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Après le premier tour des élections départementales...
Rejet massif du gouvernement et forte progression du Front national
Pas une voix pour le PS, l'UMP et le FN... nous nous exprimerons dans la rue le 9 avril !
Travaillons en urgence à la popularisation d'une alternative politique « antisystème » crédible donc révolutionnaire !
Après la déculottée des municipales et des européennes, le gouvernement a une nouvelle fois subi une défaite cinglante lors du premier tour des élections départementales. Mais de façon incroyable, les dirigeants socialistes ont eu le toupet de nier cette raclée et de verser dans l'autosatisfaction. Dès 20h05, Valls claironnait que le PS avait fait un score « honorable » pendant que Le Guen osait dire que le PS avait fait à peu près le même score que lors des élections cantonales de 2011. Ces gens là nous prennent pour des imbéciles, et cela risque de contribuer à accentuer leur raclée pour le second tour de dimanche prochain.
Une abstention très forte des jeunes et des catégories populaires
Même si l'abstention est moins forte qu'en 2011 et que ce que prévoyaient les sondages, elle est néanmoins très importante (49,8%), compte tenu du fait que ces élections concernaient pour la première fois tous les cantons en même temps, et avaient une portée nationale forte. Si on y ajoute les votes blancs (3,29% des votants, 1,65% des inscrits) et nuls (1,60% des votants, 0,80% des inscrits), 52,3% des inscrits ont donc refusé de voter pour un binôme de candidat-e-s.
Les deux tiers des moins de 35 ans (contre un tiers à peine des plus de 65 ans) et environ 60% des catégories populaires (ouvriers et employés) se sont abstenus. Plus que jamais, l'abstention est clivée par la classe et l'âge. Elle exprime un profond rejet des politiciens en général et l'absence d'alternatives jugées crédibles et désirables. Pour beaucoup d'abstentionnistes, et c'est pour nous le côté le plus négatif de l'abstention, cela entraîne une dépolitisation et un désintérêt croissant pour le débat politique
Le FN progresse fortement et il y aura des dizaines d'élu-e-s FN malgré le « front républicain »
Le FN progresse légèrement par rapport aux élections européennes, dans une élection qui lui est défavorable puisque l'absence de notables locaux joue en sa défaveur. Malgré ce handicap, le FN réalise le plus gros score de son histoire et sera présent au second tour dans la moitié des cantons. Il fera élire des dizaines de candidat-e-s, dirigera peut-être un ou plusieurs départements, et empêchera probablement des majorités absolues UMP ou PS dans plusieurs départements, notamment dans les régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie.
Dans la continuité des scrutins précédents, le FN recueille avant tout le vote des actif/ve-s des catégories populaires (40%), avec une pointe autour de 45-50% chez les ouvrier-e-s. Son score dans les campagnes et les villes de la « France périphérique » sont souvent impressionnants. Le FN est le plus faible chez les retraité-e-s (17-18%) et les cadres supérieurs (13-15%), c'est-à-dire les catégories qui s'abstiennent le moins. C'est une erreur complète de se « rassurer » en pensant que la forte abstention bénéfice au FN, un raisonnement qui sous-entend que les abstentionnistes ne voteraient pas FN s'ils/elles votaient. Or, ce sont les catégories qui votent le plus FN qui s'abstiennent le plus, et le FN réalise ses pourcentages les plus élevés à l'élection présidentielle, celle où il y a le moins d'abstentions. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Marine Le Pen est pour le vote obligatoire, car elle sait que cela lui profiterait vraisemblablement. Si on oblige des abstentionnistes en colère contre les politiciens et souvent dépolitisés à voter, il est fort possible que cela profite au FN.
Donc il faut être conscient que le score très élevé du FN (25,3%) est davantage un plancher qu'un plafond, et que le FN a encore une marge de progression importante, d'autant plus que la situation économique et sociale des travailleurs/ses risque de se détériorer encore davantage. Le deuxième tour va probablement confirmer une tendance observée lors des élections partielles depuis 2012 : la capacité du FN à progresser fortement entre les deux tours, en siphonnant une grande partie de l'électorat UMP (dans les duels avec la gauche), mais aussi une partie de l'électorat de gauche (dans les duels avec la droite), tout en mobilisant des abstentionnistes du premier tour. En outre, la petite musique du « front républicain » marche de moins en moins, et ne fait que conforter la posture « antisystème » frauduleuse du FN. Un sondage Ipsos assez étonnant au soir du premier tour indique que 44% souhaitent que le FN sorte renforcé des élections, 41% l'UMP, 30% le PS. Cela illustre le potentiel de progression du FN.
La droite crie victoire... mais elle ne progresse pas par rapport aux européennes
Sarkozy a proclamé qu'il était le grand vainqueur de ces élections. Pourtant le pourcentage de toute la droite (Modem compris) n'est que de 36,6%, en fait un score très bas pour la droite à ce type d'élections. La droite réalise exactement le même score qu'aux européennes, et c'est pourquoi les analyses sur la poussée de l'UMP et le reflux du FN sont un leurre. L'UMP fait mieux et le FN fait moins bien que ce que les sondages prévoyaient, mais ce n'est pas à l'aune des sondages qu'on doit analyser une élection, mais par rapport aux scrutins antérieurs.
