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      Note de lecture : Terminus radieux

      Par Victor Müller ( 1 février 2016)
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      Antoine Volodine, Points, 2015, 8,60 euros.

      Note de lecture parue dans l'Anticapitaliste du 21 janvier 2016

      La Seconde Union soviétique s’est effondrée. Tout avait pourtant bien commencé. Tirant les leçons du stalinisme, ce nouvel État ouvrier avait su empêcher les dérives bureaucratiques en développant la démocratie prolétarienne et l’auto-organisation...

      La révolution mondiale avait été sur le point de triompher. Seule erreur : la décision d’installer de petits réacteurs nucléaires dans chaque kolkhoze pour permettre à toutes les communautés, même les plus reculées, de s’autogérer. Ces réacteurs n’ont pas résisté à l’usure du temps, les accidents à répétition ont provoqué la désagrégation de la Seconde Union soviétique, et les « Blancs » ont repris le dessus.

      Désormais, seule une poignée de camarades survit encore (à peine...) dans les territoires les plus irradiés de Sibérie. Trois rescapéEs de l’armée rouge défaite cherchent refuge dans ces steppes inhospitalières. Ils y croisent un convoi ferroviaire fantomatique qui sillonne le pays à la recherche de camps à l’attrait irrésistible. L’un d’entre eux, Kronauer, finit par arriver au kolkhoze « Terminus radieux ». Il découvre alors peu à peu une micro-société déchirée entre la fidélité au passé bolchévique, les dérives anarchisantes et la tentation du chamanisme. Il y fréquente notamment Mémé Oudgoul, militante de la première heure reconvertie en liquidatrice du réacteur en fusion, le cruel Solovieï, chef inamovible du kolkhoze, et ses trois filles qui sont poursuivies par leur père jusque dans leurs rêves. Plus tard, il reprendra son errance.

      Une rêverie sur l’avenir de la révolution mondiale

      Cet ancien front pionnier du communisme, en état de décomposition avancé, s’insère dans l’esthétique du roman « post-exotique » élaborée par Volodine au fil de ses livres. Seul auteur connu de ce genre nouveau, celui-ci n’hésite pas à s’inventer des comparses qui sont à la fois conteurEs ou chanteurEs (aux œuvres récitées et recopiées par Mémé Oudgoul) et personnages de ses propres fictions – dynamitant ainsi la figure même de l’auteur qui écrase de sa légitimité culturelle les récits des dominéEs et des exploitéEs. L’oscillation fantastique entre réalité, rêve et cauchemar, le flou des repères spatio-temporels, invitent le lecteur à rester vigilant ou à se laisser berner : que se passe-t-il vraiment, qu’est-ce qui relève de l’hallucination ? Enfin, les effets de collage, de polyphonie, tendent vers une totalisation dialectique de la fiction (ou de la réalité ?) dans ses contradictions : oppression et émancipation, construction et décomposition, révolution et contre-révolution.

      Autant de tensions qui répondent à l’esprit de notre temps ! Pour les anticapitalistes et les révolutionnaires convaincus, ce chef-d’œuvre permet donc de prendre un peu de recul par rapport au militantisme quotidien, de s’élever au delà des inévitables routines et déceptions, vers une rêverie sur l’avenir de la révolution mondiale... Pour tous les autres amateurEs de romans, il ouvre une nouvelle voie d’accès à la culture anticapitaliste et révolutionnaire. Un grand livre à découvrir et à faire découvrir.

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