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Retrait de la loi Travail ! Retrait du rapport Laurent sur le temps de travail des fonctionnaires !
Ce rapport que Valls a commandé et aimerait bien pouvoir cacher
Le rapport Laurent sur le temps de travail des fonctionnaires, commandé par Valls, vient d’être rendu public. Son contenu explosif embarrasse Valls qui a esquivé sa réception, laissant le travail à Annick Girardin, la ministre de la Fonction Publique. Il est essentiel de le faire très vite largement connaître à tous les fonctionnaires. Il explique, en substance, quoiqu’avec le vocabulaire le plus lisse possible, qu’il faut augmenter massivement le temps de travail dans la Fonction Publique, diminuer le nombre de jours de congés, revoir l’organisation du travail, aligner toutes les situations sur les moins favorables… Bref, un rapport qui rend encore plus évident que le gouvernement à travers la loi Travail et les projets qu’il a dans ses cartons s’en prend à tous les salariés, du privé comme du public. Un rapport dont la connaissance doit favoriser la lutte « tous ensemble » pour obtenir le retrait de la loi Travail.
Les fonctionnaires : pas concerné.e.s par la loi Travail ?
Le discours du gouvernement
Alors que il se trouve dans une situation particulièrement périlleuse, confronté à une lutte de plus de 2 mois pour le retrait de la loi Travail, avec aujourd’hui un développement des grèves reconductibles dans des secteurs stratégiques, le gouvernement rejoue à l’envers l’habituelle opposition du privé et du public.
D’habitude, les représentants du patronat, qu’ils soient à l’UMP, au FN ou au PS, argumentent en disant que la situation des fonctionnaires est plus favorable que celles du privé, dénoncent les « privilégié.e.s » (bizarrement jamais les grands patrons, ni les cadres supérieurs, ni les hauts fonctionnaires, ni les ministres, députés, sénateurs, etc. !) et qu’il faut donc l’aligner vers le bas, pour rétablir « l’égalité ». C’est ainsi que la bourgeoisie la classe dirigeante a d’abord raboté les retraites des salarié.e.s du privé, pour ensuite attaquer celle de la fonction publique, avant de s’attaquer aux régimes spéciaux. Aujourd’hui, elle cherche à l’inverse. Pour éviter la mobilisation des salariés de la Fonction Publique, le gouvernement laisse entendre que tout cela ne les concerne pas et qu’il devrait donc tranquillement continuer à faire leur travail.
Le trop grand silence sur les PPCR et la loi déontologie
Il y est malheureusement aidé, à des degrés divers, par les directions syndicales de la Fonction Publique, qui ne font très insuffisamment ou pas du tout le lien entre la loi Travail et les attaques contre la Fonction Publique. C’est en particulier le cas des organisations syndicales qui ont signé le protocole PPCR (Parcours Professionnels, Carrières, Rémunérations) qui prévoit entre autres l’avancement au rythme le plus lent pour tout le monde, l’allongement des carrières (et donc le ralentissement de la progression du traitement), des fusions de corps, la remise en cause des Commissions Paritaires, etc. Quant à la loi déontologie, les syndicats ne l’ont guère combattu et n’en ont pas informé les personnels. Elle prévoit pourtant notamment la remise en cause de la garantie d’emploi des fonctionnaires de l’État et inscrit dans la loi l’obligation de « dignité », disparu depuis Vichy et qui sera un outil pour dissimuler des poursuites contre les récalcitrants en sanctions disciplinaires.
Le CPA (Compte Personnel d’Activité) : pour la Fonction Publique aussi ?
