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Référendum italien : les Italien.ne.s se mobilisent pour dégager Renzi ! La crise d’hégémonie des élites néolibérales s’amplifie en Europe

A la surprise générale, les Italien.ne.s se sont mobilisé.e.s en masse (plus de 65%) pour se prononcer sur la réforme constitutionnelle de Renzi. Selon les experts de la bourgeoisie, une forte participation devait favoriser Renzi. L'aveuglement de ces experts n'a d'égal que leur hargne contre les travailleurs/ses et leur servilité vis-à-vis des capitalistes. En réalité, les Italien.ne.s ont déferlé dans les isoloirs pour refuser sa contre-réforme à 59,1%, et surtout pour le dégager. Cette ordure prétendument de « gauche » a fait passé une des pires lois contre les travailleurs/ses avec le « Jobs act »1. C'est une juste sanction, qui va plonger le pays dans une crise politique. Au delà de l'Italie, après la victoire du Brexit, c'est tout l'édifice de l'Union européenne capitaliste qui est fragilisé. Le rejet des élites néolibérales pro-UE pourrait accélérer la grande crise bancaire qui couve depuis plusieurs mois.

Les élites néolibérales ont cherché à intimider les Italien.ne.s en leur promettant l'apocalypse si le NON gagnait. Les Italien.ne.s n'ont cependant pas cédé au chantage et nous nous réjouissons de cette éclatante victoire du NON. Bien entendu, cette victoire ne résout rien, mais elle ouvre des brèches que les révolutionnaires doivent élargir en proposant une issue anticapitaliste à la crise de ce système pourrissant.

La contre-réforme constitutionnelle de Renzi

La réforme constitutionnelle de Renzi était réclamée par les « marchés » et les autorités européennes pour mettre en place un gouvernement « stable », favorable aux contre-réformes. Elle voulait procéder à une réduction du nombre de sénateurs de 315 à 100, qui n'auraient plus été élus par la population mais « choisis » (sans qu'on sache exactement comment) parmi les conseillers régionaux et les maires. Ce Sénat, privé de légitimité démocratique, aurait eu moins de pouvoir mais aurait gardé des fonctions législatives confuses. Les sénateurs se seraient vu offrir l’immunité parlementaire pour tout ce qui touche aux arrestations, perquisitions, écoutes téléphoniques.

Surtout, la réforme aurait renforcé un peu plus le pouvoir exécutif et les dérives autoritaires de l’État. Les propositions du gouvernement auraient été examinées en priorité à la Chambre et le gouvernement aurait pu accélérer la procédure pour les faire adopter.

Une nouvelle loi électorale était liée à la réforme constitutionnelle : elle prévoyait qu'un parti qui dépasse 40% des suffrages au niveau national pourrait rafler une majorité de sièges à l'ensemble et aura tous les pouvoirs de nomination. Les Italiens ont bien analysé ce déni de démocratie, et ont refusé de troquer la « démocratie » (aussi limitée soit-elle) à « l’efficacité » néolibérale.

Renzi a fédéré tous ses opposants de gauche et de droite contre lui lors de ce référendum. Mais il a pu compter sur quelques débris de la démocratie chrétienne, sur le soutien du Medef italien (Confindustria) et sur celui des syndicats jaunes. Il a pu aussi compter sur le soutien des gouvernements bourgeois du monde entier (Merkel et Obama en tête), inquiets des conséquences politiques et économiques d'une victoire du NON. C'est toute cette clique qui a pris en pleine figure le vote des Italien.ne.s ce dimanche soir.

Un aperçu du champ politique italien

La défiance des Italien.ne.s envers leur personnel politique est très forte. Le parti démocrate de Renzi (qui a effacé toute trace, jusque dans son nom, de ses origines ouvrières) est divisé et de plus en plus impopulaire. Il ne recueillerait au mieux que 30% des suffrages, avec une aile gauche, et des poids lourds du parti (Bersani, d'Alema) qui ont appelé à voter NON au référendum. Le PD peut compter sur le soutien de « Popular Italia », des débris de la démocratie chrétienne autour d'Angelino Alfano qui a rompu avec Berlusconi en 2013, et qui recueillerait autour de 3%.

