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    Hors des partis, la pensée de gauche (radicale) s’épanouit

    Lien publiée le 20 septembre 2017

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    Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.

    http://www.slate.fr/story/151457/politique-gauche-radicale-hors-les-murs

    À la marge des partis politiques traditionnels et des organisations syndicales, la «gauche hors les murs» s'appuie sur un solide réseau de médias et de maisons d'édition.

    Les effets de la crise touchent chaque famille politique, chaque famille de pensée. À gauche, quelque part loin au-delà du PS, à l’extérieur des partis politiques mais sans jamais perdre le contact avec eux (avec le Front de Gauche, EELV ou le NPA), en lien avec de nombreux mouvements sociaux, existe un espace intellectuel et militant mis au défi par la crise de 2008.

    1989 et la chute du «socialisme réel» puis les grèves de 1995 contre le Plan Juppé visant à réformer la Sécurité sociale sont deux des dates importantes de l’essor et de la coagulation d’une «gauche critique» dont la mission a été, dès les origines, de dépasser l’échec du communisme et l’abandon par forfait de la social-démocratie. Depuis les années 1990, cet espace politique tisse des liens entres intellectuels (dont la figure tutélaire reste Pierre Bourdieu), les partis à la gauche du PS et certaines organisation syndicales (SUD et la CGT au premier chef). En 2016, elle a joué un rôle important dans la contestation de la loi El Khomri.

    Quelques mois après les 20% de Jean-Luc Mélenchon au premier tour de l’élection présidentielle, alors que la France insoumise a fait une entrée remarquée à l’Assemblée Nationale, c’est dans la «gauche hors les murs», univers foisonnant, que se joue une part du destin de la gauche française. Un siècle après la Révolution d’Octobre 1917, cette galaxie s’interroge: «Que faire?». 

    La «pensée critique» au cœur d’une galaxie française et d’une constellation internationale

    Une véritable passion pour les idées, inhérente au mouvement ouvrier, irrigue cette galaxie. Textes collectifs et pétitions jalonnent son histoire comme les motions de congrès négociées à la virgule près ont marqué la vie des partis de gauche. Au sein de la gauche radicale, du mouvement altermondialiste en particulier, les débats par courriers électroniques longs de plusieurs pages sont monnaie courante. Ils abordent des questions de fond et stratégiques. Polémiques, controverses, débats sont nombreux mais généralement réservés aux militants les plus aguerris, investis et reconnus.

    Pour dessiner les contours des pensées qui influencent cet espace, il est indispensable de se saisir d’Hémisphère Gauche (Paris, La Découverte), l’ouvrage de Razmig Keucheyan qui est un précieux guide au cœur de la «pensée critique». Les thèses de Toni NegriDavid Harvey,Slavoj ZizekStuart Hall, Nicos PoulantzasJudith Butler etc… sont abondamment débattues, et les personnalités de cet univers développent des opinions allant des thèses libertaires, parfois imprégnées par le néo-zapatisme à un marxisme beaucoup plus orthodoxe en passant par les questionnements post-marxistes. 

    Quelques maisons d’édition sont particulièrement influentes et emblématiques au sein de cette galaxie: La FabriqueLes Liens qui libèrentLes Petits MatinsLes Prairies ordinairesles éditions Amsterdam ou La Découverte.

    C’est La Découverte qui édite avec Médiapart La Revue du crieur. Le «crieur», qui ornait les collections Maspero, l’éditeur mythique de la gauche française des années 1960-1970, fait le lien. Il ferait presque figure d’emblème de cette «gauche hors les murs». 

    Une de la Revue du crieur n°7En sept numéros, La Revue du crieur s’est en effet imposée comme une revue phare de cet univers intellectuel et politique. Avec des signatures que l’on retrouve dans Regards, Le Monde Diplomatique, Médiapart ou ailleurs, La Revue du crieur aborde des sujets allant de ce qu’est «l’alt-right» américaine, «l’intersectionnalité des luttes» ou les enjeux des politiques culturelles. Elle mène des enquêtes sur la pensée et l’action de Marcel Gauchet, Alain Badiou ou Caroline Fourest.

