[RSS] Twitter Youtube Page Facebook de la TC Articles traduits en castillan Articles traduits en anglais Articles traduits en allemand Articles traduits en portugais

Agenda militant

    Newsletter

    Ailleurs sur le Web [RSS]

    Lire plus...

    Twitter

    Hommage au camarade Hoàng Khoa Khôi (1915-2009)

    Par Tendance CLAIRE ( 1 mai 2009)
    Tweeter Facebook

    Hoàng Khoa Khôi s’est éteint à Paris le 9 avril 2009 à l’âge de 94 ans. Il était indissociablement un dirigeant trotskyste d’envergure et une figure incontournable et respectée de la diaspora vietnamienne progressiste en France. C’est dans la diaspora vietnamienne et plus particulièrement parmi les travailleurs indochinois du Service de la Main-d’Œuvre Indigène (ces travailleurs que l’Etat impérialiste français avait fait venir en 1940 pour remplacer des hommes partis au front, puis qu’il utilisa pour la reconstruction) que Khôi a milité dès les années 1940. Il a fait partie des fondateurs et dirigeants du Groupe Trotskyste Vietnamien (GTV) en France. Dans une période où la propagande anti-trotskyste faisait rage, cette organisation se développa vigoureusement, passant d’une douzaine de membres en 1947 à 519 militants en 1950, ce qui en fit l’une des plus importantes sections de la IVe Internationale en nombre. Elle acquit en outre une influence considérable dans la diaspora vietnamienne. C’est ainsi que, durant toute la période précédant la première Guerre d’Indochine, les trotskystes vietnamiens ont pu proposer une orientation alternative à celle, conciliatrice, du Viêt-Minh et du PCF staliniens : pendant que ces derniers acceptaient le cadre de l’Union Française, les trotskystes étaient les seuls à avancer des mots d’ordre comme « Résistance contre la France colonialiste et capitaliste! » ou « La terre aux paysans, les usines aux ouvriers! ».

    Dans la suite, pendant les deux guerres d’Indochine, le GTV a adopté une attitude de « soutien critique » : soutien de la résistance armée anti-coloniale et anti-impérialiste (par les manifestations en France, par des collectes de fonds, etc.), mais critique sur la politique stalinienne du PCV dirigé par Hô Chi Minh, politique caractérisée notamment par l’interdiction de toute démocratie ouvrière et la dictature de la bureaucratie au nom de la prétendue « construction du socialisme » au Vietnam. Les nombreux articles de Khôi analysant et critiquant ce régime nous seront d’une aide précieuse pour comprendre l’évolution de ce régime et pour envisager une politique trotskyste pour le Vietnam d’aujourd’hui. Plus récemment, Khôi a lancé une campagne publique pour la réhabilitation de Ta Thu Thâu et des militants trotskystes vietnamiens assassinés par les sbires staliniens dans les années 1940.

    Sur le plan international, lors des crises majeures de la deuxième moitié du XXe siècle, Khôi et le GTV se sont systématiquement opposés aux calomnies des bureaucraties staliniennes et à l’intervention de l’armée soviétique. À ce titre, un des épisodes remarquables et caractéristiques de l’audace politique de Khôi a été l’organisation de la « brigade d’Octobre ». En 1950, au moment où la propagande stalinienne faisait rage contre le régime « fasciste » de Tito, la IVe Internationale décida d’envoyer des délégations ouvrières pour enquêter sur ce régime. Khôi organisa alors une expédition de trente ouvriers et étudiants vietnamiens. Sur la base de ce qu’ils constatèrent (« la nationalisation des usines, du commerce et des banques », « la distribution des terres aux paysans », « un début de contrôle ouvrier »), ils déclarèrent que « les accusations du Kominform visant à amalgamer la Yougoslavie avec un régime fasciste sont sans fondements » (Voix ouvrière, organe du GTV, septembre 1950). Leur analyse du PC yougoslave n’était alors pas dénuée de graves illusions, comme celle de la plupart des dirigeants de la IVe Internationale à l’époque, mais ils ont su le critiquer avec fermeté quand il adopta une position de « neutralité » pendant la guerre de Corée : « Les dirigeants yougoslaves ont mené une politique opportuniste et traître. Ils pensent qu’avec cette "tactique" zigzagante vis-à-vis de l’impérialisme, ils peuvent protéger la Yougoslavie. Mais avec leur attitude, la révolution prolétarienne en Yougoslavie ne pourra aboutir qu’à une impasse, car elle ne bénéficiera pas du soutien des peuples révolutionnaires d’Extrême-Orient comme des prolétariats européens. » (Voix ouvrière, novembre 1950.)