En face, le principal parti d'opposition est le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo, organisation populiste, anti-euro, anti-immigrés, anti-parti, anti-austérité et pour le revenu de base. Un parti attrape-tout qui capitalise le mécontentement contre la classe politique traditionnelle, qui recueillerait aujourd'hui environ 30% des voix.

Un troisième pôle, de droite, tourne autour de 25-30%. Le parti qui a le vent en poupe est la Ligue du Nord de Matteo Salvini, parti d'extrême-droite anti-euro et anti-immigrés, donné autour de 13%. Forza Italia de Berlusconi (qui est toujours là...) est en perte de vitesse avec environ 11%, et Fratelli d'Italia (parti de droite conservatrice, issu d'Alliance nationale, elle-même issue du postfacisme) pèse environ 4%

La gauche antilibérale est marginalisée autour de 3-4%. La principale composante est « Gauche, écologie et liberté » (Sinistra Ecologia Libertà)2, une alliance électorale dont le principal représentant est Nichi Vendola3, qui vient de « Refondation communiste ». La ligne politique est modérée, et correspond davantage à celle d'un frondeur du PS que de Mélenchon. L'an dernier, un groupe parlementaire s'est formé (Sinistra italiana4) qui regroupe les membres de SEL, mais aussi des parlementaires ayant quitté le parti démocrate (comme Stefano Fassina, ancien ministre de Renzi, critique des politiques d'austérité et de l'euro) ou le mouvement 5 étoiles.

Une dépression économique profonde

L'économie italienne va très mal. Le PIB italien par tête est le même qu'en 1997. L'ampleur de la crise de 2008 a été amplifiée par le cadre de la monnaie unique. Selon une étude du FMI, le Mark est virtuellement sous-évalué de 15% (au taux de change de l’euro) alors que la Lire est surévaluée de 10%. Le taux de profit a fortement baissé depuis la fin des années 1990.

Source : https://thenextrecession.wordpress.com/2016/11/28/the-long-depression-in-italy/

La compétitivité de l'économie italienne s'est effondrée, et la seule variable d'ajustement est les salaires. D'où les attaques du gouvernement Renzi contre les droits des travailleurs/ses avec le « Jobs act ». Mais cela ne suffit pas, et l'Italie est désormais le maillon faible de l'UE. Les banques accumulent des créances pourries : en raison de la crise, beaucoup d'entreprises et de ménages ne peuvent tout simplement plus rembourser leurs dettes. La situation est d'autant plus grave que des centaines de milliers d'Italien.ne.s possèdent des obligations bancaires, c'est-à-dire qu'illes seraient immédiatement spoliés en cas de « Bail-in », c'est-à-dire de renflouement des banques par les actionnaires et prêteurs.

Crise politique et économique en perspective

Il est aujourd'hui difficile de prévoir toutes les conséquences du référendum italien. Les banques italiennes pourraient rapidement être mises en difficulté, et des tensions risquent d'apparaître entre l'Italie et l'UE sur les modalités du renflouement des banques. La question du maintien de l'Italie dans l'euro pourrait se poser dans les mois qui viennent. La crise en Italie pourrait avoir des effets en chaîne, à la fois économiques (avec une remontée des taux d'intérêt qui pourrait provoquer plus rapidement que prévu une nouvelle récession) et politiques.

1http://www.monde-diplomatique.fr/2016/07/FUMAGALLI/55955

2cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Gauche,_%C3%A9cologie_et_libert%C3%A9

3cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Nichi_Vendola

4cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Gauche_italienne ; https://en.wikipedia.org/wiki/Italian_Left

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