L'électorat de l'UMP est très concentré dans le patronat, les couches supérieures du salariat et surtout chez les retraité-e-s, c'est-à-dire ceux et celles qui ont le plus voté. Son électorat était particulièrement mobilisé, ce qui relativise encore davantage l'importance du score de l'UMP. Grâce à des candidatures unitaires de la droite dans la plupart des cantons, grâce à l'effondrement et à la division de la gauche, et grâce au « front républicain » contre le FN, la droite va être en mesure de diriger une grande majorité de départements. Mais il n'en demeure pas moins que la droite reste très minoritaire. UMP, UDI et Modem dépassent ensemble le FN, mais le FN confirme son statut de premier parti (acquis lors des européennes) à l'issue du premier tour des départementales.
La gauche gouvernementale s'effondre, notamment dans les départements les plus sinistrés
La lourde défaite du PS est indiscutable. L'ensemble de la « gauche » passe de 49,6% en 2011 à 36,8% aujourd'hui. La chute est vertigineuse. Et la comparaison avec les élections cantonales de 2001 (sous Jospin) est cruelle pour Hollande/Valls. Il faut remonter à 1992 (et encore, avec les écologistes classés à l'époque « ni gauche, ni droite », ce n'est pas le cas) pour atteindre un cumul des pourcentages des partis de « gauche » aussi faible. La défaite du PS est d'autant plus manifeste que le PS disposait d'énormément d'élu-e-s sortant-e-s, ce qui a tiré son score vers le haut. Mais ce qui a dominé, et de loin, c'est la volonté de sanctionner le gouvernement.
La coupure entre le PS et les catégories populaires (qui ont encore moins voté pour le PS que la moyenne) est désormais abyssale. Il est difficile aujourd'hui de nier la nature complètement bourgeoise du PS, qui a abandonné depuis longtemps toute perspective socialiste, met en œuvre les pires politiques d'austérité, et n'incarne plus rien de positif pour le prolétariat qui le rejette massivement. Le PS est éliminé du second tour dans une grande majorité de cantons du département du Nord, manifestation spectaculaire de ce fossé entre PS et catégories populaires... et du fait que la semi-« frondeuse » Aubry est mise dans le même sac que Hollande/Valls. Il est symptomatique que le PS résiste le mieux dans les zones les plus favorisées alors qu'il sombre dans les territoires périphériques.
Le Front de gauche ne profite pas de la débâcle du parti socialiste
Il est difficile d'évaluer précisément le score des principales composantes (PC et PG) du Front de gauche, car elles se sont présentées selon différentes configurations : avec le PS, avec Europe Écologie ou de façon autonome. Mais il est par contre incontestable que le Front de gauche ne profite pas de la droitisation du PS et du rejet du gouvernement. Au contraire, il est entraîné dans sa chute par le PS. Le PCF résiste assez bien dans ses fiefs du Val de Marne et de l'Allier qu'il peut espérer conserver, mais il va perdre globalement beaucoup d'élu-e-s. Les listes communes entre le PG et Europe Écologie échouent de façon quasi-systématique à devancer le PS (pourtant en chute libre), y compris en Isère, où le nouveau maire de Grenoble est soutenu par EE et le PG.
Le Front de gauche échoue surtout à rallier les suffrages des catégories populaires. Il réalise des scores plutôt inférieurs à la moyenne chez les ouvrier-e-s, et le cœur de son électorat est davantage celui des professions intermédiaires, typiquement les fonctionnaires moyen-ne-s. Pour les ouvrier-e-s et employé-e-s, le Front de gauche n'incarne pas le rejet du système et n'offre pas d'alternative politique crédible.
Au deuxième tour, pas une voix pour le PS, l'UMP et le FN !
On n'éteint pas l'incendie en votant pour les incendiaires !
Nous déplorons la prise de position (à une très courte majorité) de la direction du NPA, qui appelle à voter PS pour faire barrage au FN. C'est un choix incompréhensible, prisonnier d'une vieille grille de lecture, qui fait du PS un parti de notre camp social (contrairement à l'UMP) qui pourrait permettre de freiner la montée du FN. Or, le PS et l'UMP dont deux partis de la bourgeoisie qui mettent en place les mêmes politiques d'austérité qui alimentent la désespérance sociale et le vote FN. Le FN aura alors beau jeu de gloser sur notre radicalisme verbal qui se conjugue à un appel à faire front commun électoral avec le PS. Le FN se nourrit de ce type de positions « tactiques », qui alimente la confusion et l'incompréhension autour de notre profil politique. Alors que la très grande majorité du prolétariat ne voit plus le PS comme un parti qui défend (même de façon partielle) ses intérêts, ce n'est vraiment pas le moment de théoriser une soi-disant différence de nature entre le PS d'un côté, le Modem, l'UDI, l'UMP de l'autre.
Nous nous positionnons contre tout vote « utile » pour le PS, et bien sur contre tout vote pour la droite et l'extrême droite. La seule façon de faire régresser le FN est d'y opposer une alternative politique « antisystème » crédible, donc révolutionnaire, et de tout faire pour unifier notre classe sociale dans le combat contre ce gouvernement, avec l'objectif d'une grève générale bloquant l'économie et seule capable d'empêcher le gouvernement de nuire. Il faut tout faire pour réussir la journée de grève du 9 avril, et il faut dès maintenant se confronter aux bureaucraties syndicales pour préparer la suite, pour en finir avec la stratégie des journées d'action isolées qui démoralisent les travailleurs/ses, en menant le combat à la fois dans les syndicats et pour l’auto-organisation par des AG dans les lieux de travail