Le Compte Personnel d’Activité est l’une des dispositions importantes de la loi Travail, même si elle n’est pas la plus médiatisée. Il s’agit de créer pour tout.e salarié.e un compte personnel numérique, où serait compilé toute une série d’information (notamment relatives à la pénibilité, à la formation, éventuellement au temps de travail, etc.). Le gouvernement le vante en prétendant qu’il s’agit, en attachant les droits à l’individu, de garantir aux salarié.e.s de ne pas les perdre même s’ils perdent leur poste. La réalité, c’est qu’un tel compte n’aurait de sens que dans le cadre d’une situation de précarité généralisée, où l’on changerait sans cesse d’emploi, tout en passant par la case chômage. C’est précisément la situation que veut créer la loi Travail. En outre, un tel CPA risquerait fort de servir de nouveau livret ouvrier : chaque patron pourrait demander à le consulter avant embauche du/de la salarié.e
Quel sens pourrait avoir pour les fonctionnaires, dont l'emploi est censé être garantie à vie, un dispositif qui est prévu comme la contrepartie de la précarité généralisée ? Cela n'aurait de sens que si le projet du gouvernement, déjà arrêté mais pas encore révélé, consistait précisément à remettre en cause la pérennité des emplois de fonctionnaire, autrement dit à étendre à la grande majorité des personnels les contrats précaires (AED, CUI, AVS, AESH, contractuel de droit public, etc.) qui se développent de plus en plus dans la FP en lieu et place des postes statutaires. D'ailleurs, c'est dans ce sens que va la loi Déontologie. Et personne ne peut oublier qu'en Grèce des fonctionnaires ont été licencié.e.s par dizaine de milliers.
Les déclarations de Valls et de Macron : vers une loi El Khomri de la Fonction Publique ?
Valls et Macron (et même NKM1) ont pourtant annoncé la couleur. Macron explique que la statut de fonctionnaire n’est plus adapté à la réalité actuelle : en clair, il faut le supprimer… Cependant, il ne s’agit pas ici d’un écart du Ministre de l’Économie, mais de l’explicitation de ce qui est exigé par Valls lui-même. Ce dernier a appelé de ses vœux, en septembre 2015, lors de la finalisation de l’accord PPCR, un « Combrexelle de la Fonction Publique ». Or, le rapport Combrexelle, c’est justement la base de la loi Travail (El Khomri) !
Les axes du rapport Laurent : les fonctionnaires travaillent en moyenne 15 jours de moins que les salarié.e.s du privé, ils faut les faire travailler 15 jours de plus !
Certes, le brave Monsieur Laurent a pris soin d’utiliser le vocabulaire particulièrement lisse pour essayer de rendre son rapport le plus anodin possible. Cependant, son contenu est parfaitement clair.
Comparaison avec les autres pays de l’OCDE et avec le privé
Le rapport souligne que le temps de travail des fonctionnaires en France serait l’un des plus bas de l’OCDE, avec le Portugal, l’Italie et la Finlande. On peut donner quelques exemples : la France fixe le temps de travail hebdomadaires moyen dans la Fonction Publique à 35h, tandis que l’Allemagne le fixe à 39h, la Suède à 38h, le Royaume-Uni à 37h. Le rapport note avec satisfaction que « La réforme du travail menée au Portugal devrait au demeurant faire passer ce pays dans le haut de la fourchette OCDE » (p. 36). On comprend qu’il suggère au gouvernement d’en faire autant en France, dans toute la mesure où cela serait possible. C’est pourquoi il recommande d’avoir recours à un abondant « dialogue social », reposant des constats indiscutables, grâce à la mise en place d’outils performants de contrôle du temps de travail effectif des fonctionnaires.
