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    Honeywell ne doit pas fermer! Réquisition sans indemnités, ni rachat !

    Par Jean Veymont (28 octobre 2011)
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    Le 19 octobre, la direction de l'usine d'Honeywell de Condé-sur-Noireau (Calvados) a annoncé lors d'un comité d'entreprise extraordinaire la fermeture du site qu'elle a prévue pour le 30 juin 2013. Ce sont 323 emplois qui vont se retrouver sur le pavé.

    Le groupe Honeywell est bénéficiaire et a réalisé un chiffre d'affaires de 33 milliards de dollars en 2010 contre 30,4 milliards en 2009. (860 millions de dollars au 3ème trimestre 2011). Le groupe emploie 120 000 personnes dans le monde dont 3 650 sur 30 sites en France.

    Usine à hauts risques sanitaires : travail sur fibre cancérigène, interdite en France depuis 1997, elle est installée sur 32 000 m2 et a compté jusqu’à 2 600 salariés dans les années 1960. Elle fabriquait des garnitures de frein notamment pour le groupe PSA. Depuis dix ans, elle était sous contrôle du groupe américain Honeywell et les effectifs sont tombés à 323. Le site de Condé-sur-Noireau est un centre de production et de développement pour Honeywell. D'après les chiffres de 2009, l'usine produit environ 20 millions de plaquettes de frein par an, et accueille également un centre R&D qui, en moyenne, fabrique 16 000 prototypes de plaquettes par an, et mets au point 150 formules. Il réalise environ 750 essais sur les 4 bancs dynamométriques et une centaine d’essais bruits. En dépit de ce que peut annoncer la direction, Condé est donc parfaitement viable tant par son savoir-faire que par la technologie présente mais la page semble tournée.

    L’usine Honeywell de Condé-sur-Noireau (Calvados) va fermer en 2013

    L’annonce a été faite ce 25 octobre, lors d’un comité d’entreprise extraordinaire. Sonnée, abasourdie, l’intersyndicale (CGT, FO, CFDT, CGC) n'avait pas imaginé cette issue brutale. Pour FO « On s'attendait à un plan social. La direction nous dit que l'on n'a plus le bon process, que l'usine est vieillissante et à moitié vide. Mais, ce sont nos dirigeants qui ont fait toutes ces erreurs depuis dix ans et ils nous le font payer ». « On prend une claque’ » déclare un représentant CGT

    Elle a fait l’effet d’une bombe tant l’impact va être grand économiquement et socialement pour une petite commune de 5 600 habitants puisqu’il est le 3e employeur. Honeywell impactera aussi lourdement le bassin d’emploi déjà mis à mal par la restructuration de Faurecia[1], ce qui fait dire à la présidente de l'union des commerçants, Sandrine Oudard, que « Honeywell fait partie de l'histoire de la ville ». Pour FO, c’est une « vraie catastrophe pour le bassin d'emploi de Condé-sur-Noireau ».

    Mais aujourd’hui, la direction de l’entreprise juge que le site n’est plus compétitif. Selon François Serizay, le directeur des relations sociales du site :« les causes de cette décision sont multiples » ; « Condé-sur-Noireau enregistre des pertes depuis cinq ans, avec un déficit cumulé de 15 millions d'euros dont 7 millions sur 2011 ». Mais nous « regarderons avec beaucoup d'attention les propositions qui seront faites, bien que la technologie ne réponde plus aux attentes des clients, et que donc il se trouve aujourd'hui obsolète. Économiquement et commercialement, il n'est plus viable. Il faudrait que les collectivités débloquent 100 millions d'euros pour remettre le site aux normes ». Voilà leur morale.

    Mais les causes de cette fermeture sont d’une toute autre nature

    Pour ces capitalistes avides de rentabilité et de dividendes pour leurs actionnaires, la solution consiste à aller s’installer en Roumanie « pour accompagner la croissance importante des pays de l'Est ». Une nouvelle usine de plaquettes de freins est en chantier en Roumanie avec tout ce qui se fait de plus moderne en la matière. Sans compter une main d'œuvre bon marché, les investissements sont déjà réalisés, avec le soutien de l'Union Européenne. Alors la vieille usine dépassée de Condé...

    Un aveu dont le cynisme et l’arrogance n’ont d’égal que du peu de cas qu’ils font des travailleurs et de leur famille. Pour aggraver encore la situation avant la fermeture, les travailleurs seront mis en chômage partiel jusqu’à la fin de l’année.

    Premières ripostes des travailleurs

    Dès le 20 octobre, lors de sa rentrée plénière le conseil général a reçu la visite d'une délégation de représentants syndicaux et de salariés. Comme les élus locaux, il s’est dit mobilisé « pour sauver les emplois avec le déblocage de subventions pour réorienter le groupe américain sur le site ».

    Pour un élu municipal, c’est « une catastrophe, pour les salariés, pour notre ville, pour l'intercommunalité qui touchait 1,2 million d'euros par Honeywell comme taxe professionnelle ». Dans les prochains jours, d’après leurs dires, des élus locaux vont tenter de reprendre la main face à la direction. L'initiative a néanmoins peu de chance d'aboutir. « Je n'y crois pas, estime François Serizay. Il faudrait que les collectivités débloquent 100 millions d'euros pour remettre le site aux normes ».

