Les bienfaits du capitalisme : une récession à n’en plus finir et l’austérité comme seul horizon

Article
publié dans Tout est à nous ! du 23 mai 2013 (avec un titre
différent)
Contrairement
aux prévisions de l’INSEE et de la Banque de France, le PIB a de
nouveau reculé de 0,2% au 1er
trimestre 2013. Depuis un an, la consommation stagne et
l’investissement des entreprises plonge de 2,5% sur un an. Le
déficit commercial s’accentue à nouveau, après avoir diminué en
raison d’une baisse des importations. Après une timide reprise en
2010, tous les indicateurs sont dans le « rouge » depuis
deux ans sans espoir d’amélioration ces prochains mois. Le chômage
réel va donc continuer à grimper. Dans le même temps, de façon
totalement surréaliste, abreuvée de liquidités, la Bourse s’envole
alors que les profits stagnent ou reculent (-28% pour les groupes du
CAC 40 en 2012). Une nouvelle bulle financière se forme et finira
par éclater : il faudra des plans d’austérité encore plus
durs pour sauver les grands groupes capitalistes « too big to
fail » (trop grands pour être mis en faillite).
Du
point de vue du capital, la France est désormais le maillon faible
de l’Europe. Dans les pays de l’Europe du Sud, les salaires ont
baissé depuis 2009-2010. En Allemagne, avec l'Agenda 2010 au début
des années 2000, Schröder a coupé dans les dépenses sociales et
les salaires ont été bloqués. La France fait désormais figure
d’exception : pendant la crise, malgré l'austérité, les
salaires ont continué à augmenter, plus vite que la productivité,
si bien que le taux de marge des entreprises a baissé, accentuant la
crise de rentabilité du capital. La « compétitivité »
de la France est au plus bas, malgré la réforme du marché du
travail (ANI) et le pacte de compétitivité (avec un cadeau de 20
milliards de baisse d’impôts pour les patrons). Avec la monnaie
unique, la seule variable d’ajustement pour regagner en
compétitivité est la baisse des salaires. Sans possibilité de
dévaluer, de restreindre la liberté de circulation des marchandises
et des capitaux, la mise en concurrence des travailleurs se déploie
sans entraves et aligne les droits sociaux vers le bas.
En
bon gestionnaire des intérêts du capital, la feuille de route de
Hollande est simple : baisser le « coût » du
travail, pour augmenter les marges des entreprises, afin de relancer
l’investissement et donc la croissance. Ces bons conseils lui sont
bien sur adressés par les libéraux… mais aussi par un prestigieux
économiste « antilibéral », par ailleurs membre du
collectif des « économistes atterrés », Philippe
Askenazy. Ce dernier a pondu avec d’autres un rapport (1)
où il met de côté la « relance pour les gogos », et
suggère trois pistes pour baisser le coût du travail :
- la
multiplication des dérogations aux accords de branche, qui sont
beaucoup trop rigides, et empêchent le blocage des salaires ;
- le
basculement des cotisations sociales vers les impôts pour faire
passer le financement de la protection sociale des patrons vers les
salariés ;
- l"inflation,
parce que c'est plus facile de baisser les salaires réels grâce à
l"inflation qu'en baissant le salaire nominal (un grand classique
préconisé cyniquement par Keynes en son temps… et repris
aujourd’hui par Mélenchon qui loue les vertus « sociales »
de l’inflation).
Ce
point de vue n'est bien sur pas partagé par la plupart des
antilibéraux. Si de plus en plus se prononcent pour la fin de
l"euro, le dernier en date étant Oscar Lafontaine, dirigeant de Die
Linke
en Allemagne, la rupture avec l'UE est une condition nécessaire mais
pas suffisante pour une politique alternative. La sortie de l'euro
couplée à la mise en place d'une politique de relance keynésienne
(hausse des salaires et des dépenses publiques) ne ferait
qu'aggraver la crise de rentabilité du capital et se terminerait
inéluctablement par une austérité accrue. C'est la mise hors
d"état de nuire des capitalistes, par leur expropriation des
principaux moyens de production, couplée à la planification de
l"économie, qui seule pourra permettre la satisfaction des besoins
sociaux.
1)
http://www.cae.gouv.fr/IMG/pdf/CAE-note005.pdf
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