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    Billet sur Air France

    Par Frédérick Lorie ( 7 mai 2018)
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    Depuis samedi les médias mainstream sont à l'offensive sur le dossier Air France. Tout est fait pour faire passer le vote des salarié-e-s, le refus de l'accord proposé par la direction de l'entreprise, pour une hérésie absurde discréditant l'entreprise elle-même, histoire de traiter ces salarié-e-s d'imbéciles qui n'ont pas saisi où était leur intérêt. Ils commandent et présentent des résultats de sondages dont les opinions exprimées n'ont pas plus de valeur que ces déclarations d'opinions sur les questions types «seriez vous prêt à payer plus cher vos produits si ils sont fabriqués en France ?». Généralement commandé dans une actualité de plans sociaux, licenciements et délocalisations, on en vient à mettre au centre la "responsabilité" des consommateurs et consommatrices en mettant au jour un sentiment de culpabilité. C'est pas comme si ces produits n'étaient pas déjà vendus là avant que ces usines ferment... Et si ces déclarations d'intention avaient une vraie valeur, on passerait à une étude de consommation quantitativement plus objective et vérifiable. Bon. Donc aujourd'hui on a 1/3 des sondé-e-s qui disent se détourner d'Air France pour leur voyage. En France, le droit de grève est constitutionnel. Mais à chaque fois qu'une grève est déclarée, on entendra toujours quelqu'un à la radio dire que c'est pas bien, que c'est mal. Retour à la moralité.

    S'il y en a un dont la moralité et l'intelligence est toute illuminée par les courtes hagiographies télévisuelles, c'est le big boss d'Air France Janaillac. Parce qu'il est en plus peu ou pas du tout dit que la gestion du conflit syndicale actuelle à Air France ne respecte pas les critères de rationalité économique. Généralement, quand on parle de négociation, on parle de choses à perdre et à gagner pour chacune des parties, et ces possibilités sont fonction d'un rapport de force. Aujourd'hui les jours de grève passés ont entrainé sur l'année plus de pertes financières que si la revendication initiale de l'intersyndicale d'Air France (c-à-d une hausse générale de 6% des salaires) avaient été adoptées tout de suite (aujourd'hui la revendication s'est abaissée à 5,1%).

    Mais évidemment, le but de Janaillac, comme celui de l'ensemble du patronat, d'ici ou d'ailleurs, c'est de mettre à terre le mouvement social et syndical. Exit la rationalité économique, c'est la défaite d'un combat de classe qu'il souhaite. C'est politique. D'où qu'il ait dégainé cette formidable idée du référendum de plus en plus généralisé avec les différentes montures de loi travail depuis 2016 : faire du ou de la salariée un individu atomisé, le titiller sur sa "responsabilité" vis-à-vis d'une entreprise ou de la société, l'exclure de tout collectif qui permette d'élaborer d'autres solutions ou de se sentir comme une force. Janaillac, tellement certain que la mécanique de délitement social bien huilée par le néolibéralisme allait entrainer la défaite collective qu'il avait mis sa démission sur le tapis... Bon débarras !

    Et on en revient aux bilans et conséquences économiques de ce monde concurrentiel duquel les salarié-e-s devraient prendre garde et s'autocontenir, accepter les sacrifices, le délitement des droits sociaux, de l'accès aus soins, les pensions de retraites faibles, peut-être même des baisses de salaires. Pourquoi déjà ? Ah oui, parce que Air France est sur un marché concurrentiel. Mais peut-être qu'en fait les gens ont raison de s'en foutre de la concurrence. Parce que finalement la concurrence c'est un jeu qui n'amuse peut-être que celles et ceux qui détiennent les entreprises et comptent leur part de marché sur le tapis de jeu capitaliste. Alors à Air France on a fait grève pour des hausses de salaires... mais c'est la même chose actuellement à Lufthansa. Alors peut-être serait-il préférable et logique de mettre à bas les règles du jeu capitaliste. De défaire la politique de cette classe, que les travailleurs et travailleuses construisent leur propre pouvoir, annihilant les règles du marché, de la concurrence, débarassant les entreprises des profiteurs privés, les fusionnants et coordonnants à une échelle internationale.

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