L’autre axe pour justifier les mesures préconisées explicitement ou suggérées consiste à recourir ouvertement à la comparaison entre secteur public et privé. Bien sûr, comme Laurent est habile, il souligne que les fonctionnaires – ou, en tous les cas, certain.e.s d’entre elles/eux – ont des sujétions importantes (astreintes, travail de nuit, etc.), afin de suggérer qu’il ne préconiserait pas un alignement pur et simple du public sur le privé. Il ne relève pas en revanche la faiblesse des salaires, démultipliée par le blocage du point d’indice ou sa progression extrêmement faible, ayant conduit à des baisses de pouvoir d’achat de l’ordre de 15% à 20% selon les catégories, depuis les années 2000. Même si le vocabulaire s’efforce de rester neutre, le rapport s’emploie à souligner que les salarié.e.s du public sont plus favorisé.e.s que celles et ceux du privé et qu’il faudrait donc aligner tout cela vers le bas, c’est-à-dire : augmenter le temps de travail, annualiser partout (supprimer les cycles de travail), empêcher que les jours d’absence pour maladie ouvre droit à congé payé ; accorder plus de « souplesse » au niveau local (à l’image des dispositifs prévus par la loi Travail), etc. Cette logique de rapprochement avec le privé conduit le rapporteur à suggérer la création de l’équivalent d’une Inspection du Travail pour la Fonction Publique…
Le rapport se réfère à un autre rapport pour montrer en gros les avantages attendus par le gouvernement de ce type de mesures : « Le rapport de la Commission des finances du Sénat publié le 13 janvier 2016 reprend l’analyse de la Cour des comptes43, selon laquelle : « Dans l’hypothèse où la durée effective moyenne de travail à temps complet dans le secteur public – soit aujourd’hui 1 594 heures par an -, serait alignée avec la durée légale, qui est de 1 607 heures, le temps de travail progresserait de 0,8%, correspondant à une économie de 570 millions d’euros pour l’ensemble des fonctions publiques, en raison d’une diminution des recrutements à hauteur de 22 000 emplois environ » (p. 41)
« Le risque d’un alignement sur le mieux disant » !
Le rapport se navre que le pouvoir craigne trop souvent de remettre en cause les acquis sociaux, de crainte de devoir affronter un conflit social. Dès lors, dit le rapport, des luttes locales ont conduit à la multiplication de situations particulières, plus favorables que la règle nationale. Autrement dit, exactement comme la loi El Khomri veut remettre en cause la hiérarchie des normes, faisant que les accords d’entreprise ne puissent qu’être plus favorable que les accords de branche et que les accords de branche ne puisse qu’être plus favorable que le Code du Travail. Laurent recommande la même chose pour la Fonction Publique. « Lors des entretiens avec les élus, la difficulté particulière que représente l’harmonisation du temps de travail dans le contexte de fusions de collectivités ou de mutualisation de compétences (intercommunalité) a été soulignée avec le risque d’un alignement sur le mieux-disant » (p. 39).
Réduire substantiellement les congés (RTT, jours fériés, jours de fractionnement…)
En compensation de salaires souvent très faibles et de contraintes liées au fonctionnement de leurs services, certaines catégories de fonctionnaire ont obtenu des congés plus longs. Le rapport n’envisage nullement d’augmenter les salaires, mais bien d’augmenter le temps de travail, d’abord en réduisant le nombre de jours de congés, par toute une série de dispositifs :
-
diminuer le nombre de jour de RTT en exigeant que les administrations appliquent la règle selon laquelle l’agent n’accumule pas de jours de RTT en cas d’absence, par exemple pour congé maladie. On serait donc pénalisé deux fois si l’on est malade ou si l’on doit se rendre à l’enterrement d’un proche ou si l’on a dû garder son enfant malade. Il existe la disposition équivalente dans le projet de loi El Khomri ;
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il peut arriver que certaines années, il y ait plus de jours fériés que la moyenne (8 jours par an). Dans ce cas, le rapport recommande de faire travailler plus longtemps les fonctionnaires les autres jours ou de les faire travailler certains jours en plus ;
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supprimer les jours de fractionnement (c’est-à-dire des jours de congés supplémentaires accordés aux fonctionnaires acceptant de ne pas prendre leurs congés de façon groupée, mais étalés sur toute l’année) sauf pour les fonctionnaires remplissant deux conditions : travailler 7h par jour et 35H par semaine et ne pas disposer de RTT, c’est-à-dire à peu près personne.
