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À propos de la crise du bitcoin

Article publié dans l'Anticapitaliste
Après avoir atteint des sommets, le bitcoin a perdu la moitié de sa valeur en un peu plus d’un mois. Elon Musk, patron de Tesla, avait mis le feu aux poudres en annonçant qu’il ne serait plus possible de payer ses véhicules en bitcoin, et c’est surtout l’État chinois, qui semblait jusqu’ici favorable au bitcoin, qui a interdit aux institutions financières du pays de proposer à leurs clients des services liés aux « cryptomonnaies ».
Le bitcoin n’est pas une monnaie (c’est un moyen de paiement très loin d’être universel…) mais un actif financier hautement spéculatif, qui n’a pas de sous-jacent économique réel, et donc qui n’est pas source de revenu (au contraire par exemple des actions qui permettent de recevoir des dividendes). Sa valeur fondamentale est donc nulle. Mais sa valeur spéculative repose sur sa rareté, puisque la création de bitcoins est limitée strictement chaque année. Du coup, les spéculateurs abreuvés de liquidités ont anticipé une forte valorisation du bitcoin (par rapport aux véritables « monnaies »). Les promoteurs du bitcoin affirment d’ailleurs que sa qualité fondamentale est d’être un « étalon de mesure et de transport de la valeur » en raison de sa dimension non manipulable et non-inflationniste (en bitcoin, pas en monnaies...). Autrement dit, contrairement au dollar ou à l’euro, le bitcoin serait une « monnaie bien gérée », une sorte d’« or digital » qui prendrait de la valeur par rapport aux véritables monnaies créées abondamment pour faire face à la crise.
Rêve anarcho-capitaliste
Le bitcoin avait déjà connu un trou d’air en 2018 avant de repartir de plus belle. Il est possible qu’il en soit de même aujourd’hui car les raisons de son succès demeurent. Néanmoins, des obstacles sérieux se dressent sur sa route : il utilise une grande quantité d’électricité pour les opérations informatiques qui servent à le fabriquer et à valider les transactions. D’autre part, de grands groupes comme Facebook s’apprêtent à lancer leurs propres « cryptomonnaies ». Elles ne seraient néanmoins pas en concurrence directe avec le bitcoin puisqu’elles seraient davantage des moyens de paiement (limités) adossés au dollar ou à l’euro que des supports spéculatifs. Les banques centrales réfléchissent aussi à lancer leur « monnaie numérique » afin de remplacer au maximum les billets de banque. Mais il s’agirait ici de véritable monnaie qui concurrencerait la monnaie scripturale (monnaie de crédit) créée par les banques commerciales.
Le bitcoin ne relève pas d’une utopie communiste, mais d’un rêve anarcho-capitaliste d’une monnaie stable indépendante des banques et des États considérés comme trop laxistes sur la création monétaire. Dans la réalité, il est avant tout un support spéculatif. Une approche communiste de la monnaie n’existe pas pour l’instant de façon consensuelle y compris entre marxistes (certains « modèles » prônant une économie et planification électroniques ou d’échanges directs sans monnaie). Mais si l’on pense à l’utilisation possible de la monnaie dans une économie post-capitaliste, celle-ci ne doit plus fonctionner comme « capital-argent » accumulable sur la base d’une logique de profit.
En partant de la critique radicale de l’actuel fonctionnement du système bancaire capitaliste, nous mettons en avant l’exigence de la socialisation des banques et de la subordination des financements à à la satisfaction des besoins. Par conséquent, la création monétaire devrait exclure le crédit lucratif entre les mains des banques privées ; elle devrait être dans les mains d’une entité publique. Et celle-ci, loin d’être « indépendante », devrait être soumise à un contrôle démocratique dont les modalités sont à débattre. Elle serait en lien avec des « fonds d’investissements » (dont les ressources viendraient des « cotisations » des entreprises) et des critères, élaborés en commun, de satisfaction planifiée de grands besoins déterminés collectivement comme « fondamentaux », sur critères sociaux et écologiques. L’ensemble peut s’accompagner d'une distribution qui augmente l’accès gratuit aux biens et services collectifs et le développement d'échanges directs en nature.