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Proposition de résolution politique
1. A peine plus de deux ans après son élection, Hollande est en perdition. Il a sous-estimé la profondeur de la crise et s’est définitivement discrédité en annonçant sans cesse la reprise ou le retournement de la courbe du chômage. Malgré le CICE (20 milliards de cadeaux au patronat), puis le « Pacte de responsabilité » (40 milliards), le taux de marge des entreprises ne s’est quasiment pas redressé, après un plongeon de 4 points depuis 2007. La France connaît donc un déficit de compétitivité, tant par rapport à l’Allemagne que vis-à-vis de l’Europe du Sud qui ont mis en œuvre des contre-réformes très dures contre les travailleurs, avant ou après la crise. Du point de vue de la logique du système, il y a donc une nécessité objective à accélérer et à amplifier les attaques. Il faut bien comprendre que les politiques d’austérité n’ajoutent pas « la crise à la crise » (comme le disent les réformistes keynésiens) : elles sont une réponse à la crise, la seule possible dans le cadre du capitalisme pour tenter de redresser le taux de profit et faire repartir la croissance. Le gouvernement Valls II répond à cette nécessité, et non à un caprice, à une bêtise, ou à une volonté sadique de faire payer les travailleur-e-s. Hollande est obligé de faire le pari risqué de virer l’aile gauche du PS du gouvernement alors qu’il connaît une impopularité record. Les cadeaux au patronat ne suffisent plus, il faut désormais mettre en place des « réformes structurelles » pour casser le code du travail et toutes les conquêtes sociales : remise en cause des seuils sociaux, extension du travail le dimanche, déréglementation des professions réglementées, remise en cause de l’avancement à l’ancienneté des fonctionnaires, etc. Le gouvernement veut y parvenir en associant les « partenaires sociaux », mais il n’hésitera pas à accélérer le rythme en procédant par ordonnance et en limitant au maximum le débat parlementaire.
2. La mise en place du gouvernement Valls II accélère et approfondit la crise politique au sommet. Hollande et désormais Valls sont vomis par les travailleur-e-s. Le dégoût est à son comble quand une politique totalement au service du patronat s’accompagne d’une décomposition politique et morale de la caste au pouvoir. A peine nommé, un sous-ministre est obligé de démissionner parce qu’il ne payait pas ses impôts alors qu’il s’était érigé en héros de la lutte contre la fraude fiscale au moment de l’affaire Cahuzac. Trierweiler raconte dans le détail à quel point Hollande prenait plaisir à mépriser les pauvres. Le dégoût et la nausée gagnent y compris les militants sincères du PS et des MJS, qui ne peuvent que constater l’effondrement de leur parti, en voie de PASOKisation.
3. La gauche réformiste ne profite pas du tout du rejet massif du gouvernement. Montebourg, Hamon et les « frondeurs » conjuguent inconsistance politique et pusillanimité. Ils ne remettent pas en cause les coupes dans les dépenses publiques et les cadeaux au patronat, mais ils veulent des « contreparties » et que cela soit accompagné de mesures supplémentaires pour les ménages. Refusant de faire tomber le gouvernement et se réfugiant dans l’abstention, ils se ridiculisent. Le PCF ne veut toujours pas couper les ponts avec le PS, cherche à recomposer la majorité avec Aubry, Duflot ou les « frondeurs », et ne peut incarner la moindre alternative. Le PG et Mélenchon ont compris l’impasse stratégique du Front de gauche, et cherchent à ne plus apparaître comme des membres de la grande famille de la « gauche », dans laquelle ne se reconnaissent plus la grande masse des travailleurs. Mélenchon veut incarner une alternative au système, rendre au peuple sa souveraineté, et lancer un processus constituant. Il a compris qu’il fallait apparaître en rupture avec la gauche institutionnelle pour disputer l’électorat populaire avec Le Pen. Mais son passif, son programme keynésien illusoire, et son incapacité à proposer des mesures de rupture avec le système (dont témoigne son ambiguïté sur la rupture avec l'UE) limitent fortement sa crédibilité et donc ses chances de réussir son pari.
4. L’effondrement du PS et l’incapacité de la gauche réformiste à incarner une alternative crédible offrent un boulevard au Front national, d’autant plus que l’UMP est engluée dans les affaires et apparaît comme le frère jumeau du PS. Aucune force institutionnelle n’est aujourd’hui en capacité de bloquer la dynamique du FN. Après ses 18% aux présidentielles, puis ses 25% aux européennes, le FN est aujourd’hui crédité de 30% à une potentielle élection présidentielle. Le FN réaliserait un score impressionnant chez les ouvriers : environ 50% au premier tour et 70% au second tour. Inimaginable il y a encore un ou deux ans : l’accession au pouvoir du FN n’apparaît plus comme une hypothèse absurde.
