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    Ruffin, Lordon, Halimi: un trio derrière Nuit Debout

    Lordon nuit-debout Ruffin

    Lien publiée le 27 avril 2016

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2016/04/27/01016-20160427ARTFIG00220-francois-ruffin-frederic-lordon-serge-halimi-un-trio-derriere-nuit-debout.php

    PORTRAITS- Qualifiés de « gourous » de Nuit Debout par le réalisateur Romain Goupil, le créateur du journal Fakir, l'économiste et le directeur du Monde diplomatique tentent de penser un « plan de bataille » pour l'après Nuit Debout.

    Il y a ceux qui se contentent des AG interminables place de la République, d'une démocratie à ciel ouvert aux allures de fête de l'Huma. Et il y a ceux qui veulent aller plus loin, rêvent d'une grève générale, d'une jonction avec les syndicats, d'un grand bouleversement qui permettrait de «renverser le système». Le mouvement Nuit Debout a beau refuser tout leader, il est des noms qui reviennent souvent sur le devant de la scène. «Frédéric Lordon, François Ruffin, Serge Halimi sont les gourous de Nuit debout», accuse ainsi Romain Goupil dans les colonnes du Figaro. Qui sont ces trois agitateurs? Ont-ils un projet commun? A la Bourse du travail, le 20 avril dernier, ils tentaient de penser «l'étape d'après».

    Itinéraires de trois activistes bien connus de la gauche radicale.

    • François Ruffin, Robin des bois à l'assaut du Cac 40

    François Ruffin est un agitateur bien connu des milieux de la gauche radicale, qui s'invite dans les AG des grandes entreprises du Cac 40 et titille les patrons par des happenings spectaculaires. Il est l'auteur notamment

    Couverture du dernier numéro de Fakir.

    de l'essai Les petits soldats du journalisme (2003), où il critiquait le formatage intellectuel des élites médiatiques par les écoles de journalisme. Il a été un temps compagnon de route du Front de gauche, avant de se consacrer uniquement au combat journalistique et syndical.

    En 1999, à seulement 24 ans, il fonde le journal Fakir à Amiens, en Picardie qui se présente comme un «journal fâché avec tout le monde. Ou presque». Dans ce bimestriel militant, qui revendique un tirage de 140.000 exemplaires, on parle d'écologie, de souverainisme, on critique l'austérité et le néolibéralisme, le marché et la technique.

    En février 2016, il lance un documentaire satirique intitulé Merci Patron! qui filme la revanche de deux chômeurs contre Bernard Arnault, le patron de LVMH et première fortune de France. Le succès du film en salles (250.000 entrées) est à l'origine de Nuit Debout. En effet, c'est à l'issue d'une réunion organisé par Fakir ayant pour thème «Leur faire peur», qu'un des participants lance l'idée de Nuit debout. C'est l'équipe de Fakir qui s'occupe par ailleurs du site «Convergence-des-luttes» qui publie quotidiennement les comptes-rendus des AG de Nuit debout. Vêtu de son impérissable t-shirt «I love Bernard», Ruffin intervient régulièrement à la Bourse du travail, à côté de République, où se trament les réunions les plus politiques du mouvement Nuit debout.

    • Frédéric Lordon, économiste souverainiste qui veut la grève générale

    Autre acteur incontournable du mouvement: l'économiste Frédéric Lordon, professeur à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et signataire du Manifeste des économistes atterréspublié en 2010, où un groupe d'économistes déplorait que tout recommence comme avant après la crise financière de 2008.

    Sur son blog «La pompe à phynance», hébergé par Le Monde diplomatique, il fustige «le fanatisme néolibéral du Parti socialiste» et critique vertement les économistes «officiels» Daniel Cohen, Olivier Blanchard ou Thomas Piketty. Souverainiste, il s'est positionné en faveur de la sortie de l'euro, position iconoclaste à gauche. Il est proche de Fakir et de François Ruffin: il a fait l'éloge de Merci patron…. dans Le Monde diplomatique.

    Lors d'une intervention remarquée à la Bourse du Travail, mercredi dernier, Lordon a donné sa vision de ce que devait être Nuit Debout. Justifiant l'expulsion de Finkielkraut de la place de la République, il se positionne contre une «démocratie inclusive», qui prônerait le débat pour le débat, et lui préfère un militantisme assumé. «Ce pays est ravagé par deux violences à grande échelle: la violence du capital, et la violence identitaire raciste, cette violence dont Finkielkraut est peut-être le propagateur le plus notoire.» «Nous ne sommes pas amis avec tout le monde, et nous n'apportons pas la paix», a-t-il ainsi martelé.

    Que veut-il? Lordon espère, comme Ruffin, une extension du mouvement aux classes populaires et aux banlieues. «Il n'y aura pas de transformation politique d'ampleur sans un mouvement populaire de masse. Or un tel mouvement prend nécessairement, pour partie, la forme de la grève générale», écrit-il sur son blog.

    Il évoque la stratégie dite du «grain de sable» «Il faut mettre des grains de sable partout: débouler dans un débat d'Anne Hidalgo, débouler dans une conférence de l'ESCP qui a invité Philippot… dans une multitude de lieux, faire dérailler le cours normal des choses, les harceler, leur ôter toute tranquillité.»

    • Serge Halimi, pourfendeur des «nouveaux chiens de garde»

    Fils de la militante féministe Gisèle Halimi, Serge Halimi est l'actuel directeur du Monde diplomatique, mensuel français le plus lu au monde, puisqu'il est distribué en plusieurs langues dans sa version internationale tirée à 2 millions d'exemplaires. Il est aussi l'auteur des Nouveaux chiens de garde, un pamphlet où il montre les liens entre hommes politiques, journalistes et grands patrons d'entreprises, et dénonce un «journalisme de connivence». Le livre a donné, en 2012, un film du même nom. Discret, ce docteur en sciences-politiques, auteur de nombreux essais, refuse d'aller dans les «médias dominants».

    Le Monde diplo, qui héberge le blog de Frédéric Lordon, est très présent sur Nuit Debout. Des exemplaires sont même distribués gratuitement place de la République.

    Comme Lordon et Ruffin, Halimi pense que le mouvement doit opérer la jonction avec les syndicats, et se politiser davantage. «Sans stratégie, sans alliés, la rébellion pourrait ne pas aboutir à une transformation de la société», a-t-il déclaré à la Bourse du travail.«Alors que la classe dirigeante est solidaire, consciente de ses intérêts et mobilisée, elle a en face d'elle d'innombrables associations, syndicats et partis qui sont parfois tentés de défendre leur pré carré sans alliés, sans priorité, et sans plan de bataille», a-t-il ajouté.

    Prochaine action envisagée par le trio: la jonction avec les syndicats le 1er Mai. «Je souhaite qu'on fasse un très gros 1er mai, je souhaite que la manif se termine à République, et je souhaite qu'on fasse un meeting commun avec les syndicats opposés à la loi El Khomri», affirmait ainsi Ruffin mercredi dernier.