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Chronique de la campagne présidentielle – épisode 4
Chaque week-end, nous publions une chronique de la campagne présidentielle. En commentant les faits marquants de la campagne, de notre point de vue qui est celui de communistes révolutionnaires ayant décidé de faire campagne pour la victoire de Mélenchon en 2022. Vous pouvez retrouver la chronique n°1 ici : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1708, la chronique n°2 ici : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1709, et la chronique 3 ici : https://tendanceclaire.org/article.php?id=1710
Au sommaire ce week-end :
- Montebourg reprend (avant de faire machine arrière) une proposition immonde de Le Pen et Zemmour contre les travailleurs/ses immigré.e.s
- Macron entre en campagne : cap à droite !
- Brèves : Roussel, Jadot, Mélenchon, sondages...
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Montebourg reprend (avant de faire machine arrière) une proposition immonde de Le Pen et Zemmour contre les travailleurs/ses immigré.e.s
Il ne s’agit pas d’un dérapage, mais d’une proposition d’abord fièrement revendiquée par Montebourg le 7 novembre suite à un passage média sur LCI/RTL : « Je propose de bloquer les transferts d'argent particuliers vers les pays qui ne nous aident pas à appliquer les Obligations de Quitter le Territoire Français ».
Montebourg n’a donc pas improvisé, et il a visiblement fait cette proposition contre l’avis majoritaire de son conseil politique, mais sous l’influence de "sarkozystes" qui le soutiennent ! Face au tollé et au risque de défection d’une grande partie de son équipe de campagne, il a fait machine arrière de façon très confuse. Il a expliqué le 8 novembre « s’être mal exprimé » sans retirer clairement sa proposition, avant de retirer plus clairement sa proposition le 11 novembre chez Bourdin et de mettre à l’écart les sarkozystes. Ce mea culpa laborieux satisfait visiblemement les dirigeants de la « Gauche républicaine et socialiste » (Maurel, Lienemann…) qui l’avaient rallié et son porte-parole François Cocq qui vient de la France insoumise. En revanche, les « Jeunes avec Montebourg » ont annoncé leur retrait de la campagne, avant que d’autres « Jeunes avec Montebourg » apparaissent sur les réseaux sociaux pour afficher leur soutien à Montebourg…
En réalité, au-delà de cet épisode pathétique, Montebourg fait une campagne dont la logique politique est proche de celle de Chevènement en 2002 : tenter d’unifier les catégories populaires et le patronat « patriotes » (les autres pourront être poursuivis pour « trahison économique », un nouveau délit que Montebourg veut créer…) autour d’un programme anti-mondialisation qui efface les antagonismes de classe. Il s’agit alors de regrouper les « républicains » des « deux rives » (droite et gauche) pour promouvoir la « remontada » de la « France »… et pointer du doigt les travailleurs immigrés. Par exemple, Montebourg a écrit dans son livre de campagne (cela a été relevé par Mélenchon) :
« La Remontada crée l’obligation aux étrangers qui veulent s’associer à notre destin d’adhérer à notre société. Ils signent un contrat au long cours avec la République, les engageant à l’apprentissage de notre langue, de nos règles et de nos mœurs, à la formation professionnelle et à l’exercice d’un emploi. Le suivi du contrat est contrôlé. Le non-respect du contrat conduit à l’expulsion. Le suivi de l’expulsion est effectif »
Autrement dit, les étrangers seraient mis sous surveillance et expulser au moindre écart par rapport aux « bonnes moeurs » décidées par Montebourg.
Quant au « souverainisme » de Montebourg, il s’agit essentiellement d’une « posture » (qui prend un tour abject quand il s’agit de pointer du doigt les travailleurs immigrés). Les anciens de la France insoumise qui ont rejoint Montebourg sous prétexte que Mélenchon a abandonné toute idée de rupture avec l’Union européenne en seront pour leurs frais. Montebourg ne veut pas davantage rompre avec l’Union européenne.
Face à Macron et l’extrême-droite, l’alternative ne consiste pas à constituer un « bloc souverainiste » vaguement « social » au-delà des clivages de classe. Elle consiste à unifier les catégories populaires (de toutes origines, religions… c’est-à-dire en ne faisant pas l’impasse sur la lutte contre l’islamophobie, l’antisémitisme et le racisme) autour d’un programme de rupture avec le système capitaliste. Ce programme implique la rupture avec les marchés capitalistes et l’Union européenne (ce que se refusent à envisager une certaine extrême-gauche), mais il place au coeur les revendications de classe.
Macron entre en campagne : cap à droite !
Mardi 9 novembre à 20h, Macron a fait un monologue de 27 minutes sur toutes les chaînes de télévision. Le prétexte était des annonces sur la situation sanitaire. En réalité, il s’agissait de lancer sa campagne électorale et de profiter de son statut de président pour parler longuement sans contradicteur sur toutes les chaînes. Son intervention a d’ailleurs été enregistrée pour prévenir tout faux pas : courageux mais pas téméraire le Macron.
