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Chronique de la campagne présidentielle – épisode 22
Chaque week-end, nous publions une chronique de la campagne présidentielle. En commentant les faits marquants de la campagne, de notre point de vue qui est celui de communistes révolutionnaires ayant décidé de faire campagne pour la victoire de Mélenchon en 2022. Vous pouvez retrouver les précédentes chroniques sur le site de la Tendance Claire.
Depuis quelques semaines, nous avons commencé à publier une analyse critique du programme de l’Avenir en commun. Nous invitons tous nos lecteurs à suivre cette série de billets publiés désormais chaque jour sur notre site jusqu’au premier tour de l’élection présidentielle.
Au sommaire ce week-end :
- Progression continue de Mélenchon qui reste pour le moment derrière Le Pen
- Le Pen chiffre son programme : opération enfumage
- Les meetings de ce dimanche : Mélenchon, Zemmour, Jadot, Roussel
Progression continue de Mélenchon qui reste pour le moment derrière Le Pen
Mélenchon progresse lentement (trop lentement?) mais surement. Il est désormais pointé à un plus de 14 % en moyenne. Il creuse encore l’écart avec Zemmour et Pécresse (sous la barre des 11%), mais l’écart avec Le Pen a eu tendance à se creuser puisque celle-ci est autour de 19 %.
Néanmoins, en fin de semaine, Ipsos indiquait une accélération de la dynamique de Mélenchon et un début de flécissement chez Le Pen, avec Mélenchon pointé à 14,5 % et Le Pen à 17,5 %. Dans les sondages de second tour, selon l’Ifop, il est passé de 31 % d’intentions de vote il y a 15 jours à 40 % aujourd’hui. Cela signifie que ni le premier tour, ni la victoire finale ne sont joués. Mélenchon peut accéder au second tour en mobilisant l’électorat populaire pour l’instant abstentionniste et en bénéficiant d’un « vote efficace » d’électeurs et d’électrices de gauche. Des réserves de voix existent alors que l’extrême-droite fait déjà le plein et est toujours en difficulté dans la dernière ligne droite (sauf en 2002), au moment où les gens s’intéressent de plus en plus à la campagne.
Le Pen chiffre son programme : opération enfumage
Le Pen cherche à se « crédibiliser » : du coup, alors qu’elle moquait les « comptables » en 2017, elle a cette fois-ci « chiffrer » son programme présidentiel. Et oh miracle, les mesures de dépenses (ou de recettes en moins) sont exactement égales aux mesures de recettes (ou de dépenses en moins) : 68,3 Mds très précisément !
En fait, il n’y a strictement aucun moyen de contrôler d’où sortent les chiffres avancés par Le Pen : ils sortent du chapeau et sont hautement contestables.
Côté ressources :
- 16 Mds d’économie en moindres prestations sociales aux étranger (ceux qui n’auront pas travaillé 5 ans à temps plein), notamment le RSA ou les allocations familiales. Le Monde a chiffré ces « économies » à 6 Mds, donc Le Pen aurait gonflé le chiffre de 10 Mds…
- 15 Mds récupérés de la fraude : Le Pen nous fait croire qu’en magicienne, elle va récupérer ces milliards… sans recruter un seul contrôleur fiscal !
- 5 Mds de baisse de contribution de la France à l’Union européenne : là aussi, la magicienne Le Pen versera 5 Mds de moins à l’UE… mais bien entendu les versements de l’Union européenne à la France, eux, ne baisseront pas !
- 8 Mds d’économie sur le fonctionnement des agences de l’État : là aussi, ce chiffre sort de nulle part, et Le Pen ne nous explique pas comment elle compte récupérer ces 10 Mds
Côté dépenses :
- 7 Mds supplémentaires sur l’indexation des pensions de retraite sur les prix. Le Pen table sur une inflation de 2,1 %… alors qu’elle est aujourd’hui à 4,2 % et que rien n’indique qu’elle va baisser dans les mois qui viennent. On peut donc douter de cette indexation...
- 4 Mds pour l’apprentissage : c’est présenté comme une « aide aux jeunes », mais la moitié de ces 4 Mds seront touchés par les patrons. En bonne candidate patronale, Le Pen veut promouvoir l’apprentissage plutôt que l’enseignement public
- 2 Mds d’exonération d’impôt sur le revenu pour les jeunes de moins de 30 ans : l’essentiel bénéficiera aux jeunes les plus riches… qui paient le plus d’impôt sur le revenu (l’impôt le plus juste car progressif).
