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    Contribution pour le CPN sur la situation politique et notre intervention

    Par Gaston Lefranc (11 septembre 2016)
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    Le printemps dernier a été marqué par la mobilisation contre la loi travail, le mouvement le plus important depuis celui de l'automne 2010 contre la réforme des retraites. Le gouvernement est parvenu à faire passer la « loi travail », l'attaque contre notre camp social la plus importante depuis le début de la crise. Pendant l'été, la droite et la gauche institutionnelles, et bien sur le FN, ont fait le choix de polariser le débat du côté de la surenchère islamophobe et sécuritaire. Dans un contexte de longue dépression économique et d'un probable rebond de la crise dans les trimestres qui viennent, le gouvernement se cache derrière « les valeurs de la République » pour mener une nouvelle vague d'attaques qui combine offensive de classe et offensive post-coloniale. Dans le cadre de l'état d'urgence permanent, il s'agit de briser les solidarités potentielles pouvant s'établir entre les exploités et les opprimés, d'empêcher toute convergence des luttes. L'agenda des médias capitalistes est limpide pour les mois qui viennent jusqu'à l'élection présidentielle : entretenir le climat anxiogène, désigner les musulman-e-s comme des ennemis intérieurs au moins potentiel, et dépolitiser la population avec le spectacle des primaires.

    Tirer les leçons de la mobilisation du printemps pour être utile à notre camp social

    La mobilisation du printemps n'a pas réussi à empêcher le gouvernement de faire passer la loi travail. C'est un échec dont il faut tirer toutes les leçons.

    La mobilisation de la jeunesse et de secteurs d'avant-garde chez les salarié-e-s a bousculé le train-train des bureaucrates syndicaux, englués dans la politique du dialogue social. Elle a imposé la revendication du retrait pur et simple du projet de loi travail et la tenue de manifestations avant le 31 mars (première journée d'actions prévue par les confédérations). L'intervention des militant-e-s du NPA, notamment dans la jeunesse, a joué un rôle important dans le basculement de la situation.

    Le mouvement a duré plus de 4 mois. Plusieurs fois enterré, il a à chaque fois rebondi. Il n'a certes pas connu l'ampleur des mouvements de 2003 et 2010, mais une avant-garde large de plusieurs dizaines de milliers de jeunes et travailleur/se-s s'est investie dans les Nuits Debout, les grèves reconductibles, les blocages. Elle a mené un combat politique déterminé contre « la loi travail et son monde ». Une partie d'entre elle s'est imposée en tête de manifestations, regroupement hétérogène de libertaires, autonomes, précaires, et militant-e-s lutte de classe. Par notre implantation syndicale (trop faible) sur nos lieux de travail et d'étude, par notre activité dans les quartiers populaires (beaucoup trop faible), par notre activité à Nuit debout, et par notre solidarité envers les autonomes malgré nos divergences stratégiques, nous avons participé à la vie et aux rebonds de cette mobilisation.

    Nous avons fragilisé le gouvernement mais nous n'avons pas gagné. Comme en 2003 et 2010, les directions confédérales portent une lourde responsabilité. Si des directions intermédiaires ont tiré le mouvement en avant, Martinez et Mailly (sans parler de la FSU...) ont joué leur rôle pour empêcher la généralisation de la grève. Ils ont laissé la jeunesse se faire réprimer sans réagir. Ils ont laissé les secteurs en grève reconductible s'épuiser sans lancer d'appel à les rejoindre dans la grève, se contentant (comme d'habitude) d'appeler à des journées d'action dispersées. Ils ont tiré une balle dans le dos des grévistes au début de l'Euro de foot quand ils ont clairement indiqué qu'il ne fallait pas perturber l'Euro. Et ils ont accepté l'humiliation du mouvement social en acceptant des parcours de manifestation ridicule et cadenassés par les flics.

    La combativité d'une partie de notre classe a imposé à l'intersyndicale nationale une nouvelle date de mobilisation le 15 septembre. Comme on pouvait s'y attendre, elles font le service minimum, en appelant à se (dé)mobiliser « selon des modalités décidées localement (rassemblements, manifestations, grèves, ...) pour obtenir l'abrogation de cette loi ». Elles poursuivent la politique de dialogue social, à tous les niveaux, avec le gouvernement, et refusent donc de rompre avec lui et de s'engager dans une véritable bataille contre lui.

    Sur nos lieux de travail, nous cherchons à construire la mobilisation, en permettant la convocation d'AG pour tirer le bilan de la séquence du printemps, pour définir nos revendications, et pour discuter des perspectives. En tant que parti, nous expliquons que c’est la grève générale, le blocage des profits, qui permet de changer les choses, pas les élections ou le dialogue social. Nous expliquons que pour atteindre cet objectif, il faudra s'affronter aux bureaucraties syndicales et ne pas s'adapter à leur stratégie.

