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Chronique de la campagne présidentielle – épisode 17
Chaque week-end, nous publions une chronique de la campagne présidentielle. En commentant les faits marquants de la campagne, de notre point de vue qui est celui de communistes révolutionnaires ayant décidé de faire campagne pour la victoire de Mélenchon en 2022. Vous pouvez retrouver les précédentes chroniques sur le site de la Tendance Claire.
Depuis quelques semaines, nous avons commencé à publier une analyse critique du programme de l’Avenir en commun. Nous invitons tous nos lecteurs à suivre cette série de billets publiés régulièrement sur notre site jusqu’au premier tour de l’élection présidentielle.
Au sommaire ce week-end :
- Le match des meetings : Mélenchon met Pécresse KO
- Les magouilles et tractations continuent au sein de la gauche bourgeoise
- De quoi la percée de Roussel dans les sondages est-elle le nom ?
- Le Pen renonce à la retraite à 60 ans
- Brèves : formation professionnelle, industrie du papier, Nathalie Arthaud
Le match des meetings : Mélenchon met Pécresse KO
On nous promettait un « tournant » dans la campagne de Pécresse : elle allait « fendre l’armure » lors de son meeting au Zénith de Paris ce dimanche. Ce fut un naufrage. Un naufrage accentué par le fait que son intervention, sur les chaînes d’info en continue, succédait à celle de Mélenchon à Montpellier. Pécresse a réussi à faire venir, péniblement, 6 000 personnes au Zénith en affrétant des cars de la France entière. Sur le fond, Pécresse a couru après Zemmour et a repris explicitement à son compte sa théorie du « grand remplacement ». Sur la forme, ce fut insipide. Même un éditorialiste mainstream comme Apathie ne pouvait que constater le naufrage : « Aucun parti pris, mais je cherche dans mes souvenirs un orateur aussi visiblement mal à l’aise à la tribune d’un meeting que @vpecresse au #ZenithPecresse Pour l’instant, je n’ai pas trouvé. Étonnant, non? ».
A Montpellier, l’Union populaire a fait une véritable démonstration de force avec près de 8 000 personnes, dans une ambiance très enthousiaste. C’est à ce jour le plus gros meeting de Mélenchon. Le meeting était centré sur l’économie et le social. Mélenchon a dénoncé avec talent les inégalités scandaleuses et égréné une série de mesures en faveur du monde du travail. Mais le principal problème est dans l’illusion qu’il donne que son programme est aussi dans l’intérêt du patronat, avec un raisonnement « keynésien » simpliste et erroné : si on augmente les salaires et les dépenses publiques, alors on stimulera la demande, et donc les carnets de commande se rempliront, et donc les patrons seront contents, et ils investiront et embaucheront. C’est faux : tout ce qui est pris aux capitalistes pour financer les besoins sociaux abaissera le taux de profit et approfondira la crise du capitalisme. Les patrons s’y opposeront de toute leur force. En semant des illusions, Mélenchon ne prépare pas les travailleurs/ses à la mobilisation qui sera nécessaire pour imposer la mise en place des mesures du programme de l’AEC (même si Mélenchon dit par ailleurs qu’il ne faudra pas rester spectateurs). Et il faudra que cette mobilisation aille plus loin que ne le prévoit le programme de l’AEC : il faudra retirer au patronat le pouvoir économique pour pouvoir mobiliser l’appareil productif – contrôlé par les travailleurs/ses - au service des besoins sociaux.
Les magouilles et tractations continuent au sein de la gauche bourgeoise
La gauche bourgeoise cherche désespérement la formule pour casser le leadership de Mélenchon à gauche. On sait aujourd’hui que Europe Ecologie les Verts (EELV) a cherché « à tout prix » à torpiller la primaire populaire, bien conscient que Taubira marchait sur leurs platebandes. Mediapart a révélé cette semaine que le directeur de campagne de Jadot a proposé 150.000 € aux organisateurs de la primaire populaire pour qu'ils la stoppent ! En vain. Jadot peut se rassurer sur le fait que l’opération Taubira ne fonctionne absolument pas, mais il n’en profite pas du tout : il stagne désormais autour de 4-5 %.
Les médias ont révélé en début de semaine que l’équipe de Jadot menait des négociations secrètes avec l’équipe de Taubira. Ils tentent d’obtenir le retrait de Taubira en lui faisant miroiter des postes comme celui de présidente de l’Assemblée constituante si Jadot est élu. Ces gens là sont complètement perchés. Au passage, on a appris que Jadot mettait sur la table cette idée d’assemblée constituante lors de négociations secrètes alors que cela ne figure pas dans son programme. C’est le grand n’importe quoi.