Sans surprise, Macron a annoncé qu’il faudrait une troisième dose pour les +65 ans d’ici le 15 décembre pour garder leur pass sanitaire. Pour les autres, les échéances seront plus tard mais la logique sera probablement la même : soit vous faîtes les doses supplémentaires en temps et en heure, soit vous perdez votre pass sanitaire. Cette logique de contrôle, de surveillance et de répression (des milliers de soignant.e.s sont suspendu.e.s dans l’indifférence générale des grands médias) s’inscrit donc dans la durée, alors même que le conseil scientifique avait recommandé la levée du pass sanitaire d’ici la fin de l’année.
Mais l’essentiel du discours de Macron a été consacré aux autres sujets et placé sous l’étendard de la « valeur travail ». De façon abjecte, Macron a vanté les mérites de sa réforme de l’assurance-chômage qui diminue les prestations chômage, et il a expliqué qu’elle aurait la vertu de motiver les chômeurs/ses à chercher activement un travail. Si l’incitation n’est pas suffisante, il a expliqué que les contrôles seront renforcés pour radier davantage de chômeurs fénéants. Le message est clair : nous serions dans une situation de plein-emploi où les offres d’emploi pullulent, et donc les chômeurs sont responsables de leur situation. Ils ne sont pas assez motivés pour daigner accepter les offres qui abondent. C’est un discours abject et totalement mensonger : il y a moins de 300 000 offres d’emplois non pourvues pour plus de 6 millions de demandeurs/ses d’emplois. Il y a donc un chômage de masse, structurel, dont ne sont absolument pas responsables les chômeurs/ses. Mais il s’agit pour Macron de faire de gros clins d’oeil à la droite la plus réactionnaire et de jouer sur cette vieille morale de l’effort qui dénonce l’assistanat, pour mieux diviser le camp des travailleurs/ses.
Il est aussi bon de rappeler la situation réelle des chômeurs/ses qui se complairaient dans le chômage : près de 60% des demandeurs d’emplois ne perçoivent pas d’allocation-chômage. Pour les autres, l’indemnisation moyenne est de 910 €/mois.
A la façon d’un Sarkozy, Macron nous a donc expliqué qu’on ne travaillait pas assez. D’où la réforme des retraites, repotée à après élection, mais qui serait sans nul doute beaucoup plus dure que la réforme initiale (avec un concours pour celui qui repoussera le plus possible l’âge légal de départ à la retraite). D’où aussi une réforme de l’assurance maladie qui se prépare mais dont Macron n’a pas dit un mot, contexte sanitaire oblige…
Brèves
Fabien Roussel a tweeté le 7 novembre, à propos de Pierre Mazeaud qui causait de Zemmour : « Honneur à Pierre Mazeau, gaulliste historique. Ce qu’il dit devait être dit. ».
Une fois de plus, Roussel fait honte aux militants communistes. Pourquoi parler d’honneur ? Mazeaud, malgré son grand âge, n’est pas un résistant, mais juste un politicien qui a servi toute sa vie les intérêts du patronat, en se mettant plein les poches (cf. la somme astronomique qu’il a reçu pour jouer « l’arbitre » dans l’affaire Tapie). Il est étonnant de constater que « gaulliste historique » est visiblement une qualité pour le chef du PCF. Faut-il lui rappeler que De Gaulle était un ennemi des travailleurs ?
Dans le dernier sondage Ifop sur la popularité des hommes et femmes politiques, Mélenchon recueille 32 % d’opinions favorables. A noter qu’il recueille le soutien de 41 % des moins de 35 ans, de 35 % des employés et de 58 % des ouvriers.
Le Parisien nous informe que le conseil politique de Jadot fait le plein d’ex macronistes (Aurélien Taché, Cédric Vilani…) qui ont rompu avec LREM mais pas avec l’orientation de Macron de 2017. A défaut de séduire les catégories populaires, Jadot fait un tabac chez les macronistes de « gauche ». Il paraît que les partisans de Sandrine Rousseau grincent des dents… Il est vrai qu’il va être difficile de nous faire avaler la candidature de Jadot coomme antisystème et radicale… Thomas Portes, ex porte-parole de Sandrine Rousseau, semble être sur le point de rejoindre Mélenchon.
Le 11 novembre, Mélenchon a célébré la « victoire de la France » tout en reprenant Jaurès quand il expliquait que le « capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». C’est contradictoire. Soit on a un point de vue de classe et on dénonce cette guerre inter-impérialiste qui a tué des millions de travailleurs/ses et dans ce cas il n’y a aucune victoire à célébrer, soit on a un point de vue nationaliste qui célèbre la victoire de la France. Pour notre part, il n’y a aucune victoire à célébrer le 11 novembre.
Quatre sondages ont été publiés cette semaine sur les intentions de vote : Ifop le 8 novembre, Harris le 9 novembre, Odoxa et Elabe le 11 novembre . Pas de grand bouleversement. Mélenchon est toujours en tête de la gauche, entre 8 % et 10 %, en légère progression pour l’Ifop, Odoxa, et Elabe, stationnaire pour Harris.