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    Référendum du 4 septembre au Chili : Oui au projet de Constitution ! Sans illusions, mais sans hésitation !

    Par Luc Raisse ( 3 septembre 2022)
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    À la veille du référendum au Chili sur le projet de nouvelle Constitution, nous n’avons pas d’illusions car, si elle est adoptée, elle ne permettra évidemment pas par elle-même de résoudre l’essentiel des problèmes auxquels sont confronté-e-s les travailleur/se-s et les opprimé-e-s du Chili, ni même de garantir réellement les droits démocratiques et sociaux qu’elle reconnaît. D’ailleurs, la Convention constituante qui a élaboré ce projet est issue d’un accord entre les partis de droite et de gauche de la bourgeoisie, dont le but était de mettre fin au soulèvement populaire d’octobre 2019, qui a été ainsi canalisé dans un cadre institutionnel. De plus, le texte soumis au vote ne met pas en cause le capitalisme ni la propriété privée des moyens de production et n’assure même pas la propriété publique des mines et ressources naturelles. Enfin, il est soutenu par le président Gabriel Boric, élu en décembre 2021 et entré en fonction en mars dernier, qui espère ainsi redorer son blason alors qu’il refuse de satisfaire les revendications du peuple, faute de vouloir s’en prendre aux capitalistes et d’aller à l’affrontement nécessaire avec le Sénat dominé par la droite, ainsi que la moitié de l’Assemblée, alors que ces parlementaires de l’ancien système s’opposent à toute mesure progressiste.

    Nous ne pouvons donc pas approuver la position du Comité International de la Quatrième Internationale (ex-Secrétariat Unifié, dont le NPA est proche) car il laisse entendre que le projet de Constitution pourrait « garantir » les droits qui y sont listés, voire mettre en place un « État social », et se montre même assez complaisant à l’égard du gouvernement Boric. En France, certains de ses représentant-e-s et soutiens notoires ont initié une tribune dont les formulations sèment des illusions réformistes, en faisant croire que le projet de Constitution permettrait de passer à un « paradigme d’État social » et en prétendant (au contraire du marxisme) que "le rôle de l’État est de protéger et garantir les droits individuels et collectifs en fournissant des biens et des services qui assurent la jouissance égalitaire des droits".

    Pour autant, tout cela doit-il conduire à ne pas appeler à voter Oui au référendum de ce dimanche ? C’est ce qu’estiment des organisations trotskystes comme la FTQI (Révolution permanente) et la LIT, qui ont des sections au Chili et n’appellent pas à voter Oui – sans pour autant appeler à voter Non, ni même à s’abstenir... Elles fournissent certes des analyses justes et expliquent qu’il va de toute façon falloir lutter, s’organiser, se doter d’un programme révolutionnaire, se battre pour un gouvernement des travailleur/se-s... Certes, mais que doivent faire ce dimanche les travailleur/se-s chilien-ne-s ? Qu’ils/elles se débrouillent ! La FTQI et  la LIT n’ont pas le courage d’assumer une position claire : elles ne daignent pas leur donner de consigne de vote... C’est tout de même curieux de ne pas pouvoir compter sur ces organisations pour prendre une décision sur la question qui est pourtant bien posée et qui, de fait, polarise toutes les discussions et les rapports de forces politiques au Chili.

    Pour notre part, nous ne partageons ni les illusions sur le projet de Constitution, ni l’attitude gauchiste qui consiste à refuser de prendre position. D'une part, en effet, le projet de Constitution ne « garantit » certes pas les droits qu’il reconnaît, mais il est important qu’il les reconnaisse, car cela fournit à la fois une victoire politique des mouvements sociaux et un point d’appui pour les luttes en cours et à venir. Or, force est de constater que les droits reconnus sont aussi nombreux que progressistes, du droit à l'avortement à la parité, de la reconnaissance des droits des peuples indigènes au droit de grève, des droits démocratiques aux droits sociaux... En un mot, si le projet de Constitution est adopté, le Chili sera un des pays dotés de l’une des Constitutions les plus démocratiques du monde, et c’est évidemment d’autant plus important dans un pays qui a connu l’une des pires dictatures et dans un continent où les gouvernements autoritaires restent nombreux.

    D'autre part, la victoire du Non au référendum signifierait la victoire de la droite et de l’extrême droite, qui font une campagne acharnée contre le projet constitutionnel (en s’appuyant sur le Sénat, les autres institutions de l’État et les médias, qu’elles contrôlent largement). Cette victoire du Non serait le coup d’envoi d’une campagne non seulement contre le gouvernement Boric, mais contre les mouvements sociaux, les femmes et les peuples indigènes, qui portent le projet de Constitution. Ce serait enfin le maintien de la Constitution actuelle, celle du dictateur et tortionnaire Pinochet, évidemment honnie par la masse des travailleur/se-s et opprimé-e-s du Chili.

    Le choix entre le Oui et le Non n’est donc clairement pas comparable à celui où l’on doit refuser de prendre parti entre la peste et le choléra, ou même entre Macron et Le Pen. Quels que soient les limites du projet de Constitution, les illusions qui circulent et surtout les intérêts des forces politiques qui le soutiennent, l’enjeu politique pour le peuple chilien est réel. Même si le cadre d’un référendum organisé par l’État n’est jamais favorable, les révolutionnaires ne doivent pas éviter de se prononcer sur la question posée en se contentant de donner des leçons. Sans illusions, mais sans hésitation, nous sommes pour le Oui !

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