    Une table ronde s’est tenue le 25 octobre avec le préfet, les représentants du personnel, les dirigeants de la société, les élus. Pour mettre la pression sur ces « décideurs », la ville a été déclaré « ville morte » ; en signe de solidarité, les commerçants avaient baissé leur rideau de 15h à 16h, conscients de l’impact qu’aurait la fermeture de Honeywell. Un rassemblement des travailleurs du bassin a eu lieu également devant la préfecture. Si la fermeture est confirmée « ce serait une des plus grandes catastrophes économiques de la région depuis la fermeture de Moulinex en novembre 2001 » tonne un élu municipal.

    Les premières négociations sociales sont prévues pour le 26 octobre. Les syndicats ont d'ores et déjà annoncé être « prêts à mener des actions pour garantir la survie du site et les 323 emplois ». Pour FO, « C'est trop facile d'acheter un site, de le laisser crever à petit feu et de gratter ce qu'il y a et de nous laisser sur le carreau. On se battra jusqu'au bout ».

    Report du comité d’établissement

    Honeywell souhaitait aller vite dans la liquidation du site et avait donc prévue une réunion du CE qui devait lancer la procédure du Plan de Sauvegarde de l’emploi (PSE) le 26/10 avec l’étude des raisons économiques de la fermeture du site le 30 juin 2013. Suite à la table ronde du 25/10 qui a vu la mise en place d’un groupe de travail afin de rechercher des pistes pour maintenir le site, les élus locaux ont demandé à la direction de Honeywell le report de ce CE. Report qui a été accepté ainsi qu’une prochaine réunion le 28/10, ce qui permettrait aux élus locaux de peaufiner leurs propositions au groupe américain afin de lui proposer un nouveau site, à l'image de l'usine Faurecia de Flers où un plan de plus de 28 millions d'€ a permis de soutenir un millier d'emplois. Mais pour les responsables de Honeywell, aucune proposition concrète n'a été faite hier, juste des promesses. « Nous avons accepté de repousser la réunion du Comité d'Établissement initialement prévue demain mercredi et allons rencontrer à nouveau ce vendredi les services du Préfet, les syndicats et les autorités locales afin de s'accorder sur un calendrier de consultation pour les semaines à venir (...) Nous espérons que ce processus nous permettra d'impliquer les représentants de nos salariés et les pouvoirs publics locaux dans un échange constructif à mesure que nous avancerons dans la discussion », conclut la directrice de la communication d'Honeywell.

    Propositions plus que discutables des élus

    Tous en cœur, les élus de tous bords se disent prêts à sauver les emplois « avec des aides pour que Honeywell puisse redéployer la production à Condé pour cela les collectivités vont mobiliser des lignes de crédits importantes. Nous serons une opposition frontale et constructive ».

    Si nous nous référons aux estimations du directeur des relatons sociales évaluées à 100 millions d’€ pour faire redémarrer l’usine, les élus seraient donc prêts à injecter une telle somme d’argent public pour sauver un capitaliste avide de super-bénéfices et d’hypothétiques emplois qui seraient laissés sans nul doute à l’appréciation d’Honeywell. Un tel marchandage serait se plier aux diktats du capitalisme, ce serait lui faire un chèque en blanc avec de l’argent public, ce serait faire payer leur crise à la collectivité alors qu’il y a une multitude de besoins sociaux non satisfaits.

    Au lieu de contester les raisons invoquées par la transnationale américaine pour fermer le site, les élus devraient, dans le cadre de leurs responsabilités et dans le respect des fonds publics dont ils ont la charge, décider avec les organisations syndicales, les travailleurs, la population de réquisitionner l’usine puisque la direction Honeywell ne veut pas maintenir le site avec son appareil de production et les emplois qui y sont encore attachés. Un tel geste condamnerait la stratégie d'un groupe qui achète des entreprises, exploite les salariés, laisse péricliter le site avant de délocaliser ses productions.

    Alors que la santé du groupe est au zénith, il serait crapuleux de ne pas s’affranchir de ce capitalisme prédateur, il serait immoral de faire payer les perdants de cette restructuration. Il y a donc mieux à faire que distribuer l’argent à fond perdu et les travailleurs sont en capacité de le faire. Ils l’ont démontré à de nombreuses reprises leur force et leur détermination. L’histoire de Honeywell est traversée de nombreux conflits tant pour la défense de leurs conditions de vie que de travail. Oser poser la réquisition à ce reniement social et humain qu’est la fermeture de l’usine de Condé-sur-Noireau est la seule solution efficace. Si les élus peuvent réellement trouver 100 millions d’euros pour faire les investissements nécessaires à la modernisation de l’usine, alors ils peuvent aussi bien le faire pour une usine sous contrôle ouvrier que pour Honeywell. Alors, plutôt que de renflouer une fois de plus le patronat avec l’argent des travailleurs, qui de toute façon recommencera le même chantage dans peu de temps ou partira après avoir empoché les subventions, tous ensemble disons :

    • Non a tous les licenciements

    • Oui a la réquisition sans indemnités ni rachat sous contrôle des travailleurs

     

    [1] Voir notre article « Connaître et comprendre pour mieux résister: voyage dans l’univers Faurecia » http://tendanceclaire.npa.free.fr/contenu/autre/artpdf-283.pdf

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