    La nécessité d'une campagne contre l'islamophobie d’État

    Les attaques contre les musulman-e-s ou assimilé-e-s (par leur origine ou couleur de peau) se multiplient. Elles touchent en premier lieu les femmes musulmanes. Elles ont franchi un nouveau seuil cet été avec les arrêtés anti-burkini soutenus par Valls. L'arrêt du Conseil d’État ne met pas un terme à cette offensive, puisque la droite, l'extrême droite et Valls évoquent la nécessité d'une nouvelle loi. Le gouvernement est bien décidé à attiser les tensions « communautaires » pour se maintenir à flot. Dans les écoles, il organise le signalement des élèves suspectés d’être « entrés dans un processus de radicalisation », et il cherche à conditionner les élèves, dès le plus jeune âge, en organisant des exercices « alertes attentats ».

    Nous défendons les musulman-e-s et assimilé-e-s contre ces attaques racistes et islamophobes, qui se font souvent au nom de la défense des droits des femmes et de la laïcité. Nous expliquons que la laïcité ne consiste pas à interdire le port de signes religieux dans l'espace public : elle consiste à séparer l’État de toutes les institutions religieuses pour permettre la liberté de conscience de chacun. Nous dénonçons l’instrumentalisation des droits des femmes et défendons le droit des femmes à disposer librement de leur corps contre tous ceux qui veulent les forcer à se couvrir ou à se découvrir.

    L'objectif de ces campagnes islamophobes est de chercher à creuser un fossé entre travailleur/se-s selon l'origine ou la religion, pour mieux asseoir la domination des capitalistes. Le pseudo-universalisme républicain cache en fait un communautarisme d’État désignant les musulman-e-s comme des corps étrangers à la nation, sommés de prouver qu'ils/elles sont de « bon-ne-s français-e-s » sous peine d'être désigné-e-s comme ennemi-e-s intérieur-e-s. En retour, cette islamophobie d’État nourrit les courants politico-religieux réactionnaires (financés par les régimes réactionnaires du Golfe, de Turquie, etc.), ennemis mortels du prolétariat et de tout projet d’émancipation socialiste-communiste, auxquels il ne faut faire aucune concession politique.

    Tout en défendant nos positions propres, nous nous adressons à l'ensemble des organisations antiracistes pour construire une mobilisation unitaire large : journée de mobilisation contre l'islamophobie fin septembre / début octobre, avec manifestations et meetings. Parce que nous luttons contre « la loi travail et son monde », nous travaillons également à la convergence des luttes contre le gouvernement. Les mobilisations contre la loi travail, contre l'islamophobie, contre les grands projets inutiles, etc. doivent converger dans un mouvement unique contre le système.

    Une campagne communiste révolutionnaire contre le système

    Notre campagne, notre candidature doivent clairement être identifiées dans la continuité du mouvement Loi Travail. Nous devons chercher à exprimer ce que l’« avant-garde » du mouvement a dit, dans une logique d'ensemble cohérente, anticapitaliste et révolutionnaire. Notre campagne doit articuler des propositions d'action de front unique aux différentes forces impliquées dans les bagarres (contre la loi travail, l'islamophobie, etc.) et la mise en avant d'un programme de transition articulé à la nécessité d'un gouvernement des travailleur/se-s.

    Contre les licenciements, l'aliénation au travail, la précarité, la pauvreté, nous opposons le droit au salaire à vie, l'autogestion dans l'entreprise. Au pouvoir patronal sur l'économie, nous opposons la nécessité d'exproprier les grands groupes capitalistes, la socialisation des moyens de production, la planification démocratique de l'économie pour satisfaire les besoins, en rupture avec le productivisme destructeur de la planète. Nous expliquons qu'il n'y a pas d'alternative à l'austérité et à la destruction de nos acquis sociaux sans rupture avec les institutions capitalistes, tant nationales qu'européennes. Nous devons prendre le contrôle des moyens de production et de la monnaie. Nous devons rompre avec les marchés capitalistes internationaux.

    En cette période de longue dépression économique, nous combattons toutes les illusions réformistes et populistes d'une relance du capitalisme grâce à une politique « antilibérale ». Il n'y a aujourd'hui aucune marge de manœuvre pour des politiques keynésiennes absorbables par le système. L'alternative se résume à une accentuation de la barbarie capitaliste ou une alternative socialiste que nous devons esquisser et mettre en débat.

    « Tout le monde déteste la police » ont scandé des milliers de personnes : notre campagne doit s’appuyer sur une défiance vis-à-vis de la police, de la justice, en un mot de l’appareil répressif d’État qui s’est exprimé à une échelle massive. Nous serons les seuls à dire que cet État qui emprisonne les syndicalistes est le même que celui qui assassine dans les quartiers, qui harcèle les femmes qui portent un burkini ou un foulard.

    Le capitalisme en crise entraîne une multiplication des guerres impérialistes, et donc une guerre contre les populations des pays dominés pour servir les profits des grands trusts capitalistes. Nous exigeons le départ de toutes les troupes françaises et nous opposons à toute forme d'intervention de l’État français en Afrique et en Orient. Nous exigeons l'arrêt des exportations d'armes. Notre campagne doit être l’occasion d’exprimer un soutien sans faille aux droits des peuples à disposer d'eux-mêmes, notamment les Palestiniens et les Kurdes, et le renforcement des liens avec les forces révolutionnaires dans tous les pays.

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