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L’Université volante: une utopie concrète
Ces articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » sont publiés à titre d'information et n'engagent pas la Tendance CLAIRE.
C’est dans le cadre du mouvement de contestation de Parcoursup qu’a germé le projet de fonder une Université expérimentale. Plus de 600 propositions de cours ont été faites et des statuts rédigés. L’assemblée générale constitutive se tient ce samedi 22 septembre à Jussieu.
L’Université volante est encore une utopie fragile, mais une utopie concrète, une utopie vivante. Un Appel à bâtir une autre université, signé très vite par plus de 2000 personnes, dont une majorité d’universitaires, a été publié sur Mediapart le 31 mai 2018. Après la pose symbolique de la première pierre dans le bois de Vincennes le 2 juin, sous la conduite de la Fanfare invisible de Tolbiac et dans une ambiance festive (voir ICI une vidéo), la joyeuse compagnie s’est rendue deux semaines plus tard à Sevran, dans le 9.3, pour « inaugurer » ce qui pourrait devenir un jour une nouvelle université de la banlieue nord de Paris. Des élus locaux soutiennent le projet et une trentaine d’hectares pourraient être mis à la disposition du projet qui a aussi reçu le soutien d’architectes et de travailleurs du bâtiment.
La première pierre, terrain de Sevran-16 juin 2018 © Mathilde Larrère
La mise en place de commissions et d’outils de travail collaboratifs (Wiki et Discord) ainsi que trois réunions ont permis de faire avancer le projet pendant l’été. Une première réunion des enseignants qui ont proposé des cours et des autres participants se tiendra ce samedi 22 septembre à Jussieu (voir le programme ci-dessous). Elle a en particulier pour objectif de travailler à la constitution de l’offre de formation, mais elle proposera aussi en matinée des interventions de Charles Soulié, Guy Berger et Colette Perrigault qui tenteront de répondre à la question suivante : « Comment Vincennes a été possible? ». Outre cette référence à l’université expérimentale de Vincennes - qui relève plus de la nécessité d’un bilan critique que de la recherche d’un modèle -, trois caractéristiques de ce projet d’Université volante ont retenu mon attention.
Tout d’abord le nombre important de cours proposés : plus de 600 intervenants et au moins 10 000 heures d’enseignement. On peut y voir le signe, non seulement de l’intérêt des universitaires pour le projet, mais aussi d’une forte insatisfaction de ceux-ci face aux conditions d’enseignement et de recherche dans l’Université publique. Subissant depuis des années une dégradation de leurs conditions de travail, des évaluations permanentes et des injonctions à produire toujours plus dans le cadre de thématiques de recherche imposées, ils sont certainement nombreux à aspirer à un espace de liberté et à de nouvelles formes d’organisation de la recherche et des enseignement. Un travail de reconception des rapports entre recherche et enseignement est d'ailleurs l’un des enjeux majeurs du projet.
Terrain de Sevran © Membre de l'Université volante
Ensuite l’extrême diversité des participants, de leurs formations, de leurs engagements et de leurs expériences professionnelles : les réunions ont rassemblé de nombreux étudiants et jeunes chercheurs, des précaires de l'enseignement supérieur, des militants associatifs et syndicaux, des professeurs du secondaire, des enseignants-chercheurs, quelques lycéens... Cette diversité constitue à la fois une richesse et un facteur qui ralentit nécessairement le processus de co-construction. Mais La Volante a tout le temps devant elle. Les réunions et les outils de travail numérique ont constitué autant d’espaces d’échange où chaque participant a pu dire librement l’université dont il rêve. A l’impatience de voir exister les premiers cours dès la rentrée a succédé une réflexion nourrie sur le projet politique et l’architecture d’ensemble de l’Université volante. Conçue initialement pour accueillir en priorité les bacheliers victimes du tri social imposé par Parcoursup, La Volante, sans pour autant renoncer à cet objectif, ambitionne une diversification de ses publics.
