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Blade runner 2049 ou quand le néo-libéralisme hollywoodien ne nous fait plus rêver
Article paru sur le site du NPA : https://npa2009.org/idees/culture/blade-runner-2049-ou-quand-le-neo-liberalisme-hollywoodien-ne-nous-fait-plus-rever
La première chose à dire sur Blade Runner 2049 c’est que l’histoire du film reste très confuse en particulier si on n’a pas vu l’original. Les enjeux reste très obscurs tout au long du film.
Une belle photographie
Oui, la photographie du film est très belle, hyper léchée. Big up aux technicienNEs qui ont bossé dessus. Mais l'art pour l'art, ça laisse un peu de glace. Surtout, autant de moyens pour si peu de consistance politique, philosophique, esthétique, c'est du gâchis.
Plus généralement, sur l'esthétique du film, il y a des ratés. L'ambiance SF des années 80 où la ville est baignée de bijoux techniques mais avec des gens qui cuisinent encore sur des gazinières, c'est un peu bizarre aujourd'hui. Ca avait du sens dans les années 80, c'était l'imaginaire de l'époque, on en était là. Mais aujourd'hui, on aurait au moins des plaques à induction. Et ça n'assume même pas cette esthétique un peu désuète qui, si elle l'était, donnerait une couleur nostalgique au film et nous parviendraient alors des émotions suscitées par le titillement de notre imaginaire enfantin. Mais non, c’est assez incongru.
Le bruit du film ?
Il y a de belles trouvailles sonores et certaines musiques sont très bienvenues. Par exemple, le travail autour des bruits de la ville est à saluer. Ville encore plus bruyante et d'un bruit encore plus omniprésent qu'il peut déjà l'être dans nos villes contemporaines. Une petite critique toutefois sur un usage peut-être trop systématique de musique à suspens à chaque scène où il va « se passer » quelque chose, qui contribue à tendre le spectateur. Pour un film se voulant contemplatif, ça tape légèrement à côté...
Mais surtout de manière générale, on est envahi par une ambiance sonore beaucoup trop forte, qui est vraiment dérangeante. Mais le problème de ce film est bien son idéologie qui est celui de la domination masculine blanche américaine (puritaine). Ce point de vue non assumé, non mis en perspective, se retrouve à plusieurs niveaux.
Sexisme et hétéronormativité puissance 1000
On ne pourra pas ne pas remarquer qu’en plein dans l’affaire Weinstein : il y a deux agresseurs sexuels comme acteurs principaux (Jared Leto et Harrisson Ford). Joli casting.
Il y a une célébration de la femme dans ce film dans un rôle hyper genré : c’est la femme qui a su procréer et sauver l'humanité d'elle-même. L'histoire vient nous rappeler (heureusement, parce qu'on l'avait oublié depuis le temps) qu'un enfant c'est un papa et une maman (biologiques). Bien sûr que la quasi totalité des blockbusters sont masculinistes et hétéronormés. Mais, il y une différence entre la représentation de la domination, le fait de ne pas interroger cette domination et le fait d'en faire la propagande. Là, on nous fait bien comprendre qu'Adam et Eve transhumanistes seront blancHEs, hétéros, amoureuSESx, l'un de l'autre (parce que pour procréer il faut de l'amour sinon ça ne marche pas). Vraiment, la procréation c'est le sens de la vie et notre but ultime.
En faisant une petite typologie des personnages féminins on obtient dans le désordre,
- Joi, l'hologramme esclave sexuelle. C'est un produit vendu par la firme Wallace. Elle a un nom mais qui est en fait une marque puisqu'elle s'appelle pareil pour tout le monde. C'est un peu comme si vous nouiez une histoire d'amour avec Siri ou avec votre peluche Pikachu. Elle a aussi la même tête et le même corps pour tous les clients. Elle est vendue nue, en tout cas on la voit telle sur les pubs géantes dans la ville. Sa première apparition dans le film est en tant qu'amante de Ryan Gosling 1 en tenue de ménagère des années 60. Elle vient tout juste de tester une nouvelle recette de cuisine juste pour le plaisir de son « mari ».
- Les prostituées, espionnes des rebelles – et russes, forcément (relent d'anticommunisme ?) – et leur maquerelle, cheffe de la rébellion. C'est une maquerelle donc elle est moche, forcément, mais il n'ont pas tiré le trait jusqu'à choisir une personne grosse ; elle a simplement perdu un œil par amour pour la cause qu'elle défend.
