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Les pratiques de Shein sont répugnantes... mais celles des autres plateformes aussi !

Toute la semaine dernière, l’arrivée des produits de Shein au BHV parisien, et, prochainement, dans les Galeries Lafayette de différentes villes a excité les politicien-ne-s et les médias. Ils se sont déchaînés contre la plateforme chinoise de commerce en ligne et ont même découvert in extremis, comme par hasard, qu’elle vendait des poupées sexuelles d’apparence infantile et des armes à feu...
Indignation sélective et hypocrisie à tous les étages
Il est évident que les pratiques de Shein doivent être dénoncées et que l’ouverture de ses boutiques physiques n’est pas une bonne nouvelle. Les produits qu’elle vend sont souvent de mauvaise qualité car ils sont fabriqués à la va-vite dans des conditions d’exploitation maximale en Chine, beaucoup ne respectent pas les normes de sécurité de l’Union européenne, leur importation est source d’une pollution considérable et leur prix très bas ruine les dernières usines françaises de textile et les petits commerces.
Cependant, la différence avec les autres plateformes et les autres produits importés n’est que de degré et non de nature. Depuis des années, la mondialisation capitaliste a conduit à l’inondation des marchés par des produits à bas coût, distribués par de grandes plateformes de commerce en ligne. Les mêmes qui s’indignent contre Shein n’hésitent pas à acheter sur les plateformes états-uniennes, bien plus importantes encore que celles de la Chine. Les mêmes qui s’indignent contre la « fast fashion » venue des usines chinoises se taisent quand il s’agit de produits du Français Décathlon ou de l’Espagnol Zara, pourtant fabriqués eux aussi en Chine, dans des conditions d’exploitation qui n’ont rien à envier à celles des marques distribuées par Shein. Les patrons de Shein et du BHV ont eu beau jeu de le rappeler, en arguant de leur droit de participer à la concurrence généralisée avec les mêmes armes que les autres.
En outre, la Chine n’a pas le monopole de la maltraitance des travailleur/se-s : cet été encore, Libération a révélé les conditions indignes des usines milanaises dans lesquelles travaillent les ouvrier-e-s d’une marque de luxe appartenant au groupe français LVMH. On a entendu bien peu d’indignations alors envers Bernard Arnaud, dont les marques sont bien sûr vendues, elles aussi, au BHV, et qui possède même un bon tronçon de la rue de Rivoli...
La gauche bourgeoise parisienne a même appelé à une manifestation devant le BHV le jour de l’ouverture des boutiques de Shein... mais elle a rassemblé beaucoup moins de monde que les files d’attente des clients impatients. Comment ces gens du PS et leurs alliés pourraient-ils être crédibles, alors qu’ils ont été eux aussi artisans, quand ils étaient au pouvoir sous Mitterrand, sous Jospin ou sous Hollande, de la dérégulation généralisée exigée par les capitalistes ?
L’ennemi principal, c’est le capitalisme !
Car c’est bien là le problème : depuis des décennies, les patrons et leurs valets politiques de droite comme de « gauche », au niveau de l’État comme de l’Union européenne, n’ont cessé de multiplier les mesures visant à libéraliser l’économie, à autoriser les importations de n’importe quels produits, à cautionner la croissance exponentielle des transports, au nom de la « concurrence libre et non faussée ». Cela a favorisé la fermeture de centaines d’usines, notamment dans les secteurs textile et manufacturier, à la dégradation de la qualité des produits, sciemment conçus pour être vite jetés et remplacés, à la pollution par les usines et les transports, à la surconsommation généralisée...
L’achat de ces produits par les gens est dû d’une part aux difficultés financières d’un nombre croissant d’entre eux, qui choisissent les produits les moins chers, d’autre part à l’aliénation consumériste qui frappe toutes les classes sociales dans une société où règnent les plaisirs immédiats, en compensation de l’épuisement productiviste au travail, de la peur du lendemain, de la perte de sens résultant du recul des solidarités actives et notamment des luttes collectives... Intoxiqués par le fétichisme de marchandises clinquantes et apparemment toujours nouvelles, les gens oublient, au moment de les acheter, les conditions réelles de leur production, l’exploitation des travailleur/se-s chinois-es, les dégâts écologiques et les conséquences pour l’emploi local.
Pour un protectionnisme social et écologique, il faut un gouvernement des travailleur/se-s !
