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Sur la lutte des travailleurs sans-papiers de Vitry-sur-Seine
L’occupation du centre des Impôts : une autre forme de lutte, tout aussi légitime
Le 19 octobre, une assemblée générale appelée par le Collectif des Travailleurs Sans-Papiers de Vitry (CTSPV) décide, en investissant le centre des Impôts de Vitry, de rejoindre le mouvement lancé par la CGT le 12 octobre. Évacués par la police le soir même, les camarades reviennent les jours suivants pour bloquer l’accès au centre depuis l’extérieur. Après plusieurs jours, et sous la menace d’évacuation défi-nitive par la police, ils ont décidé de laisser libre l’accès tout en occupant, de façon symbolique, le trottoir devant le centre. Depuis, dans un froid souvent glacial, des dizaines de sans-papiers occupent jour et nuit ce trottoir, dans un campement de fortune, qui est également devenu un véritable quartier général où s’organisent et se tiennent des manifestations, des rassemble-ments et des fêtes de solidarité.
L’occupation du centre des Impôts et non d’une entreprise s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, le mouvement est parti d’un collectif de ville, le CTSPV. La plupart des membres du collectif sont des travailleurs isolés, souvent dans de petites entreprises. Il n’existait donc pas une entreprise évidente vers laquelle diriger la lutte de l’ensemble du collectif. Du point de vue de la lutte des sans-papiers en général, il s’agit là d’une question stratégique importante. Pour aller vers un mouvement de tous les sans-papiers (organisés ou isolés, avec ou sans travail...), la grève et l’occupation des entreprises, forme de lutte absolument centrale et nécessaire, doit être complétée par d’autres formes.
En second lieu, l’occupation du centre des Impôts permet aux camarades de dénoncer un autre aspect de l’exploitation: le racket de l’État (1), qui encaisse les impôts, les taxes, les cotisations sociales salariales, etc. (en effet, 70% des salariés sans-papiers ont un contrat sous une identité d’emprunt), mais qui ne leur donne aucun droit en retour (pas de protection contre les licenciements, pas de droit à la Sécu, à la retraite, etc.). D’autre part, ils accusent l’État d’« organis[er leur] exploitation au profit des patrons ».
Une conscience politique avancée, un soutien important de la population et de nombreuses organisations...
Dès le début de la lutte et de manière constante, les camarades ont mis en avant le mot d’ordre de « régularisation de tous les sans-papiers par une carte de dix ans » (2), qui tranche avec l’orientation proposée de la CGT de régularisation « par le travail » (3). Ainsi n’ont-ils jamais demandé une « circulaire de régularisation » comme le fait la CGT et ils ont immédiatement dénoncé la circu-laire Besson comme « repren[ant] tout ce qu’[ils ont] dénoncé : l’obligation de demander la permis-sion au patron pour être régularisé (la promesse d’embauche), la liste des métiers en tension, l’obligation de 5 ans de présence, de 12 feuilles de paye, etc. » (4)
Les camarades ont également toujours cherché à s’adresser à l’ensemble de la population en diffusant régulièrement des milliers de tracts à Vitry et ailleurs, tracts qui soulignent notamment les liens entre leur lutte et celle des autres travailleurs et catégories de la population (électriciens, gaziers, routiers, producteurs de lait, etc.). De manière générale, la lutte a amené des camarades à discuter de l’oppression des patrons et de l’État, du colonialisme, du système capita-liste... bref de politique. Certains ont d’ailleurs commencé à lire Marx...
Cette lutte est très populaire à Vitry : un comité de soutien regroupant des habitants de Vitry ainsi que des élus et une dizaine d’organisations (VP-Partisan, dont un militant joue un rôle dirigeant dans la lutte, NPA, LO, PS, PCF, PG, les Verts, Solidaires, FSE Paris, etc.), se réunit toutes les semaines pour aider les camarades sans-papiers à organiser des collectes, à distribuer des tracts, etc. Un autre exemple de solidarité a été fourni par des étudiants de l’Université Paris VII : avec le syndicat étudiant FSE-Paris VII et du comité jeune NPA-Paris VII, nous avons organisé plusieurs collectes à l’université, permettant de populariser la lutte des sans-papiers de Vitry et de récolter un soutien financier appréciable, et nous leur avons régulièrement apporté notre soutien sur place.
... à l’exception de la CGT !
Lorsque le collectif CTSPV avait lancé cette lutte le 19 octobre, une semaine après le début du mouvement piloté par la CGT, il l’avait conçu comme s’intégrant pleinement à ce dernier. Cependant, malgré de nombreuses sollicitations du collectif, l’UL CGT de Vitry a obstinément refusé de soutenir cette lutte. Pire, lorsque des délégués du collectif sont venus à Montreuil le 23 octobre pour participer à une réunion de délégués des sites en lutte, ils ont été interdits d’accès sous prétexte que le collectif critiquait la CGT (ce qui est par ailleurs factuellement faux) et qu’il s’en prend à un centre des Impôts et non à une entreprise (5).
Le refus des bureaucrates de la CGT de soutenir cette lutte s’ajoute aux nombreux méfaits que nous avions déjà relevés dans le précédent numéro, comme le boycott par la CGT des manifestations appelées par les collectifs sans-papiers « indépen-dants » (CSP 75, CTSPV) ou l’interdiction de comités de soutien pluralistes. En fait, la CGT veut garder un contrôle total sur l’organisation de la grève, sur sa stratégie et notamment sur les négociations avec le gouvernement. Dans ce cadre, la participation de collectifs auto-organisés, avec des stratégies et mots d’ordre différents, est inacceptable. Face à un gouvernement en position de force, cette ligne bureaucratique aboutit à une division des forces qui ne peut que nuire au mouvement et est d’autant plus criminelle qu’elle livre des travailleurs parmi les plus exploités et vulnérables aux possibles représailles.
Devant le refus de la CGT de les soutenir, les camarades sans-papiers de Vitry ont raison de continuer à insister auprès de l’UL CGT, car cela est nécessaire pour constituer le front unique ouvrier. Mais ils doivent aussi chercher à s’adresser aux autres collectifs indépendants, ainsi qu’aux camarades des sites contrôlés par la CGT, avec l’objectif d’une coordination nationale des sans-papiers (voir article suivant). Il est évident qu’un tel appel pour l’auto-organisation de la part de sans-papiers en lutte rencontrera un écho favorable chez d’autres sans-papiers en lutte, fussent-ils dirigés par la CGT.
Au moment où nous bouclons ce numéro, le piquet vient d’être évacué par la police. Cependant, la détermination des camarades reste très forte : une AG doit décider de la suite du mouvement.
1) Pour un argumentaire très précis, voir le tract du CTSPV du 4 novembre 2009, disponible sur notre site http://tendanceclaire.npa.free.fr
2) Voir l’ensemble des tracts du CTSPV, disponibles sur notre site.
3) Voir notre critique de l’orientation de la CGT dans Au CLAIR de la lutte n° 4.
4) Voir le tract du CTSPV du 11 déc. 2009.
5) Voir le document du CTSPV du 2 novembre 2009.