    Khôi fut le représentant de la majorité de la section vietnamienne au 3e Congrès de la IVe Internationale en 1951 et élu au Comité Exécutif. Au moment de la plus grave crise dislocatrice qui ait frappé la IVe Internationale, entre 1951 (exclusion de la majorité de la section française par Pablo et le Secrétariat international) et 1953 (explosion de la IVe Internationale et constitution du Comité de la IVe Internationale, derrière notamment le SWP américain et la SLL britannique), le GTV choisit de suivre Pablo. Il rompit avec lui lorsque celui-ci, au début des années 1960, devint conseiller de Ben Bella et thuriféraire de Castro. Membre de la « IVe Internationale » « réunifiée » en 1963 sous la direction d’Ernest Mandel, le GTV maintint son autonomie par rapport au PCI dirigé par Pierre Franck, puis par rapport à la LCR des années 1970 (1).

    Dans les années 1980, la disparition de plusieurs militants et le vieillissement de ses dirigeants conduisirent le GTV à poursuivre son combat pour la défense du marxisme et du trotskysme, contre l’orientation du Parti Communiste Vietnamien au pouvoir, à travers l’édition d’une revue, Chroniques vietnamiennes, qui parut régulièrement de novembre 1986 à l’été 1991, date à laquelle elle fut interrompue. Le GTV décida alors de fonder la Bibliothèque des études pour se consacrer à l’édition en langue vietnamienne des œuvres de Trotsky et de textes en français et vietnamien, notamment sur l’histoire des trotskystes vietnamiens. Khôi dirigeait ce travail et, quelques mois avant sa mort, toujours trotskyste, il était en train de terminer la traduction de La révolution permanente.

    En ces temps où la subjectivité de la classe ouvrière est en crise partout dans le monde, où les idées communistes et révolutionnaires sont combattues même à l’intérieur des courants qui, il n’y a pas si longtemps, se réclamaient encore de la IVe Internationale, la détermination et la volonté révolutionnaires dont Khôi a fait preuve jusqu’au bout de sa vie sont un exemple brillant pour tous.

    C’est pourquoi deux représentants de la Tendance CLAIRE du NPA, qui avaient rencontré plusieurs fois Khôi et avaient discuté avec lui de l’actualité brûlante des idées trotskystes, ont participé le 16 avril à ses funérailles. Étaient également présents de nombreux amis et camarades vietnamiens de Khôi, Alain Krivine, au nom de l’ex-LCR, et Jean-Michel Krivine, spécialiste de la question vietnamienne dans l’ex-LCR et longtemps chargé des relations avec le GTV. Trois brefs hommages ont été prononcés, l’un par J.-M. Krivine, le deuxième par le plus proche camarade et ami de Khôi et le troisième par un jeune camarade vietnamien dont l’engagement communiste révolutionnaire avait enthousiasmé Khôi, car il tenait plus que tout à assurer la continuité du trotskysme vietnamien ; nous reproduisons ci-dessous le discours de ce camarade. C’est au chant de L’Internationale que les militants présents ont rendu leur dernier hommage à Hoàng Khoa Khôi.

    Tendance CLAIRE du NPA

    Discours prononcé aux funérailles de Hoàng Khoa Khôi le 16 avril 2009 par un jeune militant communiste révolutionnaire vietnamien

    « J’ai rencontré Hoàng Khoa Khôi environ une dizaine de fois, la première fois étant vers la fin de l’année 2004, alors qu’il avait déjà 89 ans. Malgré cette période relativement brève pendant laquelle j’ai pu connaître Khôi, j’éprouvais pour lui un profond respect et une immense admiration.

    Un profond respect, car en tant que jeune militant communiste révolutionnaire, j’ai pu rencontrer en Khôi un camarade qui a mené des combats anti-impérialistes et révolutionnaires au cours des épisodes historiques, comme pendant la première et la deuxième guerres du Viêt-Nam.

    Mais ce qui m’a inspiré cette immense admiration, c’était la vivacité de son esprit et la force de ses convictions et de sa volonté, qui étaient évidentes à chaque fois que j’ai pu discuter avec lui. À plus de 90 ans, il avait encore un sens politique des plus aigus, ses analyses n’ayant en rien perdu de leur clarté, et il continuait de suivre de près l’actualité politique. C’est ainsi que, récemment, il s’était enthousiasmé pour la grève générale en Guadeloupe et en Martinique, dont la victoire a dû lui apporter un immense bonheur.