    La Revue du crieur partage ce rôle de moteur des débats intellectuels à gauche avec d’autres revues comme MouvementsRegards ou Contretemps. Regards a notamment été dirigé, dans le passé, par Emmanuelle Cosse (devenue dirigeante d’EELV puis Ministre de François Hollande et Manuel Valls) et, très récemment encore, par Clémentine Autain. C’est aujourd’hui Pierre Jacquemain, démissionnaire du cabinet de Myriam El Khomri, qui en a pris la tête. 

    Contretemps est également une des revues de référence de cet univers. Ayant fusionnée avec Critique Communiste, animée notamment par Francis Sitel, issu du trotskysme, elle fut fondée par Daniel Bensaïd, figure intellectuelle de référence, auteur de nombreux ouvrages, dirigeant historique de la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) puis du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA).

    Une de Contretemps n°34On trouve à Contretemps nombre d’anciens membres de la LCR-NPA et de leurs scissions (Gauche Unitaire, depuis fondue dans le PCF, ou Gauche Anticapitaliste). Les archives de Contretemps-Critique communiste témoignent de quarante années d’intenses et riches débats. 

    Lors de Nuit Debout, le rôle du Monde Diplomatique et de son actuelle rédaction avait pu être souligné. Serge Halimi, Pierre Rimbert ou Renaud Lambert mirent par exemple en garde le mouvement de la Place de la République contre les impasses révélées par Occupy Wall Street (OWS).

    Constituée autour d’anciens membres de la rédaction du «Diplo», comme Bernard Cassen, Ignacio Ramonet, Ramon Chao ou Maurice Lemoine, Mémoire des luttes est animée par Christophe Ventura. 

    C’est à l’initiative des dirigeants d’alors du Monde Diplomatique que fut créée l’association altermondialiste Attac, en 1998. Détenteurs d’un carnet d’adresse lié au prestige du Monde Diplomatique à l’étranger et à ses nombreuses éditions dans d’autres pays, ils créèrent les Forums Sociaux Mondiaux, véritable incubateur des mouvements anti-globalisation, devenus ensuite «altermondialiste». Attac, si elle n’est plus aussi puissante qu’il y a une quinzaine d’années, demeure néanmoins une des organisations emblématiques.

    La génération de la crise

    Une nouvelle génération militante apparait. Elle s’est engagée le plus souvent après la crise de 2008. Les sites Ballast et Le Vent se lève sont emblématiques de leur ainsi deux des sites émergents et très dynamiques de cette «gauche hors les murs». Animés par de jeunes intellectuels et militants venus de différents horizons de la gauche, ils sont les relais privilégiés des réflexions et thèses des fondateurs et dirigeants de Podemos et des débats stratégiques nés dans les contexte espagnol et portugais.

    En effet, la naissance de Podemos en janvier 2014 et son installation confirmée nationalement comme localement marque une relative rupture dans l’histoire de la gauche radicale. Le contexte né de la crise de 2008, l’ampleur des drames sociaux et l’impasse des politiques menées jusqu’alors tant par les sociaux-démocrates que par les conservateurs a donné naissance à des mouvements de contestation associant souvent jeunesse précarisée et diplômés déclassés. 

    Clémentine Autain, François Ruffin, Danièle Obono, députés du groupe de La France Insoumise, ont des parcours intellectuels et militants forgés au cœur de cette «gauche hors les murs», mais également emblématique de la génération nouvelle de la gauche radicale européenne.

    L’élection d’une trentaine de députés de la gauche radicale ou communistes (répartis dans deux groupes parlementaire) offre un débouché politique et parlementaire inédit. L’inscription dans les institutions de la démarche politique de la «gauche hors les murs» comme le débat stratégique en cours a été accéléré par l’élection présidentielle. 

    Crise de croissance

    L’élection présidentielle a permis à une candidature issue de la gauche radicale –celle de Jean-Luc Mélenchon– de convaincre largement au-delà de son électorat traditionnel.

    La «gauche hors les murs» est en conséquence confrontée à un défi majeur: comment faire partager ses points de vue, ceux de la pensée critique, auprès d’un électorat étranger à ses stratégies et à ses codes? En France, comme en Espagne, en Italie ou au Royaume-Uni, la gauche radicale est face au défi de sa refondation.