’un climato-sceptique comme Trump dans ce petit cercle, il suffit de voir le champ libre laissé à la puissance des lobbys capitalistes sur l’environnement et le social pour comprendre qu’il n’y a rien à attendre de ces marionnettes politiques, même repeintes en vert.
Pour l’écologie aussi, sortir du capitalisme
Loin d’être un combat qui pourrait naïvement rassembler « tout le monde » dans une même ardeur innocente et faire table rase des questions qui fâchent, la lutte contre le changement climatique cristallise des intérêts divergents qui font ainsi largement écho au capitalisme moderne, à son mode de développement impérialiste, à ses logiques de profit, à ses rapports de pouvoir. Pour nous, il ne s’agit pas seulement d’une guerre contre le réchauffement climatique, mais d’une guerre contre le Capital et ses intérêts. C’est pourquoi notre défense de l’environnement ne peut pas être compatible avec l’idée d’un développement durable sous la forme d’un « capitalisme vert » qui laisserait le pouvoir aux capitalistes de conditionner notre présent et notre avenir à leurs profits.
Luttons pour nos propres revendications !
Contre le « greenwashing », les vœux pieux et les plaidoyers illusoires des grandes entreprises et des dirigeants politiques, nous opposons nos revendications par la lutte, nos propres mobilisations, pour une écologie nécessairement et fondamentalement anticapitaliste :
- Expropriation et mise sous contrôle des salarié.e.s et des usager.e.s des grandes entreprises de l’énergie, l’industrie, les transports… !
- Planification et conversion démocratiques des systèmes de production/consommation en fonction des besoins sociaux !
- Développement des énergies renouvelables pour sortir au plus vite du fossile et du nucléaire, arrêt des pratiques agricoles néfastes pour l’environnement et la santé… !