    Mais, étant marxiste, il savait qu’il ne suffisait pas d’interpréter le monde mais qu’il importait de le transformer, par et dans l’action politique. C’est ainsi que tout au long de sa vie, sous des formes diverses, il n’a jamais cessé de militer. Son militantisme passait, dans les années 40 à 70, par la construction d’une organisation politique – le Groupe Trotskyste Vietnamien (GTV) en France, membre de la IVe Internationale. Dans les années 80, avec la disparition et le vieillissement des camarades du GTV, Khôi et ses camarades ont poursuivi le combat pour la défense du marxisme et le trotskysme avec l’édition de la revue Chroniques vietnamiennes. Plus récemment, à travers la « Bibliothèque d’Etudes », il s’était consacré à la tâche immense de traduction des œuvres de Trotsky en langue vietnamienne. Il offrait, à tous ceux, jeunes ou moins jeunes qui venaient chez lui, des livres de Trotsky. Il entendait ainsi contribuer à la diffusion des idées authentiquement communistes et révolutionnaires.

    C’est avec cette même volonté qui l’a animé pendant plus de 70 ans qu’il a entamé, il y a quelques mois, à l’âge de 94 ans, un nouveau combat. Il a accepté de contribuer à l’édition d’un site web bilingue vietnamien-français, dont le but, ambitieux, était d’apporter au prolétariat vietnamien des analyses politiques d’un point de vue ouvrier aussi bien que des éléments de théorie marxiste.

    Malheureusement, sa santé ne lui a pas laissé le temps de mener l’ensemble de ses tâches jusqu’au bout. Son expérience et son intelligence politique nous manqueront certainement, mais nous sommes résolus à poursuivre son combat révolutionnaire, et c’est peut-être cela le meilleur hommage qu’il aurait souhaité que nous lui rendions. »

    Bibliographie

    Collections d’articles éditées par Hoàng Khoa Khôi

    • Dossier de la IVe Internationale (3 tomes) : collections d’articles relatifs au Groupe Trotskyste Vietnamien en France.

    Traductions en langue vietnamienne de l’œuvre de Trotsky dirigées par Hoàng Khoa Khôi

    • Ma Vie (2 tomes)
    • Littérature et Révolution
    • La révolution permanente
    • La révolution trahie
    • Histoire de la révolution russe (2 tomes)

    Sites Internet


    1) Cf. Le CRI des travailleurs (journal de l’ex-Groupe CRI) n° 17, mars-avril 2005, http://groupecri.free.fr/journal.php?numero=17

    Télécharger au format pdf

    Ces articles pourraient vous intéresser :

    Kurdistan

    Heval Robîn, militant engagé volontaire au Rojava, tué par l’armée turque

    Nous venons d'apprendre avec colère et tristesse la mort de Michael Israel (Heval Robîn), tué par une frappe aérienne de l'armée turque dans le nord de la Syrie. Socialiste et militant syndical aux Etats-Unis, Heval Robîn se trouvait pour la troisième fois au Rojava où il combattait, dans les rangs des YPG, contre Daesh et pour défendre l'expérience politique révolutionnaire du Rojava. Nous saluons ici sa mémoire. Puissent son abnégation et son courage nous inspirer dans les combats à venir ! Lire la suite...

    Télécharger en pdf Tweeter Facebook

    Hommage

    Nguyễn Khánh Hội (1931-2012)

    Nous n'avions pas eu l'information : Nguyễn Khánh Hội est mort le 16 février.

    C'était un vieux militant du groupe trotskyste vietnamien de France. Nous l'avions rencontré avec son camarade Hoàng Khoa Khôi, lui-même mort en 2009 et auquel nous avions rendu hommage.

    Nguyễn avait mené des luttes importantes et dangereuses contre le stalinisme vietnamien, pour l'indépendance de son pays quand Hô Chi Minh négociait avec l'impérialisme, puis en soutien au FLN algérien, contre la guerre du Viêtnam, pour la campagne de dénonciation des ravages de l'"agent orange", pour faire vivre la mémoire du trotskysme viêtnamien jusqu'à aujourd'hui, en France et au Viêtnam même, où il avait des contacts.

    C'est grâce à des militants comme lui que notre courant politique, au sens large du terme, a pu continuer d'exister à l'époque du stalinisme tout-puissant et contre l'impérialisme. Nous ne pouvons que nous associer à l'hommage que lui a rendu Jean-Michel Krivine dans Inprecor. Lire la suite...

    Télécharger en pdf Tweeter Facebook