- Les statues géantes, censées être des vestiges d'une civilisation perdue ? Elles ressemblent à des personnages de manga. Elles sont nues avec des gros seins et les tétons qui pointent, une taille très fine, de très belles fesses rebondies, elles se tiennent sur la pointe des pieds, la tête renversée et la bouche ouverte et ont des cheveux blonds (à cause de la lumière de la scène) attachés en queue de cheval.
- La cheffe de la police jouée par Robin Wright. C'est la femme célibataire sans enfant donc dure et occupant un poste d'autorité. Etant la supérieure de Ryan Gosling, elle joue le substitut de père et de mère auprès de ce robot orphelin. On en rajoute une couche au passage : si Ryan Gosling a lui aussi besoin d'un papa et d'une maman, c'est bien que c'est important.
- L'assistante de direction du méchant. Un robot méchant (quoique je n'en suis pas certaine encore une fois, je n'ai pas bien compris les rapports de force et les lignes morales de ce film) qui verse des larmes à certains moments, on ne sait pas pourquoi, et qui défend par dessus-tout son patron (euh non, pardon, patron est un gros mot ; elle défend l'homme qu'elle admire, qui lui a fait confiance et lui a donné du travail), qui fait tout le sale boulot pour lui et qui adore les bébés.
- L'enfant prodige. Le seul personnage qui ne s'en sort pas trop mal. Elle est immuno-déficiente donc enfermée dans une cage blanche en verre et en mur épais et insonorisés où elle peut rêver et créer des souvenirs pour les robots (c'est son métier). Super perspective d'avenir. Mais bon c'est une auto-entrepreneuse qui ne s'est pas laissée racheter par le géant Wallace. Elle préfère la liberté. Et puis c'est une artiste. Ou plutôt, elle se rêve artiste (elle met d'elle-même dans les souvenirs qu'elle crée « comme un artiste dans son œuvre »). Cependant, c'est mon seul gros coup de cœur du film. J'ai trouvé l'actrice incroyable. Son jeu est hyper fin et assez profond (on ne sait pas comment elle a échappé à la direction d'acteurs/rices des plus douteuses) ; ce qui fait que c'est le seul rôle féminin qui s'en sort à peu près sauf que ça ne fait pas pencher la balance, malgré ses efforts... Et puis, ce n'est qu'un robot.
Sans oublier le racisme...
Enfin si on examine la question de race on peut voir que le seul exploiteur avéré est noir. Ce personnage est deux fois condamnable moralement car 1/ c'est un exploiteur 2/ il exploite des enfants.
Le patron de la firme Wallace, en regard de ça – à part qu'il a tous les attributs de méchant (il est moche et infirme et a les cheveux gominés) est présenté comme un génie créateur2. Alors que le gars vend des « produits » (un hologramme-femme) contre la misère sexuelle et amoureuse et qu'il envoie des transhumainEs esclaves coloniser d'autres planètes, il est stylé parce qu'il sauve l'humanité. En plus il va bientôt se rendre compte qu'il peut reproduire ses produits. En fait, c'est un mac transhumaniste qui fait aussi de la traite d'esclaves, certes robotiques, mais un peu humainEs quand même. Bon donc en gros c'est un génie créateur qui fait un peu peur et qui a l'air un peu méchant mais ce n'est pas central. Tout sauf un exploiteur sans vergogne. Ca c'est le rôle du Noir.
Le deuxième personnage noir du film est une caricature : il est drôle et il rit on-ne-sait-pas-pourquoi-mais-ce-doit-être-parce-qu'il-est-joyeux-malgré-sa-misère-financière. Il vit et travaille dans un 10m2 rempli de gadgets à réparer du sol au plafond. Oui donc, forcément, il est réparateur de télé, il fait ça au « black ». Forcément, en plus de réparer des appareils, il refourgue aussi des chèvres (et il s'y connaît en matière première, bah oui, les mines, tout ça, la nature, il est en connexion hein avec la nature, même s'il n'y a plus d'animaux vivants, marche pieds nus tout ça, c'est ses ancêtres, ça doit laisser des traces).
On saluera au passage le remarquable travail de la police de Los Angeles qui tient la ville toute seule grâce à ses supers agentEs, sans faire aucune bavure. Merci les flics blancHEs. Pour le coup, toute ressemblance avec la vraie police de Los Angeles est à proscrire. Heureusement que la LAPD est là pour nous rappeler qu'on est bien dans un film de science-fiction.
Le film se voulait contemplatif... On peut lui reconnaître : on contemple ça tous les jours. C'est ennuyeux et ça ne fait pas rêver.