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      Pour une analyse marxiste de la crise. Pour expliquer l’impasse de l’antilibéralisme et la nécessité d’une rupture avec le capitalisme

      Par Tendance CLAIRE (25 septembre 2017)
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      Nous sommes aujourd'hui incapables de convaincre sur l'imposture du programme économique de la France insoumise pour une raison fort simple : nous portons la même analyse de la crise... sans nous rendre compte que cette analyse légitime les réponses de Mélenchon !

      Alors que l'analyse économique marxiste devrait constituer un fondement solide de notre parti, cet héritage est aujourd'hui dilapidé par la direction de notre parti. Nous sommes à la remorque idéologique des réformistes, alors que l'ampleur de la crise et la faillite des solutions bourgeoises à la crise (libérales ou keynésiennes) devraient nous ouvrir un boulevard pour populariser les analyses marxistes, et les réponses politiques qui en découlent.

      Que dit Mélenchon sur la crise ? Que ce sont les politiques d'austérité « absurdes Â» qui sont responsables de la crise. Le blocage des salaires, les coupes dans les dépenses publiques dépriment la « demande Â» : du coup, les carnets de commandes des entreprises se vident, si bien que la production se contracte et que l'investissement des entreprises chute, celles-ci préférant spéculer sur les marchés financiers. Si ce diagnostic est juste, les remèdes de Mélenchon sont parfaitement adaptés : il faut augmenter les salaires et les dépenses publiques, ce qui permettra de remplir les carnets de commande et faire redémarrer l'économie ! Pas la peine d'en finir avec le capitalisme, il faut  suffit d’en finir avec les politiques néolibérales « absurdes » et tout le monde ou presque sera gagnant (salariés, « entrepreneurs », etc.). Les seuls qui seront perdants seront les méchants financiers qui spéculent sur le terreau de la crise. Mélenchon se présente ainsi en expert du « bon Â» capitalisme. L’analyse en terme des classe exploitées contre la classe exploitante disparaît, et la centralité de la classe ouvrière avec.

      Que dit notre parti sur les causes de la crise ? A peu près la même chose. Par exemple, dans son livre de 2012 (On a voté… et puis après ?), Olivier Besancenot développe une théorie de la crise qu’il attribue frauduleusement à Marx : « En s’attaquant au coût du travail, en réduisant les salaires, le pouvoir d’achat et en supprimant de l’emploi, les détenteurs de capitaux rétablissent, il est vrai, des taux de profit et des marges supplémentaires en leur faveur, mais sur la base d’un calcul à très court terme. En privant la population des moyens de consommer ce que les producteurs produisent, ils empêchent la société d’absorber les ressources produites. Les capitalistes disposent dès lors d’une production qui ne trouve pas de marchés solvables. L’offre ne correspond plus à la demande. C’est ce que l’on appelle la crise de surproduction et de suraccumulation, que Marx avait déjà décelée dans la société capitaliste, il y a plus de 150 ans, dans ses travaux sur la crise de 1857 Â» (p.55-56). Cet extrait est représentatif de ce que dit notre parti à une échelle large.

      Pourtant, l’explication marxiste de la crise est parfaitement corroborée encore aujourd'hui par les faits. Cette explication est la suivante : le système entre en crise quand les capitalistes ne sont plus capables d’extorquer suffisamment de plus-value par rapport à la masse de capital investi. C’est ce que Marx appelle la « suraccumulation de capital » (qui n’a rien à voir avec l’explication attribuée à Marx par Besancenot) à laquelle conduit la « loi fondamentale de l’économie politique Â», à savoir la loi de la baisse tendancielle du taux de profit. Marx explique que le fonctionnement normal du système conduit les capitalistes à utiliser de plus en plus de machines et de moins en moins de travailleurs/ses. Or c’est l’exploitation des travailleurs/ses qui est la source des profits, pas les moyens de production. Résultat : le taux de profit moyen diminue. L’enchaînement causal est alors le suivant : quand le profit diminue, l’investissement diminue, la croissance ralentit, le chômage augmente. C’est exactement ce qu’on a constaté. Ce n’est pas une diminution de la consommation liée à l’insuffisance des salaires qui a causé la crise de 2008-2009. Aux USA, les profits ont diminué à partir de 2006, ce qui a entraîné ensuite (avec quelques trimestres de décalage) une chute de l’investissement et une chute du PIB. La baisse de la consommation est venue en dernier, comme un effet de la crise. Le terreau de la crise est le décalage entre les profits dégagés dans l’économie réelle et la bulle de capital fictif alimentée par l’endettement privé. C’est cette contradiction qui a explosé en 2008. Et du point de vue capitaliste, les politiques d’austérité sont parfaitement rationnelles pour tenter de redresser le taux de profit des entreprises capitalistes et relancer l’accumulation.

      Pourtant, la majorité explique régulièrement que la crise capitaliste continue… mais que les profits sont au plus haut et que tout baigne pour les capitalistes ! Comment expliquer qu’un système est en crise alors que son moteur (le taux de profit) marche du feu de dieu ? Les réformistes ont la réponse, et malheureusement la majorité la reprend à notre compte : les méchants capitalistes ne veulent plus investir leur profit, ils se gavent de dividendes et spéculent. Le problème est que c’est complètement faux : c’est un mythe populiste qui fait croire qu’il suffirait de tordre un peu le bras aux capitalistes (les forcer à réinvestir davantage leurs profits) pour que le système redevienne vertueux. En fait, la part du profit qui est réinvesti par rapport à celle qui est distribuée en revenus de la propriété (dividendes, intérêts, etc.) n’a pas baissé. Elle est relativement stable pour une raison simple : les capitalistes doivent investir pour rester compétitifs sur le marché. Mais il est plus simple de dénoncer les comportements des individus que la logique d’un système…

      Armée de cette analyse, nous serions capables d’expliquer que les remèdes de Mélenchon ne feraient qu’aggraver la crise du système et conduirait inéluctablement (faute de s’engager dans une rupture avec le capitalisme) à une politique d’austérité accrue. Les exemples historiques ne manquent pas. Le plus flagrant pour nous est l’échec complet de la relance de 1981. Aujourd’hui, cet échec serait encore plus rapide et flagrant, puisque les marges de manœuvre pour une politique réformiste sont encore plus réduites, compte tenu de l’ampleur de la dépression économique dans laquelle nous sommes engluées.

      Si notre parti popularisait une analyse marxiste de la crise, nous pourrions expliquer que les prémisses sur lesquelles repose le réformisme antilibéral de Mélenchon sont faux, et que rompre avec les politiques d’austérité implique de rompre avec le capitalisme.

      Il faudrait alors expliciter ce que nous entendons pas « rupture avec le capitalisme Â», et donc dessiner les contours de notre projet communiste. Celui-ci devrait articuler la collectivisation des principaux moyens de production, la planification démocratique de l'économie et l'autogestion dans les entreprises, sur les lieux de vie, etc. Sans oublier le « monopole étatique du commerce extérieur Â», point pratique fondamental car toute rupture avec le capitalisme nécessite un contrôle des travailleurs/ses sur les échanges extérieurs afin de ne pas nous soumettre à la loi des marchés internationaux.

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