- 10 Mds de cadeaux supplémentaires pour les patrons avec la baisse d’impôts sur la productions
- 1,7 Mds d’allégement de la fiscalité sur l’héritage et les donations, qui bénéficiera aux ménages les plus richessses
- 3 Mds pour instituer une part fiscale complète dès le 2ème enfant : ici aussi, Le Pen baisse l’impôt le plus redistributif, et cette baisse bénéficiera essentiellement aux ménages avec enfants les plus riches
- 10 Mds en année pleine pour sa réforme des retraites : Le Pen explique qu’elle n’a pas changé son projet, et pourtant les dépenses passent de 46 Mds en 2017 à 10 Mds aujourd’hui ! En fait, Le Pen a abandonné le retour aux 40 annuités et à l’âge légal à 60 ans, sauf pour celles et ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans.
Et puis il y a les mesures présentées comme « sans conséquence budgétaire » : par exemple une trentaine de milliards d’investissements dans la santé ou le nucléaire qui seraient financés par un « fonds souverain » alimenté par l’épargne des Français. Mais du coup, on imagine que cette épargne sera rémunérée… et donc il y aura un coût (non chiffré) pour les finances publiques.
Autre entourloupe : les 7 Mds d’exonérations d’impôts sur les sociétés pour les entreprises créées par les moins de 30 ans (encore une aide pour les patrons déguisée en aides pour les jeunes…) ne couteraient rien au budget public ! Idem pour les exonérations de cotisations patronales sur les hausses de salaires, ce ne serait pas un manque à gagner pour finances publiques !
Pour résumer, Le Pen n’a pas grand-chose à proposer pour le pouvoir d’achat des catégories populaires dont elle prétend défendre les intérêts. Elle a revanche des propositions très précises en faveur des plus riches et du patronat. En outre, le chiffrage de son programme est une arnaque totale, et donc on peut être sur que les maigres promesses sociales pour les plus modestes ne seront pas honorées. Il y aura en outre des coupes massives dans les services publics et la protection sociale si Le Pen veut équilibrer son budget comme elle prétend vouloir le faire pour être crédible aux yeux du patronat.
Les meetings de ce dimanche : Mélenchon, Zemmour, Jadot
Dimanche après-midi à peu près à la même heure, il y avait trois meetings : Zemmour au Trocadéro à Paris, Mélenchon à Marseille, Jadot au Zénith de Paris, et Roussel à Toulouse.
Bizarrement, les grandes chaînes d’information (BFM, Cnews, LCI) ont privilégié le meeting de Zemmour (retransmis en direct), alors que celui-ci est désormais nettement distancé par Mélenchon.
Zemmour a rassemblé beaucoup de monde. Mais il ment de façon grossière en annonçant « 100 000 personnes » sur une place de 21.000 mètres carré. Surtout qu’une photo aérienne montre que les manifestants étaient concentrés sur la place. La foule était densé mais en comptant 2 personnes au mètre carré (on peut difficilement faire plus dans un rassemblement extérieur), on atteint une participation maximale d’environ 40.000 personnes.
Mélenchon revendique 35.000 personnes à son meeting marseillais. C’est moins qu’en 2017 (où il revendiquait « près de 100.000 »), mais il y avait une foule enthousiaste croyant en la victoire. L’intervention de Mélenchon a été précédé notamment par les interventions du syndicaliste Xavier Mathieu et de deux acteurs/actrices de « Plus belle la vie ». Cette fois-ci, Mélenchon a ciblé tout autant Macron et Le Pen, et on retiendra cette « punchline » bien lancée et très juste sur le fond : « M. Macron, c’est le programme économique de Mme. LePen, plus le mépris de classe. Mme. LePen, c’est le programme économique de M. Macron, plus le mépris de race ».
Quant à Jadot, il organisait son meeting national au Zénith. En faisant venir de la France entière, il n’a pas réussi à remplir le Zénith : il n’a revendiqué que 4.000 personnes pour une salle de 6800 places. Des rideaux avait été fermés pour faire croire à une salle comble, mais il n’y a pas de miracle pour Jadot. Comme il le fait depuis plusieurs semaines, il a tapé comme un sourd sur Mélenchon, essayant de freiner le départ de ses électeurs et électrices vers Mélenchon : « On ne vote pas pour un homme qui refuse d’appeler un dictateur un dictateur » a-t-il martelé, faisant croire que Mélenchon était proche politiquement de Poutine.
Quant à Roussel, il a réuni moins de 2.000 personnes à Toulouse dans une salle d’une capacité de 2.200 places qui n’était pas entièrement remplie.