La lutte pour la prise de conscience et les changements de comportement ne peut être que politique et non moralisatrice. Il ne s’agit évidemment pas de culpabiliser les pauvres, qui n’ont souvent pas le choix de leurs consommations et sont de toute façon les moins pollueurs. Le boycott des plateformes multinationales et des produits des grands groupes capitalistes fabriqués dans les pires conditions est un moyen de combat légitime, dont les organisations anticapitalistes ne se saisissent pas assez, alors qu’il peut être un moyen de politiser les gens et de les faire venir peu à peur sur le terrain de l’anticapitalisme. Car il faut surtout convaincre que le problème réside dans le système capitaliste comme tel, qui conduit à des désastres sociaux, économiques et écologiques. Contre nos gouvernements, l’Union européenne et l’Organisation mondiale du commerce, nous devons exiger la rupture avec la mondialisation capitaliste, notamment le protectionnisme social et écologique. Les promesses de réindustrialisation faites par Macron ne sont pas tenues car il refuse de rompre avec le libre-échange – allant même jusqu’à l’aggraver par son acceptation du Mercosur qu’il avait pourtant contesté !
Pour que, en France comme dans les autres pays, des emplois soient créés massivement, que la classe ouvrière puisse de nouveau croître en quantité et que les modes de consommation deviennent plus vertueux sur le plan écologique, il faut développer des industries utiles à la population, respectant des normes sociales et environnementales optimales. Cela ne sera possible que dans le cadre d’un plan de développement élaboré par la population elle-même, c’est-à-dire par les travailleur/se-s, qui sont aussi les consommateur/trice-s les plus nombreux/se-s. C’est donc à eux et elles de prendre le pouvoir et de décider ce qu’il faut produire, comment et à quelles conditions. Cela implique de réduire les importations de produits que nous pouvons fabriquer localement, de contrôler les frontières et les flux de capitaux en mettant en place le monopole étatique du commerce extérieur.
Le scandale des poupées sexuelles cache mal le refus de lutter réellement contre la pédocriminalité
Quant à la vente de poupées sexuelles d’apparence infantile, qui n’est pas l’apanage de Shein, elle a suscité une indignation légitime, mais elle en saurait masquer que ce n’est pas là le scandale le plus grave. Si des personnes s’achètent ce genre d’objets, ce n’est pas encore un crime, même si cela peut y conduire, tout en les rendant suspectes de consommer de la pédopornographie. Les pouvoirs publics font mine d’être fermes contre la pédocriminalité et promettent en l’occurrence d’identifier les acheteurs, mais de façon générale ils ne mènent pas la lutte qu’il faudrait. D’une part, la lutte contre la pédopornographie, qui implique quant à elle des crimes puisque ce sont de vrai-e-s enfants qui sont violés pour être filmés, est menée avec des moyens dérisoires par rapport à l’ampleur du phénomène : c’est un des secteurs de la police pour lesquels nous revendiquons beaucoup de moyens supplémentaires, au lieu de dilapider l’argent public dans des systèmes de vidéosurveillance de rue qui ne servent pas à grand-chose ou dans de nouveaux équipements toujours plus dangereux des CRS ou des gendarmes mobiles qui répriment les manifestant-e-s. D’autre part, les viols d’enfants ont lieu en fait, pour la plupart, non à l’occasion de tournages de films, mais au sein de la cellule familiale, et sont commis le plus souvent par des pères, des grands-pères, des frères ou des oncles.
Or les moyens de détection sont cruellement insuffisants : il faut embaucher et former massivement des personnels dans l’éducation nationale, les structures d’accueil des enfants, les services de l’assistance sociale et la protection judiciaire de la jeunesse – autant de secteurs laissés à l’abandon par les gouvernements successifs, qui préfèrent investir dans la répression de la population. Il faut aussi qu’un vrai plan de prévention et de formation soit mis en œuvre, notamment dans le cadre scolaire, en informant et en formant les parents comme les enfants, sous des formes adaptées, par des séquences annuelles dédiées. Il faut enfin investir massivement dans le domaine de la santé mentale pour diagnostiquer et soigner les troubles du comportement ou de la mentalité des personnes qui en sont atteintes – même si ce ne sont là qu’une partie moins importante qu’on ne crois souvent des pédocriminels. Au-delà, seule une transformation révolutionnaire de la société pourra mettre fin à la plupart des comportements criminels, en l’occurrence en changeant profondément les structures familiales qui expliquent la plupart des violences patriarcales commises généralement par des hommes contre des enfants et des femmes.