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Interdire tout dispositif de RTT plus favorable que celui permis par la règle nationale
Allonger le temps de travail
Le rapport préconise d’uniformiser les modalités de décompte du temps de travail, notamment en en excluant les temps de pause, de repas (même pour des personnels sous astreinte), etc., dispositions reprenant tout à fait celles de la loi El Khomri.
Le rapport se plaint que les 1607h annuelles soient plus considérées comme un plafond (un maximum) qu’un objectif (un minimum).
Il recommande aux administrations de se doter des outils nécessaires pour mesurer et contrôler effectivement le temps de travail des agents.
Diminuer les compensations accordées pour les astreintes
Le rapport note que les compensations des astreintes, qu’elles soient financières ou en jours de congés, coûte cher à l’État. Il préconise d’harmoniser les dispositifs, c’est-à-dire de les aligner vers le bas. Cela concerne tout particulièrement les médecins, infirmières, policiers, pompiers, etc.
Réduire les Autorisations Spéciales d’Absence (ASA)
Exactement comme la loi El Khomri, le rapport recommande de réduire – pardon, de définir de façon uniforme – les ASA : jour de congé pour un décès d’un membre de la famille, un mariage, la garde d’un enfant malade, une fête religieuse (pour les salarié.e.s ayant une religion différente de celle possédant encore des jours fériés officiels), etc.
Réduire les rémunérations
Le rapport recommande de diminuer le nombre d’heures supplémentaires par l’annualisation du temps de travail. Il ajoute que les heures supplémentaires doivent être proposées par l’administration, jamais par l’agent. Enfin, il conseille de mettre en place des dispositifs pour limiter la récupération des heures supplémentaires sous forme de jours de congés, en réduisant à trois mois le délai pour prendre les jours concernés.
Dans le même temps, il veut réduire la rémunération des temps partiels à 80% et 90%, qui n’est pas exactement proportionnel : ainsi on est payé 85,7% de son plein traitement pour un temps partiel à 80% et 91,4% pour un temps partiel à 90%. Ces temps partiels sont souvent demandés par des femmes pour pouvoir s’occuper de leurs enfants. Ce sont donc elles qui seraient les premières pénalisées.
Étendre les horaires d’ouverture des services
Dans la même logique que la loi Macron concernant le commerce, le rapport recommande d’adapter les heures d’ouverture aux besoins du public. Les salarié.e.s ayant des horaires toujours plus délirant dans le privé, cela impliquerait logiquement l’extension des horaires d’ouverture, au détriment de la vie privée des personnels.
Quelques exemples
Pour bien saisir qui est en ligne de mire, à savoir d’abord les agents de catégorie C, exerçant les tâches les plus ingrates, les plus mal payés et les plus mal considérés, ou certains agents de catégorie B, on peut reprendre quelques exemples pointés du doigt par le rapport :
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les agents administratifs et techniques des universités, payés au lance-pierre, parfois à peine au niveau du SMIC, bénéficient de congés supplémentaires que le rapport préconise de remettre en cause. Ils travaillent, selon le rapport 1550h par an en moyenne au lieu de 1607h ; en outre, comme leur travail est concentré sur une partie de l’année, ils bénéficient d’environ 9 semaines de congés au total. La logique du rapport impliquerait donc de leur supprimer au moins 1 semaine de congé.
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Une ATSEM selon le rapport travaillerait 1553h par an, là encore 1 semaine de congé au moins doit être supprimée
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Un agent d’exploitation des routes travaillerait quant à lui 1537h par an, et devrait perdre au moins 1 semaine et demi de congés.
C’est l’ensemble des travailleur.se.s qui sont attaqué.e.s par le gouvernement. Nous devons riposter, maintenant, tous ensemble. Par la grève, jusqu’au retrait !
1 http://www.leparisien.fr/politique/nathalie-kosciusko-morizet-ne-veut-plus-du-statut-de-fonctionnaire-generalise-16-02-2016-5550485.php