Sandrine Rousseau, qui adore se répandre dans les médias, s’est fâchée toute rouge quand elle a appris ces négociations secrètes dont elle a dit ne rien connaître : « Pendant 15 jours on raconte que Taubira est la pire des candidates et au final, on fait une réunion en catimini pour se répartir les places, avec que des mecs ». Promis, à la prochaine réunion, Sandrine sera invitée aux agapes !
Pendant ce temps là, Hidalgo qui désormais est à 2 % dans les sondages, se démène… pour empêcher Taubira d’avoir ses signatures. Cela semble fonctionner car au dernier pointage Taubira n’avait que 47 signatures jeudi soir. Mais les signatures du PRG ne sont pas encore arrivés. C’est pourquoi Libération a révélé que Hidalgo a appelé le très peu honorable ancien président du PRG, Jean-Michel Baylet, pour lui demander de bloquer les parrainages à l'adresse de l'ancienne ministre de la Justice. Quelle bassesse et quelle médiocrité !
La gauche bourgeoise est aujourd’hui au fond du trou, divisé en trois candidatures liliputiennes. Les médias dominants essaient pourtant d’aider les candidats de la gauche bourgeoise à décoller dans les sondages. Et cela commence à se voir : l’Arcom (Autorité publique française de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) a par exemple mis en garde France Culture pour une surreprésentation de Anne Hidalgo sur son antenne.
De quoi la percée de Roussel dans les sondages est-elle le nom ?
Roussel perce incontestablement dans les sondages : il est désormais autour de 4 % contre 2 % il y a quelques semaines. Il faut dire qu’il a bien été aidé par les médias dominants. Ainsi, il arrive en 3ème position pour les passages sur les matinales des médias, derrière Pécresse et Attal : 47 apparitions en un an pour les seules émissions matinales ! Ex aequo avec Jadot (lui aussi très bien traité par les médias). Pas mal pour un candidat qui stagnait à 2 % dans les médias pendant de longs mois ! Il faut dire que Roussel se donne les moyens de se faire applaudir par la bourgeoisie la plus répugnante : il doute des « valeurs républicaines » de Mélenchon, il participe au rassemblement des flics d’Alliance, il déroule le tapis rouge (dans le cadre d’un hommage à Charlie Hebdo) à des figures islamophobes du Printemps Républicain ou à Caroline Fourest, etc. De quoi se faire féliciter régulièrement par Manuel Valls ou les propagandistes zemmouriens de Cnews.
Un article paru dans Contretemps revient sur le « phénomène Roussel ». D’une part, il rappelle que celui qui cultive le style « gauche populaire » jusqu’à la caricature perce avant tout dans les catégories aisées et surtout chez les retraité.e.s. Très peu chez les jeunes et les ouvriers, malgré ses efforts clownesques pour faire parler de lui à tout prix, comme par exemple en exhibant ses exploits sportifs. D’autre part, il rappelle que Fabien Roussel a été porté à la tête du PCF par une alliance hétéroclite qui conjugue un discours « identitaire », cultivant la nostalgie de l’époque Marchais, qui fait plaisir aux vieux militant.e.s et un opportunisme crasse à l’égard du PS. D’ailleurs, le choix de Ian Brossat, maire adjoint d’Hidalgo (alors que la France insoumise est dans l’opposition municipale), est assez révélateur.
Il se proclame comme le seul candidat de « gauche » qui défend le travail alors que tous les autres défendraient l’assistanat et le « revenu universel ». Ce discours plaît également à la droite réactionnaire, et il est grossièrement mensonger, puisque Mélenchon s’oppose clairement au revenu universel et défend la « garantie d’emploi » que Roussel a d’ailleurs critiqué en affirmant que cela faisait penser à l’URSS !
Roussel affiche en réalité un mépris profond pour les catégories populaires en pensant les séduire en polémiquant lourdement avec la « gauche bobo » et en affichant son amour du pinard, de la viande rouge et de la bagnole. Ce discours cache d’importants renoncements, comme le refus de remettre en cause concrètement la 5ème République. Roussel joue aux « monsieur plus » sur les revendications sociales, mais cela s’apparente à une pure surenchère car il refuse de remettre en cause la propriété capitaliste. Par ailleurs, en invisibilisant les revendications antiracistes, féministes, écologiques, il a une stratégie de « niche » au lieu de chercher à articuler les différentes luttes pour construire l’unité du prolétariat face à la bourgeoisie.
Le Pen renonce à la retraite à 60 ans
Cela ne va pas très fort pour Le Pen. Les départs du RN se succèdent pour aller chez Zemmour, avant le coup de grâce programmée du ralliement à Zemmour de Marion Maréchal Le Pen. Zemmour remonte dans les sondages et se rapproche de Le Pen. Dimanche dernier, Le Pen avait péniblement fait venir 3000 personnes à son « grand meeting » de Reims en faisant venir des cars de la France entière. L’ambiance était terne, le discours de Le Pen était soporifique et technocratique, avant le sketch intimiste de la fin du meeting. Cela contrastait avec le meeting de Zemmour à Lille qui a réuni le double de participants sans affréter des cars de la France entière. L’ambiance était exaltée. La dynamique de campagne est incontestablement du côté de Zemmour.
Dans une interview au Figaro, Le Pen avait accusé Zemmour d’être entouré de “catholiques traditionalistes”, de “païens”, de “nazis”... Rétropédalage quelques jours plus tard pour attirer les catholiques traditionnalistes qu’elle aime bien finalement : « J’ai, moi-même, fait baptiser mes enfants à Saint-Nicolas-du-Chardonnet ».
Mais la grosse actualité de la semaine est l’abandon par Le Pen de la revendication de la retraite à 60 ans avec 40 années de cotisations. Le vernis social craque. A la place, Le Pen défend une position peu claire, un système « progressif » selon l’âge d’entrée dans la vie active. Pour Le Pen, il s’agit de montrer à la bourgeoisie sa « crédibilité » et de disputer l’électorat de Fillon à Zemmour. Avec le pari que son électorat populaire lui restera fidèle quoi qu’il arrive…
Brèves
On réfléchit chez les partisans de Macron à la préparation de la thérapie de choc contre les travailleurs pour le second mandat de Jupiter. L'ancien directeur de cabinet de Pénicaud a monté un "cabinet de conseil en stratégie sociale" qui vient de publier un rapport sur la formation avec une série de propositions. Un article du Monde évoque ce rapport. Parmi ces propositions, on notera celle-ci : « Doter financièrement le CPF de tous les jeunes qui ne poursuivent pas leurs études au-delà du baccalauréat (8000 €) ». Autrement dit, le rapport préconise de mettre 8000 € sur le compte formation (CPF) des jeunes si ceux-ci acceptent d'arrêter leurs études au niveau du bac... en leur faisant croire que c'est leur intérêt de les arrêter pour les reprendre plus tard ! En réalité, il s'agit de considérer que trop de jeunes font des études supérieures non rentables pour le capital,. C'est abject, mais révélateur d'une conception instrumentale de l'enseignement, réduit à son utilité pour le grand capital.
Avec la flambée du coût de la matière première, de l’électricité, et des transports, le prix du papier flambe. Le prix de la tonne de papier journal est passé de 400 € en juin 2021 à 800 € en décembre 2021. Il n’y a plus aujourd’hui en France d’usine qui fabrique du papier recyclé (qui alimente les journaux). La grande usine de la Chapelle Darblay qui subvenait à 40 % des besoins en France, a fermé en 2020. Du coup, les vieux papiers collectés en France partent en Allemagne et reviennent pour être utilisés en France. Absurdité écologique, mais aussi économique avec la forte hausse du coût des transports. Il y a quelques jours, la métropole de Rouen a préempté le site de la Chapelle Darblay en vue de chercher un industriel qui accepterait de reprendre l’activité et les machines. C’est tout l’échec de la politique industrielle qu’illustre le funeste destin de la filière du papier recyclé. L’urgence est de nationaliser le site de la Chapelle Darblay et de relancer immédiatement la production pour satisfaire les besoins en papier recyclé sans avoir recours aux importations. Ce qu’un gouvernement au service de la bourgeoisie est incapable de faire !
Nathalie Arthaud (qui est en voie d’obtenir les 500 parrainages : 419 sont déjà enregistrés par la Conseil constitutionnel) a tenu un grand meeting parisien à la Mutualité ce samedi devant 1600 militant.e.s. Comme en 2012, LO programme un meeting national au Zénith quelques jours avant le scrutin. En 2017, le meeting national de clôture de la campagne avait eu lieu à Aubervilliers. Nul doute que LO réussira à faire monter l’ensemble de ses militants très disciplinés à Paris pour ce meeting national qui devrait regrouper, comme en 2012 et 2017, environ 4000 personnes. Une démonstration que seule LO est capable de faire à l’extrême-gauche. A noter que LO a apporté son soutien à la mobilisation du « convoi de la liberté »