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Egypte: une loi pour criminaliser l’athéisme, un tour de vis contre les libertés
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
Annoncée par le comité religieux du Parlement, une loi criminalisant l’athéisme est en préparation en Egypte. Elle a été rédigée et présentée par le député Amrou Hamroush qui veut enrayer un «fléau» vers lequel les jeunes se tournent de plus en plus. Déjà approuvé par la haute autorité religieuse d’Al-Azhar, le projet est dénoncé comme anticonstitutionnel par des défenseurs des droits de l’Homme.
Nouveau tour de vis contre les libertés publiques en Egypte, une loi criminalisant l’athéisme est en cours d'élaboration pour être soumise au vote du Parlement.
Rédacteur et présentateur de ce projet, le député Amrou Hamroush estime en effet que l’athéisme se répand de plus en plus ces derniers temps dans la société égyptienne et qu’il est devenu nécessaire de le contrer.
«Empêcher la propagation d'une pensée empoisonnée parmi les musulmans»
Insistant sur l’idée que l’athéisme est «un danger pour toutes les religions abrahamiques» (judaïsme, christianisme et islam), le député égyptien considère qu’avant même de légiférer, il est indispensable de le combattre idéologiquement.
Dans son intervention à la télévision Dream par satellite, Hamroush affirme également que le repli des jeunes vers l’athéisme est quelque chose qui nuit à toute la société, car «la jeunesse est le nerf même de la société».
Selon lui, enfin, le texte n’enfreint pas la liberté de croyance qui reste, dans la Constitution, liée aux principes de la charia islamique.
Son projet de loi a déjà reçu l’aval d’Al-Azhar, la plus haute autorité religieuse de l’islam sunnite en Egypte.
«Il est nécessaire de promulguer des lois qui dissuadent les gens de violer les instincts naturels de l’homme et de punir ceux qui ont été séduits par l’athéisme», a déclaré Mohamed Zaki, chef du Conseil suprême de cette institution.
«La force de dissuasion doit être sévère pour empêcher la propagation de cette pensée empoisonnée parmi les musulmans, notamment les plus jeunes d’entre eux», a-t-il ajouté.
Criminaliser désormais l'absence même de croyance
Il existe déjà en Egypte, selon Jeune Afrique, l’article 98 du code pénal qui permet les poursuites pour blasphème ou diffamation religieuse.
Une loi selon laquelle ceux qui ont insulté ou ridiculisé les religions, ou fait la promotion d’idées «extrémistes» capables de nuire à l’«unité nationale», sont passibles de six mois à cinq ans de prison.
Elle a permis d’envoyer derrière les barreaux de nombreux jeunes tels que Sherif Gaber ou Karim al-Banna qui ont écopé respectivement d’un an et de trois ans de prison, début 2015, pour avoir fait part de leur doute ou de leur athéisme sur les réseaux sociaux.
Si actuellement la loi égyptienne permet en effet de punir les personnes qui affichent publiquement leur athéisme, la nouvelle prévoit de criminaliser désormais la seule absence de croyance.
Et c’est cela que contestent certains défenseurs des libertés publiques et des droits de l’Homme. Hafez Abou Saada, membre du Conseil national des droits de l’Homme cité par le site al-Fajr, estime que la constitution égyptienne est claire sur la liberté de croyance.
Une loi qui servira à remplir les prisons, selon un défenseur des droits de l'Homme
«Cela signifie que l’Etat n’a pas le droit d’aller farfouiller dans le cerveau des gens pour savoir qui croit et qui est athée», a-t-il expliqué, lui aussi sur la chaîne Dream. Pour lui, «l’athéisme est une forme de pensée comme une autre, dépourvue de matérialité, et il n'est pas possible de la criminaliser».
Une loi qui ferait des athées des criminels «ne servira qu’à envoyer plus de gens en prison», a-t-il conclu.
Une perspective partagée par le journaliste Mohamed al-Baz, cité par al-Fajr. Pour lui, si Al-Azhar soutient le projet de loi, «c’est parce qu’elle est incapable de faire face aux idées athées avec une pensée et une compréhension justes des choses».
«Al-Azhar et son cheikh ont tout mon respect, a dit Al-Baz, mais ils ne sont pas sacrés», s’est-il insurgé.
Ce débat intervient en pleine intensification de la campagne contre l’athéisme dans le pays. Le 24 décembre 2017, une mère a été privée de la garde de ses enfants pour cause d’athéisme. Un jugement prononcé par le tribunal des affaires familiales du Caire, sans précédent jusque là.