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    Industrie française : tout doit disparaître !

    La désindustrialisation française se poursuit irrésistiblement. Le nombre d'emplois salariés directs (hors interim) dans l'industrie ne cesse de diminuer : -60.000 emplois par an en moyenne depuis 2000. Ce recul est partiellement compensé par le recours accru à la forme la plus précaire d'emplois (l'interim) qui atteint aujourd'hui le niveau record de 9% de l'emploi manufacturier. Malgré un contexte favorable (euro faible et prix bas du pétrole), la production manufacturière a stagné en 2016 (+0,3%) alors qu'elle progressait de 1,7% dans l'ensemble de l'UE. Le déficit commercial manufacturier a atteint -44,3 milliards en 2016, proche de son niveau record de 2011 (-46,8 milliards). La restauration partielle du taux de marge dans l'industrie (+ 3 points depuis 2012), après une chute de plus de 10 points au début des années 2000, n'a pas suffi à restaurer la compétitivité de l'industrie française. Malgré le CICE et le blocage des salaires, les groupes industriels français ne font pas le poids face à la concurrence étrangère. Et la logique capitaliste est impitoyable : les forts absorbent les faibles, liquident, restructurent, et ce sont les travailleurs qui en paient le prix. C'est pourquoi les travailleurs d'Alstom et des chantiers de l'Atlantique ont tout à craindre des opérations industrielles en cours.

    La fin du dépeçage d'Alstom : l'absorption par Siemens

    En 2014, Hollande et Macron s'étaient opposés à l'offre de Siemens soutenue par Montebourg. Celle-ci consistait en un échange d'actifs entre les deux groupes : Siemens auraient repris les activités énergie d’Alstom et en contrepartie toutes les activités ferroviaires (y compris la signalisation) auraient été reprises par Alstom. Ils ont préféré laisser les dirigeants d'Alstom brader la branche énergie du groupe à General Electric. Cette vente s'est faite sous la pression de la justice américaine, comme le démontre un excellent documentaire : http://www.lcp.fr/emissions/droit-de-suite/283004-alstom-une-affaire-detat. Pour résumer, les dirigeants d'Alstom, poursuivis pour corruption (et un haut cadre a été récemment condamné à 30 mois de prison : http://www.lejdd.fr/economie/frederic-pierucci-le-cadre-maudit-dalstom-condamne-a-30-mois-de-prison-aux-etats-unis-3446582), ont négocié en secret un accord avec General Electric pour acheter la clémence de la justice américaine. Ce scandale d’État a également fait des heureux en France : la vente des bijoux de famille a permis de distribuer du cash (sous la forme d'un rachat d'actions) aux actionnaires d'Alstom au détriment des intérêts à long terme de l'entreprise.

    L'an dernier, l’État avait obligé la SNCF à passer 700 millions d'€ de commandes en rames de TGV et de trains intercités pour remplir le carnet de commandes de l'usine de Belfort. Mais Alstom était un groupe affaibli et moins rentable que ses concurrents. Cela ouvrait la voie à l'offre de Siemens, un groupe au chiffre d'affaire équivalent, aux effectifs bien plus faibles, mais beaucoup plus rentable. Contrairement à ce que veut nous faire croire le gouvernement, il ne s'agit pas d'un « mariage entre égaux » ou de construire un « Airbus du rail » : il s'agit simplement d'une vulgaire absorption. Siemens possédera la majorité du capital du groupe et aura la majorité absolue au conseil d'administration. Macron, en bon banquier d'affaire, a donné son feu vert à une opération qui n'aura qu'un seul gagnant côté français : les actionnaires d'Alstom qui percevront pour fêter la liquidation du groupe un « dividende exceptionnel » et qui voient le cours de leurs actions s'envoler. Pour les travailleurs, les promesses concernant le maintien de l'emploi pendant 4 ans n'ont strictement aucune valeur juridique. Les capitalistes de Siemens ajusteront l'emploi en fonction de leur objectif de maximisation du profit. Et l’État français a bien fait comprendre qu'il s'en lavait les mains. En renonçant à exercer en octobre son option sur les titres détenus par le groupe Bouygues (et prêtés à l’État français qui était donc actionnaire à 20% d'Alstom), l’État se désengagera totalement d'Alstom. Merkel saura-t-elle remercier Macron en appuyant son projet jupitérien de réforme de l'Union européenne ? Cela n'en prend pas le chemin, et les gesticulations grandiloquentes de Macron risquent de ne pas peser bien lourd dans les négociations pour constituer un nouveau gouvernement en Allemagne.

    Quand la nationalisation des Chantiers de Saint Nazaire fait pschitt

    Dans des temps lointains (avant 2006), les Chantiers de l'Atlantique étaient détenus par Alstom. Mais c'était avant le démembrement d'Alstom. Vendus en 2006 aux norvégiens Aker Yards, ces derniers s'en sont débarrassé en 2008 en le revendant aux coréens STX en 2008, avec une participation minoritaire de l’État français (33%). Après la faillite de STX en 2016, le groupe italien Fincantieri était le seul candidat à la reprise des Chantiers. Mais Macron a affirmé qu'il était inacceptable qu'un groupe étranger prenne le contrôle des Chantiers. En juillet, il a procédé à une nationalisation des Chantiers au nom de la « défense des intérêts stratégiques de la France ». Tout cela... pour faire machine arrière deux mois plus tard : Fincantieri va en effet s'emparer de 50% de STX, auxquels s'ajoutera 1% prêté par l’État français pour une durée de 12 ans. C'est donc Fincantieri qui dirigera seul les chantiers de l'Atlantique. Et ici encore, le gouvernement prend des vessies pour des lanternes, en parlant de la création d'un « Airbus naval », de « garantie de l'emploi » avec la menace de reprendre le 1% prêté si Fincantieri ne respecte pas ses promesses.

    Stoppons la désindustrialisation du pays ! Imposons la nationalisation sous contrôle ouvrier des grands groupes industriels !

    La logique capitaliste est limpide : les groupes industriels pas assez rentables doivent être liquidés ou restructurés. Les variables d'ajustement sont les emplois et les salaires, qui doivent être revus à la baisse. Pour préserver les emplois et les conditions de travail, il faut donc rompre avec cette logique. Cela signifie refuser ces fusions / absorptions capitalistes et se battre pour la nationalisation (sans indemnité pour les gros actionnaires) et sous contrôle des travailleurs des sites industriels menacés. En effet, dans le cadre du capitalisme, seul l’État est en mesure de garantir la pérennité des emplois. Il faut pour cela imposer la garantie des débouchés des entreprises nationalisés, en s'affranchissant des lois du marché et de la concurrence.

    Des victoires partielles, imposant la nationalisation d’entreprises qui ferment ou licencient, sont possibles. Cela nécessite évidemment de construire un gros rapport de force et de ne pas se laisser enfermer dans des revendications illusoires compatibles avec la logique capitaliste. Ces victoires ouvriraient alors la voie à la remise en cause du système, à la socialisation des grands moyens de production, sous le contrôle des travailleurs, pour la satisfaction des besoins sociaux.

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