5. Le discrédit grandissant de toutes les forces défendant le système capitaliste (hormis le FN) ouvre l’espace des possibles, à condition que nous soyons capables de nous remettre en cause et de repenser notre orientation et notre intervention. Il n’y a aucune fatalité à ce que les travailleur-e-s se réfugient dans l’inaction, l’abstention, ou se tournent vers l’extrême droite.
6. Mais aucun beau discours ne fera reculer l'extrême droite et la réaction. Seul le mouvement ouvrier en action pourrait par ses victoires mettre un coup d'arrêt à la montée du FN.
Nous devons lancer une campagne d’agitation autour de la nécessité de construire un grand mouvement d’ensemble, c’est-à-dire une grève générale bloquant l’économie, pour empêcher le gouvernement et le patronat de faire passer leurs contre-réformes. Nous devons expliquer le rôle de la grève, et le rôle des bureaucraties syndicales qui est d’accompagner les contre-réformes et d’empêcher la convergence des luttes vers la grève générale, par la stratégie bien rodée des journées d’action dispersées qui ne mènent à rien. Cela passe par la dénonciation du « dialogue social » par lequel elles s'intègrent au dispositif gouvernemental sur l'application du pacte de responsabilité, sur la préparation d'attaques à venir dans la Fonction publique
Développer l'implantation dans les entreprises, développer au maximum les mobilisations (notamment les 23 septembre et 16 octobre), favoriser la convergence des luttes est une nécessité, mais cela ne suffit pas pour gagner. Face aux directions syndicales, nous devons prendre des initiatives pour regrouper et organiser les militants lutte de classe dans les syndicats, au sein d’un courant intersyndical. C’est une condition décisive pour vaincre le sabotage organisé des directions syndicales. C’est pourquoi nous proposons que le NPA mette toutes ses forces pour impulser aux cotés d'équipes syndicales et militantes combatives des assises nationales du syndicalisme de lutte de classe, pour que nous avancions concrètement vers la constitution d’un tel courant.
7. Mais la crise du mouvement ouvrier se nourrit aussi de l'absence de perspective politique. Le NPA doit apparaître comme le parti des révolutionnaires, des gens qui pensent que l'on peut en finir avec ce système.
Nous devons donc aussi lancer une campagne de propagande à la hauteur des enjeux. Il faut en finir avec la mauvaise routine des mesures d’urgence sociales et démocratiques, slogans répétés à l’infini, qui nous donnent l’impression d’être « concrets » alors qu’ils n’ont aucune crédibilité à partir du moment où nous sommes incapables d’expliquer comment ceux-ci pourraient mis en œuvre. Il nous faut expliquer qu’il n’y pas d’alternative aux politiques d’austérité dans le cadre du capitalisme pourrissant. Pour satisfaire les besoins sociaux, il faut non seulement socialiser le système bancaire, mais aussi et surtout les grandes entreprises. C’est en expropriant les capitalistes et en prenant le contrôle des grands moyens de production, que nous pourrons produire (différemment) pour satisfaire les besoins sociaux. Voilà le cœur de notre programme qui nous différencie radicalement de tous les partisans avoués du capitalisme (Front National inclus), mais aussi de l'impasse réformiste portée par le Front de Gauche.
Poser la question de la rupture avec le capitalisme de façon concrète et crédible, c’est répondre aux questions et aux doutes que les travailleu-r-ses se posent légitimement. Nous n'intervenons pas dans les luttes simplement comme des syndicalistes très radicaux. Nous portons notre programme politique dans ces luttes. Un profil ouvertement révolutionnaire – dans nos tracts, journaux, apparitions médiatiques, combiné à une intervention volontariste dans nos milieux et dans les luttes permettrait de construire le NPA de manière beaucoup plus dynamique. Il faut donc exprimer un point de vue clair sur la nécessité, pour un gouvernement des travailleur-e-s, de rompre avec le capitalisme et ses institutions (Union européenne, 5e République…), de créer une nouvelle monnaie inconvertible sur les marchés, de contrôler les échanges extérieurs, pour permettre au processus révolutionnaire d’avancer et de s’étendre.
Un tel gouvernement ne pourrait pas émerger à froid dans le cadre des institutions bourgeoises de la 5ème république ou d'un processus constituant à la Mélenchon. Il serait le débouché d'une grève générale qui irait jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'au renversement de la clique politicienne qui gère les affaires de la bourgeoisie, et il serait fondé à partir des organes d'auto-organisation forgés dans la lutte. Il faudra pour cela se confronter aux directions réformistes du mouvement ouvrier, rempart de la bourgeoisie pour sauver ce système qui prend chaque jour davantage le visage de la barbarie.