Enfin la volonté de faire coexister dans une même aventure collective des projets, des objectifs et des formes d’organisation qui apparaissaient dans un premier temps contradictoires et qui ont donné lieu à des débats animés. Les participants semblent s’accorder sur fait que l’Université volante doit être plurielle et intégrative. Elle refuse l’opposition entre un centre et une périphérie. Ainsi, des enseignements pourraient être dispensés à la fois à l’université de Sevran, dans un ou deux lieux à Paris et dans des départements expérimentaux au sein des universités publiques et rattachés à l’Université volante. Elle fait tenir ensemble le projet d’une université ouverte, alternative, expérimentale et engagée qui vise la production et la diffusion de savoirs critiques, et une inscription dans les interstices des universités publiques existantes. Ainsi sa démarche ne s’inscrit pas contre l’Université publique, mais vise sa transformation.
Trois mois après le lancement du projet, les défis et les obstacles sont encore nombreux. En particulier les modes d’organisation et la logistique, le financement (public/privé, donations…), les lieux, les formations et les diplômes, etc. L’enjeu de l’Assemblée générale de ce 22 septembre sera aussi de s’assurer des capacités d’investissement de chacune et chacun, en une rentrée universitaire qui met à rude épreuve les personnels des établissements publics et leur laisse peu de temps et de liberté. Mais s’il est une caractéristique de l’Université volante, c’est bien la reconquête du temps et de la liberté. Un bien précieux que la gestion autoritaire des universités et les réformes néolibérales successives ont mis à mal et qu’il convient de reconquérir.
Pascal Maillard
Programme de la réunion du 22 septembre :
La première réunion plénière réunissant celles et ceux qui souhaitent faire vivre l'Université Volante (plus de 600 cours ont déjà été proposés) aura lieu le
samedi 22 septembre
à Jussieu (Sorbonne Université)
dans l'amphi 25 (au pied de la tour 25)
4 Place Jussieu, 75005 Paris
Métro : Ligne 7 ou 10 station Jussieu
Bus : Ligne 67, 89 arrêt Jussieu ou lignes 24, 63 arrêt "Université Paris 6"
Jussieu se trouve à 10 minutes de Châtelet - Les Halles, à 20 minutes de Gare de l'Est, Gare de Lyon et Gare du Nord.
L’objectif de cette séance de lancement en plénière sera de faire le point sur le fonctionnement, le public visé, l'organisation, et surtout, de travailler à l’organisation des enseignements et de la recherche et à la mise en cohérence des cours qui seront dispensés au sein de l’Université Volante.
- 9h30-10h: Accueil informel
- 10h-11h: Présentation de la cartographie de l'Université Volante, suivie d'une discussion.
La présentation visera à esquisser les différentes formes concrètes que peuvent prendre ce projet, suivant tout ce qui a été proposé dans les différentes rencontres, et qui sont amenées à co-exister.
- 11h-12h30: "Comment Vincennes a été possible?", présentation de Charles Soulié, Guy Berger et Colette Perrigault suivie d'une demi-heure de discussion.
L'idée est de revenir sur les conditions sociales, politiques, intellectuelles, académiques, etc., de création de cette université puis de décrire son devenir en montrant notamment comment cette création a échappé à ses initiateurs pour répondre à des demandes sociales, culturelles non prévues au départ. Il s'agira aussi de mettre à distance critique le mythe de Vincennes pour penser l'Université volante.
- 12h30-13h30: Pause déjeuner
- 13h30-14h30: Présentation d'ébauches de blocs cohérents d'enseignement/recherche et nouvelles propositions. Ouvert à tous les participants.
- 14h30-16h30: Réunions en équipe (une dizaine) pour créer les "parcours volants" (regroupement de cours/projets/recherche en thématique, fonctionnement, pédagogie, possibilités de lieux, ...).
- 16h30-17h30: Restitution synthétique des différentes équipes (~5mn par équipe) et prochaines étapes.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient enseigner dans les interstices ou participer aux groupes de travail et aux discussions: